lecture Brink: 4eme partie et fin

Et c'est parti pour nos impressions sur la dernière partie du livre

La dernière partie est très courte, ainsi que l'épilogue.

Le livre trouve sa conclusion naturelle : Ben a perdu son combat, mais il a gagné sa dignité d'être humain, et son exemple va peut-être en inspirer d'autres.
La tonalité finale est assez triste, j'ai du mal à imaginer que le pays s'en sorte sans violence et sans bain de sang.
La dernière page est assez ambigüe : la lettre posthume de Ben a-t-elle été postée après sa mort, auquel cas la police secrète va reporter sa surveillance sur l'écrivain ? l'écrivain ira-t-il jusqu'au bout de la mise au propre des notes de Ben ? le livre trouvera-t-il un éditeur ? ou sera-t-il muselé et tué comme Ben l'a été ?

On sait déjà que le livre de Brink a tout de suite été interdit et qu'il s'est exilé.....

Certes, clinchamps, la réalité se mélange à la fiction ...

ca y est j'ai fini il est vrai que la 4eme est plus courte.
Je suis néanmoins contente d’être parvenue au bout, car c'est un livre difficile,assez éprouvant et étouffant d’atmosphère.

Bon, ok, ça on le sait du départ, que çà ne va pas être léger, léger comme lecture; c'est le postulat de base.

Cependant, j'avais du lire ce livre, au lycée, dans les années 90, et forcement je n'en gardais aucun souvenir, ou alors les souvenirs que je gardais n’étaient pas de ce livre là    
j'ai vraiment été déconcertée par ce livre, justement parce que je croyais m'attendre à autre chose.
Je n'imaginais pas du tout cette lutte solitaire et vaine , d'un seul homme.  
Je pensais que Brink allait nous faire explorer toutes les facettes de la lutte anti apartheid, de l'époque: à savoir les groupements clandestins de lutte dans les townships, la clandestinité, la traque, l'emprisonnement, l'exil à l’étranger, .... ou alors, je confonds vraiment avec un de ses autres livres    

Ce livre est effectivement  différent, et du coup ça donne une vision très pessimiste des choses. Tout est fermé, cloisonné, sous contrôle. Aucune faille n'est possible dans le système.
C'est glaçant et pessimiste    heureusement que nous avons le recul de l'histoire , pour se dire que finalement, la sortie de l’apartheid ne s'est pas si mal passée.  

Je l'ai également terminé hier soir et, sitôt achevé, j'ai eu envie de reprendre le début pour boucler la boucle.

S'agissant de Suzette, je pense que j'aurais pu me laisser prendre par son changement de comportement si je n'avais pas su qu'il y aurait trahison. En fait, elle change de comportement une fois les photos de Ben avec Mélanie diffusées et elle est dépeinte comme paraissant soulagée de quelque chose (si je me souviens bien). J'ai donc pensé -fugitivement- qu'elle était elle aussi dans une situation d'adultère et que cette situation la rapprochait de son père.

Ce qui est étonnant c'est que Ben ne se méfie pas et aille jusqu'à lui révéler la cache aménagée dans son placard à outils certainement la fatigue nerveuse qui lui fait baisser sa garde et le besoin d'être soutenu par quelqu'un une fois Mélanie en exil et son père un peu hors circuit pour des raisons de santé (la lettre cachée de Mélanie fait également froid dans la dos )

Petit Faucon a écrit:

La dernière page est assez ambigüe : la lettre posthume de Ben a-t-elle été postée après sa mort, auquel cas la police secrète va reporter sa surveillance sur l'écrivain ? l'écrivain ira-t-il jusqu'au bout de la mise au propre des notes de Ben ? le livre trouvera-t-il un éditeur ? ou sera-t-il muselé et tué comme Ben l'a été ?

En effet, le narrateur nous laisse entendre que la lettre a été postée par la police. Et c'est sans fin. Comme l'Apartheid semblait l'être pour ceux qui le vivaient à l'époque où Brink a écrit son livre (1978 j'imagine au vu de la date de publication).

Merci à zoju d'avoir organisé cette lecture de groupe et merci à toutes et à tous pour ces échanges autour de ce livre, sans vous, je n'aurai probablement jamais lu ce roman qui prenait la poussière dans ma PAL depuis trop longtemps

Les dates d' écriture du livre, écrites à la fin de mon livre sont 1976, 1978-1979. 
Au début, je crois, on nous explique que Brink avait du interrompre son écriture, et y revenir bien plus tard, car il avait été très déprimé par le décès pour causes " naturelles" de Steve Biko, en prison.

Ceci expliquant aussi cela, et notamment le ton pessimiste, laissant entendre qu'il n'y a aucune issue possible. 

zoju a écrit:

Les dates d' écriture du livre, écrites à la fin de mon livre sont 1976, 1978-1979. 
Au début, je crois, on nous explique que Brink avait du interrompre son écriture, et y revenir bien plus tard, car il avait été très déprimé par le décès pour causes " naturelles" de Steve Biko, en prison.

