Lecture Brink : deuxieme partie

En attente de vos commentaires sur la 2eme partie

Je viens de finir la deuxième partie, dans le train, et je poste mes impressions avant d'oublier.
Ben avance dans la découverte de ce qu'est réellement son pays, et de lui-même face à cette révélation. Il croit vraiment en la Justice, persuadé que la vérité sera faite sur le "suicide" de Gordon et que les bourreaux seront punis. La révélation de la collusion Justice-Police, des témoignages truqués, ignorés ou déformés est un véritable effondrement de son univers, le laissant nu, dépouillé de tout ce qui composait la coquille factice de sa personnalité et de sa vie, et face à la question de Mélanie : Et maintenant ?
Deuxième point important de cette partie : la rencontre avec Mélanie, dont on sent qu'elle va être déterminante d'autant que tout son petit monde lui tourne le dos, se moque ou le rejette carrément, comme Susan, incapable de comprendre le geste d'Emily sur les marches du tribunal. Il est évident que sa solitude, jusque là intellectuelle, va devenir physique, et même poussée jusqu'à l'ostracisme. Parallèlement, un contact s'établit avec Stanley, proche de lui par leurs souvenirs d'enfances semblables, formant les deux faces d'une médaille symbolique de leur pays.
Un déclic s'est produit, avec la fouille de sa maison, les écailles sont tombées de ses yeux, pour rester dans le langage biblique, et maintenant c'est lucidement qu'il va s'engager dans ce combat dont il pressent qu'il ne sortira pas vainqueur.
Les lignes qui clôturent cette partie :
"J'ai l'impression d'être à la lisière d'une autre saison blanche et sèche, peut-être pire que celle que j'ai connue enfant." le montrent entrant dans la voie choisie, les yeux ouverts et lucide.

J'ai également terminé cette deuxième partie. 
Et je dois dire qu'elle est magistralement résumée par Clinchamps, ci dessus, et que je n'ai pas grand chose à rajouter.  

Effectivement prise de conscience douloureuse pour Ben de la réalité de son pays. Cela donne la sensation d'un basculement , dans cette partie: Ben bascule d'un monde à l'autre . Petit à petit il se fait rejeter par toutes les personnes qui constituaient son entourage familier:  épouse, enfants, collègues, amis. Tous le jugent négativement, désormais et ne vont pas tarder à le lâcher définitivement. 
Et il bascule dans un autre monde, celui qu'il ne connaissait pas, ou très superficiellement, et il est guidé dans ce monde là par des personnages, riches en expériences, que sont  Mélanie et Stanley. 

Stanley et Mélanie sont lucides, et clairvoyants sur leur société, ce sont eux qui ouvrent les yeux de Ben . 
Stanley:" nous savions de toute façon que ça allait arriver, n'est ce pas!" " ce genre de
chose se produit tout le temps".

Mélanie: " vous vous attendiez à un verdict différent? "

L'opposition est tranchée entre les deux femmes: Mélanie qui dit à Ben" je suis là , si vous avez besoin de moi". Et Suzan qui lui ferme maintenant la porte. 

Ben bascule dans un autre monde, symbolisé partout, par cette phrase qui revient en boucle: "et maintenant  ?".

Je viens de terminer moi aussi cette 2e partie, dans laquelle Ben Du Toit est confronté à la réalité de la société fondamentalement inégalitaire et injuste de son pays, avec le déroulé du procès examinant les circonstances de la mort de Gordon Ngubene.

Le procès est minutieusement décrit, sans partis pris, et nous, lecteurs, sommes comme Ben, pris de court par le verdict, qui ne tient pas compte des failles béantes dans le récit des évenements fait par la Sûreté, ni des témoignages accablants de Anatole et Grace.
Dès lors, nous ne pouvons qu'être en empathie avec le désarroi de Ben, et voir avec lui ses certitudes se fissurer et s'effondrer.

Les visites que fait Ben ne font que renforcer ce sentiment : le pasteur Bester, d'abord, montre le vrai visage de l'Eglise et son soutien indéfectible au système de l'apartheid, il dit à Ben :"Mais si vous commencez à douter de vos autorités, vous agissez contre l'esprit chrétien. Elles sont investies de l'autorité de Dieu." C'est édifiant.
Ensuite le docteur Herzog, qui est plus ouvertement collaborationniste avec la Sûreté, sa qualité avouée de médecin de la prison laisse suggérer des horreurs ...

