Raymond Queneau

Si tu as aimé le livre, je peux que t'encourager à découvrir l'adaptation de Louis Malle, ça je l'ai sur DVD, si tu vois ce que je veux dire...

Oui, je vois

Voilà, me voilà prête à vous rejoindre sur le topic de Queneau.
J'ai terminé la lecture de Zazie dans le métro la semaine dernière, et je regrette un peu de ne pas avoir eu le temps de poster mon avis plus tôt, les choses auraient été plus claires dans ma petite tête...

D'une manière générale, j'ai beaucoup appréciée cette lecture, et cette découverte plus approfondie de Queneau, que je n'avais approché que via les Exercices de styles.
Ce roman contient à mon sens, plusieurs degrés de lecture : tout d'abord elle est divertissante par sa structure, son style très atypique, et sa syntaxe pour le moins très personnelle. J'ai souri plusieurs fois, j'ai ri sincèrement en me représentant le parlé gouailleur et peu conventionnel de Zazie, qui ponctue chaque phrase par un "mon c**" plutôt déplacé dans le bouche d'une jeune fille, mais qui ne le paraît finalement pas dans celle de cette gosse des rues, dont l'esprit et la philosphie appartiendraient plus volontiers à un chauffeur de taxi qui aurait 40 ans de métier...

Ensuite, il y a cette gravité dans les propos de Zazie (et peut-être un peu de son entourage), que le monde est rempli de pervers qui lui en veulent personnellement... Par certains aspects, on peut être un peu dérangé par cette obsession omniprésente, et d'un autre, on ne peut s'empêcher de sourire assez paradoxalement, à la lecture du récit du désastreux procès de la mère de Zazie, et ce qui en a suivi. Mis à part cela, je me suis demandée à plusieurs reprises quel était le degré de vérité des histoires que raconte la jeune fille... Quelle est la part de fabulation (ou d'exagération) et quelle est la part de triste réalité dans tout cela...

Bref, c'est un roman hors normes à bien des degrés, où l'on peut se poser des questions, tout comme pleurer de rire... (Et là je pense à Laverdure et son "Tu causes, tu causes, c'est tout ce que tu sais faire", qui intervient à tout bout-de-champ au milieu des conversations )...

Une lecture que je n'oublierai pas de sitôt, je pense...

Enfin je te retrouve ici Clélie!!! je suis tout à fait d'accord avec toi et je ne peux que "plussoier"!! Tout ce que tu dis si bien est tellement vrai. Un critique bien connu de l'univers quenien, Claude Simonnet, compare d'ailleurs les romans de Queneau à des oignons, ils ont en effet différentes pelures, chaque couche en cache une autre, toujours plus piquante!!

C'est vrai que ce n'est pas un roman de facture classique, comme tous les textes de Queneau d'ailleurs, mais pour moi l'aspect le plus important qui se dégage de tout cela est l'amour des mots et de la littérature. Une lecture plus approfondie montre que le monologue de Gabriel en haut de la Tour Effeil est une parodie d'un monologue de Hamlet... de même, le texte est constamment ponctué de références littéraires chères à Queneau, Victor Hugo entre autres...

Enfin, il est vrai aussi que les thèmes sont assez dérangeants, une lecture simpliste y verrait quelque chose de malsain, mais je pense que le duo Zazie / satyre s'apparente à la même rhétorique que celle du Petit Chaperon rouge, dans le film Louis Malle prend comme référence les dessins animés de Tex Avery... Le thème de l'homosexualité a choqué aussi à l'époque, même s'il n'est pas évident à repérer dans une première lecture. Je trouve cela assez courageux de la part d'un auteur de faire cela en 1959 dans un roman grand public...

Merci pour ton avis Clélie!!

Citation :

le monologue de Gabriel en haut de la Tour Effeil est une parodie d'un monologue de Hamlet

En effet, j'avais oublié de mentionner l'aspect très shakespearien de certaines scènes, et ça m'avait marqué très fort durant la lecture. Je me disais bien que j'avais oublié de mentionner quelque chose ... je devrais noter mes impressions en cours de lecture, ce serait plus pratique

J'ai également une "vague" impression de similarité (ressenti très personnel ) avec ma première lecture de Boris Vian. Pas au point de vue structure ni syntaxe, mais plutôt dans le cadre non conventionnel de l'écriture, de l'histoire parfois et des personnages. Rien ne paraît vraiment y être comme dans le monde réel... le personnage de Zazie lui-même échappe un peu à la réalité, non ?

