Eugénie Grandet

J'ai été absolument enchantée de ma redécouverte de Balzac, que j'avais honteusement abandonné depuis plusieurs années, avec Eugénie Grandet que je voulais lire depuis longtemps. J'y ai retrouvé avec grand plaisir son style si beau et si romantique ainsi que ses personnages. Le Père Grandet est à mettre dans les premiers rangs des avares de la littérature, plus redoutable encore qu'Harpagon parce qu'il est extrêmement intelligent et calculateur. Au début, son obsession d'accumuler de l'argent m'a fait rire, parce qu'il ne respire que pour ça. J'ai beaucoup ri pendant ses dialogues entrecoupés de bégaiements très bien rendus avec Messieurs Cruchot et de Grassins. Mais il arrive un moment où il devient détestable parce son avarice va causer le malheur de sa famille, et en premier lieu de sa fille. J'ai eu beaucoup de sympathie pour Eugénie. Soumise et naïve au début, elle découvre la vie et mène une existence de sacrifice à partir du moment où elle rencontre Charles. J'ai aimé sa détermination à aller jusqu'au bout de ses projets, quitte à s'opposer à la tyrannie de son père. Nanon, la domestique, m'a énormément plu. Elle est attachante et drôle.

La vie de province est très bien décrite, avec ses petites villes où tout se sait et les calcul habiles de ses habitants. Les thèmes prédominants de l'argent et du mariage m'ont rappelés les romans de Jane Austen. J'ai été frappée par le souci d'ascension sociale des personnages et le peu de cas fait aux sentiments. Tout n'est qu'hypocrisie dans la société saumuroise du roman, et si on rit facilement des manigances matrimoniales autour d'Eugénie, je n'ai pas pu m'empêcher d'être horrifiée par ces mœurs d'un autre temps, où l'argent était censé constituer l'ingrédient indispensable au bonheur (mais n'est-ce pas encore beaucoup le cas aujourd'hui ? Comme quoi rien n'a changé depuis les années 1820). Dans le cas d'Eugénie, il aurait mieux fallu pour elle que son père fût un simple paysan.

Bref, j'ai passé un excellent moment et je me réjouis déjà beaucoup du prochain Balzac que je lirai  [/quote]

Je suis ravie que tu te sois réconciliée avec Balzac de cette façon Tatiana. Tu as raison, les thèmes sont encore très actuels, avec cette recherche de l'argent à tout prix du père Grandet (et peut-être du cousin en fin de compte, je ne me souviens pas vraiment ). Allez, je le relis cette année.

Je ne connais pas trop les scènes de la vie de province, mais j'espère que tu vas vite continuer ton exploration de Balzac.

Chouette, tu as aimé, Tatiana! Je plussoie pour l'actualité des thèmes. Ainsi que pour la parenté avec JA. Décidément, les grands écrivains savent créer des personnages dans lesquels on peut souvent reconnaître ses voisins ou connaissances.

Merci pour ton avis Tatiana, je partage aussi ton ressenti. J'aime beaucoup le personnage du Père Grandet (pas le bonhomme, il est horrible, mais ce qu'en fait Balzac est tout à fait remarquable) et la description de la vie rurale. Les stratégies de mariage autour de l'"héritière" sont aussi très prenantes. Il y a un topic dans lequel on a comparé Jane Austen et Balzac enterré quelque part au fond du forum (Le réalisme chez Jane Austen je crois).
Il y a aussi des similitudes avec Trollope, le cas d'Eugénie Grandet n'est pas sans rappeler celui de Miss Mackenzie ou de Marie Melmotte (qui s'en sortent comparativement mieux )

Ravie que Eugénie Grandet t'ait donné envie de poursuivre ton exploration Balzacienne . Mes lectures datent un peu pour pouvoir te conseiller un autre roman (si tu as besoin de conseil). J'avais beaucoup aimé La Rabouilleuse.
Et tu me donnes envie de m'y remettre, c'est l'un de mes auteurs préférés (injustement abandonné).

