Kore-eda Hirokazu, pour sentir le Japon, et l'âme humaine.

J'ai regardé hier soir I wish, et qu'est ce que j'ai aimé ! Il est probablement celui de Kore-eda que j'ai le plus aimé jusque là, d'autant que je ne m'attendais pas à être touchée à ce point. J'en suis encore émue ce matin !

Kore-eda a une tendresse véritable pour tous les laissés pour compte, pour toutes les personnes fragiles (enfants, personnes âgées, personnes professionnellement en difficultés, originaux qui ne se fondent pas dans le conformisme japonais...). Je l'ai encore plus ressenti dans ce film. C'est un film grave (la situation des familles est compliquée et triste, le père adulte est irresponsable), mais il y a aussi l'ambiance chaleureuse du sud du Japon (quel plaisir de découvrir Kyushu ! ), et les personnages principaux sont les enfants et les grands-parents, tous bienveillants, tous attentifs aux rêves des uns et des autres, sans leçons données, sans pression. Tout ceci en fait un film doux, lumineux, émouvant, réconfortant.

J'ai été impressionnée par le naturel avec lequel les enfants sont filmés. Apparemment, Kore-eda a aussi réalisé des documentaires, et c'est peut-être pour ça que les enfants ne jouent pas mal, mais qu'ils sont comme ils sont, et que le réalisateur en tire le meilleur.

Ceci dit, ce qui m'a vraiment bluffée c'est l'écriture du film.   Tout est vu à travers le regard des enfants, de l'enfance. Mais ce n'est pas ce retour en enfance artificiel, ou nostalgique, ou un peu maladroit, ou poseur, qu'on voit dans la quasi-totalité des films qui sont centrés sur des enfants. Là nous avons des enfants normaux, qui font face à des situations d'adultes, avec un regard d'enfant : c'est à dire à la fois un regard lucide de créature sensée , et à la fois un regard d'espoir qui transfigure tout, même des actes anodins (comme le passage d'un TGV), en moments magiques, porteurs de symboles et d'aventures. Pour tout dire, je me suis revue hier, avec mes envies d'aventures de petite-fille (quand je croyais que le monde s'ouvrirait à moi, une fois adulte - la réalité c'est que le monde s'est plutôt fermé ). Je retrouve parfois ces impressions en lisant des livres pour la jeunesse, mais bien rarement au cinéma, et c'est en tout cas ce à quoi j'aspire quand j'écris.

Kore-eda se met à la portée des enfants, il les respecte, sa caméra soutient leur histoire avec sérieux, attention et tendresse. Je trouve ça émouvant, et terriblement réconfortant. J'ai vraiment adoré ce film...

Contente que tu aies aimé Annwvyn.
C'est un bel avis qui donne envie de revoir ce très beau film

Annwvyn a écrit:

Kore-eda se met à la portée des enfants, il les respecte, sa caméra soutient leur histoire avec sérieux, attention et tendresse. Je trouve ça émouvant, et terriblement réconfortant. J'ai vraiment adoré ce film...

Excellente critique, avec laquelle je suis tout à fait d'accord !!! Tu as parfaitement compris le cinéma de Kore-eda !!

J'ai vu Air doll hier soir, le dvd étant au catalogue de ma médiathèque.
Je ne suis pas très enthousiaste sur ce film, contrairement aux autres Kore-eda que j'ai pu voir...
Le concept est intéressant (une poupée gonflable qui devient humaine et s'interroge sur le sens de la vie) et illustre bien certaines "dérives" de la société japonaise contemporaine (j'ai entendu parler il y a quelques temps d'un japonais qui s'était marié avec une poupée - ou un hologramme - je ne me souviens plus très bien ).
Mais le film est lent, et comme il est long, il semble interminable... Donc je dois avouer m'être passablement ennuyée pendant une bonne partie

C'est le seul Kore-eda que je n'ai pas vu et n'y envie de voir... Et ce que tu dis me conforte dans ma position !

Merci pour ton avis, Ju ! J'y jetterai peut-être un oeil à l'occasion, si j'ai le courage et si je trouve le temps, je crois que ma bibliothèque le détient. Mais j'avoue avoir la flemme de m'ennuyer...

J’ai vu Still walking que j’ai beaucoup aimé    J’ai trouvé que c’était un film très épuré, mais très fort : on suit simplement la vie quotidienne d'une famille à l’occasion de  la commémoration du décès du fils aîné. Les membres de la famille se retrouvent dans la maison familiale, comme si rien n'avait changé, un peu englué dans un passé  idéalisé. Chacun garde en lui ses souffrances, ses blessures, mais les émotions, les souvenirs remontent lentement à la surface et transparaissent dans les mots, les réactions de chacun.
La poésie, la finesse des descriptions, la délicatesse dans le traitement des personnages m'ont beaucoup plu    Et puis j’ai particulièrement aimé la fin : toujours les actions simples de la vie quotidienne à travers lesquelles on comprend beaucoup de choses !

