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Sujet: Re: KUROSAWA Akira Jeu 28 Fév 2013 - 20:10
Kusanagi a écrit:
........mais il faut aussi découvrir ses oeuvres films noirs, qui sont de pures merveilles (et font découvrir une sombre et ô combien fascinante facette du Japon en reconstruction....
Oui, j'arrive ! j'arrive !!! j'espère bien compléter le sujet peu à peu et rien ne t'empêche de présenter ceux que tu connais, que tu as et que tu aimes !!!
Lady A The Lady of Shalott
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Sujet: Re: KUROSAWA Akira Jeu 28 Fév 2013 - 20:29
Citation :
dont la philosophie se rapproche plus de la philosophie japonaise sur la nature
Sans doute parce qu'il est animiste justement ! Je ne m'identifie à personne pour le moment vu que je n'ai pas vu le film et quand je parlais de "russitude" (ce néologisme a plu ! lol) et bien je parlais bel et bien de la culture russe, que je ne connais pas parfaitement mais à laquelle je ne suis pas non plus étrangère, qui me semble assez tournée vers la nature malgré les apparences, si je puis dire. Mais je pourrais donner un avis vraiment tranché sur la question quand j'aurais vu le film .
Kusanagi Scottish Jedi Sensei
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Sujet: Re: KUROSAWA Akira Sam 12 Oct 2013 - 17:07
(bon j'avais fait un tout joli post ce matin, et comme la crétine que je suis, j'ai fermé la mauvaise fenêtre... )(on recommence)
Je ne viens toujours pas vous parler des films noirs de Kurosawa (quoique, il y a un lien ^^) mais comme je suis dans une période samourï+Mifune+Kurosawa, j'ai visionné Yojimbo (le Garde du corps) très récemment.
Et Yojimbo est un film important à plusieurs point de vue: - Il est génial -C'est un film inspiré de la moisson Rouge de Dashiell Hammett (avec aussi une référence à la CLé de verre du même auteur) (vous voyez le rapport avec le film noir? ^^) - il a plus qu'inspiré Pour une poignée de dollars de Sergio Leone avec Clint Eastwood (ya des scènes c'est limite du plagiat, Sergio, là...) mais aussi le Dernier Recours qvec Bruce Willis.... et Sukiyaki Western Django de Miike sous le patronnage de Tarantino - Toshiro Mifune est parfait de graouhitude dedans.
Yojimbo
L'histoire: Japon, XIXe siècle. Un samouraï errant fait étape dans un village terrorisé par deux clans rivaux. En se ralliant successivement à l'un et à l'autre, il va précipiter leur chute et sauver les villageois de leur joug.
Les acteurs: Toshirō Mifune : Sanjuro Kuwabatake Tatsuya Nakadai : Unosuke Yōko Tsukasa : Nui Isuzu Yamada : Orin Daisuke Katô : Inokichi, le frère rondouillet d'Ushitora Seizaburô Kawazu : Seibei Takashi Shimura : Tokuemon Hiroshi Tachikawa : Yoichiro Yosuke Natsuki : le fils de Kohei
Mon avis: J'ai adoré ce film. Bon un Kurosawa en général, c'est difficile que je n'aime pas, il y a une telle maitrise dans la façon de raconter une histoire, dans l'image (les jeux sur le noir est blancs sont terribles.... pas aussi impressionnant que dna sla Nuit du Chasseur, mais Akira se débrouille bien aussi). Yojimbô est la transcription d'un roman noir au jideiki/chambara... et on comprends aussi pourquoi Sergio Leone en a fait un western. Ce film a tout des codes du western. L'arrivé du héros solitaire (il ne manque plus que le cheval), le village qui semble vide, la poussière, le vent, l'impression d'être aux confins du Japon... la période qui est la fin d'une époque (1860 c'est pendant la fin du shogunat...)
Toshiro Mifune est excellent dans le rôle de ce samouraï mainpualteur mais avec un bon fond.... quelle classe, quel jeu! Mais les autres ne sont pas en reste, que ce soit le tavernier boudeur, râleur... dans un des gangs, le frère au pistolet.... dans l'autre gang, la mère, tenancière de bordel (j'ai découvert d'ailleur Isuzu Yamada, qui est aussi la Lady Macbeth de la version de Kurosawa... et j'ai envie de découvrir plus sa filmo. Bon elle m'a aussi fait penser à Nino dans certaines de ses expressions, et ça c'était un peu perturbant XD)
Bref, un film que je vous invite à découvrir (ou redécouvrir ^^)
Kusanagi Scottish Jedi Sensei
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Sujet: Re: KUROSAWA Akira Mer 16 Oct 2013 - 19:55
Après Yojimbô, j'ai aussi visionné Rashômon.... un très grand classique du cinéma) (j'ai aussi visionné la Forteresse Caché, le film qui a inspiré certains passages de Star Wars mais j'y reviendrais après ^^)
Rashômon
L’histoire:
Citation :
Kyoto, au XIe siècle. Sous le portique d'un vieux temple en ruines, Rashômon, trois hommes s'abritent de la pluie. Les guerres et les famines font rage. Pourtant un jeune moine et un vieux bûcheron sont plus terrifiés encore par le procès auquel ils viennent d'assister. Ils sont si troublés qu'ils vont obliger le troisième voyageur à écouter le récit de ce procès : celui d'un célèbre bandit accusé d'avoir violé une jeune femme et tué son mari, un samouraï. Le drame a eu lieu dans la forêt à l'orée de laquelle est situé le portique de Rashômon. L'histoire est simple : Qui a tué le mari ? Le bandit Tajomaru, la femme, un bûcheron qui passait ou le mari lui-même qui se serait suicidé ? Autant d'hypothèses vraisemblables. Mais les dépositions des témoins devant le tribunal apportent à chaque fois une version différente du drame, et la vérité ne percera qu'après de nouvelles révélations surprenantes...
