Merci
Ysabelle Voici le chapitre deux:
Chapitre deuxWoking, contrairement à Whitechapel, n'était pas si mal que ça. La classe moyenne inférieure, pour ainsi dire. Cependant, c'était un endroit dangereux la nuit et je gardai la main dans mon manteau comme le faisait Holmes, en marchant dans la rue. Mon vieux revolver armé était un poids réconfortant.
Il ne faisait pas totalement sombre et plusieurs personnes déambulaient encore dans le crépuscule froid de l'automne. Des fiacres et des chariots claquaient sur les pavés humides alors que les passants revenaient de leur travail et rentraient chez eux. Certains avaient aussi probablement envie de dépenser leur argent et de se divertir.
Tandis qu'un fiacre passait, dévoilant de jeunes femmes vêtues de couleurs vives, je me mis à songer à mes futures noces. Mary voulait à tout prix avoir mon opinion sur les repas du mariage et sur le linge de maison. J'aurais aimé lui dire que cela n'avait pas d'importance pour moi, qu'un drap ressemblait à un drap d'une façon ou d'une autre, mais elle se soumettait entièrement à ma décision. Je me demandais si je pouvais prendre Holmes et Moriarty comme excuse pour me sortir de cette situation délicate et de tous ces enquiquinements liés au mariage, mais je rejetai aussitôt cette solution. Je préférerais mourir plutôt que d'infliger cela à ma fiancée.
Un léger bruit provenant de Holmes me tira de mes pensées. La rue était quasiment vide à présent. Il avait ralenti le rythme et me tirai par la manche tandis que je passais devant lui. « Regardez là-bas, devant cette porte » D'un petit mouvement de tête, il me désigna la porte en question. Essayant de rester discret, je jetai un coup d'œil.
Tout ce que j'aperçus au début était une silhouette aux contours flous à moitié dissimulée dans l'obscurité. Au premier abord, je crus que c'était une femme parce qu'elle était drapée dans quelque chose de fluide. Puis l'ombre se déplaça et je réalisai qu'elle était beaucoup trop grande et large d'épaule pour que ce soit le cas. C'était un homme mais étrangement vêtu. Le vêtement qui se mouvait doucement était une sorte de robe, sombre et ne pouvant être clairement identifiée dans la pénombre. Comme il bougeait, je distinguai un bout de tissu clair en dessous du vêtement. « Qu'est-ce que c'est ? » demandais-je doucement à Holmes.
Il secoua la tête. « Je n'en suis pas certain. Mais il est traqué » Non loin du mystérieux individu, je remarquai une seconde silhouette, debout et immobile dans le recoin d'une ruelle. Pour autant que je pourrais le dire, celle-ci était habillée de façon plus conventionnelle.
« Qu'allons-nous faire ? » soufflais-je.
« Rien pour le moment. » Il me tira sur le côté, dans l'ombre d'une porte. « On va simplement regarder. Je veux voir ce qui va se passer. »
« Mais Holmes, cet homme ne sait peut-être pas qu'il est traqué. Peut-être devrions-nous... »
« Il sait qu'il est surveillé » me dit doucement mon ami. Pour une fois, j'évitais de lui demander comment il le savait et reportai mon attention sur l'homme en robe. Après un moment, je compris comment Holmes avait deviné. L'homme était tendu, sur le qui-vive. Cela se sentait dans ses mouvements.
C'était comme assister à un drame, la scène était captivante mais quelque chose de terrible se préparait. On ignorait ce qui allait se produire et ce suspens en était presque insoutenable. Après un long moment, l'homme se déplaça rapidement vers l'autre côté de la rue, sa main se glissant sous sa robe.
Un autre mouvement attira mon attention. Le deuxième homme s'était emparé d'un objet étrange qui ressemblait vaguement à un pistolet, mais elle n'appartenait à aucune sorte d'arme à feu que je connaisse. Il leva le bras et je sentis Holmes se raidir à mes côtés. Je me tendis brusquement, moi aussi, prêt à distraire l'ombre armée.
L'autre homme sembla sentir la menace, il se tourna alors qu'il s'approchait du coin de la rue et commença à retirer sa main de sa robe. Sans avertissement, un fiacre déboucha tout à coup d'une ruelle. Je pouvais clairement entendre les malédictions du conducteur comme il dévalait les pavée en tirant sur les rênes, essayant d'éviter l'homme debout dans la rue. Le cheval se cabra dans un hennissement de frayeur. L'homme en robe se retourna rapidement pour voir ce nouveau danger foncer droit sur lui. A travers tout ce vacarme, j'entendis un sifflement suivi d'un éclair vert.
