Yukio MISHIMA, l'ambigüité jusqu'à la mort.

est un écrivain japonais, né le 14 janvier 1925, et qui s'est suicidé par seppuku le 25 novembre 1970.



le mien, :

mais celui-correspond bien mieux au livre :


Ce livre ne m'a pas été facile à lire. Je n'ai rien lu de Mishima, et je voulais le découvrir, car il est catalogué comme un grand écrivain contemporain japonais.
Ce n’est pas un roman, car en fait ce n’est ni plus ni moins qu’une autobiographie de l’auteur, de son enfance à son âge adulte, soit 22 ou 23 ans.
Il en ressort quelque chose qui m’a étonnée, car j’ai lu ici et là (je m’intéresse au Japon, Ah oui ! Vous le savez déjà !   ) donc j’avais lu ici et là que Mishima était une figure notoire du Nationalisme japonais dans son aspect le plus radical, allant jusqu’à créer une milice privée en opposition à la constitution pacifiste du Japon imposée par les Américains en 1945.  
Or Mishima avait 20 ans en 1945, il aurait donc dû être mobilisé, or sa faible constitution (et son mensonge concernant une éventuelle tuberculose) l’en ont dispensé, et dans « Confession d’un masque » la guerre n’est qu’un fond sonore, et le Nationalisme semble vraiment très loin de ses préoccupations. Il a donc dû parcourir du chemin pour en arriver à ce qui a fait le tour du monde entier : son suicide théâtral et assez épouvantable.  
Se faire seppuku en 1970, en public et en haraguant la foule au nom du nationalisme et du militarisme, ça marque l’esprit et ne me donnait pas vraiment envie de connaître cet écrivain.

Et je vous épargne les détails !

Pourtant j'ai lu ce livre, mais je n'ai pas pu un seul instant m'enlever cette fin affreuse de l'esprit, et, si sans conteste ma vision du roman en a été biaisée, le fait est que l'auteur lui-même dès les débuts, alors qu'il est censé raconter les souvenirs de son enfance, ne rêve que mort, et suicide, puis au fil des années, aura besoin de visions de sang et de martyrs (il adore Saint Sébastien, allant jusqu'à se faire photographier en posture du saint martyr) pour éprouver désir sexuel et jouissance.

Sa fascination morbide pour la mort paraît jusque dans sa description de la mer  sous l'orage :

Citation :

Comme elle (la houle) approchait de la grève, quelque chose s'éveilla et s'éleva sous son capuchon vert. La vague grandit aussi haut que l'œil pouvait atteindre, révéla la lame, affilée comme un rasoir, de l'énorme hache de l'océan, levée, et prête à frapper. Soudain la guillotine bleue sombre s'abattit, projetant une éclaboussure de sang blanc.

Si le talent littéraire est évident, la fêlure du psychisme l'est tout autant !
En outre, s'il sait bien qu'il n'éprouve aucun désir pour les femmes, il se persuade que cette anomalie(c’est son propre terme) n'est que physique, que l'amour ne peut être que pour une femme, allant jusqu'à se figurer qu'il aime Sonoko, et cette dichotomie entre le corps et le cœur, ou l’âme, crée une sensation de déséquilibre permanent.  
Le livre est donc en fait le chemin de douleur et de profond mépris de soi qui va conduire Mishima a se  comprendre. Il ne s’est cependant pas vraiment accepté, il s’est quand même marié et a eu même deux enfants (mon Dieu ! Les pauvres quel poids à porter !     ) mais il ne faut pas oublier que l’homosexualité est très mal acceptée au Japon, certains auteurs niant celle de Mishima qui, pourtant, est criante quand on lit « confession d’un masque ». D’ailleurs sa biographie de Henry Scott-Stokes, ouvrage de référence, accorde à cet aspect une attention soutenue.
Je ne peux pas dire que ce livre ne m'a pas intéressée, au contraire, mais je crois que mon expérience de Mishima va s'arrêter là.

Un extrait de nippon.com (décembre 2017)en conclusion assez ironique je trouve.

Citation :

Les revendications qui constituaient les raisons ostensibles du suicide spectaculaire de Mishima – reconnaissance juridique de l’armée japonaise et réforme de la « Constitution pacifique » imposée par les États-Unis – sont aujourd’hui inscrites au programme politique d’Abe Shinzô et de son Parti libéral-démocrate, qui vient de remporter une victoire électorale écrasante. Par une sinistre ironie du sort, la boucle s’est en vérité bouclée il y a trois ans avec le suicide par le feu d’un contestataire, hostile précisément à la réforme constitutionnelle que réclamait Mishima.

Passionnant Clinchamps ! Paradoxalement, tu me donnes envie de lire ce livre et de découvrir cet auteur.

