V.S. Naipaul

Un autre de ces bijoux que j'ai découvert il y a quelques années déjà, V.S. Naipaul est un de ces écrivains plutôt peu connu mais qui me fait rêver! Note: 9 sur 10!
Pour sa biographie visiter le site:
http://www.kirjasto.sci.fi/vnaipaul.htm
Mes deux recommandations:
A House for Mr. Biswas, une histoire tragi-comique d'un pauvre gars qui ne rêve que d'avoir sa propre maison. Le côté comique, à mon avis, surpasse le côté tragique même si les "aventures" de Mr. Biswas pourront nous émouvoir aux larmes quelques fois...
Et puis, même si je ne vibre pas pour l'Afrique (le seul continent que je n'aie jamais visité) le livre A Bend in the River est un enchantement! Le héros, un de ces indiens dont la famille à émigré depuis de longues générations, se retrouve dans un village de la brousse africaine et vit là-bas un coup d'état dont l'Afrique est si coutumière. Son analyse de l'Afrique et de ses traditions (au secours! je l'ai dit, je n'y ai jamais mis les pieds, je ne fais qu'analyser ce livre à travers ma vision "déformée" de l'Afrique - les spécialistes me corrigeront!) me frappent par leur justesse et leur pertinence.
Bref, si vous n'avez jamais lu de Naipaul, je vous recommande ces deux livres, je suis prêt à garantir la satisfaction!

Je déterre ce topic des profondeurs de la cave de l'Auberge (merci au moteur de recherche ) pour vous parler de

Un chemin dans le monde / A way in the world, publié en 1994.
Le livre comprend neuf textes, avec comme fil conducteur Trinidad, île natale de l'auteur, située dans les Caraïbes au large du Vénézuela.
Certains textes sont courts, d'autres font plus de 100 pages, certains relatés comme des souvenirs de jeunesse, d'autres comme décrivant des épisodes de la vie de conquérants de cette région : Raleigh et Miranda.
C'est une lecture intéressante, mais VS Naipaul n'est pas un conteur, il prend plutôt le ton du moraliste, mélange son récit avec des anecdotes personnelles (ou présentées comme telles) ; il y a donc beaucoup de ruptures de ton dans le récit, qui font que le lecteur ne se laisse jamais glisser dans l'histoire, il est toujours secoué avant que la magie du récit puisse opérer ; de ce fait, j'ai eu du mal à mémoriser et à intégrer ces histoires ; cependant les réflexions amenées sont presque toujours intelligentes et finement observées.
Les sujets abordés sont :
- le sentiment d'éloignement de l'auteur de la vie culturelle ou intellectuelle mondiale (thème abordé aussi par le turc Orhan Pamuk et le russe Dostoïevski), qui va de pair avec le thème de la petite île/prison pour ceux qui y vivent.
- ne pas être blanc dans notre monde, avec toutes les graduations de couleur : mulâtre, africain, antillais, "chinois", "indien" et les conséquences qui en découlent (en lien avec le thème du dessus).
- la destruction des civilisations premières (dans le texte l'habit nouveau) et
- l'échec des régimes politiques marxistes en Afrique / colonisateurs dans les Caraïbes

En revanche, je le classerai dans la catégorie "écrivain énervé" (comme il y a des chanteurs énervés), c'est-à-dire en refus perpétuel de tout ce qui touche aux sentiments. On sent en lui une personnalité-oursin, à la fois en manque de reconnaissance et avec une forte conscience de sa propre valeur. A plusieurs reprises, il raconte une rencontre avec quelqu'un, qui tourne à la controverse, et cela finit à chaque fois par une brouille.

Au final, un écrivain singulier, anticonformiste au sens que ce qu'il fait ne ressemble à rien de ce que j'ai déjà lu, vraiment intéressant intellectuellement.

Merci pour cette présentation Petit Faucon et bravo pour cet exercice d'archéologie lambtonienne
J'étais curieuse d'en savoir plus sur cet auteur -je viens de voir qu'il était toujours vivant, car né en 1932 j'avoue que je ne parvenais pas à le situer dans le temps avec précision et le pensais un peu plus âgé que cela. Son oeuvre ne m'attire pas plus que cela pour l'instant, mais je me laisserai peut-être tenter par des nouvelles ou courts récits si j'ai l'occasion

Oui, ce n'est pas l'auteur lambtonien par excellence .
Mais il a une voix originale et beaucoup d'acuité.