Merci de ton avis, Elianor, je suis ravie que tu aies aimé, ce film est un de mes préférés de Kore-eda. Le personnage qui m'a le plus frappée est celui de la mère,

Spoiler:

Je te rejoins tout à fait sur le personnage de la mère Clinchamps

Spoiler:

Le DVD d'une "affaire de famille" vient de sortir !! et je l'ai !! Si vous l'avez raté au cinéma, courrez à la médiathèqye la plus proche, s'ils ne l'ont pas, attaquez-les en justice !!

Laisse-leur le temps de l'acheter

clinchamps a écrit:

Le DVD d'une "affaire de famille" vient de sortir !! et je l'ai !!

Eh bien ! Tu n'as pas tardé !

Je continue ma découverte de Kore-eda et je viens de regarder I wish . C'est un très beau film que j’ai trouvé touchant   .

J’ai apprécié retrouver l’ambiance si particulière (que je définirais comme une sensibilité et une douceur spontanées teintée de mélancolie)  que j’avais aimée dans les autres films de Kore-eda. J’ai d’ailleurs reconnu deux acteurs de Still Walking   (Kirin Kiki qui joue également le rôle de la grand-mère et Hiroshi Abe qui joue cette fois le rôle d’un professeur. Il me semble d’ailleurs bien que ces deux acteurs jouent également dans d’autres films du réalisateur !).  J’ai beaucoup aimé la bienveillance qui se dégage des relations entre les personnages mais aussi de la tendresse que le réalisateur semble avoir pour eux.

Malgré une situation de départ triste (la séparation de la famille et des deux frères), c’est un récit joyeux rempli de la poésie et de l’espoir magique de l’enfance. C’est indéniablement un film qui met de bonne humeur !    

Les petits acteurs sont vraiment excellents ! J’ai aimé que la caméra les suive de près, de manière naturelle, car on a vraiment l’impression d’être parmi eux et de faire partie de leur groupe. Les enfants sont également très attendrissants avec leurs rêves, leur quête du miracle, leurs émerveillement devant les choses simples de la vie. Les grands-parents, ces alliés discrets, sont également touchants à leur manière. J’ai beaucoup aimé le personnage réservé et silencieux du grand-père.

Il y a deux passages que j’ai particulièrement aimés :

Spoiler:

C’est finalement une belle aventure entre amis, ce genre de moment que l’on n’oublie jamais et que chacun a au fond de soi, sans que cela soit aussi spectaculaire peut-être   . Et je te rejoins, tout à fait, Annwvyn, sur ce que tu dis de l'enfance et du retour en enfance  
J’ai trouvé que  ce voyage avait aussi  une dimension un peu différente pour le frère aîné. C’est presque un voyage initiatique pour lui : on a l’impression qu’il commence à sortir de l’enfance et qu’il choisit, sans le savoir encore, la direction qu’il veut donner à sa vie d’adulte en devenir.

J’ai donc énormément aimé ce film, mais pour être tout à fait honnête, j’ai quand même trouvé qu’il y avait quelques longueurs qui alourdissent un peu l’histoire sans pour autant la gâcher.

Très joli commentaire, juste et sensible !! Je partage tout à fait ! Quant à Abe Hiroshi et Kirin Kiki on les retrouve dans "après la tempête" et Abe Hiroshi dans le drama de Kore-eda "going my home" que je recommande aussi !

Merci pour vos derniers commentaires, les filles ! C'est drôle, j'ai bien aimé I Wish, film que j'ai trouvant très émouvant, mais ce n'est pas mon Kore-eda préféré ! Depuis, j'ai visionné Notre Petite Soeur qui est mon préféré (ex-aequo avec Tel Père, Tel Fils)

Hier soir, j'ai enfin pu visionner Une Affaire de Famille, que j'ai beaucoup aimé également J'ai retrouvé avec grand plaisir quelques acteurs fétiches de Kore-eda, et l'histoire de cette "famille" atypique m'a beaucoup touchée La Palme d'or est amplement méritée

EDIT : Je viens d'emprunter Still Walking à la médiathèque !

https://www.francetvinfo.fr/culture/cinema/kore-eda-devoile-lhistoire-de-son-prochain-film-quot-la-veritequot-tourne-a-paris-avec-deneuve-binoche-et-sagnier_3286741.html

C'est le dernier film de Kore-eda "la vérité", tourné en France cet automne avec Deneuve et Binoche qui a été sélectionné pour l'ouverture de la Mostra de Venises aujourd'hui !

Le film sort en octobre au Japon, ici je ne sais pas mais j'ai hâte !!

Merci pour l'info

C'est intéressant ce choix d'actrices françaises, et son commentaire (lu dans l'article dont tu as mis le lien)

Kore-eda a écrit:

Les actrices françaises ont ceci de particulier qu'elles gèrent elles-mêmes leur carrière. Elles font ce que ne font pas les actrices japonaises, quand elles ont envie de travailler avec un acteur, un réalisateur en particulier, elles vont elles-mêmes le voir et le lui disent, elles sont très attentives à leur carrière, dans le bon sens du terme, et s'activent pour la mener dans la direction qu'elles souhaitent, j'aime bien cela.