L'homme en robe se décala vers l'avant, les sabots avant du cheval manquant de peu son crâne et tomba lourdement sur le sol. Le conducteur avait réussi tout juste à tirer de force son cheval, de sorte qu'il n'écrasât pas l'homme tombé à terre. Le cheval hennit de douleur et de protestation et ce bruit fut comme un catalyseur. C'était comme si nous avions été figés sur place avant, mais là, Holmes s'élança. Je me précipitai à mon tour, me dirigeant vers l'homme blessé, tandis que mon ami prenait en chasse celui qui avait tiré.
Je pouvais voir que le conducteur du fiacre était descendu et se rapprochait de la forme étendue sur les pavés. « Ne le touchez pas ! » intimais-je. Il stoppa net comme si ma brusque autorité l'avait brûlé.
Arrivé près du blessé, je mis un genou à terre, me maudissant d'avoir oublié ma sacoche. Un examen rapide me révéla que l'homme n'avait, heureusement, ni crâne, ou dos, ou cou cassé, je n'aurais rien pu faire pour lui. Il avait une profonde entaille au front et une ecchymose recouvrait déjà sa pommette gauche. Je vérifiai son pouls et mes mains coururent sur ses jambes, ses bras et ses côtes. Les épaisses couches de vêtements rendaient mon examen difficile mais je me doutais qu'il avait dû se fracturer plusieurs côtes.
Cependant, sa blessure à l'épaule était une autre affaire. Cela ressemblait plus à une brûlure qu'à une blessure. Au moins était-elle cautérisée et ne saignait-elle pas. J'avais vu bien pire en Afghanistan.
« C'était un accident, m'sieur !' glapit le chauffeur de fiacre. Je lui jetai un bref coup d'œil, il tremblait de sous ses membres. « Il...il va bien, n'est-ce pas ? »
« Il a été touché... »
« Touché ? Mais je n'ai pas... »
« Je sais » coupais-je d'un ton cassant. « Calmez-vous, s'il vous plaît. »
« Il est...il est mort ? » demanda le conducteur d'une toute petite voix.
« Non, mais il est très mal en point. » Je plissai le nez en respirant l'odeur de chair et de tissus brûlés. Quel genre d'arme pouvait produire ça ? J'avais déjà vu des brûlures causées par de la poudre à canon, etc...mais elles n'étaient pas aussi nettes.
Holmes revint, il était à bout de souffle. « Je l'ai perdu. » dit-il sombrement. « Celui qui a fait ça, Watson, il savait ce qu'il faisait. Je n'ai pu retrouver aucune trace de lui.» Il regarda l'homme toujours inconscient. « Nous devons le ramener à Baker Street. Vous le soignerez et je jure que je mettrais cette situation au clair. »
« Très bien. Cher monsieur » déclarais-je en m'attirant un regard horrifié du conducteur. « Aidez-moi à le charger dans votre fiacre. »
Le conducteur s'inclina, marmonnant tout le long du chemin des prières, des malédictions et tout un ramassis de bêtises. Je l'ignorai, Holmes, cependant, perdit rapidement patience.
« Dépêchons-nous, Watson. Mes omoplates commencent à me démanger. Je n'aime pas m'exposer ainsi, tout peut arriver dans ce quartier à une heure aussi avancée de la nuit. Oh, pour l'amour du ciel, ressaisissez-vous ! »Cette dernière remarque, plutôt méchante, s'adressait au pauvre conducteur qui se tordait les mains d'angoisse alors que j'installai le patient sur le siège du fiacre.
Il était très jeune et je me doutais que c'était probablement la première fois qu'il manquait de tuer quelqu'un. Me sentant désolé pour lui, j'essayai de le calmer, mais il fallut que Holmes le menace et se mette en colère pour qu'il se ressaisisse suffisamment pour conduire. Nous partîmes enfin, laissant derrière nous les ombres et les secrets de Woking.
Voir le 221B Baker Street me procura un intense sentiment de soulagement et de confort dès que nous approchâmes du trottoir. Je payai le chauffeur du fiacre, ajoutant quelques shillings supplémentaires et lui suggérai de se prendre un remontant. Reconnaissant, il m'adressa un sourire hésitant et s'en alla, nous laissant Holmes et moi, porter l'inconnu. Qui était beaucoup plus lourd qu'il n'en avait l'air.
