Avez-vous réussi à lire Proust ?

Citation :

Ton message ne nécessite pas vraiment la création d'un nouveau sujet, je fusionne donc avec le topic de Proust.

merci de l'avoir fait pour moi, je me suis rendue compte de mon erreur juste après l'avoir posté

On sait tous que Proust a une réputation d'auteur difficile mais je vous assure que quand on a accroché, il est impossible de le quitter.
La première fois que j'ai essayé, comme beaucoup je me suis ennuyée à mourir. Et j'ai laissé tomber.

Mais je trouvais que c'était dommage, un peu comme ne pas gouter un très bon vin ou de refuser de partir en voyage. Je me disais que je passais surement à coté de quelquechose.

Alors j'ai essayé de nouveau, plus tard. Et là, bingo! C'est une merveille, cela ne ressemble à rien d'autre. C'est comme un jour choisir d'aller admirer de près les sculptures d'une cathédrale en se disant que derrière chacune, on va découvrir le coeur de celui qui a sculpté et ce qui le reliait à l'univers; on en ressort riche, apaisé...

Maintenant, chaque fois que je lis Proust, ce ne sont plus des mots que j'entends. J'entends de la musique, c'est une mélodie, c'est un rythme qui a sa propre vie indépendant de moi. Même en fermant le livre la musique continue. C'est incroyable et terriblement bon. Il n'y a que Proust qui me fait cet effet là.

Je ne recommanderai jamais assez ;-)

Ah!, Proust! J'avais commencé à le lire, dans une belle édition de La Pléiade, et j'appréciais, mais peut-être par manque de maturité, j'ai laissé tomber...

Alors en septembre, je recommence toute La recherche, parce qu'en hypokhâgne, notre vénéré prof de lettres nous avait conseillés de lire ce bijou. Et il a raison, c'est beau et poétique. J'ai été marquée par la description de la chapelle familiale dans le premier tome et le chemin de Guermantes, avec ses descriptions de fleurs odorantes et colorées.

Je vais le relire avec plus de maturité je pense, et donc l'apprécier plus j'espère, et...le finir !

Pour ceux qui auraient du mal à entrer dans son écriture, je vous recommande d'écouter jusqu'à dimanche l'excellente émission de Guillaume Gallienne sur France Inter le samedi après-midi à 18h.

Ses 2 dernières émissions étaient consacrées aux moments comiques et grinçants de la Recherche du temps Perdu.

http://sites.radiofrance.fr/franceinter/em/ca-peut-pas-faire-de-mal/
On peut encore écouter la 2e émission sur cette page; en cliquant en haut à droite.

C'est savoureux et ça donne envie de (re)lire Proust.

Pour ceux qui n'ont pas envie de lire Proust, mais d'écouter il y a en ce moment à Paris,

Citation :

Marcel Proust
Lecture d'instants choisis

Avec en alternance

Romane Bohringer
Xavier Gallais
Bernadette Laffont
Michaël Lonsdale
Nicolas Vaude

Un voyage dans la diversité et la richesse du texte de Marcel Proust, qui permet de découvrir toutes les tonalités de son style, la tendresse, la critique mondaine et surtout un immense humour.
Les extraits choisis montrent le comique souvent méconnu de Marcel Proust, à travers la voix du narrateur et des personnages hauts en couleur comme Madame Verdurin, Monsieur de Charlus, la Duchesse de Guermantes ou encore Françoise, la cuisinière de Combray.

http://www.theatrelabruyere.com/proust.html

Je m'apprêtais à me régaler, Proust est je crois un genre de génie de la prose, je ne sais pas trop pourquoi mais je pensais que cela se rapprocherais de Gérard de Nerval dont la moindre des lignes est une oeuvre d'art en elle-même et dont le style est fluide et tellement agréable à lire.
J'ai emprunté "La prisonnière" , avec de grands efforts et en me forçant, je croyais que j'avais lu une centaine de pages en fait je n'était arrivée qu'à la page 26, je pense que cet auteur n'est pas fait pour moi, en tous cas pas pour le moment.

Eleanor, essaye le tout début de La Recherche avec "Combray", et là tu vas te régaler !

Je prends note car si "La prisonnière" m'a rebutée il n'en sera peut-^tre pas de même avec ses autres oeuvres.
On ne peut pas faire que des chefs d'oeuvres alors je suis ouverte à une nouvelle tentative, direction la médiathèque...