Le personnage de Mélanie est la seule lumière qui éclaire ce sombre tableau, elle a une personnalité atypique et un parcours assez violent ; elle est différente et s'assume. Stanley et Melanie vont certainement jouer un rôle important dans la suite.

Enfin le chapitre 9 est extraordinaire, Ben y fait un retour sur l'histoire de son pays et sur lui-même, se demandant qui sont maintenant ses frères, et que veut dire "être humain".
Quel beau livre, je suis vraiment conquise.

Quel bel enthousiasme, Petitfaucon, et qu'elle rapidité de lecture, tu m'impressionne toujours là dessus 

C'est parce que je suis monotâche, zoju   mon petit cerveau ne peut lire qu'un seul livre à la fois, et je m'immerge complètement dedans. J'ai toujours eu des difficultés à lire plusieurs romans en même temps, leurs univers différents me perturbent.

Blague à part, je voulais dire aussi que grâce à cette lecture, j'ai appris pas mal de choses, par exemple :
Que l'Afrique du Sud blanche n'était pas un bloc monolithique contre les Noirs, qu'elle était/est traversée de courants très violents entre les Afrikaners d'origine hollandaise et les autres d'origine anglo-saxonne, que ça a donné lieu à des trahisons et pratiquement des guerres civiles, avec des Afrikaners ayant des affinités avec l'Allemagne nazie pour s'opposer au gouvernement sud-africain favorable à la Grande Bretagne pendant la 2e guerre mondiale.
Les Noirs non plus ne sont pas monolithiques, il y a les Xhosa comme Gordon et les Zoulous comme Stanley, et beaucoup d'autres ethnies, mais ça je le savait déjà.
J'ai appris aussi que Soweto était l'abbréviation de South West Township.
Et enfin après m'être demandé pourquoi l'automne arrivait alors qu'on est au mois de mai, je me suis souvenue que l'Afrique du Sud est dans l'hémisphère Sud .

Mais moi aussi , je ne sais lire qu'un livre à la fois, mais , ca ne donne pas le même résultat que toi  , Petitfaucon

et oui, quand ils parlent maintenant de nation arc en ciel, on sait pourquoi .
JE suis toujours impressionnée sur certains livres plus contemporains, de voir à quel point il y a d’ethnies différentes, de couleurs différentes , de cultures,  de langues différentes parlées dans ce pays..
C'est très marqué dans les polars de DEon Meyer. Il explique ça très bien.

je ne me suis pas encore penchée sur la question de la guerre des boers, qui revient souvent dans les romans anglais, et qui m'interroge toujours il va falloir creuser la question

Ah oui Deon Meyer, ça fait plusieurs fois que je le croise, il va falloir que j'approfondisse cette rencontre 

Et la guerre des Boers, on en parle aussi indirectement dans pas mal de séries (Murdoch / Downton Abbey), et je n'en connais pratiquement rien ...

ET oui, concernant la guerre des boers, l'armée  britanniques y a été embarquée . Mais je ne sais pas de quoi il s'agit exactement   

et il y a un topic pour Deon Meyer, si le cœur t'en dit

Les Boers ne voulaient pas devenir une colonie britannique intégrée au Commonwealth, ils se sont battus contre , et on perdu les deux guerres des Boers.
http://fr.wikipedia.org/wiki/Guerre_des_Boers

Merci Clinchamps, de nous apporter l'info sur un plateau

En tout cas, voici un moment de l'histoire, dont l'armée britannique ne doit pas être bien  fière: faire mourir des milliers de femmes, enfants et personnes âgées dans des camps de concentration ca fait froid dans le dos et ça rappelle surtout des pratiques instaurées à d'autres heures sombres de l'histoire mondiale.
JE cherche encore si les anglais se sont fendus d'excuses publiques pour ces atrocités commises, mais je n'ai pas trouvé l'info

Je viens de terminer la seconde partie.