Citation :

Le thème de l'homosexualité a choqué aussi à l'époque, même s'il n'est pas évident à repérer dans une première lecture. Je trouve cela assez courageux de la part d'un auteur de faire cela en 1959 dans un roman grand public

En effet, j'imagine que l'impact a dû être non négligeable. Cette question revient très souvent au cours du roman ; on se rend vite compte que le ton est particulièrement libre pour l'époque.

Queneau a été très marqué, voire influencé par la littérature anglo-saxonne (toutélié), il a même été lecteur/ traducteur chez Gallimard, il a traduit notamment Peter Ibbetson de G. du Maurier (je viens d'ailleurs de lire sur la page wiki de George du Maurier que l'intrigue de son roman Trilby inspira en partie Le Fantôme de l'Opéra de Gaston Leroux, toutélié again)

Oui, je me souviens bien que tu avais parlé de sa traduction de Peter Ibbetson Merci pour l'info sur Trilby (je croyais que ça avait un rapport avec le Trilby de Charles Nodier que j'ai lu il y a longtemps et qui m'était mortellement tombé des mains )...

Je t'en prie, j'a remis l'info sur le topic du Poto et je vais chercher de quoi il retourne...ça m'intrigue!!
Sinon, dans Loin de Rueil, le personnage principal s'appelle Lehameau, traduction littérale de Hamlet...il y a plein de références aussi...

Pour les fans de Zazie

Citation :

Bus Zazie dans le métro,
Raymond Queneau
Lecture
avec Noémie Rosenblatt et Grégoire Baujat
du Jeune Theâtre National
Zazie débarque à Paris pour la première fois
chez son tonton Gabriel. Le Panthéon, les
Invalides et le tombeau du véritable Napoléon,
elle s’en contrefiche. Mais kess-qui l’intéresse
alors, Zazie ? Le métro. Et quand elle apprend
que les employés sont en grève, elle leur
envoie une volée d’injures. Mieux vaut ne pas
contrarier Zazie…
Dimanche 13 ~ 15h et 17h30 ~ Départ de l’Hôtel de Ville

C'est dans le cadre de Paris en toutes lettres...

http://www.parisentouteslettres.net/Programme_Parisentouteslettres2010.pdf

hop, une nouvelle fan de queneau et du coup, je fais remonter le topic

alors, moi aussi, j'étais obligée de lire "les fleurs bleues" en 1 ere L......Mais le fait de l'étudie en cours m'a permis de mieux comprendre le livre et surtout de découvrir Raymond ! lol

Mon livre préféré est Exercice de style qui me fait toujours rire

En ce moment, au théâtre le Lucernaire à Paris, une adaptation de Zazie dans le métro par Sarah Mesguich.

Le pitch : La fable fantaisiste et cruelle de Raymond Queneau, questionne notre rapport à la liberté, à l’enfance, au langage, à l’identité sexuelle à travers le regard incisif et décalé de la jeune Zazie...

Un regard qui fait mouche et révèle ce qui est confiné, verrouillé, souterrain (même le métro est en grève quand Zazie est là)... Partout les contradictions, la cruauté, les lâchetés et l’absurdité du monde des adultes.

Zazie, circule d’un monde à l’autre et débusque les vérités avec un mélange d’ingénuité, de séduction et de malice. C’est une passeuse de frontière. Le théâtre viendra encore mettre du jeu dans ce jeu. Un rêve éveillé que nous souhaitons partager avec vous et Zazie.

C'est vraiment pas mal du tout, avec beaucoup d'humour, de fantaisie, beaucoup d'impertinence. Dommage que la pièce n'est pas accessible pour tout public (trop d'allusions grivoises ! )

Lady Clare a écrit:

trop d'allusions grivoises !

tu m'étonnes !

merci pour ton compte-rendu, j'ai beaucoup aimé voir Daniel Mesguish, mais sa fille est pour moi une parfaite inconnue, cependant je pense qu'elle a de qui tenir.

Je viens de re-re-relire les Exercices de style de Queneau, et c'est toujours un plaisir malgré le concept relativement répétitif de l'ensemble

Si j'aime moins les "exercices" purement grammaticaux (Epenthèses, Paragoges, Métathèse...), l'immense majorité des autres me fait mourir de rire tant ses tournures de phrases, synonymes, métaphores ampoulées ou imitations d'accent anglais sont délicieusement créatives jusqu'à l'absurde (cf "Parties de discours" dans lequel il trie chaque mot de son texte initial selon sa catégorie grammaticale , ou "Antonymique", dans lequel "un vieillard [...] remercie une dame placée très loin de lui car elle lui caresse les mains" en lieu et place d'une dispute entre deux hommes d'âge moyen à propos d'un écrasage de pieds malencontreux   )
J'aime aussi beaucoup ses formules inutilement alambiquées comme "spatio-temporalité postérieure" pour dire "plus tard", devenues désormais presque communes dans le jargon administratif !