Ah, génial, un topic sur Proust ! En fait, The Inn At Lambton, c'est la bibliothèque de Borgès : tous les sujets ont déjà été abordés !

Proust a été l'une des grandes révélations littéraires de mon existence. J'en avais lu un passage au collège et, loin de me faire fuir, celui-ci m'avait beaucoup impressionné. Pourtant, il a fallu des années avant que je ne m'y attelle vraiment ! Cela date, en réalité, du début des études de Lettres, même s'il n'était pas au programme de mon année.
Je crois qu'il faut aborder Proust sans la moindre a priori ; les fameuses phrases d'une page n'ont rien de vraiment tortueuses et s'écoulent avec limpidité. Comme d'autres l'ont écrit ici, en parlant de méandres, notamment, il faut simplement se laisser embarquer sur un petit cours d'eau qui serpenterait dans un sous-bois apaisant. A mon sens, une bonne phrase est une phrase où il n'y a pas un mot de trop. Or, pour longues que soient les phrases de Proust, elles me semblent tout sauf emphatiques.

Je trouve qu'il y a, dans l'écriture de Proust, un mimétisme avec la pensée. Or, dans l'exercice de mémoire, il est primordial de retrouver toutes ces étapes. Au-delà de ce style que je trouve remarquable, il y a donc chez Proust cet effort de mémoire, cette conviction que le secret de l'existence se trouve enfoui sous des strates de sensations, de sentiments. Je ne connais personne d'autre que lui qui a décrit avec tant de soin et de justesse ces errements de la pensée. Je me rappelle avec beaucoup de plaisir d'un passage où il décrit, avec force détails, la torture qui consiste à attendre, en vain, qu'un être aimé vous appelle. J'ai rarement lu quelque chose d'aussi fin.

Il y a déjà bien longtemps, j'étais retourné sur un lieu de vacances de mon enfance, et il y a eu ce moment magique où l'on est assailli par des odeurs, des visions, une certaine chaleur, mais aussi des sons (en l'occurrence, le bruit un peu étouffé d'une cigale dans un arbre voisin, le léger souffle du mistral)... bref, un instant où tous les sens sont en éveil et essaient de nous faire parvenir un message du passé. J'étais resté là, bêtement, à profiter des souvenirs qui remontaient, avec au creux du ventre la sensation d'un immense bonheur. Eh bien, à chaque fois que je lis Proust, je revis tout cela d'une ligne à l'autre. Je crois que Proust a vraiment réussi à dire l'indicible. Quand survient Le Temps retrouvé, on se sent plus heureux, plus serein, plus en prise avec sa propre histoire. Voilà en tous les cas ce que m'évoque ce cher Marcel.

Eleanor, je ne comparerais pas le style de Proust à celui de Nerval. Proust n'a rien d'un poète, réellement : c'est vraiment un peinte de nos émotions, de notre pensée, et un observateur remarquable des rapports humains. Nerval, lui, c'est un poète en prose, pratiquement. Ses phrases sont un peu plus resserrées, mais renvoient à des choses moins concrètes, je pense. A titre personnel, c'est un autre de mes héros !

Florizel a écrit:

Proust a été l'une des grandes révélations littéraires de mon existence.

Pour moi, il y a même eu un avant et un après Proust.
Je me réjouis à l'avance de la réouverture à Paris du Musée des lettres et manuscrits à partir du 15 avril et je suis impatiente de voir la première expo de l'année, consacrée à Proust et La recherche.

Je suis allée voir l’exposition Proust au musée des manuscrits. C’est toujours très puissant d’avoir accès direct aux objets d'arts, au cas particulier le contact physique avec les manuscrits est très émouvant. Je suis sans aucun doute de parti pris car j’aime beaucoup Proust, j’étais toute prête à me laisser emporter. Alors toutes ces lettres, certaines chaleureuses affectueuses certaines professionnelles, certaines attendrissantes certaines agaçantes m’ont beaucoup beaucoup émue.