En fait je n'étais pas tout à fait brouillée avec Honoré parce qu'après ma déconvenue avec Le colonel Chabert, sur lequel j'ai beaucoup peiné au collège à faire cet exercice pas très sympa qu'on appelle une fiche de lecture, j'ai découvert La femme de trente ans. Suite à ce coup de cœur, je me suis dit que finalement Balzac était tout à fait abordable et je me suis décidée à poursuivre mon exploration. Je pense qu'au collège je n'étais pas assez mûre pour apprécier ses romans.

Ravie de t'avoir donné envie de relire Eugénie Grandet, Misshoneychurch

Et j'espère qu'esperluette passera par là pour constater que M. Balzac a son club de supporters lambtoniens

Je viens ajouter ma modeste pierre à la chambre Balzacienne !

Bien qu'aimant la littérature française du XIXe siècle, je n'avais jamais lu de roman de Balzac . Enfin, si peu...j'avais lu, vers 11/12 ans, une version "jeunesse" d'Eugénie Grandet. Qui sans me déplaire vraiment ne m'avait pas non plus emballé plus que ça.
Balzac me faisait peur: la réputation des ses descrpitions interminables n'est plus à faire.

Et puis, il y a quelques jours, j'ai eu envie de donner une chance à cet ogre littéraire ! Et c'est avec Eugénie Grandet que j'ai eu envie de le faire.

Hop, ni une ni deux, je le télécharge sur ma liseuse (vive les libres de droits). Malheureusement la version que j'ai a un peu desservi ma lecture, car il n'y avait aucun chapitre (et j'ai horreur de ça !)

Bref...nonobstant cet inconvénient, me voici partie pour Saumur et son microcosme petit bourgeois, que Balzar raille avec une ironie plaisante mais à laquelle je ne m'attendais pas ! La lutte intestine pour la main d'Eugénie - l'une des seules à ignorer la formidable fortune de son père - est à la fois savoureuse et odieuse !

J'ai beaucoup aimé cette lecture, le style de Balzac est vraiment puissant, et les descriptions, loin de m'assommer, m'ont plu...à part les interminables digressions économiques auxquelles je n'ai rien compris, et que, je l'avoue, j'ai survolé.

Mais ça ne m'a pas empêché d'apprécier ma lecture, d'une part parce que chaque personnage est intéressant, et en particulier l'héroïne, Eugénie, qu'on plaint au départ - avec un peu de commissération, elle est tellement "oie blanche"-, puis qu'on admire dans la pureté de son amour, et dans sa soudaine révolte qui la transforme en femme et qui lui fait tenir tête à son odieux père, que l'on plaint dans cette attente vaine du retour de Charles, et que l'on pleure au final devant sa transformation, elle qui devient plus dure et aigrie, plus Grandet au fond...

Ce roman n'est pas gai, mais il n'est pas non plus sinistre. IL parle de la bassesse, de la médiocrité, de l'avarice, mais aussi de la perte des illusions face à la réalité de la vie.

Bref un roman que j'ai dévoré et beaucoup aimé.

Je te remercie de ton long compte-rendu, papotea !
Eugénie Grandet est le type de livre qu'il ne faut pas lire trop jeune, je pense qu'on en profite mieux à l'âge adulte .
Moi je l'ai lu au lycée, mais j'en ai gardé un bon souvenir, surtout de la noirceur des caractères.

Je me borne à acquiescer en tous points au post de PetitFaucon, je l'ai lu à la fin du lycée ou un peu plus tard et je l'avais beaucoup apprécié. Merci pour ton avis détaillé, Papotea

Papotea, je suis contente que tu ai aimé Eugénie Grandet, c'est un de mes Balzac préféré J'espère que cela te donnera envie d'en lire d'autres.