Mrs Hudson ouvrit la porte et ses yeux s'écarquillèrent de surprise devant l'étrange cortège que nous formions. « Oh mon Dieu ! » Son ton exprimait plus de l'exaspération que du choc. Cela faisait des années que des inconnus plus bizarres les uns que les autres avaient franchi le seuil de sa maison. Avec Holmes, elle n'était plus choquée par quoi que ce soit depuis bien longtemps. « Non ! Non ! Mr Holmes, ne vous avisez pas de le mettre dans le salon ! Je viens tout juste de le nettoyer. Allongez-le plutôt dans la chambre d'amis ! » Elle posa ses mains sur ses hanches et le fixa farouchement alors que Holmes hésitait entre la porte du salon et les escaliers qui menaient à la chambre. « Ne me lancez pas ce regard, Mr Holmes ! Je n'accepte pas que l'on salisse ces meubles ! »
Holmes la regarda un moment, puis décida que tout compte fait, le blessé serait bien mieux à l'étage. Nous montâmes progressivement les marches, levant doucement notre charge, suivis de Mrs Hudson. Nous posâmes l'homme sur un lit et je demandai à notre cuisinière de m'apporter ma sacoche. Elle emmena Holmes avec elle, lui ordonnant d'aller à la cuisine pour m'amener de l'eau bouillante, une distraction que j'avais inventée il y a quelques années, pour le tenir éloigné lorsque je m'occupais d'un patient. Dans ce cas là, j'avais effectivement besoin d'eau, afin de nettoyer et de poser un cataplasme sur l'épaule du blessé. Les protestations de Holmes furent fermement ignorées et il finit par emboiter le pas à Mrs Hudson tandis que je reportai mon attention sur l'homme allongé sur le lit.
Ses habits étaient encore plus curieux que je ne le pensais : il portait une longue robe brune volumineuse avec une capuche dans un tissu qui ressemblait à de la laine douce, et en dessous, une tunique de couleur crème ceinturée sur un pantalon d'une teinte légèrement plus foncée. Le fermoir de la ceinture était un assemblage de matériaux encore plus étranges et il me fallut un moment avant de comprendre le mécanisme d'ouverture. Accroché à sa ceinture, un objet long de forme cylindrique attira mon attention. Je n'en avais encore jamais vu de tel, je l'examinai de près avant de le mettre soigneusement de côté avec la ceinture enroulée autour.
Une fois que je le vis torse nu, je compris pourquoi il avait été si lourd : l'homme était solidement musclé. Je me demandais quelle profession il exerçait pour le maintenir dans une aussi excellente forme physique. Après toutes mes années de carrière, je n'avais pas autant de muscles. J'étais plutôt considéré comme « trapu ».
Mrs Hudson revint avec mes affaires et je m'occupais aussitôt de l'épaule du jeune homme. Il ne bougea pas d'un pouce, même quand je désinfectai sa plaie. Il n'était pas très vieux, âgé tout au plus d'une vingtaine d'années. De nombreuses cicatrices sur son torse et ses bras laissent penser que la vie qu'il menait était loin d'être paisible. Ses traits étaient fins et beaux, avec de larges pommettes et une petite fente au milieu du menton. Ses cheveux étaient encore plus bizarres que sa tenue. Coupés courts de partout, en brosse, rassemblés en une très courte queue à l'arrière de sa tête et une longue tresse enroulée à intervalle régulier avec du fil rouge et doré tombait sur son épaule droite. Je me demandais alors s'il appartenait à un quelconque ordre religieux.
Je ne pouvais plus faire grand chose pour son épaule tant que Holmes n'aurait pas apporté de l'eau pour nettoyer la plaie. Il y avait des ecchymoses qui apparaissaient sur les côtés, me confirmant que notre hôte s'était bien cassé une côte ou deux. Avec l'aide de Mrs Hudson, j'enveloppais son torse dans des bandages serrés et nous l'installâmes plus confortablement dans son lit.