J’ai aimé l’intimité sans l’indiscrétion ; les lettres ont été choisies avec beaucoup de pudeur; c'est si vrai que ce qui n’est pas montré est très présent. Beaucoup de ses affections, rien de ses passions. Et pourtant … cette force transpire.
« Je pense au passé et à celui que nous ne verrons plus ; à qui j’aurais souhaité une bonne année, une bonne santé. Mon cher petit jamais vous ne saurez combien je suis près de vous. Je me suis mal pris sans doute pour vous le témoigner puisque lettres et visites sont restées sans réponse. Mais ne m’oubliez pas tout de même. Les années passées vous ont apportées tant de chagrin que je n’ai pas le courage de rien vous souhaiter pour la nouvelle »

J’ai aimé voir des petites anecdotes qui illustrent ce qui est bien connu, à savoir à quel point la vie de Proust et la vie du narrateur dans l’oeuvre sont très reliées . Tant de personnages dans sa vie comme dans l’œuvre. La même solitude dans la vie que dans l’œuvre ; la même réflexion ultra-fine dans la vie et dans l’œuvre. Les mêmes sentiments d’amour, les mêmes grandeurs, les mêmes petitesses.

Bon, malgré tout c’est essentiellement un travail sur son œuvre qui est présenté ; l’expo s’appelle d’ailleurs : du temps perdu au temps retrouvé. Le temps, le temps…
Deux choses reviennent sans cesse : sa santé, son travail de retouche permanent (tant de références à d’autres écrivains). En filigrane, sa dépendance affective.

Je ne savais pas (ou j’avais occulté) toutes les difficultés qu’il a rencontré pour faire éditer son œuvre. J’ai ressenti vivement certaines critiques qui lui étaient faites. Sa santé ne lui a pas permis de se plier aux jeux des critiques et journalistes, certains lui en ont tenu rancune. Il a trop rapidement été mis en « monument » inaccessible ; trop élitiste, trop compliqué, trop dense, trop mondain, trop trop trop… C’est dommage, cette image lui colle encore à la peau aujourd’hui. Regardons le titre de ce topic, c’est révélateur en fait. Proust fait peur alors qu’il est tellement humain… Certes, c'est un génie.

« Le cœur se fond à ces souvenirs ; comment pourrait-on les faire revivre sans pleurer »

Accessoirement, j'ai complètement oublié d’aller voir les collections permanentes...

Je reprends la lecture de "Du côté de chez Swann", à voix haute cette fois et c'est un régal. ça prendra le temps que ça prendra mais pourquoi pas toute la Recherche à voix haute ?

Tiens c'est une bonne idée, de lire La Recherche à haute voix ! De Proust je ne connais que "Combray" pour l'avoir étudié en prépa. Au départ j'étais terrifiée à l'idée de lire du Proust, car je pensais que ça serait très difficile, mais finalement j'ai beaucoup aimé. Depuis je veux continuer Un amour de Swann, et j'espère m'y mettre prochainement !

Je t'y encourage vivement Tatiana et te souhaite beaucoup de plaisir

Merci à Serendipity de m'avoir indiqué ce topic.

Réponse à la question d'abord, oui j'aime Proust. Pas que la Recherche, j'ai eu la chance d'étudier le Contre Sainte-Beuve, et les Pastiches et mélanges en hypokhâgne, et ensuite j'ai lu pour moi-même d'autres oeuvres "courtes", comme Jean Santeuil, Les Plaisirs et les jours, ses réflexions sur l'oeuvre de Ruskin et la correspondance avec Madame Strauss; c'est bien aussi de le connaître par ces côtés-là.

Je ne sais plus quand j'ai eu Du côté de chez Swann au programme, en licence sans doute, qui est un livre spécial qui s'apprécie vraiment comme deux petits romans comme le dit quelqu'un plus haut.
Mais je n'ai envisagé la grande traversée qu'après mon certificat de lecture comparée en maîtrise où j'ai étudié le Temps retrouvé qui reste pour moi le grand point d'orgue (comment, c'est déjà fini?), ce qui m'a fait prendre conscience que je ne pouvais mourir un jour sans avoir lu ce qu'il y avait au milieu.
Si bien qu'au total j'ai maintenant lu trois fois la Recherche en entier, une fois tous les dix ans, comme disait le prof de quelqu'un plus haut, c'est très bien: tout change et bouge avec la maturation personnelle.

Après je vis les mêmes affres exactement que Serendipity qui les décrit très bien, le temps, le temps quand on a un métier n'est plus du tout le même... et ça fait mal. Alors oui, quand viendra la retraite (si elle vient un jour, je suis mal barrée vu les années d'études et de petits boulots qui ont précédé/retardé mon entrée dans le monde du travail officiel.)