Disons que ça a fait disparaître mon appréhension vis à vis de Balzac. Et je pense que j'en relirai avec plaisir (reste à savoir lequel..)

papotea a écrit:

Disons que ça a fait disparaître mon appréhension vis à vis de Balzac. Et je pense que j'en relirai avec plaisir (reste à savoir lequel..)

Le Père Goriot est très abordable, je l'ai adoré, si je peux t'en conseiller un

Je plussoie totalement les posts précédents ! J'ai lu ce roman il y a 2 ans, et j'avais beaucoup aimé ma lecture
Merci pour ton avis Papotea !

Comme Marganne, je te conseille fortement Le Père Goriot, très émouvant et sans conteste mon Balzac préféré

Je remonte ce topic pour venir grossir les rangs de celles qui ont aimé Eugénie Grandet. Je ne peux que remercier les lambtoniennes qui en ont parlé et qui m'ont donné envie de tenter la lecture d'un roman qui était jusqu'alors synonyme d'ennui à mes yeux tant les retours que j'avais pu en avoir étaient catastrophiques  

Comme vous j'ai apprécié la plume de Balzac et ses coups de griffes tant pour la bourgeoisie "de province" que pour ce milieu parisien si condescendant (la fin contient aussi une critique assez implicite de la traite des esclaves). Contrairement à Papotea, je n'ai pas trouvé Eugénie aigrie à la fin du roman, et dans le contexte de l'époque il était difficile de lui imaginer un autre destin, je regrette qu'elle n'envisage pas d'autre destin que la mort physique ou sociale. Ce Charles qu'elle a mis sur un pied d'estal et à qui elle sacrifie son bonheur, n'est en réalité qu'un homme superficiel (un homme totalement de son époque et de son milieu) et aujourd'hui, elle en aurait fait son deuil. Mais Saumur au XIXè siècle n'a rien à voir avec la société contemporaine et au moins Eugénie contribue-t-elle à adoucir le malheur de ses contemporains grâce à sa fortune. Cette fin montre aussi comme l'on reste parfois prisonnier de son éducation et de son milieu (elle ne songe même pas à remettre en cause les habitudes basées sur la radinerie de son père pour s'accorder un peu plus de confort, un confort qu'elle avait bien témoigné à son cher Charles ).

Je rejoins un commentaire de MissAcacia, dommage que ce roman figure au programme des collèges/lycées car sa lecture requiert une certaine maturité et l'imposer en lecture obligatoire ne peut que dégoûter des générations de lecteurs de toute l'oeuvre de Balzac

serendipity a écrit:

Je rejoins un commentaire de MissAcacia, dommage que ce roman figure au programme des collèges/lycées car sa lecture requiert une certaine maturité et l'imposer en lecture obligatoire ne peut que dégoûter des générations de lecteurs de toute l'oeuvre de Balzac

Pour ma part je m'en suis dégoûtée toute seule car si j'ai lu ce livre vers mes 12 ans, personne ne me l'avait imposé. Je pense que c'est l'époque où je commençais à lire des classiques au pif, et comme Le Père Goriot m'avait plu, je me suis imprudemment lancée dans Eugénie Grandet. Quelle erreur...

Ton avis (et les précédents) me confortent dans l'idée de lui redonner sa chance un jour. Je n'ai aucun souvenir de l'histoire, juste le souvenir d'une interminable description de Saumur et de la maison d'Eugénie en ouverture (mais je me trompe peut-être ?).

esperluette a écrit:

Je n'ai aucun souvenir de l'histoire, juste le souvenir d'une interminable description de Saumur et de la maison d'Eugénie en ouverture (mais je me trompe peut-être ?).

