Quel bonheur de replonger dans une œuvre dédiée aux sœurs Brontë !
Et ce, d’autant plus que Paulina Spucches a choisi de nous présenter la vie de cette fratrie à travers les yeux de la plus jeune, la discrète Anne Brontë, si souvent sous-estimée mais ô combien talentueuse.
Depuis mon adolescence, je voue une passion aux sœurs Brontë ; j’ai tout d’abord lu avec ferveur
Jane Eyre de Charlotte (pour lequel j’ai développé une sérieuse obsession et qui est resté mon second roman favori de tous les temps
), puis ai tremblé en parcourant les pages des
Hauts de Hurlevent d’Emily, avant d’être passionnément transportée par la douceur de
Agnès Grey d’Anne. Par la suite, j’ai dévoré les autres œuvres de Charlotte et Anne, qui m’ont fascinée, sans exception. A mes yeux, Anne Brontë se démarque par l’éclectisme de ses œuvres, dépeignant le quotidien tranquille d’Agnès Grey aussi bien que la cruauté et la violence d’Arthur Huntington dans
La Châtelaine de Wildfell Hall, tout en dénonçant les maux de la société de son époque.
Brontëana a réussi le pari de raconter avec une extrême fidélité, bien que parfois romancé, les grands évènements de l’existence de la fratrie Brontë : une enfance marquée par une imagination féconde, la création d’univers fantastiques (les Royaumes d’Angria, Glass Town, Gondal) mais aussi le deuil et le chagrin ; l’arrivée de la maturité, source de questionnements et d’angoisses pour Anne, en tant que femme non mariée, mais déterminée à mener sa vie comme elle se l’imagine ; puis, le rêve exaucé…la publication de « Jane Eyre », « Les Hauts de Hurlevent » et « Agnès Grey » sous les noms respectifs de Currer, Ellis et Acton Bell. Et, pour Anne, l’envie intacte, malgré les obstacles, les critiques acerbes de la presse et les problèmes de santé, d’écrire une histoire de liberté, celle d’une femme mariée, Helen Graham, qui, en dépit des conventions, fuit le domicile conjugal pour protéger son fils du caractère abominable de son époux et finit par trouver un bonheur mérité !
Enfin, les dernières pages de la bande-dessinée, d’une grande pudeur, nous livrent les ultimes secrets d’Emily, d’Anne puis de Charlotte, toutes trois disparues précocement…
J’ai été particulièrement séduite par Emily, au tempérament si volcanique, ainsi que par Anne et dont la complicité est ici mise en valeur tout au long des pages. Le portrait de Charlotte est complémentaire à celui de Laura El Makki dans
Les Sœurs Brontë : la force d’exister, bien que nuancé dans ses rapports avec Anne. Branwell apparait comme un enfant gâté, peu attaché à Anne et très proche de Charlotte. Les dessins sont incroyables, esquissant la famille Brontë avec précision, tout en nous révélant les décors sauvages du Yorkshire et ses landes à perte de vue
.
Une bande-dessinée de qualité, que je ne peux que conseiller à tous les amoureux des sœurs Brontë, de la littérature anglaise en général, ou tout simplement à tout admirateur de dessins délicats et lumineux !