Non seulement ça, mais il a tourné en France, ne parlant pas un mot de français !! Et dans l'article j'aime sa modestie, quand il s'interroge sur sa capacité à diriger un enfant français, quand on a vu déjà tout ce qu'il a filmé sur l'enfance !!

Merci pour l'info, Clinchamps ! Ce film m'intéresse vivement

J'ai regardé ce week-end Une affaire de famille (grâce à Annwvyn ) et j'ai bien aimé cette première incursion dans l'univers du réalisateur.

Je dois tout d'abord dire que je suis une parfaite inculte en cinéma asiatique. À part mon coup de cœur récent pour Parasite, les seuls films que je me rappelle avoir vus sont In the mood for love, quelques Miyazaki, l'adaptation de Balzac et la petite tailleuse chinoise et Furyo. Il y en a peut-être d'autres, mais ce sont les seuls qui me viennent en tête, donc autant dire que je n'y connais rien et que j'ai beaucoup de rattrapage à faire.

Pour Une affaire de famille, il a fallu que je m'habitue au rythme un peu lent du film et que j'accepte de me laisser porter sans trop comprendre les enjeux. Je n'ai pas été totalement captivée, mais j'ai aimé découvrir par petites touches cette famille peu ordinaire, suivre leur quotidien difficile mais pourtant pas sordide. J'aurais toutefois envie de le revoir une deuxième fois

Spoiler:

Pas un coup de cœur pour moi, mais un film que j'ai trouvé intéressant et qui m'a donné envie de creuser la filmo de Kore-eda.

esperluette a écrit:

Pas un coup de cœur pour moi, mais un film que j'ai trouvé intéressant et qui m'a donné envie de creuser la filmo de Kore-eda.

je ne peux que te le conseiller fortement !!

Merci pour ton avis, d'autant plus intéressant que le cinéma japonais, son rythme particulier, ne t'est pas familier ! Je suis ravie que tu l'aies aimé, et le fait d'avoir envie de le revoir est un très bon symptôme !
Tous ses films sont bien et intéressants à divers titres, mais je te conseille "Notre petite sœur" qui est une bonne approche,surtout si tu aa amé "la papèterie Tsubaki " (je ne sais plus si tu l'as lu); puis "Still walking" et "Tel père tel fils" ! "Nobody knows" est magnifique, mais plus dur !

Merci pour ton avis, Esperluette !

Je plussoie Clinchamps : les films de Kore-eda en valent la peine ! Pour ma part, Tel Père, Tel Fils, Notre Petite Sœur et Nobody Knows sont mes préférés

clinchamps a écrit:

Tous ses films sont bien et intéressants à divers titres, mais je te conseille "Notre petite sœur" qui est une bonne approche,surtout si tu aa amé "la papèterie Tsubaki " (je ne sais plus si tu l'as lu);

Je ne l'ai pas encore lu, mais il est sur ma (looongue) liste de livres à découvrir ! Je note vos conseils, à toi et à Juliette.

Sur le rythme et l'ambiance du cinéma japonais (et même de la littérature, pour le peu que j'en ai lu), je crois que cela m'a longtemps un peu rebutée. Bizarrement, je n'ai pas de mal à regarder des films européens lents et pas forcément explicites, mais j'ai toujours eu l'impression que dans le cinéma japonais cela s'accompagnait d'une certaine froideur.
En fait, je crois que mon problème, c'est que je ressens (par exemple dans les quelques Miyazaki que j'ai vus ou avec le Shimazaki que j'ai lu) une énorme mélancolie qui me parle beaucoup trop. Du coup, cela m'attire autant que cela me rebute, parce que cela aggrave ma mélancolie naturelle.

C'est tout à fait bien vu, autant pour la froideur, que pour la mélancolie ! J'ai éprouvé ça aussi quand j'ai commencé à m'intéresser au japon et à sa culture !

La froideur n'est en fait que de surface, et une fréquentation plus approfondie de la littérature ou du cinéma japonais te fera voir qu'en fait derrière cette distanciation les émotions sont bien présentes. Cette aspect se retrouve dans toute la culture japonaise, où la maîtrise de soi et de ses émotions est quasiment dans leurs gènes !
Pour la mélancolie, c'est aussi vrai, le plus souvent il n'y a pas vraiment de fin heureuse, déjà bien quand elle n'est pas carrément sombre ! Je l'avais remarqué dans les Miyazaki, où l'histoire finit toujours ouverte, et plus nostalgique que joyeuse ! Voir Le vent se lève, ou Le voyage de Chihiro en particulier ! Et en même temps il s'en dégage une émotion poignante qu'un happy end banal ne donnerait pas !

clinchamps a écrit:

Pour la mélancolie, c'est aussi vrai, le plus souvent il n'y a pas vraiment de fin heureuse, déjà bien quand elle n'est pas carrément sombre ! Je l'avais remarqué dans les Miyazaki, où l'histoire finit toujours ouverte, et plus nostalgique que joyeuse ! Voir Le vent se lève, ou Le voyage de Chihiro en particulier ! Et en même temps il s'en dégage une émotion poignante qu'un happy end banal ne donnerait pas !

C'est très bien dit