Merci Petit Faucon pour cette fine analyse de cet auteur Inconnu pour moi. Je ne sais si je vais le lire un jour mais tu as suscité ma curiosité. J'aime bien ton expression "Ecrivain énervé". Je vois ça comme une sorte de qualité chez un chanteur car elle peut donner lieu à une interprétation intéressante qui reflète ses émotions. Mais ma foi, chez un écrivain, je ne sais si e résultat serait aussi intéressant A voir

J'apporte quelques précisions sur l'auteur :

Il est d'origine indienne, sa famille a émigré du nord de l'Inde au milieu du XIXe siècle à Trinidad (port of Spain) pour travailler la terre ou être des petits commerçants. Son prénom est Vidiadhar Surajprasad.

Il a quand même reçu le Nobel de littérature en 2001, a écrit de nombreux romans, nouvelles et essais.

Sur son style, je cite sa page wiki : Naipaul est reconnaissable pour un style singulier, alliant le réalisme documentaire à une vision satirique du monde contemporain. Moraliste éloigné des modes littéraires, l'écrivain se saisit au plus près du réel et donne à sa matière historique et ethnique une forme romanesque qui perpétue la tradition des Lettres persanes dans le besoin d'exprimer, avec l'approche d'un conteur, les disparités culturelles et politiques d'une société mondiale marquée par l'instabilité et le chaos. Il a aussi été rapproché de Conrad pour sa peinture de l'effondrement des empires coloniaux.
J'ai lu que son style est satirique, je n'ai pas trouvé que ce soit le cas dans ce livre ; il raconte des choses tristes, des échecs, des morts violentes, avec un ton neutre, parfois en colère, et en tous cas sans aucun humour.
Un des thèmes du livre est aussi l'absence de racines et d'histoires des caribéens arrachés il y a plusieurs générations à leur pays d'origine, à leurs cultures et leurs traditions, et qui sont sans histoire, dont plus nus que les européens, et qui ne trouvent pas leur place dans le monde.

Merci pour ton avis, PetitFaucon J'ai lu de cet auteur, Une maison pour Monsieur Biswas, narrant la construction de la maison de Monsieur Biswas, cauchemardesque entre les artisans, les matériaux ... un roman passionnant, parfois amusant, souvent énervant

J'aime aussi beaucoup ton expression d'"auteur énervé" c'est vrai qu'il est sans concession, Sir Vidiadhar

Merci pour cet avis très intéressant, Petit Faucon Je retiens le nom de cet écrivain, surtout s'il est anticonformiste et singulier !

L’écrivain britannique V. S. Naipaul, prix Nobel de littérature nous a quittés hier. Pour ma part, je n'ai encore rien lu de ces livres, ni vu aucune adaptation. J'espère pouvoir y remédier un jour

J'ai lu un seul livre de lui, par hasard, et qui m'a vivement impressionnée. Plutôt un essai qu'un roman si je me souviens bien et qui faisait réfléchir sur la partition Inde / Pakistan et l'intolérance religieuse associée (les lois pakistanaises marquées par l'islam, en particulier). Si quelqu'un voit ce que c'est et peut m'en retrouver le titre je lui en serais reconnaissante.
Et merci de vos conseils livresques.

Ysa, merci pour cette info je n'ai lu que Une maison pour Monsieur Biswas et j'avais adoré l'histoire, l'écriture poétique Quand tu parles d'adaptation, tu penses à quel livre ?

Cassandre a écrit:

Ysa, merci pour cette info  je n'ai lu que Une maison pour Monsieur Biswas et j'avais adoré l'histoire, l'écriture poétique  Quand tu parles d'adaptation, tu penses à quel livre ?

J'ai vu que The Mystic Masseur avatar été adapté au cinéma 

Merci Ysa, j'ai trouvé le DVD mais en anglais et sans sous-titres français Patience et longueur de temps ....