Je pense que le jour où tu décideras à lui donner sa chance, tu ne trouveras pas la description interminable. Franchement, j'ai trouvé que Balzac nous peignait la toile de fond de cette histoire sans en faire trop et en nous mettant assez vite dans le bain. Je pensais aussi à tort que ce roman était un pavé du genre Les Chouans ou Le lys dans la vallée, mais mon édition Folio comporte à peine plus de 200 pages Mais bon, je pense qu'il vaut mieux lire ce roman quand on a le moral et que l'on n'a pas peur de se coltiner l'humanité pas toujours reluisante. Difficile de trouver une lueur d'espoir dans ce roman ...cela me rappelle les échanges avec Vavyala sur La Cousine Bette ou avec d'autres membres sur La Terre de Zola... on peut trouver cela trop sec ou on peut décider de le lire en suivant Balzac dans l'ironie que lui inspirent ses personnages, j'ai opté pour la seconde position 

Merci serendipity pour ton commentaire sur Eugénie Grandet !
Je me réjouis que tu aies apprécié ta lecture , et en effet mes souvenirs de seconde me montrent un livre relativement mince, rien à voir avec Les Misérables .
C'est chouette que plusieurs d'entre vous redécouvrent des classiques !

Ravie de te voir enthousiaste au sujet de ce roman, Serendipity !
Je te rejoins sur les personnages de Charles et Eugénie
Et totalement d'accord sur le fait que ce roman peut être difficile à appréhender pour des collégiens / lycéens !

Ravie aussi que le charme ait opéré serendipity, merci pour tes impressions .
Je pense également que ce livre souffre de sa réputation de "passage obligé" au collège, une de ces lectures imposées difficilement digérées par des adolescents. Si je l'avais lu pendant cette période je me serais certainement ennuyée face à cette chronique provinciale, beaucoup plus parlante à un lecteur adulte.

(Le Lys dans la vallée ne me tente vraiment pas du tout, ennuyeux étant le qualificatif le plus fréquemment entendu autour de moi ).

serendipity a écrit:

Mais bon, je pense qu'il vaut mieux lire ce roman quand on a le moral et que l'on n'a pas peur de se coltiner l'humanité pas toujours reluisante. Difficile de trouver une lueur d'espoir dans ce roman ...cela me rappelle les échanges avec Vavyala sur La Cousine Bette ou avec d'autres membres sur La Terre de Zola... on peut trouver cela trop sec ou on peut décider de le lire en suivant Balzac dans l'ironie que lui inspirent ses personnages, j'ai opté pour la seconde position 

Je n'ai rien contre les romans assez noirs ou cyniques, mais c'est sûr qu'il vaut mieux ne pas être trop déprimé pour s'y plonger.

Tatiana a écrit:

(Le Lys dans la vallée ne me tente vraiment pas du tout, ennuyeux étant le qualificatif le plus fréquemment entendu autour de moi ).

C'est le seul Balzac qui reste dans ma PAL pour le moment, mais effectivement sa mauvaise réputation fait que je ne me suis pas encore jetée dessus.

Contente que tu aies aimé Serendipity, je l'ai lu il y a longtemps mais je me souviens avoir plutôt apprécié ma lecture

esperluette a écrit:

Tatiana a écrit:

(Le Lys dans la vallée ne me tente vraiment pas du tout, ennuyeux étant le qualificatif le plus fréquemment entendu autour de moi ).

C'est le seul Balzac qui reste dans ma PAL pour le moment, mais effectivement sa mauvaise réputation fait que je ne me suis pas encore jetée dessus.

Ma mémoire est totalement inexistante (c'est grave ) mais je l'ai lu et j'avais bien aimé !
Je ne saurais le défendre plus vu que je ne m'en souviens pas, mais en tout cas je l'avais lu sans ennui il y a quelques années

Merci pour ce retour plus encourageant Ju !

Une nouvelle adaptation réalisée par Marc Dugain sortira sur les écrans français en septembre .

La bande annonce:

Dans la distribution, Joséphine Japy, Olivier Gourmet, Valérie Bonneton, César Domboy (Outlander ), Bruno Raffaelli...

Nouvelle intéressante !! merci !

Merci pour la bande-annonce, Tatiana

Tatiana a écrit:

César Domboy (Outlander )

Je l'ai tout de suite repéré et je suis ravie de le revoir dans un film !