Les acteurs Toshirō Mifune : Tajomaru, le bandit Masayuki Mori : Tashehiro, le samouraï Takashi Shimura : Le bûcheron Machiko Kyō : Masago, la femme Daisuke Kato : Le policier Fumiko Honma : La médium
Ce que j'en dis:
Rashômon est le premier film d'Akira Kurosawa à s'être exporté en Occident. Il a été présenté (sans même que le maitre le sache, d'ailleurs) à la Mostra de Venise en 1951 (où il remporta le Lion d'Or). C'est le film qui fit connaitre réellement le cinéma japonais en occident et plus particulièrement les Jidaiki (même si celui-ci est particulier, de par sa forme et par l'époque choisie... Heian, plutôt que classiquement Edo)
Rashômon est aussi important dans l'histoire du cinéma par sa forme. Sur une histoire finalement basique d'un crime, on explore ici la façon dont la réalité est perçue et à travers l'image (et la musique) on explore l'âme humaine.
Du point de vue de l'image, Rashômon est situé dans trois lieux qui comme les récits, s'imbriquent entre eux. Il y a Rashômon, d'abord, la Porte de Rashô, une des porte monumentale qui servait d'entrée à Kyoto. Ici c'esdt après son incendie, c'est un lieu en ruine, où se réfugient nos 3 premiers narrateurs. Le temps (un orage) va souligner le récit qui nous est fait en ce lieu... Puis le tribunal, un lieu anonyme... comme un théâtre. on y voit juste le mur du fond, et les témoins comme sur une avant-scène... ceux ayant déjà raconté leur histoire étant au fond... un lieu écrasé par la lumière du soleil, comme si en ce lieu de justice, l'âme devait être mise à nue. Puis le lieu du crime, le lieu de l'action. une forêt, avec ses jeux d'ombre et de lumière en travers du feuillage, qui indique l'état de trouble des participants.
La musique et les bruitages soulignent les actions, comme le piano d'un film muet. Il y a de cela d'ailleurs, dans Rashômon, avec ces gros plans sur les expressions, comme il y a aussi un rappel de la gestuelle théâtrale.
Malgré le même récit multiplié, on n'est jamais perdu... on veut savoir, comme l'homme du commun, cynique en passant, qui écoute le récit du moine et du bûcheron.
Rashômon nous parle aussi de la vérité, de la façon de la percevoir, et peut-être aussi, à travers cela du cinéma... chaque spectateur aura sa vision du film qu'il a vu. Existe-t-il vraiment une vérité, tellement écrasante comme cette lumière au tribunal? Doit-on devenir cynique comme l'homme du commun, qui finalement pense que chacun vit pour soi... Kurosawa nous répond en partie dans la scène finale, avec l'arrêt de la pluie et le retour du soleil. Comme Miyazaki, il avait sans doute fois dans l'homme.
Bref, un classique que je vous conseille très fortement ^^
Dans la partie anecdote, le film avait eu un accueil tiède au Japon par les critiques. Après sa victoire à Venise, certains ont dit que c'était parce que c'était exotique pour les Occidentaux, d'autres que le film était occidentalisé, c'est pour cela qu'ils avaient touché le jury (et les spectateurs). C'est d'ailleurs, des critiques dans son propre pays auxquelles Kurosawa fera face toute sa vie... il disait lui-même que les Japonais devraient évoluer et ne pas s'abaisser à penser que leur culture n'est pas exportable. C'est encore souvent un voeu pieux...
Petit Faucon Confiance en soie
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Sujet: Re: KUROSAWA Akira Jeu 17 Oct 2013 - 14:32
Je n'ai pas vu Yojimbô, mais j'ai un excellent souvenir, bien qu'ancien, de Rashômon, qui est effectivement un très beau film, qui donne pas mal à réfléchir, et qui continue à tourner dans la tête bien longtemps après l'avoir vu. Et Toshiro Mifune est un très grand acteur, qui crève l'écran
Merci Kusanagi d'avoir ravivé mes souvenirs
Kusanagi Scottish Jedi Sensei
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Sujet: Re: KUROSAWA Akira Ven 18 Oct 2013 - 22:16
Mais de rien Petit Faucon. Et je plussoie à fond pour Toshiro Mifune
On continue dans mon exploration de Kurosawa, avec un film, qu'en bonne fan de Star Wars, je me devais de regarder depuis longtemps. J'avais déjà vu son remake japonais récent (The Last Princess, avec Abe Hiroshi, Jun Matsumoto et Nagasawa Masami), qui était bon, sans arriver à la cheville de son illustre prédécesseur (le fait est que le lien avec SW aidant, ils ont rajouté des péripéties, comme le grand méchant au casque noir, par exemple....)
Or, si Pour une poignée de dollars est un presque plagiat de Yojimbo, Lucas lui ne s'est effectivement inspiré que de certaines façon de faire de Kurosawa... le fait de raconter et suivre l'histoire de point de vue de deux personnages "mineurs" de l'histoire, qui passent leur temps à se chamailler (ici les deux paysans, Tahei et Matashichi... dans SW R2-D2 et C3-PO ... et certaines de leur péripétie, en particulier au début...) et une certaines inspiration "samourai" soit dans le casque de Vador, soit dans la philosophie sous-tendant les Jedi.