Merci zoju, c'est intéressant ... je n'ai pas de préface explicative dans mon édition (mais j'avais bien les dates ). J'ai bien tenté quelques recherches sur Internet, notamment sur des sites en langue anglaise, mais on trouve plus d'éléments sur le film que sur le roman
(d'ailleurs je me demande si ce roman n'est pas plus connu en France que dans les pays anglophones

Merci Zoju pour tes explications ; mon exemplaire en français contient aussi un résumé de l'histoire de l'Afrique du Sud, 2 cartes, et un lexique des mots afrikaans et "bantou" : du coup je me suis renseignée car pour moi c'était zoulou et non bantou, et j'ai donc appris que le zoulou est une sous-catégorie de la langue bantou.

Pour ce qui est de Suzette, je comprends très bien Ben qui ne voit presque rien venir, penser que son enfant puisse le vendre à la police est pour lui impensable ; qu'elle soit hostile (comme sa mère), attachée à son mode de vie fondé sur l'apartheid est une chose, mais l'espionner, gagner sa confiance et le trahir pour le compte de la police spéciale c'est tout autre chose.
En tous cas Ben boit le calice jusqu'à la lie : il y a une dimension presque christique à son destin, je trouve (Suzette faisant Judas).

Je trouve tout à fait fascinant le fait que justement Ben ne soit qu'une goutte d'eau, dans le mouvement en gestation de la lutte contre l'apartheid, et que sa mort paraisse inutile, bien qu'en fait elle ne le soit pas : ceux qui l'ont connu, et qui sont partis, n'oublient pas et pour un Noir avoir vu un Blanc aller jusqu'au bout du chemin c'est une ouverture énorme sur un nouvel espoir. Le bouche à oreille marche et ce genre de goutte d'eau fait un océan, et j'aime que ce roman soit réaliste, et ne nous montre pas à la manière des films américains un homme sauvant le monde à lui tout seul. Il a été écrit au plus noir de l'apartheid, quand le système semblait bâti dans un granit inaltérable, mais ce sont de petits hommes insignifiants comme Ben qui l'ont peu à peu lézardé jusqu'à sa disparition.
J'attends toujours de recevoir mon DVD, il a l'air de traîner, mais j'ai hâte de le revoir ! La fin en est moins pessimiste, si je m'en souviens bien.

Petit Faucon a écrit:

En tous cas Ben boit le calice jusqu'à la lie : il y a une dimension presque christique à son destin, je trouve (Suzette faisant Judas).

 bien trouvé , Petitfaucon
effectivement rien ne lui est épargné, même le pire : une espèce de manipulation à l'affectif par sa fille, pour le trahir.
Je n'arrive même pas à imaginer quel est l’intérêt de Suzette la dedans, pour aller jusqu'à jouer ce rôle et se ranger du coté de la police secrète    
maintenir les acquis de sa classe, dont on sait qu'elle en profite au maximum, certes. Mais le débat est le même, ce n'est pas Ben avec son dossier sur Gordon qui va renverser le régime à lui tout seul.

J'ai l’édition la plus récente en livre de poche, et le livre est très complet : préface, et annexes avec une biographie de Brink, des repères historiques, glossaire, et commentaires sur le livre  
j'ai bien apprécié, car dans combien de livres, on se retrouve avec des termes afrikaans non traduits, des références historiques incompréhensibles , là , c’était servi sur un plateau

et donc, en fin, pour revenir à ta remarque , Clinchamps, il est dit que le film est plus optimiste que le livre, car il date de 1989, et "

Citation :

qu'en 1989, l'espoir paraissait plus justifié qu'en 1979.

JE vous cite le passage du livre expliquant  les dates d’écriture du livre:

Citation :

Brink précise qu'il commença l’écriture de ce roman un an avant la mort de Steve Biko, l'in des héros de la résistance noire, arrêté torturé, et tué en prison en 1976. Cet événement causa un tel choc à l’écrivain, trouble et rage mêlés , qu'il ne put poursuivre la rédaction de son roman pendant plusieurs années. C'est seulement en 78/79, qu'il  l'acheva, ayant retrouvé assez de sérénité intérieure pour donner à son témoignage et à sa révolte une expression digne de la littérature.  Les dates mises à la fin du roman gardent la trace de cette composition en deux temps, de part et d'autre du deuil de steve Biko.  

Merci zoju d'avoir pris le temps de copier l'extrait exact du texte (j'ai le même dans ma vieille édition Livre de poche).

Comme clinchamps, je trouve que la fin, même triste, a une grande force. La voix de Ben ne s'éteindra pas, même si Ben n'est plus là.

Pour rebondir sur la dimension christique de Ben comme l'a suggéré Petit Faucon, il me semble que l'écrivain a le rôle de l'apôtre de Ben. C'est lui qui est chargé de prendre la relève et de montrer qu'une force de resistance s' est mise en marche. Du coup même si la fin semble pessimiste, la lueur d'espoir réside dans l'idée que d'autres vont se dresser contre ce régime absurde.
Pour Suzette, je dois dire que je me suis laissé un peu avoir par son soi-disant changement tant il me paraît incroyable qu'un enfant puisse agir ainsi. Elle aurait tout aussi bien pu rompre avec son père de façon définitive pour montrer sa désapprobation.
Une dernière chose: la scène de confrontation entre Ben et Stolz qui fait froid dans le dos tant la tension est palpable. On a l'impression que c'est Ben qui a le dessus en ne cédant rien. Et pourtant cette scène annonce la fin funeste de Ben qui signe là sa condamnation.
Merci beaucoup à Zoju et aux organisatrices pour cette belle découverte. J'ai bien l'intention de poursuivre avec cet auteur dès que j'aurai fait diminuer un peu ma pal!