Ce fut le projet de mon père, qui n'avait jamais lu quoi que ce soit de Proust, et a eu la surprise d'apprécier Du côté de chez Swann emprunté un jour par curiosité à ma bibliothèque; mais il est mort avant de l'avoir mené à bien.

J'ai essayé Proust avec la lecture de la Recherche mais je n'ai pas pu poursuivre, m'y étant pourtant reprise à plusieurs fois pour absorber le tout.
Mais sans succès.
Et puis il y a quelques jours (oui oui), je suis tombe sur un extrait de nouvelles écrites par Proust... et j'ai beaucoup apprécié.
Du coup je suis allé sur Amazon et me suis penchée sur ses autres écrits, notamment ses nouvelles ou autres.
J'ai commandé et j'attends, je vous donnerais mon verdict.
Moral de l'histoire : à mon avis, La Recherche n'est pas du tout la meilleure façon d'aborder Proust et de l'apprécier, du moins pour le commun des mortels tels que moi.
Rien de mieux pour dégouter. Mais il faut laisser une chance et lire autre chose.
Essayez.

N.. a écrit:

Maintenant, chaque fois que je lis Proust, ce ne sont plus des mots que j'entends. J'entends de la musique, c'est une mélodie, c'est un rythme qui a sa propre vie indépendant de moi. Même en fermant le livre la musique continue. C'est incroyable et terriblement bon. Il n'y a que Proust qui me fait cet effet là.

Grace à Cat 47, j'ai découvert ce topic et depuis un moment je lis vos commentaires fort divergents! Je dois être l'une des rares créatures extraterrestres qui raffolent de Proust!
Je ne le lis pas, je le déguste! Et comme l'a si bien décrit quelqu'un ci-dessus, (désolée, je n'arrive pas à me rappeler le pseudo ! Au fait, ravie de te rencontrer!) C'est une musique et pas n'importe laquelle! C'est comme écouter "swan lake" de Tchaikovsky. Je l'ai découvert par hasard à l'âge de 18 ans à travers "Du côté de chez Swann" et c'était le coup de foudre! J'ai enchainé avec un "Amour de Swann" et plusieurs autres. Je n'ai pas lu tous ses livres, mais même si cela remonte à loin, ça m'a laissé une fascination si grande pour cet auteur! Je me souviens qu'à l'époque, je recopiai des phrases sur des post-it que je collais partout, dans ma chambre, la salle de bains,...La folie quoi! En vous relisant, j'ai senti une grande nostalgie et je pense que je vais m'y remettre ! Pas les post-it, je pense, je n'ai plus de chambre à moi toute seule et mon mari va s'arracher les cheveux!

Allez, encore une petite secousse pour faire bouger ce topic. France 2 consacre 2 soirées à l'adaptation de "A la recherche du temps perdu" de ce cher Marcel Proust, le 1er et 2 février.

Spoiler:

personnellement, je me suis jamais intéressée à Marcel proust. mais le pire, je ne sais pas pourquoi

en dehors, du fait que je sais que c'était un très bon écrivain mais après c'est tout. en plus, je ne l'a pas étudié au lycée. pour moi, c'était juste maupassant, voltaire entre autres.

Merci pour l'info Ysabelle, ça va peut-être être le déclic pour que je m'y mette pour ma part

OK Black Pandora. RDV donc pour échanger nos avis.

Merci mille fois pour cette info Ysabelle, je suis ce projet depuis pas mal de temps car j'aime beaucoup le travail de la réalisatrice Nina Companeez et j'attendais avec impatience la date de diffusion

Le casting de cette adaptation est royal puisqu'il comprend entre autres Dominique Blanc (Madame Verdurin), Didier Sandre (le baron de Charlus) et Eric Ruf (Charles Swann) et Catherine Samy (la grand-mère), tous deux membres de la Comédie Française.

Le Monde des Livres a par ailleurs publié un article très intéressant sur ce téléfilm

C'est une très belle analyse toute en finesse et qui donne une grande envie de voir le film
Merci Tatiana.

Tout à fait Ysabelle !

Pour continuer dans la mise en bouche, je suis tombée par hasard sur cette vidéo de France 2 autour du tournage de l'adaptation

On y retrouve des interviews des acteurs et de la réalisatrice et quelques extraits. Je suis retombée sous le charme de Didier Sandre qui a l'air une fois de plus de maîtriser le texte à la perfection.

Merci beaucoup Tatiana pour cette vidéo.

J'ai hâte de voir l'adaptation