Mais assez de considérations techniques pour le moment, passons à une rapide présentation
La Forteresse cachée (1958)
Résumé:
Citation :
Dans le Japon du xvie siècle, une guerre oppose deux clans rivaux. Deux paysans pauvres, Tahei et Matashichi cherchent à contourner la ligne de front pour retourner chez eux. En chemin, ils découvrent un morceau d'or dans une branche d'arbre et pensent être sur la piste du trésor du clan des Akizuki, vaincu. Ils se mettent en chasse de ce trésor, mais sont surpris par un homme. Cet homme leur dissimule sa véritable identité, car il s'agit du général Rokurota Makabe, l'un des derniers survivants des Akizuki. Lui aussi cherche à aller dans le même territoire que les deux paysans. Mais sa tâche est ardue, en effet, il doit y accompagner la princesse Yuki, l'héritière du clan ainsi que son trésor, pour refonder son clan. Il décide d'utiliser la naïveté et la cupidité des paysans pour l'accompagner et l'aider à transporter l'or, tout en cachant son secret.
Avec: Toshirō Mifune : Général Rokurota Makabe Misa Uehara : Yukihime Minoru Chiaki : Tahei Kamatari Fujiwara : Matashichi Toshiko Iguchi : La fille du fermier acheté par le marchand d'esclave Takashi Shimura : Général Izumi Nagakura Susumu Fujita : Le général Hyoe Tadokoro
Ce que j'en dit: La Forteresse caché n'est pas une oeuvre majeure de Kurosawa. Ce qui n'empêche que c'est un bon film, mais c'est une oeuvre grand public, que le réalisateur a fait pour avoir les coudées franches pour des projets plus personnels. On y retrouve toutefois la rigueur du metteur en scène, au service d'une oeuvre assez drôle et divertissante. On y retrouve aussi son humanité, au travers des deux paysans, mais aussi de la princesse Yuki, seule survivante de son clan, élevée en partie comme un garçon, avec un caractère très intéressant pour une jeune fille, aussi bien à l'époque de l'histoire, mais aussi à l'époque du film ^^ (et je remarque qu'à l'époque Edo, une jeune fille en short, ça ne choque personne au Japon ^^)
Il y a aussi beaucoup d'humour dans ce film, et finalement une assez grande modernité (comme souvent ) dans la façon de raconter une histoire. On comprends qu'il aie pu influencé un jeune réalisateur, voulant faire une oeuvre SF et grand public ^^
Au final, un film fort sympathique, que je vous conseille, fan de Star Wars ou pas ^^ Et pour les plus affamées, une critique un peu plus complète (et analytique ^^) que la mienne ^^
Lady A The Lady of Shalott
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Sujet: Re: KUROSAWA Akira Lun 21 Oct 2013 - 10:29
Parce qu'il me semble que ça na pas été dit, Rashômon (que j'adore !) est une adaptation de la nouvelle du même nom d'Akutagawa Ryûnosuke :)Si vous avez aimé le film, vous aimerez également cette nouvelle je pense !
Kusanagi Scottish Jedi Sensei
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Sujet: Re: KUROSAWA Akira Lun 21 Oct 2013 - 11:03
Non je ne l'ai pas dit, merci de préciser LadyA
Techniquement, c'est mêem une adaptation de 2 nouvelles du recueil Rashômon: - Rashômon pour le lieu - Dans les fourrés pour la trame principale
Mais le livre est sur ma pàl depuis
Lady A The Lady of Shalott
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Sujet: Re: KUROSAWA Akira Lun 21 Oct 2013 - 11:23
Je ne me souviens pas de la nouvelle Dans les fourrés, je ne dois pas l'avoir lue Sinon, il m'avait plutôt semblé (j'ai lu ça il y a quelques années...) que le film montre ce qui est seulement évoqué dans la nouvelle. Ce qui est logique puisque c'est une histoire que l'on rapporte et qu'Akutagawa a pris le parti de toujours maintenir son récit au moment où l'histoire est racontée et non au moment où elle a lieu. Mais je vais lire cette histoire de fourrés quand même
Petit Faucon Confiance en soie
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Sujet: Re: KUROSAWA Akira Lun 6 Jan 2014 - 13:15
Je signale simplement que Arte diffuse ce soir lundi 6/01 à 22h40 RASHOMON
C'est un peu tard, mais je vais essayer de veiller pour le revoir
Kusanagi Scottish Jedi Sensei
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Sujet: Re: KUROSAWA Akira Lun 6 Jan 2014 - 18:46
Merci pour l'info Petit Faucon... l'ayant vu il n'y a pas si longtemps je vais passer mon tour (et puis ce soir c'est Castle....)
Mais je vous le conseille vivement si vous pouvez le voir
ludi33 Fairest of all elves
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Sujet: Re: KUROSAWA Akira Lun 6 Jan 2014 - 19:11
Merci pour l'info Petit faucon , je vais de ce pas programmer mon enregistrement
clinchamps Oshaberi Sensei
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Sujet: Re: KUROSAWA Akira Lun 24 Fév 2014 - 15:56
J'allais faire un Nème double-post sur le topic "cinéma asiatique" je me suis souvenue que Kurosawa avait son propre topic, donc me voilà avec le film vu hier : "Sanjuro" avec Toshiro Mifune.
Wikipedia =
Citation :
Sanjuro (titre original Tsubaki Sanjūrō (椿三十郎?) est un film japonais de chanbara sorti en 1962, tourné en noir blanc par Akira Kurosawa.Toshiro Mifune y interprète une fois encore un rōnin qu'on a pu voir dans un précédent film du réalisateur, Le Garde du corps. Le scénario s'inspire d'un roman de Shūgorō Yamamoto, Jours de Paix, et combine des éléments d'action et d'humour. Synopsis : Neuf jeunes samouraïs décident de s'attaquer à la corruption dans leur clan. Leur candeur et leur naïveté interpelle un samouraï vagabond, expérimenté mais d'une nature terre-à-terre et cynique. Celui-ci va leur éviter une mort certaine en leur offrant son aide.