Glaçant !!! La machine à broyer s'est mise en marche, rien ne pourra l'arrêter et au fond de lui Ben le sait maintenant.
Quand commencera la violence physique ? Très vite sans doute, à moins que Stolz ne réalise qu'elle serait inutile et cherche plutôt à le détruire autrement

Impressionnant chapitre 9 en effet, conclusion naturelle de cette partie. Plus rien ne sera plus comme avant. Et effectivement le retour sur l'Histoire de son pays est bien pensé. Rappelons qu'il est Professeur d'Histoire-Géo et donc en charge de raconter cette histoire qu'il sait maintenant être détournée. Voir s'effondrer tout ce en quoi l'on croyait, c'est sans doute ce qu'il y a de pire

Seul répit: Mélanie et le chapitre où il termine chez elle la journée du procès permet une respiration bienvenue pour nous comme pour Ben. Une sacrée femme, Mélanie, si jeune et déjà si lucide et si mûre, si "sage" serait-je tenté d'écrire. J'ai beaucoup aimé la description de sa maison et du sympathique "bordel" qui y règne , sans même parler des chats. On aimerait presque faire la connaissance du père - peut-être cela viendra-t-il ?

Une relative surprise l'attitude de l'avocat qui semble encore croire en la justice ? et qui manifestement se mouille vraiment, pour rien certes, mais cela mérite d’être souligné

Susan: déception! On s'en doutait un peu, mais à ce point et aussi vite, sans aucun état d'âme, aucun questionnement !!! Cela ne colle pas tout à fait avec l'image du prologue: une femme ambitieuse certes, mais honnête et sincère. Linda et Johan à voir ?

Toujours aussi agréable à lire en anglais sauf dans le premier chapitre dans les dialogues avec Stanley parsemé de mots africains et d'un style moins limpide, je ne sais pas ce qu'il en est dans la version française: peut-être même est-ce voulu, pour souligner que Ben et Stanley, blancs et noirs ne vivent pas dans le même monde

Et à nouveau pour terminer quelques exercices de traduction soumis à votre sagacité

chapitre 7: lorsque la secrétaire revient triomphante annoncer à Ben que le Docteur ne le recevra pas
Then the door was closed and the girl returned to her desk in bitchy triumph
Je me demandais vraiment comment le traducteur allait traduire le "bitchy triumph", très savoureux en anglais > devient  platement l’air bêtement triomphant  bien trop banal. Je n'ai pas mieux à proposer mais quand-même!

et quand le Docteur dit
(Why go to all this trouble for the sake of) a bloody coon? > Pourquoi risquer tant de problèmes pour ce pauvre type ? en français ! là non, Coon est trés insultant: il y fallait au moins "négro" ou "sale nègre"

chapitre 6 dans le dialogue avec la pasteur ils s'adressent l'un à l'autre comme Oom Ben et Dominee

wiktionary a écrit:

oom (plural ooms): (South Africa) An older man, especially an uncle. (Frequently as a respectful form of address.)

traduit par Oom Ben, pas foulant, mais comment faire autrement?

wiktionary a écrit:

dominee (plural dominees): pastor; minister

traduit par Révérend, là c'est bien!

That's all folks

PS quid de Deon Meyer? qui est-ce? et qu'a-t-il écrit ?

Je vous rejoins après avoir terminé cette partie hier soir et j'ai peu de choses à ajouter (merci pour vos commentaires si intéressants et pour la précision sur la Guerre de Boers Clinchamps).

L'arrivée de la police en début de chapitre 8 constitue un choc dans la lecture (même si comme Ben, nous ne sommes pas totalement surpris)...
L'attitude de Susan est prévisible. Elle fait partie de cette société et on voit bien que la photo publiée dans la presse jette le déshonneur sur Ben et son entourage. Le verdict de la porte de la chambre verrouillée est implacable. Susan enferme Ben qui jusque là pouvait être encore entre les deux mondes ...

Comme vous j'ai trouvé de beaux moments et j'avais noté ces deux extraits que j'ai trouvé très beaux :

Citation :

"But who are my people today ?To whom do I owe my loyalty ? Ther must be someone, something"

Citation :

And it seems to me I'm finding myself on the edge of yet another dry white season, perhaps worse than the one I knew as a child. What now ?

Intéressants extraits sélectionnés pour la traduction PapiSido. Le traducteur affadit clairement le texte de Brink  
Pour "bitchy triumph" : avec son air de peste triomphante ? arborant un triomphe narquois ?

Merci à tous pour vos commentaires 
Je dois dire que lire ce livre dans ses conditions est un réel bonheur et fournit une vraie stimulation  . Donc merci à tous , réellement, d'être aussi curieux, et stimulants   , 
Après ce Petit aparté personnel ,
Et pour répondre à ton Ps, Papisido: Deon Meyer est un auteur de polars , contemporain , africain du sud. 
Tu trouveras ses polars partout où on en vend, : librairies, supermarché, gares, amazon,... Que sais je encore, car il rencontre un succès amplement   mérité .
 