Holmes arriva à point nommé avec l'eau et je commençai à tremper le matériel nécessaire pour un cataplasme. Quand il aurait refroidi et serait fin préparé, je le mettrais sur l'épaule de mon patient. Holmes se tenait adossé contre la porte, me regardant travailler dans un silence inhabituel. Quand je mis le cataplasme de côté pour qu'il refroidisse, il rompit le silence : « Cela vous dérange si j'emprunte ses vêtements ? »
Mrs Hudson leva un sourcil « Et que pensez-vous faire avec les vêtements de ce pauvre garçon, Monsieur Holmes ? Vous ne pouvez pas le laisser un peu tranquille ? » Elle semblait anormalement bouleversée par cette suggestion. L'idée de Mrs Hudson de ce qui était juste et appropriée avait toujours été quelque peu différente de celle de mon ami.
« Je souhaiterais simplement en savoir plus notre mystérieux invité, Mrs Hudson, et comme il n'est pas disponible actuellement... »
Sentant une dispute sur le point d'arriver, je préférai intervenir: « Je suis plus intéressé par l'arme qui a causé ça » dis-je en désignant l'épaule blessée. « Je jurerais avoir vu une lumière verte lorsque l'attaquant a tiré dans la ruelle et je ne connais aucune arme qui cause une telle blessure. »
Face à ce mystère encore plus fascinant, Holmes oublia immédiatement son irritation. « Peut-être est-ce une sorte d'arme expérimentale ? » se dit-il en s'approchant dangereusement de la blessure. Tardivement, je réalisai que j'avais réussi à capter son attention sur quelque chose que je ne voulais pas qu'il touche pour l'instant.
« Peut-être que ce jeune homme pourra nous le dire lui-même quand il se réveillera » suggérais-je à la hâte. « S'il vous plaît, Holmes, ne touchez pas au bandage, il est tout propre. Contentez-vous de nous dire ce que vous avez observé sur lui pour l'instant » ajoutais-je.
Il étudia mon patient attentivement, ses yeux gris devenant subitement calculateurs. « Il est âgé de vingt ans, est droitier et prend soin de ses vêtements. Vu les callosités sur ses mains, c'est un épéiste. » Il s'arrêta, fronçant les sourcils. « Mais je ne connais pas cette forme d'escrime, peut-être est-ce une forme orientale ? »
« De quelle nationalité est-il ? » demanda doucement Mrs Hudson.
« Je n'en suis pas encore certain » admit-il à contrecœur. « J'en saurais plus quand je pourrais parler avec lui. Je vais jeter un coup d'œil à ses vêtements, si vous avez besoin de moi, Watson, je serais dans mon bureau. Prévenez-moi quand il se réveillera. »
Il adressa un signe de tête à Mrs Hudson et s'en alla.
« Il n'a toujours pas mangé » déplora Mrs Hudson. « Tant pis, je lui mettrai de côté pour plus tard. Mais vous, Monsieur Watson, vous devez être affamé. Que diriez-vous d'un bon plat chaud et d'une tasse de thé ? »
J'acquiesçai avec reconnaissance « Merci Mrs Hudson, ce serait parfait. » Une lueur joyeuse dans les yeux, elle quitta la pièce, me laissant seul avec le jeune homme mystérieux.
Normalement ce soir, je devais dîner à nouveau avec Mary afin de discuter du mariage de façon plus approfondie. Cependant, je m'en serais voulu d'abandonner mon patient et je recrutai donc un des gamins des rues de Baker Street pour lui laisser un message avec tous mes regrets. J'envoyai le petit garçon en guenilles, me sentant à la fois coupable et soulagé de ne pas avoir à parler du linge de maison. Mary était la femme la plus adorable qui soit, mais les femmes et le mariage...Secouant la tête, je rejoignis l'intérieur de la maison.
Je tombai sur Mrs Hudson dans le hall et elle m'annonça qu'elle avait laissé le repas sur le buffet et allait se coucher. Je la remerciai, allai dans la salle à manger engloutir mon dîner puis retournai voir mon patient.
Il était calme, trop calme, pensais-je. Cela faisait plus de trois heures qu'il était resté inconscient et il ne montrait toujours aucun signe de réveil. Les traumatismes crâniens sont assez particuliers et, même si celui-ci ne paraissait pas alarmant, on ne sait jamais comment cela va évoluer. Ne pouvant rien faire de plus, je me décidais d'aller rendre visite à Holmes. Histoire de voir s'il avait progressé dans son enquête. Alors que je me retournais, quelque chose capta mon regard auprès du lit. Je me penchai et découvris que c'était la ceinture du jeune homme avec l'étrange objet cylindrique accroché dessus. J'aurais pourtant juré l'avoir rangée sur la commode mais elle avait dû glisser et personne ne l'avait remarquée, cachée à cet endroit. Sachant que Holmes voudrait certainement l'étudier, je la récupérai et descendis vers son bureau.