Nat2a: tout le plaisir à été pour moi  

Terminé pour moi aussi

Tout a déjà été dit, et je me limite à quelques remarques générales

¤ écriture complètement hallucinée de Ben lors de sa visite à Soweto ( je n'ai pas vérifié en français) décidément Brinks joue beaucoup là dessus

¤ Un dernier problème de traduction pour la route: lors de la visite au Pasteur

Citation :

Oom Ben, don’t you see it’s useless to kick against the pricks?
> ne voyez-vous pas qu’il est inutile de ruer dans les brancards ?

Le traducteur  ne s'est pas mouillé mais qu'est ce que "pricks" vient faire là-dedans un terme péjoratif.( Ct mon Cambridge Internationa Dictionary of English)  Qui sont les pricks: les policiers ??? Je calais mais le dictionnaire de ma liseuse m'a finalement donné la solution "to kick against the pricks" serait une allusion biblique (Actes 9:5) ??? je viens de vérifier, pas très clair ( ni en français ni en anglais, c'est Paul sur le chemin de damas ) mais au moins j'ai une explication

Et pour conclure sur une note positive

Petit Faucon a écrit:

La tonalité finale est assez triste, j'ai du mal à imaginer que le pays s'en sorte sans violence et sans bain de sang.

Et pourtant !!!!
Il me reste de cette période une image très forte: au JO de Barcelone le tour d'honneur de Derartu Tule et Elena Meyer, aprés la finale du 10000m
http://running.competitor.com/2012/08/news/the-victory-lap-20-years-later_56291

Merci à zoju pour cette lecture de groupe - ma première ici - et j'ai bien aimé.
Il me reste à voir le film que je viens de récupérer,

Et je suis très contente que tu ai apprécié la lecture de groupe, Papisido  
moi aussi, je l'ai trouvé très riche en échanges, et c'est quand vous voulez pour recommencer
Merci à tous de votre participation motivée et motivante

Je viens aussi de récupérer le film et il est prévu pour ce soir !!! J'ai été très heureuse de relire ce beau roman grâce à cette lecture de groupe, Zoju et je te conseille aussi "un turbulent silence" du même auteur.

J'étais passée là encore trop rapidement, donc merci d'être revenu sur cette expression PapiSido (et ton exemple me démontre la plus-value de la liseuse électronique).

J'avais beaucoup aimé "Un turbulent silence"

zoju a écrit:

c'est quand vous voulez pour recommencer cheers

Avec grand plaisir en ce qui me concerne   . Si vous avez des idées de lecture que vous souhaitez partager, n'hésitez pas à les proposer dans les topics ouverts à cet effet

- soit en lecture de groupe en ouvrant un topic dans" Lambton Bouge"
- soit en lecture en duo/trio (voir ici  

Pour les commentaires sur le film, vous ouvrez un autre topic ?

serendipity a écrit:

Pour les commentaires sur le film, vous ouvrez un autre topic ?

Je ne sais pas si beaucoup ont prévu de le regarder à part Clinchamps et Papysido  ;
mais il y a toujours le topic initial sur le livre où on avait commencé à parler du film également. Ca peut être convenir pour les impressions sur le film 

JE ne me rappelle plus si j'ai déjà lu " un turbulent silence", car j'ai dévoré Brink, à une époque.
Par contre, je viens de me commander "Au plus noir de la nuit".

Tu veux dire le topic "André Brink" ? Oui, ça me paraît bien aussi, ça peut intéresser d'autres personnes que celles qui ont participé à la lectire de groupe.

oui, il y a aussi ce topic là  
moi, je parlais du topic de présentation de la lecture de groupe  il n'y a que l’embarras du choix .

J'ai donc également fini la dernière partie, effectivement très courte.

Concernant la trahison de Suzette, je pense qu'elle ne le voit pas comme une trahison à proprement parler. Je crois qu'elle cherche juste à anéantir les recherches de son père afin de revenir à un état pré "affaire Gardon", dans lequel elle se trouvait dans une famille parfaite (du moins en apparence), je ne pense pas qu'elle cherche à lui nuire, juste à faire disparaitre cette affaire.

C'est aussi la partie dans laquelle Ben sombre dans la paranoïa (justifiée), alors qu'il avait jusque là foi en le système. Jusqu'à la troisième partie, s'il avait conscience d'être surveillé et victime d'intimidation, il ne se voyait pas vraiment en danger. Dans cette partie, il sait que la seule issue est sa propre mort.

Au final, je n'ai pas vraiment accroché au livre, je n'ai pas réussi à rentrer dans l'histoire.