Gisèle Halimi, Le lait de l'oranger et autres oeuvres

Décrite comme l'une des avocates féministes les plus importantes du XXème siècle, Gisèle Halimi est aussi une militante engagée contre toutes les injustices. Elle est la seule avocate signataire du manifeste des 343 de 1971, réunissant des femmes qui déclarent avoir déjà avorté et réclament le libre accès à l'avortement, alors réprimé en France.
Elle fonde la même année le mouvement "Choisir la cause des femmes", aux côtés notamment de Simone de Beauvoir et Jean Rostand.

Elle est née Zeiza Gisèle Élise Taïeb, le  27 juillet 1927 à La Goulette, en Tunisie, dans une famille modeste juive, conservatrice, qui devient une source d'inspiration dans ses écrits, mais dont elle va néanmoins s'affranchir ainsi que de la religion. Dans ses livres, elle évoque souvent son enfance, le poids de la religion et des traditions, son itinéraire de révoltée, ses engagements, ceux auprès de femmes, depuis les militantes algériennes du FLN dans les années 50, jusqu'au procès les plus retentissants de l'histoire du féminisme en France.
Pour aller plus loin, je vous mets le résumé et le lien vers France Culture qui lui a consacré plusieurs émissions

Spoiler:

....et Wikipédia

Je suis tombée sur son livre Le lait de l'oranger, lors de sa sortie fin des années 80 et j'ai été séduite par son humour et son style.   Je me retrouvais aussi dans beaucoup de situations qu'elle décrivait.  

Citation :

Le lait de l'oranger
Collection Blanche, Gallimard
Parution : 04-10-1988
Une enfant de huit ans qui engage le combat contre l'institutrice qui la traite de «sale Juive» ou de «sale bicote». Une écolière qui ne se soumet pas au culte rendu à Pétain dans les écoles, du temps de Vichy. Une adolescente qui se révolte contre le Dieu des Juifs, parce
qu'il n'accorde pas leur place aux femmes. Une jeune avocate qui refuse de prêter le serment traditionnel, parce qu'elle le juge trop servile... Parcours d'une rebelle, qui permet de retrouver les moments forts d'une vie marquée par des combats difficiles, voire dangereux.
Défense des militants du F.L.N. pendant la guerre d'Algérie, ce qui lui vaut d'être arrêtée par les militaires putschistes. Procès de Bobigny sur l'avortement, cause des femmes, Gisèle Halimi ébauche ici une nouvelle réflexion sur le féminisme, née de la tendresse et des contradictions d'«une jeune mère indigne» à l'épreuve d'«un couple impossible».
Bien des hommes et des femmes célèbres traversent cette histoire passionnée. Coty, de Gaulle, Giscard, Mitterrand, Chirac, Simone Veil, Bourguiba ou encore
Camus, Sartre, Simone de Beauvoir... Peints souvent avec amitié, quoique toujours sans complaisance et parfois d'une plume acérée.
Mais, sans doute, pour cette actrice et témoin privilégiée de quelques événements importants de notre époque, le vrai grand homme a-t-il été Édouard, cette figure paternelle à laquelle elle revient toujours, par-delà la vie et la mort, et qu'elle appelle «le magicien».

J'ai aussi lu Fritna, où elle parle de sa relation difficile avec sa mère.

Citation :

Fritna, Paris, Plon, 1999

« Ma mère ne m'aimait pas. Ne m'avait jamais aimée, me disais-je certains jours. Elle, dont je guettais le sourire -rare- et toujours adressé aux autres, la lumière noire de ses yeux de juive espagnole, elle dont j'admirais le maintien altier, la beauté immortalisée dans une photo accrochée au mur où dans des habits de bédouine, ses cheveux sombres glissant jusqu'aux reins, d'immenses anneaux aux oreilles (...), elle, ma mère dont je frôlais les mains, le visage pour qu'elle me touche, m'embrasse enfin, elle, ma mère ne m'aimait pas. »

La Kahina L'histoire d'une femme berbère, rebelle, qui lui ressemble

Citation :