J'avais ouvert un topic de présentation de Deon Meyer.  Mais je ne maitrise pas la manip de la petite flèche qui y mène directement 

Et voici le lien vers le topic consacré à Deon Meyer  

La manip de la petite flèche :

Spoiler:

Pour en revenir aux propositions de traduction de PapiSido, je ne connaissais pas le terme "coon" mais en effet, c'est un terme insultant. Et renforcé par "bloody" .. un satané négro ? un foutu négro ?

Je viens de lire tous vos commentaires et je suis d'accord avec vous sur tout. Très beau livre en effet, très agréable à lire.
Pour Ben, c'est tout un monde qui s' effondre, fin de sa naïveté et de sa vie tranquille. Le procès est un exemple de ce que peuvent offrir en la matière les régimes autoritaires, de l'imposture, de l'hypocrisie, du détournement des propos, , c'est terrifiant.
Ce qui ne l'est pas moins, , c'est l'attitude du pasteur, quel cynisme dans ses propos et Ben, encoreun peu naïf, qui croit q'il peut lui apporter un quelconque soulagement.
La fouille de sa maison est un moment fort de cette partie, cela signifie que les autorités l'ont désormais dans le colimateur et cela ne laisse présager rien de bon. J'ai compati avec Susan, car voir la police entrer dans son intimité n'est certainement pas une expérience agréable et je peux comprendre qu'elle ait été choquée et même qu'elle lui en veuille. Toutefois, on sent bien que cet épisode va servir de prétexte pour faire basculer définitivement leurs relations déjà bien tendues. Les gens le lachent au fur et à mesure, ça aussi c'est édifiant et terriblement triste pour Ben.

Je viens de finir la deuxième partie

Je vais être dissonante, mais je n'arrive toujours pas à m'intéresser au livre. J'ai l'impression d'avoir déjà lu et vu l'histoire des dizaines de fois et le tout me laisse un peu indifférente. Je trouve le livre assez caricatural : un gentil blanc un peu naïf se bat tout seul contre des méchants blancs, tortionnaires de gentils noirs.

Mais je continue quand même

certes, Ludi, il faut juste que tu imagines que ce livre a 36 ans, qu'il a été écrit afin de dénoncer un système politique aberrant , qui  est maintenant révolu depuis 1994.
Donc, en le lisant aujourd'hui , ça n'a plus la même impact, que de le lire au moment de sa sortie, en 1980.
Car, ce livre a , en partie contribué à ouvrir les yeux, sur la réalité de l'apartheid, c'est ce qui a fait sa force.

Mais , je conçois, que depuis, on puisse avoir l'impression de déjà vu.

Je suis tout a fait d'accord à ce niveau zoju, et c'est ce que je me suis dit.

Mais d'un autre coté, je me dis que si je n'accroche pas à l'histoire et que je n'arrive pas à aller au delà de cette impression, c'est que, pour moi, le livre n'a pas de qualité autre que la simple dénonciation d'un système aberrant. J'ai lu pleins de livre avec une impression de lire une histoire déjà écrite 1000 fois, mais je peux prendre du plaisir à lire le style de l'auteur, la façon dont il raconte l'histoire,....

Bref, avec un très bon prologue, je crois que j'en attendais trop

Je peux comprendre ton sentiment Ludi car il est vrai que le rythme change entre chaque partie (et comme quelqu'un l'a fait remarquer dans un autre topic, André Brink n'a pas rédigé ce roman de manière linéaire vu qu'il l'a repris après quelques mois/ années de panne).

C'est bien d'entendre une voix dissonante quelque part mais je suis désolée si cette lecture tourne au pensum en ce qui te concerne tu penses poursuivre ?

Absolument

J'attends toujours que l'auteur prenne un chemin un peu original . Par exemple, que Ben découvre que Gordon a vraiment fait ce pour quoi il a été en prison (attention, je ne cautionne pas du tout ce qui lui est arrivé )

Je le lis en parallèle de livre plus léfer, donc j'avance moins vite, mais j'avance tout de même

ludi33 a écrit:

Absolument

J'attends toujours que l'auteur prenne un chemin un peu original .

Ta persévérance force le respect Ludi ! Mais au vu de tes autres lectures en cours, j'espère que tu ne vas pas tout mélanger la nuit et prévoir des scènes exhibitionnistes à Ben qui serait aussi un ami d'Emma

Çà égayerait le tout