A part ça, j'ai lu Zazie dans le métro étant petite, mais il faudrait que je le relise maintenant car je pense à la lecture des commentaires ci-dessus avoir raté pas mal de jeux de mots et autres subtilités textuelles

Fauvette a écrit:

c'est toujours un plaisir malgré le concept relativement répétitif de l'ensemble

C'est excellent !

Merci pour ton retour

Fauvette a écrit:

Si j'aime moins les "exercices" purement grammaticaux (Epenthèses, Paragoges, Métathèse...), l'immense majorité des autres me fait mourir de rire tant ses tournures de phrases, synonymes, métaphores ampoulées ou imitations d'accent anglais sont délicieusement créatives jusqu'à l'absurde [...]
J'aime aussi beaucoup ses formules inutilement alambiquées comme "spatio-temporalité postérieure" pour dire "plus tard", devenues désormais presque communes dans le jargon administratif !

Tu me donnes envie de le relire ! Je me rappelle avoir été enthousiasmée par cette lecture, j'ai dû le lire deux fois quand j'étais ado et je me rappelle avoir partagé les passages que je préférais avec mon frère... qui avait beaucoup aimé aussi, donc on avait dû finir par le lire intégralement ensemble.

J'ai aussi lu Zazie dans le métro, deux fois. La première, je devais avoir dix ans, ça m'avait plu mais pas mal déroutée aussi. Je l'ai relu quelques années plus tard et cette fois je m'étais vraiment régalée. Et j'ai eu l'occasion de voir le film il y a deux ans, je l'avais trouvé réussi (même si je préfère le roman), on retrouve vraiment bien l'esprit loufoque de l'œuvre.

Je suis contente que mon pastiche dans le jeu littéraire t'ait donné envie de relire ces textes Fauvette.Ils restent, pour moi, un super souvenir de mes cours de français au collège !

Merci pour vos retours enthousiastes les filles, je suis ravie de voir que ces Exercices de style font l'unanimité !

Et merci Uly d'avoir écrit le 100e dans le jeu littéraire ! J'aurais bien aimé les étudier au collège moi aussi mais je les ai découverts bien plus tard

Je viens de relire d'une traite Zazie dans le métro cet après-midi et je n'ai pas regretté de m'être replongée dans le style tellement original de Raymond Queneau, j'ai vraiment adoré cette relecture ! (J'ai même l'impression d'avoir totalement redécouvert le roman, ma première lecture remontant à bien 20 ans et ne m'ayant bizarrement pas laissé un grand souvenir, j'avais sans doute été perdue par les dialogues confinant à l'absurde et le "sous-texte" avait dû me passer bien au-dessus de la tête à l'époque )

Le roman, constitué presque intégralement de dialogues plus surréalistes les uns que les autres, est effectivement construit comme un scénario de film ou une pièce de théâtre qui fait virevolter lecteurs et lectrices dans une course-poursuite effrénée autour de Paris, après Zazie, son oncle, un car de touristes enthousiastes et divers individus plus ou moins recommandables
Bien que connaissant déjà un peu l'auteur, j'avoue avoir été surprise par la modernité de l'ensemble, que ce soit au niveau du style à la fois argotique, loufoque (j'ai éclaté de rire à plusieurs reprises ) et à plusieurs niveaux de lecture qu'au regard des thèmes abordés en filigrane... ou de façon plus directe

Spoiler:

La "bataille" finale clôt en apothéose ce roman complètement déjanté comme on dit aujourd'hui

Spoiler:

, et avec tout ça Zazie n'a finalement

Spoiler:

Fauvette a écrit:

et avec tout ça Zazie n'a finalement

Spoiler:

Hé oui, tout ça pour ça. Merci d'avoir posté tes impressions de relecture Fauvette, que j'ai lues avec grand plaisir ! Bel OVNI que ce roman en effet.

Merci Fauvette pour ton retour enthousiaste sur ce roman qui est toujours dans ma PAL

Merci esperluette et Juliette ! Une chose que j'ai oubliée de mentionner ci-dessus est le non-dépaysement total de l'intrigue qui se passe littéralement à 2 pas de chez moi au début, j'ai presque failli reconnaître les bistrots mentionnés