La Kahina Paris, Plon, 2006

" Mon grand-père paternel me racontait souvent, par bribes, l'épopée de la Kahina. Cette femme qui chevauchait à la tête de ses armées, les cheveux couleur de miel lui coulant jusqu'aux reins. Vêtue d'une tunique rouge - enfant, je l'imaginais ainsi -, d'une grande beauté, disent les historiens. [...] Devineresse, cette pasionaria berbère tint en échec, pendant cinq années, les troupes de l'Arabe Hassan. " Ces quelques lignes sont extraites du Lait de l'oranger écrit en 1988, et qui continue mon récit autobiographique initié avec La Cause des femmes. J'ai voulu clore ce cycle par la Kahina. Dans son contexte historique, je l'ai fait vivre, aimer, guerroyer, mourir. Comme mon père Edouard-le magnifique, l'aurait peut-être imaginée. La Kahina était-elle son ancêtre ? Peut-être. L'ai-je aimée en lafaisant revivre. Oui. Passionnément. (Gisèle HALIMI) Au terme d'intenses recherches, Gisèle Halimi redonne vie à cette reine de l'Aurès qui, au VIIe siècle, résista aux troupes du général arabe Hassan. Entre son amour pour Khaled, le neveu de son ennemi et son implacable désir de victoire, elle incarne le destin d'une femme exceptionnelle qui, jusqu'à la mort, commanda aux hommes, des montagnes de l'Aurès aux plaines de l'oued Nini. Gisèle Halimi retrace cette tragédie romanesque avec passion et talent. Elle dont la poétesse et philosophe égyptienne Doria Chafik a écrit : " Héroïne d'un combat donné pour perdu il y a moins d'un demi-siècle, Gisèle Halimi tient de la Kahina berbère. "

Citation :

Avocate irrespectueuse, Paris, Plon, 2002

"En entrant dans le prétoire, j’emporte ma vie avec moi".
Tout, dans la vie de Gisèle Halimi, renvoie à son Afrique du Nord natale, à sa foi en l’égalité de tous les êtres humains entre eux. Cette femme, qui fut une des premières à mettre le mot avocat au féminin, éprouve très tôt une passion innée, violente, pour la justice. C’est la guerre d’Algérie qui lui dicte ses premiers combats. En défendant le FLN, en militant contre la torture, elle met sa vie en danger. La cause des femmes lui doit ses plus grandes conquêtes quand, au cours de procès retentissants, elle exige le droit à l’avortement, la répression du viol.
Ce livre résume trente années de lutte pour la tolérance et la liberté. C’est le témoignage d’une femme en colère qui s’insurge contre des lois injustes et archaïques, et découvre l’irrespect comme une forme de courage et d’héroïsme. Le témoignage d’une femme de cœur".

Il y a des livres que je n'ai pas encore lus, mais que je compte bien découvrir, notamment :
- Ne vous résignez jamais Paris, Plon, 2009
- Histoire d'une passion, Paris, Plon, 2011
ainsi que des articles et autres documentaires,...

Gisèle Halimi nous a quittés le 28 juillet 2020.  

Merci Ysabelle !

Je révère littéralement Gisèle Halimi pour son œuvre politique / féministe, son parcours. D'elle cependant je n'ai lu que Fritna, que j'ai beaucoup aimé. Ta présentation est donc plus que bienvenue !

C'est une Tunisienne et son roman m'a restitué un peu du monde de mon enfance. Son nom fait partie des sons admirables derrière lesquelles je sentais que se trouvait le vrai monde des adultes : dans la bouche de papa revenait régulièrement «Djamila  Boupacha» et alors maman répondait «Gisèle Halimi» puis c'était lui qui reprenait et faisait son apologie.

Ensuite avec le manifeste des «343 sa!opes» comme elles le disaient et l'écrivaient sans fard à l'époque, elle a été le phare de mon initiation au féminisme, j'avais 12 ans. Je voulais devenir comme elle.

Pour bien d'autres choses, je sais que je lui dois beaucoup et j'ai les larmes aux yeux. Encore merci Ysabelle.