Leur but est de libérer le chambellan du clan, capturé par leur faute. Pour commencer, le petit groupe délivre la femme et la fille du chambellan, retenues prisonnières dans leur maison. Lorsque la femme du chambellan demande son nom au samouraï errant, celui-ci regarde autour de lui et, apercevant des camélias, répond « Tsubaki Sanjuro », ce qui signifie littéralement camélia et trentenaire ; un pseudonyme qui provoque l'hilarité dans le groupe.
Après diverses péripéties, Sanjuro — qui a sympathisé avec un homme de main des vassaux corrompus (Tatsuya Nakadai) — décide de s'introduire au sein du camp adverse pour découvrir où le chambellan a été emprisonné. Mais la fougue de ses jeunes compagnons va l'obliger à improviser.
C'est un film d'action pure, réglé comme une partie d'échec entre Sanjuro et le vassal corrompu, chacun calculant le coup de l'autre, sauf que les jeunes viennent régulièrement démolir la belle construction. Par moment cela m'a rappelé l'humour de certains westerns américain. C'est un film de sabre, et pourtant la maxime principal du film, prononcée par la femme du chambellan est : "Tu es comme une lame de sabre nue, un bon sabre doit savoir rester au fourreau". Le combat final qui ne dure que quelques secondes est très japonais dans son côté minimaliste et définitif, puis le départ du héros m'a à nouveau rappelé le mythe du cow boy solitaire... Au total c'est un bon film, qui donne à Toshiro Mifune l'occasion de montrer tout son talent dans l'incarnation de ce ronin plus vraiment jeune, cynique et surtout libre... J'ajoute que la copie remasterisée de la belle collection "les introuvables" est d'un très beau noir et blanc.
Kusanagi Scottish Jedi Sensei
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Sujet: Re: KUROSAWA Akira Lun 24 Fév 2014 - 16:18
Merci Clinchamps, c'est vrai je voulais le voir, c'est en quelque sorte la "suite" de Yojimbo ^^ (ou d'ailleurs, le héros prend encore son nom en s'inspirant des plantes qui l'entoure ^^)
clinchamps Oshaberi Sensei
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Sujet: Re: KUROSAWA Akira Mar 25 Fév 2014 - 14:34
Hier j'ai seulement regardé le second disque, les Compléments, pour apprendre que les accessoiristes devaient installer chaque jour 15 000 fleurs de camélia dont certaines peintes en noir pour que cela donne l'image d'un rouge foncé dans le noir et blanc, que parfois la journée se passait en installation et qu'après il était trop tard pour tourner... Ce Kurosawa !!!
clinchamps Oshaberi Sensei
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Sujet: Re: KUROSAWA Akira Lun 10 Mar 2014 - 11:48
J'ai regardé hier avant-hier (et hier les compléments) de la forteresse cachée. Je ne le présente pas, Kusa l'a fait un peu plus haut. J'ai beaucoup aimé le film, où l'on sent à l'évidence l'admiration de Kurosawa pour John Ford. L'influence westernienne est encore plus flagrante que dans Sanjuro. Pour la référence à SW, si on ne me l'avait pas dite, je crois que je n'y aurais pas pensé, mais bon, je n'ai pas un esprit d'observation très pointu !! Les acteurs sont tous excellents, mais je mets un bémol sur la Princesse, dont je trouvais qu'elle jouait comme un pied, ce qui fut confirmé quand j'ai appris dans les Compléments qu'elle n'avait quasiment jamais joué avant et avait plutôt été choisie pour "son élégance et sa beauté". Travailler avec le Maître n'était certainement pas une partie de plaisir, d'après les récits de sa scripte, son accessoiriste et son premier assistant... Dans les compléments, on apprend que quand la pluie (déjà faite par toutes les lances à incendies disponibles dans "les 7 samourais") ne se voyait pas assez, il y mettait de l'encre de Chine !!! Son travail pour filmer en Scope (ce qui est le cas ici) les scènes magnifiques où les acteurs sont à cheval est tout à fait passionnant, et Mifune avait une trouille bleue quand il brandit son sabre debout dans les étriers du cheval au galop, eh bien je peux vous dire que ça ne se voit pas !!! Quel homme c'était !!! Quelle puissance !! et il paraît qu'il était tout à fait charmant sur les plateaux... Et j'ai retrouvé une longue interview de son assistant Takashi Koizumi, qui réalisa par la suite "après la pluie" et du fils de Toshiro Mifune, Shiro Mifune, qui joue également le daimyo du film, alors qu'il y avait 20 ans qu'il n'était plus acteur. Comme je venais de voir "après la pluie" j'ai énormément apprécié ces interviews, la modestie des deux hommes, chacun s'effaçant avec une grande émotion derrière son Maître, ou son père. C'est bien ce que j'avais ressenti : ce film est entièrement dédié aux deux hommes, morts à 10 mois d'intervalle, et indissociables à jamais dans la mémoire cinématographique, Kurosawa et Mifune. Vraiment cette collection, Les Introuvables, est magnifiquement faite, et recèle de vraies perles !! le prochain c'est "l'ange ivre" !!
Kusanagi Scottish Jedi Sensei
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Sujet: Re: KUROSAWA Akira Lun 10 Mar 2014 - 18:13
Moi le jeu de la princesse ne m'a pas choqué (je l'ai presque préféré à la princesse du remake....). Je dois dire que j'ai pris sa façon de joué pour un côté classique dans le jeu japonais de l'époque (très théâtral quand même... surtout dans les chanbara )
Ah l'Ange ivre on change de registre.... et je trouve que Kurosawa est encore meilleur dans le film noir .... (et mon dieuuuuuuuuuuuu, que Mifune est beau )
clinchamps Oshaberi Sensei
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Sujet: Re: KUROSAWA Akira Lun 15 Sep 2014 - 13:45
Aussi bizarre que cela paraisse, je n'avais pas "les sept samourais" dans ma vidéothèque, et sa sortie en version restaurée m'a incitée à corriger cette carence. . Je l'avais vu il y a au moins 40 ans, et j'avais le vague souvenir d'un truc boueux et ennuyeux.... Horreur, enfer et damnation !! Comme on change quand on fait sauter les verrous culturels... Le film dure 3 h 26 et franchement je ne les ai pas vu passer !! Une réalisation et des cadrages magnifiques, des acteurs excellents, de gros moyens (et pas l'ombre d'un effet numérique, bien sûr : 1954, ni de couleurs : il est en noir et blanc !)