Je trouve ça d'ailleurs assez fascinant (ou effrayant) de lire que Mishima est encore une grande figure littéraire au Japon... En France, je vois mal un amour assumé et ouvert pour un auteur nationaliste. Le Japon est décidément un peuple bourré de contradictions, quand on voit l'adulation qu'il peut y avoir pour Miyazaki, qui est tout le contraire, antimilitariste, avec un amour (mélancolique certes) pour la vie comme elle vient. Enfin, il est vrai aussi qu'on ne peut qu'être interpellé par le personnage de Mishima, et sa mort épouvantable.

Un jour où je me sentirai prodigieusement gaie, je me lancerai dans la lecture de Mishima !

Très intéressant ton post Clinchamps! Merci pour ton avis sur Confessions d'un masque!  Un livre à ne pas lire en cas de dépression/moment de doute, si j'ai bien compris! Ce livre m'a toujours intéressée, mais je n'ai jamais osé m'y frotter, il me paraissait "malsain" d'une certaine manière.

Annwvyn a écrit:

En France, je vois mal un amour assumé et ouvert pour un auteur nationaliste.

Intéressante cette réflexion! Tu n'as pas tort. Il faut dire que le Japon est resté quelques temps isolé du reste du monde, ce qui n'est pas le cas de la France. Et en France on commence à vivre dans une bien-pensance effrayante.

Merci de votre retou, Cléo et Annwvyn ! On ne peut pas dire que ce soit triste, comme lecture, mais dérangeant, et pas mal malsain, comme tu le pressentais, Cléopatre. Cependant la sincérité et l'hônnêteté sans fard de cette confession sont assez fascinantes !
mais on ne peut pas aimer le Japon et ignorer Mishima, c'est tout le paradoxe de ce pays !!

Merci clinchamps d'avoir présenté Mishima, qui est quand même malgré ses idées politiques un très grand écrivain, même traduit en français.

J'ai découvert Mishima au lycée, et j'ai eu ma grande période Mishima vers 16 ans ; son intransigeance, sa soif d'absolu, sa désespérance allaient bien avec cette époque de ma vie, je pense.
J'ai lu de lui :
Le pavillon d'or
et la tétralogie :
Neige de printemps
Chevaux échappés
Le temple de l'aube
L'ange en décomposition

J'en garde le souvenir d'une écriture très poétique, et assez morbide aussi, il faut le dire.
Comme l'explique clinchamps, le fait de devoir refouler son homosexualité l'a certainement rendu malheureux et sombre.

Je ne sais pas si ce que je penserais de ses livres 40 ans après, il me semble quand même qu'il a d'indéniables qualités littéraires.

Petit Faucon a écrit:

J'en garde le souvenir d'une écriture très poétique, et assez morbide aussi, il faut le dire.
Comme l'explique clinchamps, le fait de devoir refouler son homosexualité l'a certainement rendu malheureux et sombre.

Je ne sais pas si ce que je penserais de ses livres 40 ans après, il me semble quand même qu'il a d'indéniables qualités littéraires.

Les qualités littéraires sont indéniables, son style précis, presque chirurgical et en même temps empli d'une poésie souvent mortuaire mais poésie quand même ! Même si son refoulement acharné l'a sûrement traumatisé, il avait quand même des idées de mort, de suicide et de sang à l'âge de la maternelle, si j'en crois "confession d'un masque" ce qui est quand même un symptôme sérieusement aggravant, je crois ! Vu ce qu'il raconte de ses fantasmes il aurait tout aussi bien devenir tueur en série !

Je me souviens de sa fascination et de son obsession pour la beauté physique des hommes, et la beauté en général (qui est aussi une obsession japonaise, que j'aime beaucoup).
Dans la tétralogie, le personnage est amoureux ou obsédé par le corps d'un homme qui a 3 grains de beauté noirs sur la poitrine, et ce personnage se réincarne, ou se retrouve des générations plus tard ; je m'en souviens, ça m'avait marquée .
Et en effet, il aurait fait un excellent serial killer

Merci pour cette belle présentation Clinchamps !

Je suis totalement inculte en littérature asiatique, mais j'ai noté depuis longtemps le nom de Mishima dans un coin de ma tête. Il me semble avoir lu une ou deux de ses nouvelles, il y a des années, dans la revue Muze. Je n'en ai aucun souvenir, mais elles m'avaient interpellée, tout comme la notice biographique. Un personnage si excessif intrigue !

Je viens de découvrir qu'un Mishima inédit est sorti en janvier
Le pitch me parle bien, je me suis procuré le ebook du coup.

Tu me diras ce que tu en auras pensé... je suis assez réticente après "confession d'un masque"...

clinchamps a écrit:

Tu me diras ce que tu en auras pensé... je suis assez réticente après "confession d'un masque"...

Oui, pas de souci Je comprends ta réticence

Surtout en ce moment, j'ai plus besoin de lire Little women que Mishima !!