Mon fils m'a offert "le lait de l'oranger". je connaissais bien sûr Gisèle Halimi, la femme du combat contre l'avortement et celle qui osa défendre les accusés du FLN pendant la guerre d'Algérie, mais je n'avais rien lu d'elle. Le début du livre a été un choc temporel, je me suis retrouvée dans mon enfance algérienne d'un coup (elle était plus âgée que moi et tunisienne mais le Maghreb reste le Maghreb) Elle était juive et la communauté juive était intimement mêlée aux chrétiens et aux musulmans dans mon enfance, jusqu'à la guerre. J'avais même une voisine qui s'appelait Fortunée, prénom très répandu, comme la mère de Gisèle Halimi...
Passée cette émotion mémorielle, ce fut celle tout aussi mémorielle de la guerre, des attentats, des procès. C'était à Constantine, à l'autre bout de cet immense pays et j'étais une gamine, ce n'était que des échos lointains, les conversations des parents, comme toi, Selenh, mais c'est surtout le procès des "343 salopes" qui m'a fait connaître son nom. Et ensuite je l'ai souvent vue à la télévision, (je la regardais en ce temps-là) et je la trouvais belle, et j'adorais sa voix et sa dition particulières ! Sa parole était forte et claire et compréhensible par tous.
Pour en revenir au livre j'ai moins ressenti la dernière partie parce que le côté "fréquentation des célébrités littéraires et politiques", intéressantes,certes, s'éloignaient trop de mon univers. par contre son amour pour son père jusqu'à la fin m'a beaucoup touchée.
Quelle femme ! Partie d'une enfance à l'éducation séfarade stricte qui ne donnait rien aux femme, elle est arrivée par sa seule force et son intelligence brillante à être une étoile du monde littéraire et judiciaire français, tout en menant la vie d'une femme libre. Je lirais certainement ses livres consacrés aux procès du FLN particulièrement celui de Djamila Boupacha, victime pour finir de ceux pour qui elle s'était battue et qui ont si bien su lui couper les ailes !
Merci d'avoir ouvert une chambre chez nous à cette femme exceptionnelle, Ysabelle !   J'espère que d'autres s'y arrêteront !

Moi aussi je joins mes remerciements, Ysabelle !

De Gisèle Halimi, admirée par ma grand-mère et ma mère, j'ai lu à l'époque de sa sortie Le lait de l'oranger, un peu ancien je ne m'en souviens pas bien.
Ensuite, j'ai luLa Kahina, un roman sur la première reine berbère au temps des Romains, et ça m'avait bien plu. Le livre est romancé car il n'y a quasiment aucune source historique, et il y a une grande énergie dans ce beau portrait de femme guerrière et libre

Je dois reconnaître que je n’ai découvert cette dame qu’à l’occasion de son décès. Je n’ai encore rien lu d’elle, mais elle mérite assurément sa place à l’auberge. Merci Ysabelle.

Merci pour vos commentaires les filles. Je suis très contente que ce topic trouve des adeptes. Gisèle Halimi est une femme exceptionnelle, de la lignée des guerrières modernes qui n'ont pas froid aux yeux et qui font bouger le monde.

Merci Ysa pour l'ouverture de ce topic Je connais bien sûr, les actions de Gisèle Halimi mais je n'ai rien lu d'elle En lisant vos commentaires, je pense qu'il va falloir que j'y remédie

J'ai terminé ma lecture de Lait de l'oranger, très intéressant mais lecture un peu ardue pour mon état du moment (suis claquée et sous antibio ).
Cette femme a eu une vie fascinante, heureusement que de telles personnalités existent !
Je connaissais vaguement quelques étapes (notamment le procès de Bobigny, car j'ai vu une pièce de théâtre sur le sujet) mais pas grand-chose au final donc c'était intéressant.
Et l'amour qu'elle porte à son père tout le long est fort bien écrit

J’espère que ça va vite aller mieux, Ju.

J’ai apprisqu’une bande dessinée sortait sur Gisèle Halimi chez Steinkis. Je pense l’acheter, cet éditeur de qualité me plaît beaucoup.

Ju, je te souhaite un bon rétablissement.
Merci pour ton retour sur ce livre.

misshoneychurch a écrit:

J’ai apprisqu’une bande dessinée sortait sur Gisèle Halimi chez Steinkis. Je pense l’acheter, cet éditeur de qualité me plaît beaucoup.

Je suis intéressée aussi. Merci pour l'information, MissHo Connais-tu la date de sortie?

Bon rétablissement, Ju ! Et merci pour ton retour !

Ysabelle, elle est sortie le 6 octobre.

Merci MissHo, je vais chercher ce weekend

Sitôt dit, sitôt fait! J'ai acheté Une Farouche liberté J'aurai préféré une couverture un peu plus jolie, mais elle est acceptable
Les dessins, en revanche, sont beaux et les textes sont agréables à lire Je reviendrai en parler dès que je l'aurai lu

Super, j'ai hâte de lire ton avis.

misshoneychurch a écrit:

Super, j'ai hâte de lire ton avis.