Tout le monde connaît l'histoire : des villageois exploités et martyrisés par une troupe de bandits décident d'engager des samourais pour les défendre. Il faut dire que dans le Japon du XVIème siècle les ronins (samourais sans maîtres et plutôt traine-savate que guerriers flamboyants) ne manquaient pas. Le film se compose très nettement de trois parties à peu près équilibrées : la décision et la recherche, la préparation et l'affrontement. Celui-ci n'arrive qu'au bout de plus de deux heures de film et on se demande même s'il aura lieu (les villageois se le demandent aussi !! ) Quelques extraits d'un article des Inrocks, (pour eux le film de Kurosawa ouvre la porte aux films de super-héros, c'est un aspect intéressant ! )qui dit tout à fait ce que je pense :
Citation :
C’est la force du chef-d’œuvre de Kurosawa de résonner encore soixante plus tard dès que l’on veut assembler des héros en bande...... La pérennité du cinéaste, son exportation, assurés dès son vivant, c’était l’art de l’hybridation. Pas seulement entre personnages mais dans les ponts jetés entre le Japon et l’Occident.... Dans Les 7 Samouraïs, Kurosawa veut faire son John Ford, qu’il admire tant. Un western au milieu des paysans nippons et de ronins du XVIe siècle..... Le film n’a rien perdu de sa superbe. Kurosawa ne néglige jamais la construction, ce qui relie les scènes comme les personnages. Et le rythme. Comment expliquer sinon que ces trois heures et plus passent d’une traite, même quand il faut se préparer et attendre les bandits (soit l’essentiel du film) ? Dans un va-et-vient harmonieux, constant, Les 7 Samouraïs module l’humour et la gravité, le souffle et l’intime, l’attente et l’action. Les morceaux de bravoure ont la grandeur épique d’un film de guerre jamais dupe (la bataille finale dans la pluie et la boue(je savais bien qu'il y avait de la boue quelque part... ), la puissance intérieure du théâtre nô lorsqu’il s’agit de faire ruminer les samouraïs en intérieur ou la nuit, éclairés à la flamme. Et d’un détail comme une tonsure, Kurosawa extrait le maximum : Kanbei, le samouraï en chef, se rase la tête (déshonneur) pour sauver un enfant (altruisme), et l’on peut pratiquement voir ses cheveux repousser le long du film (mesure du temps qui passe). Le cinéaste insiste sur l’opposition de classes dans son Japon féodal. Elle lui permet de déconstruire l’héroïsme du samouraï, sa solitude de cow-boy fordien, à travers les yeux des paysans, pour qui ils sont des queutards n’existant que dans la violence(comment les paysans matois cachent leurs femmes, leurs filles et leurs réserves de saké est assez réjouissant ! ). Elle offre un effet mélo – via les amours contrariées entre un samouraï et d'une fille de paysans. Enfin, elle crée un monstre grotesque, moitié samouraï, moitié fils de paysans. Toshirô Mifune prête admirablement ses grimaces et postures d’homme-enfant tragique, qu’on pourrait croire né dans la jungle, à ce “mutant”, pour reprendre le terme de Catherine Cadou, ancienne assistante et traductrice de Kurosawa. Cet été au cinéma, un autre mutant appelé Wolverine s’apprête à visiter le Japon. En 2013, Les 7 Samouraïs continue donc de boucler encore et encore la boucle.
Franchement on est là devant un pur et vrai chef d'œuvre, en ce sens qu'il est éternel : aucune importance que cela se situe dans un pays lointain dans des temps reculés : c'est l'humanité éternelle qui nous est offerte là. Un mot pour une magnifique (et très sobre) OST composée pour la plupart de percussions.
à voir A-BSO-LU-MENT !!
Et maintenant je vais me refaire "les sept mercenaires" ...
Atonement Ready for a strike!
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Sujet: Re: KUROSAWA Akira Dim 20 Mar 2016 - 22:30
Avec la restauration d'un certain nombre de films de Kurosawa, mon cinéma favori à Nantes lui consacre une rétrospective (le Cinématographe, au cas où il y aurait des Nantaises que j'y croiserais peut-être sans le savoir). Je me suis donc fait un week-end kurosawesque et je vais récidiver le week-end prochain.
J'avais déjà vu Ran, Rashomon et Yojimbo (Le Garde du Corps) qui j'avais aimé, en particulier Yojimbo qui est le meilleur Kurosawa que j'aie pu voir jusque maintenant. J'ai vu maintenant Je ne regrette rien de ma jeunesse, Les Bas-Fonds et Qui marche sur la queue du tigre que j'ai également beaucoup aimé, notamment le dernier que j'ai trouvé très drôle (en particulier le personnage du porteur). L'intrigue est pauvre mais on ne s'ennuie pas pendant l'heure que dure le film. J'ai trouvé Les Bas-Fonds très chouette également, même si j'ai décroché à certains moments, notamment vers la fin. Le film m'a fait beaucoup pensé à Affreux, sales et méchants d'Ettore Scola. Pour finir, j'ai aussi vu Les Salauds dorment en paix que j'ai trouvé très réussi. Comme dans Ran, Kurosawa s'approprie très bien l'oeuvre de Shakespeare. Certaines scènes sont vraiment extraordinaires.