Je m'arrêtai devant sa porte et tendis l'oreille. Il n'y avait aucun bruit à l'intérieur et aucune odeur suspecte ne me chatouilla les narines.J'avais appris depuis longtemps à ne pas rentrer sans frapper quand il travaillait. Lorsque nous étions colocataires, j'avais commis cette erreur alors qu'il était plongé dans une expérience chimique délicate. L'explosion avait brisé les vitres de la chambre et mit la pièce dans un tel désordre que Mrs Hudson ne nous avait pas parlé durant une semaine. Depuis lors, je faisais preuve de prudence. Je frappai, attendis un long moment et, n'obtenant aucune réponse, j'ouvris prudemment la porte et entrai.
Holmes était assis dans son fauteuil en osier, le regard plongé dans le vague, en train de jouer discrètement avec sa pipe. Pendant un moment, je crus qu'il avait cédé à la tentation mais je réalisais en voyant ses yeux, qu'il était devait être plus préoccupé qu'autre chose...Je dus prononcer trois fois son nom avant qu'il ne lève enfin son regard vers moi.
« S'est-il réveillé ? » me demanda-t-il immédiatement.
« Non, et cela commence à m'inquiéter. Mais ce n'est pas la raison pour laquelle je suis ici. J'ai pensé que cela vous intéresserait » Je lui montrai la ceinture avec l'objet cylindrique.
« Qu'est-ce que c'est ? »
« Je n'en ai aucune idée. Je l'ai remarqué quand j'ai déshabillé notre hôte. Étonnant, n'est-ce pas ? »
Il me le prit vivement des mains et l'examina sous toutes les coutures. « Je ne reconnais pas cet alliage. Et ses finitions sont très inhabituelles ! » Il le détacha de la ceinture, la laissant négligemment tomber sur le sol alors qu'il tournait à plusieurs reprises le cylindre entre ses doigts. « C'est fin et solide à la fois » dit-il en tapotant sur l'une des extrémités. On aurait dit qu'il y avait une sorte de lentille ou de pierre en son centre. « Cela ressemble à un bouton »
« Holmes, avez-vous tellement envie d'appuyer dessus ? Nous n'avons aucune idée de ce que c'est ou de ce qu'il fait. »
« Allons, Watson. Où est passé votre curiosité ? » fit-il en souriant.
Je le fixai avec inquiétude, n'aimant pas cette expression familière qui passait sur son visage. « Là, où elle devrait être » répondis-je vaillamment. « Derrière le bon sens. »
Il ricana et son doigt se déplaça vers le bouton...
Des bruits de pas dans les escaliers attirèrent tout à coup notre attention. Holmes se tourna vivement tandis que la porte s'ouvrait, révélant une silhouette maigrichonne. Je reconnus Billy, l'un des garçons de rue le plus familier de Holmes. « M'sieur Holmes ! » lança-t-il à bout de souffle. « J'ai un message pour vous » De sa main sale, il tendit un papier plié en quatre.
Holmes s'en empara et, oubliant le cylindre, parcourut rapidement son contenu. « Ha ! Il semblerait, Watson, que l'une de mes sources ait décidé de me parler » Devant mon regard perplexe, il expliqua « Je suis allé enquêter un peu plus tôt aujourd'hui, à la recherche d'informations sur Moriarty. Apparemment, il a été plus que menaçant...Cela ne m'a pas empêché de laisser entendre que je paierais gracieusement pour toute information. Le poisson a mordu à l'hameçon visiblement...Billy, va réveiller Mrs Huson, elle te donnera sûrement quelque chose à manger. » Il lança une pièce au garçon qui l'attrapa en souriant et sortit en courant. Holmes ajouta le message sur la pile de papiers qui encombrait son bureau, l'épinglant avec le poignard qu'il gardait spécialement pour ça.
« Vous allez rencontrer cet homme ? Ce soir ? »
« Il n'y a pas de temps à perdre, Watson » Il alla dans sa chambre et je pus l'entendre fouiller dans une armoire.
« Voulez-vous que je vienne ? »
« Non, non. Vous, vous restez ici et vous gardez un œil sur notre invité. Je ne pense pas rentrer très tard » Il réapparut, portant des vêtements miteux et une casquette en tissu.
« Soyez prudent, Holmes »
Il sourit. « Toujours, Watson »