Spoiler:
A commencer par la première, celle de ce mariage on ne peut plus étrange et bancal, qui se solde par cette pièce montée...
J'ai prévu d'aller voir d'autres Kurosawa, comme Le Château de l'araignée qui passe aussi. Je ne crois pas que Les sept samouraïs soit diffusé à mon cinéma mais vu sa réputation et la critique que tu en fait, clinchamps, je vais essayer de le trouver pour le voir aussi.
cléopatre Traveler of both time & space
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Sujet: Re: KUROSAWA Akira Lun 18 Avr 2016 - 12:42
Vu l'Ange ivre hier, c'est clairement un coup de coeur!! Le duo Mifune/Shimura fonctionne à merveille! J'ai adoré leur scènes! Et mon dieu, Mifune, quel acteur!!! Quand je pense à son rôle dans les 7 samouraïs.... Et là... Le jour et la nuit, et il est autant génial dans les 2... Il arrive à rendre le rôle fougueux, violent et ombrageux, tout en lui donnant une part de lumière dans sa naiveté... Il m'a fait pensé à un jeune fauve blessé. Non, vraiment, quel acteur! (Et puis qu'est ce qu'il était beau ) Et la mise en scène contient quelques coups de génie : lla scène de combat avec les pots de peinture et juste après quand il ouvre la fenêtre ), le fait d'avoir mis cette mare malsaine qui symbolise tellement de chose (et permet de beaux effets visuels)... Et la musique, j'ai adoré la musique...cet air de guitare qui revient sans cesse... Bref, un film cruel, mais qui détient quand même sa part de lumière! Merci Kurosawa.
clinchamps Oshaberi Sensei
Nombre de messages : 72614 Age : 81 Localisation : Dans les bois du Fushimi Inari-taïsha Date d'inscription : 09/01/2007
Sujet: Re: KUROSAWA Akira Lun 18 Avr 2016 - 14:03
je suis ravie Cléopatre, de voir remonter le topic de KUROSAWA, et surtout que tu aies autant apprécié "l'ange ivre", que j'aime aussi beaucoup ! Oui, Toshiru Mifune était un très très grand acteur (c'était l'idole de ma maman, c'est vous dire !! ) Tu m'as donné envie de le revoir !!
cléopatre Traveler of both time & space
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Sujet: Re: KUROSAWA Akira Dim 29 Mai 2016 - 14:19
J'ai vu Rêves, série de courts qui reprennent des thèmes chers au monsieur, et je dois dire que c'est le Kurosawa que j'ai le moins aimé jusqu'à présent. Déjà, il est assez difficile d'accès (je pense que quelqu'un qui ne s'intéresse pas à la culture japonaise passerait totalement à côté...) Ensuite, je l'ai trouvé trop ouvertement moralisateur. Je ne veux pas dire que je n'aime pas ce côté moralisateur "retenez de nos erreurs, ne refaites pas la bombe, rapporchez vous de la nature" toussa toussa, c'est légitime d'ailleurs.. Je dis juste que j'aurais aimé que se soit plus subtil... Sa très belle mise en scène plus son propos auraient largement suffit à Kurusawa pour faire passer son message, pas besoin d'en plus le remettre dans les dialogues... Tout ceci ajoute une certaine lourdeur à la chose, à mon point de vue. Et le pire, c'est que malgré ça, 2 des courts métrages sont restés abscons pour moi (celui de la tempête de neige, que j'ai détesté, et celui du mariage des renards... Je n'ai absolument pas compris ce qu'il voulait dire avec ces 2 là...) Par contre, comme je le disais avant, niveau mise en scène, voilà, c'est Kurosawa! J'ai beaucoup aimé l'histoire avec les renards! (même si je ne l'ai pas comprise ) Ce passage avec le mariage des renards était magnifique et la musique, et les costumes, et la "choré", et les paysages, et cette scène du début quand on voit à travers la porte la mère du petit qui range ses affaires... J'ai adoré! Adoré aussi celui avec le soldat qui passe dans le tunnel... Il arrive à y intégrer une certaine angoisse qui m'a saisie. Conclusion, même en ayant aimé 2 des "rêves" proposés par Kurosawa, je n'ai que très moyennement aimé ce film.
Petit Faucon Confiance en soie
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Sujet: Re: KUROSAWA Akira Lun 30 Mai 2016 - 9:04
Ah, Rêves ! je l'ai vu en salles à sa sortie, je ne me souviens plus quand ... J'en ai gardé un souvenir inégal car c'est un films composé de plusieurs histoires, mais je me souviens que c'était intensément poétique, même si je n'avais pas tout compris. En résumé, cléopatre, je dirais que même si ce film est un peu raté, il en reste quelque chose de magique.
cléopatre Traveler of both time & space
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Sujet: Re: KUROSAWA Akira Lun 30 Mai 2016 - 13:01
Je suis entièrement d'accord avec toi Petit Faucon! Il en reste quelque chose d'assez magique, ou en tout cas onirique. Il m'a fait de l'effet, à sa manière. Ca reste un film à voir de toute façon! Par contre je ne compte pas le revoir (ou alors juste le court avec le mariage des renards )
clinchamps Oshaberi Sensei
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Sujet: Re: KUROSAWA Akira Jeu 7 Déc 2017 - 13:16
Je viens de découvrir (il était temps, il date des années 60 !) un magnifique chef d’œuvre du maître inégalé KUROSAWA Akira :
« Barberousse ».
C’est le dernier film en noir et blanc (et quel noir et blanc !! ) de Kurosawa avant son passage à la couleur, et aussi sa dernière collaboration avec Toshiro Mifune, qui a duré 16 films ! L’histoire : Aux alentours de 1820 à Edo (aujourd’hui Tokyo), un tout jeune médecin est affecté à un dispensaire de quartier pauvre alors qu’il attendait un poste bien plus prestigieux du fait de ses relations. Il se révolte d’abord contre son patron, un docteur entièrement dévoué à sa tâche surnommé Barberousse, avant de s’intéresser peu à peu à certains cas…
Barberousse fait partie des grands films humanistes d’Akira Kurosawa. Il s’agit d’une œuvre de grande ampleur à laquelle le cinéaste a consacré deux années. L’histoire se déroule sur deux plans, différents évènements plus ou moins difficiles s’enchaînent comme une suite presque de sketch, et l’évolution du personnage par rapport à ces évènements.
Citation :
Citation :
L’idée développée par Kurosawa est de montrer que les maux physiques cachent souvent une tragédie humaine dont la cause profonde est soit la pauvreté, soit la rigidité des codes sociaux. Le docteur Barberousse prouve peu à peu au jeune homme que soigner les maux des autres lui permet aussi de soigner les siens et trouver une paix en lui-même. Kurosawa sait éviter tout misérabilisme et tout sermon, il raconte des histoires qui nous captivent par leur force et qui nous touchent profondément. Barberousse fait partie de ces films qui nous font réfléchir sur notre vision de la vie et nous donnent une sensation d’enrichissement. La mise en scène est parfaite, un grand soin a été porté sur les décors et le format large de l’image est merveilleusement exploité. Barberousse fait partie des plus grands films de Kurosawa.
Acteurs : Toshirô Mifune,Qu’on ne présente plus (1920-1997)
Yûzô Kayama, (né en 1937… et pas du tout désagréable à regarder à l'époque en passant vu dans « Sanjuro » du Kurosawa entre autres)
Tsutomu Yamazaki, (né en 1936, vu dans des dramas, et aussi dans « Departures » et « Tampopo »et « entre le ciel et l’enfer » et « Kagemusha » de Kurosawa.
Reiko Dan, (1935-2003) vue aussi dans « Sanjuro) Miyuki Kuwano (1942…)a joué avec Ozu aussi
Bien sûr ces vieux films ont un générique qui fait penser à un cimetière, mais il est bon de s’en souvenir !
Kurosawa et Mifune ne s’entendirent pas sur le personnage central, Mifune voulait lui donner un côté héroïque prêt à tout et Kurosawa voulait surtout accentuer le côté humain et altruiste de l’homme. Cela a nui à l’équilibre du film, amenant une scène de bataille inutile, mais en dehors de ça c’est un pur chef d’œuvre !
Akira Kurosawa a mis deux ans à tourner son film, et avant de commencer, il a fait jouer la 9è symphonie de Beethoven, disant « ce sera parfait, comme cette musique. » (décor méticuleusement reconstitué, où même les bois utilisés sont ceux qui poussent dans la région. ) Certains lui ont reproché cette trop grande recherche de perfection qui apparaît flagrante dans les merveilleux cadrage, la magnifique organisation des personnages dans les images donnant un sens second intuitif à chaque plan ou presque mais moi, cela m'a enchantée, au sens premier du mot !
Si vous avez le courage de tout lire, la critique suivante est parfaite :
Spoiler:
Critikat Barberousse (Akahige) Japon - 1965 Réalisation : Akira Kurosawa Scénario : Masato Ide, Ryûzô Kikushima, Akira Kurosawa, Hideo Oguni d'après : le recueil de nouvelles Akahige Shinryôtan de : Shûgorô Yamamoto Image : Asakazu Nakai, Takao Saitô Décors : Yoshirô Muraki Montage : Akira Kurosawa, Reiko Kaneko Musique : Masaru Satô Producteur(s) : Ryûzô Kikushima, Tomoyuki Tanaka Interprétation : Toshirô Mifune (Dr Kyôjio Niide dit Barberousse), Yûzô Kayama (Dr Noboru Yasumoto), Tsutomu Yamazaki (Sahachi), Terumi Niki (Otoyo), Reiko Dan (Osugi), Miyuki Kuwano (Onaka), Kyôko Kagawa (la folle), Kinuyo Tanaka (la mère de Noboru), Bokuzen Hidari (un patient), Noriko Honma (une patiente)... Durée : 3h05
Rejouer la vie, par Nicola Brarda Barberousse Akahige réalisé par Akira Kurosawa
Fraîchement sorti d’une prestigieuse école à Nagasaki, où il a appris les secrets de la médecine hollandaise, un jeune apprenti, Noboru Yasumoto, pénètre dans l’enceinte du dispensaire tenu par le docteur Nige. Alors qu’il s’y rend pour une simple visite, sur les conseils de son beau-père médecin du shogun (ce même poste auquel Noboru aspire), le jeune apprenti va se retrouver engagé d’office : le voilà désormais prisonnier dans l’hôpital tenu par le redoutable docteur, que tous surnomment Barberousse. Une affaire de souffle
On le devine, Barberousse, dernier opus né de la collaboration plus que féconde entre Kurosawa et Toshirô Mifune (ici dans le rôle du médecin chef), met en scène la naissance d’une vocation, et par là, un apprentissage qui dépasse les confins de la médecine pour toucher à la vie. C’est ce qu’affirme le docteur Barberousse lui-même, quand il explique à son apprenti que formuler un diagnostic revient moins à repérer des symptômes qu’à percevoir l’histoire d’un homme derrière son «cas». Le film est donc scandé par une suite de récits: la confrontation entre Noboru et une femme assassine, la saga familiale d’un patient terrassé par un cancer, une histoire d’amour tragique racontée par un malade sur son lit de mort, enfin la convalescence physique mais également morale d’une orpheline arrachée aux griffes de sa proxénète.
Il s’agit d’une suite de récits exemplaires en ce qu’ils ont pour objet la condition humaine dans ses différentes facettes fondamentales (amour, famille, deuil, amitié). À vrai dire, le contraire eût étonné : ce qui fait la force de l’œuvre n’est pas le dispositif choisi par Kurosawa, simple au demeurant, mais bel et bien sa capacité à donner vie à une fresque déroutante par la richesse de tons, de situations et de registres qu’elle mobilise.
Il est donc question, derrière la simplicité apparente de son propos, de l’intensité dramatique et de la finesse d’exécution du cinéaste. Et ce tout d’abord dans la façon dont Kurosawa parvient à rendre les nuances multiples de cet hôpital qui n’apparaît au premier abord que comme un espace angoissant et mortifère. Les premiers plans vus par Noboru en présentent ainsi une approche frontale qui rappelle sa fonction d’espace de cloisonnement. Cependant, cette vision est remise en cause par une suite de coupes, des vues de biais qui sont autant de brèches par lesquelles les autres dimensions du lieu peuvent se manifester. Ainsi, alors que le jeune apprenti se laisse guider dans les dédales du dispensaire-prison par son prédécesseur (l’ancien assistant du docteur Nige), celui-ci ouvre un volet derrière lequel on aperçoit les cuisinières en train d’écouter la conversation des deux hommes, comme un témoignage de la vie secrète qui anime l’hôpital. Alternance du regard et de la parole: un cinéma dialogique
Ce principe d’alternance a une influence directe sur la manière propre au réalisateur de tisser image et récit. On le sait, le cinéma de Kurosawa expose fréquemment des hommes en méditation, des hommes qui pensent, des hommes qui discutent. Ce faisant, il démultiplie l’action en conférant la fonction de commentateurs aux personnages eux-mêmes, en même temps qu’il dramatise le geste de la parole comme intervention. Ce double présupposé se retrouve non seulement dans les scènes chorales plus traditionnelles (notamment à travers le rôle des servantes), mais il caractérise les interactions entre la totalité des personnages.
Ainsi, l’une des premières scènes du film nous montre, sous les yeux de Noboru, une discussion entre patients. Le petit échange entre ceux-ci s’accompagne d’une circulation du regard solidaire de l’évolution de la parole: celle-ci capte aussi bien les points de vue des différents acteurs de la conversation que de Noboru, qui en saisit une vision d’ensemble. Or, cette interaction laisse apparaître une disjonction entre le tableau dramatique de la souffrance humaine vu par le jeune apprenti, et la vérité profonde de ce dialogue anodin, qui trouve son incarnation dans le personnage moribond de Sashiro. Ce dernier continue à parler alors que son état de fatigue rend la chose dangereuse, et énonce ce faisant des constats apparemment simples dont Noboru mesurera ultérieurement la profondeur (à partir de la nécessité d’endosser un kimono pour être reconnu comme un médecin par les patients pauvres de l’hôpital). L’apprentissage du jeune médecin est donc lié au fait de comprendre l’importance du lien entre parole, pensée et vie: c’est précisément ce lien qui apparaît pleinement au moment où Sashiro, celui qui doit parler et celui qui risque sa vie en parlant, raconte avant de mourir l’histoire de l’amour tragique qui a marqué son existence. Plasticité et matière: rejouer la vie
L’emprunt au théâtre ne concerne pas uniquement l’importance donnée au dialogue et à la parole : il touche aussi les situations que Kurosawa met en scène. Le dépouillement scénique, l’épure du décor ont pour contrepartie une exacerbation du jeu des acteurs, la transe visuelle et physique. On songe ici à la gestuelle fascinante de la danse qui se joue entre Noboru et la femme assassine, faite de saccades, de reculs soudains, d’enlacements, ou encore aux tics qui font trembler le visage d’une jeune femme au moment où elle raconte la mort de son père. À cet égard, Barberousse est un film plastique, qui s’appuie sur une transformation des corps aussi bien que du décor: l’architecture en écrans coulissants sert ainsi à démultiplier les scènes, à organiser les multiples situations qui rythment la vie de l’hôpital, et à révéler la soudaine profondeur (métaphorique mais aussi purement visuelle) des événements qui y prennent place.
On assiste alors au surgissement des images, depuis le « tableau » d’un cerisier sous la neige jusqu’aux visions terrifiantes des malades dans leurs kimonos à motif, se pressant pour rendre visite à Sashiro sur son lit de mort. C’est cette intelligence de la mise en scène qui donne son intensité à des situations parfois anodines: on songe à la confrontation attendue entre la patronne du bordel et les servantes qui protègent la petite fille, confrontation qui se mue en un instant de jubilation et de violence pure au moment où l’une d’entre elles lui casse une igname sur la tête.
À défaut de pouvoir énumérer toutes les trouvailles qui jalonnent l’œuvre, il nous faut évoquer ici un dernier instant, véritable moment de grâce, où les femmes rappellent l’âme du petit voleur sur son lit de mort en criant dans un puits. Il y a dans cette scène un indice de la visée profonde de Kurosawa : non pas l’imitation du réel, mais le choix de travailler la matière jusqu’à faire jaillir son pouvoir d’hallucination, ce que le son déformé des voix s’engouffrant dans le terre rend palpable.
En somme, la réussite du film réside dans son choix de mise en scène: les multiples emprunts à la tradition, qu’elle soit théâtrale ou picturale, en passant par le registre narratif du conte, garantissent une limite et dans le même temps un cadre à travers lequel mettre au jour la condition des hommes. C’est pourquoi l’on peut dire que Barberousse rejoue la vie : il stylise l’existence pour mieux mettre au jour ses strates essentielles, ses pics d’intensité, et son inépuisable poésie.
Moi, j’ai connu trois heures de bonheur intégral, devant un film qui parlait à mon cœur, à ma tête, à ma mémoire… vraiment à voir absolument, même s’il est difficile de trouver 3 heures pour un film dans notre monde moderne !