Andri Snær Magnason, LoveStar et autres romans

J'ouvre un topic pour le premier roman (pour adultes) de l'auteur islandais Magnason, LoveStar. Ce roman n'est pas dénué de défauts, mais je ne regrette pas ma lecture. J'ai mis du temps à entrer dedans, mais l'écriture est plus qu'abordable, et le livre se lit bien vite... avec une sorte de curiosité malsaine.



Avant de donner mon avis, je me permets de reprendre la présentation des éditions Zulma, chez qui le roman est publié en France depuis 2015. Le roman a gagné le "grand prix de l'imaginaire".

Citation :

« Peu de temps après que les mouches à miel eurent colonisé Chicago, les papillons monarques furent saisis d’un étrange comportement. […] Au lieu d’aller vers le sud rejoindre leurs quartiers d’hiver, ils se dirigèrent vers le nord. » C’est ainsi que s’ouvre le roman, fable imaginative et pourtant étrangement familière, tenant à la fois de Calvino et des Monty Python.

Face à la soudaine déroute de toutes sortes d’espèces volantes, le génial LoveStar, vibrionnant et énigmatique fondateur de l’entreprise du même nom, invente un mode de transmission des données inspiré des ondes des oiseaux, libérant d’un coup l’humanité, pour son plus grand bonheur, de l’universelle emprise de l’électronique. Et développant au passage quelques applications aussi consuméristes que liberticides… Avec des hommes et des femmes ultra connectés payés pour brailler des publicités à des passants ciblés, le système ReGret, qui permet « d’apurer le passé », ou le rembobinage des enfants qui filent un mauvais coton. Autre innovation, et pas des moindres, en faveur du bonheur humain : les âmes sœurs sont désormais identifiées en toute objectivité par simple calcul de leurs ondes respectives.

Quand Indriði et Sigríður, jeunes gens par trop naïfs et sûrs de leur amour, se retrouvent « calculés », ils tombent des nues : leur moitié est ailleurs. Les voilà partis, Roméo et Juliette postmodernes contrariés par la fatalité, pour une série de mésaventures cocasses et pathétiques, jusqu’à ce que leur route croise celle de LoveStar lui-même, en quête de son ultime invention…

Le personnage principal est l'islandais LoveStar (un genre de Steve Jobs, relativement hautain, un intellectuel pur, habité par les idées créatrices). Ce-dernier a identifié les ondes avec lesquelles communiquent les oiseaux. A partir de là, il est devenu l'homme le plus influent du monde, qui ne se repose plus que sur ses créations. Il y a d'abord l'homme connecté sans fil (ce que nous sommes en train de devenir ), puis ReGret (l'application qui permet à chacun à tout instant de vérifier qu'il a fait les bons choix de vie), puis Istar (qui est le département pub/marketing de l'empire LoveStar - ce sont eux qui compilent toutes les données des consommateurs, histoire de savoir à tout moment à quel groupe cible ils appartiennent - Google m'entends tu ? ). Et puis LoveMort et InLove, je n'en dis pas plus.

LoveStar est est un roman d'anticipation, l'histoire se passe dans un futur très proche, et laisse deviner jusqu'où les dérives de notre société actuelle pourraient mener. Mais contrairement à un 1984 très sombre, LoveStar assume une grande désinvolture, et une certaine dose d'humour (pas toujours de bon goût). C'est un roman léger en apparence seulement, qui déroule des concepts choquants et inquiétants sans le moindre complexe. C'est cette société qu'il décrit : des concepts farfelus, écœurants, grotesques... mais auxquels tous les personnages adhèrent parce que ça brille et que ça facilite la vie. La publicité ou le marketing leur font avaler n'importe quoi, et tirer un trait sur leur réflexion, leur liberté, leurs valeurs, et leur bon sens... tant que ça brille, que ça leur nous facilite la vie, ils on fonce. LoveStar interpelle nécessairement, et nous met face à nos travers : surconsommation, partage de données sur le net, obsession de la croissance, absence d'humilité vis à vis de la planète, perte de recul et de réflexion, renoncement au hasard avec les rencontres sur internet et les calculs de compatibilité amoureuse...

A mon sens, le gros défaut du livre est son côté abstrait. Les concepts proposés par l'auteur sont peu développés, et les personnages sont plus des coquilles vides que des héros avec une réelle psychologie. Le roman alterne entre chapitres consacrés au quotidien de Indridi et Sigridur (d'une mièvrerie sans nom - c'est voulu, mais insupportable), et chapitres d'exposition des créations de LoveStar ("LoveMort est une autre branche de la société, elle sert à ceci et à celà"... ). Le personnage de LoveStar est profondément charismatique... mais c'est le seul personnage à m'avoir un peu intéressée. Je n'ai pas "ressenti" cet univers, j'ai eu l'impression que l'auteur se contentait de présenter un futur probable, sans vraiment approfondir, et en tout cas, sans lui donner de réalité (d'autant plus difficile que plus on avance, et plus c'est délirant, donc c'est plus difficile de s'y projeter. C'est dommage, maintenant que j'ai fini le livre, j'aimerais revoir évoluer des héros dans cet univers). Par moment, mon intérêt a donc faibli.

Mais voilà, je ne regrette pas cette lecture. J'ai vraiment retrouvé notre société dans ce livre, c'est à dire ce côté "perte de valeurs et de recul et de neurones mais pas de souci + paillettes et publicité et confort et le temps passe tout va bien". L'auteur est très habile, il nous vend son univers avec effronterie, un côté "plus c'est gros et plus c'est révoltant, plus ça passe", et il sait bien que certains projets ne peuvent que nous prendre au piège (InLove, qui dirait non ? Le lecteur/consommateur est à la fois écœuré et conquis, c'est effrayant). J'avoue que c'est plutôt réussi de ce point de vue là. Ajoutez à ça le fait qu'on se promène un peu en Islande (et qu'on revoie un peu le paysage à la LoveStar), c'est tout dit : je conseille ce roman (qui à mon avis, ferait un excellent film).

Merci Annwvyn pour cette présentation.

Ma médiathèque possède le roman, mais pour le moment il n'est pas disponible. Je le note pour plus tard  

Chouette Rosalind !
C'est un roman que j'ai trouvé déroutant sur le moment, mais qui avec le temps m'a bien plus marquée que prévu. Par exemple, cette semaine j'ai appris que la société SpaceX envoyait les cendres des gens dans l'espace pour leur offrir des obsèques spatiales... exactement une partie du business de LoveStar dans le roman. Plus le temps passe, et plus on dirait que ce roman était visionnaire...

Cet auteur semble aimer la science-fiction légèrement inquiétante  

Le réseau de la médiathèque possède ce roman jeunesse mais uniquement en consultation sur place.


Les enfants de la planète bleue

Citation :

Loin, très loin dans l'espace, il y a une planète bleue sur laquelle ne vivent que des enfants. Insouciants et libres de faire tout ce qui leur plaît, ils sont heureux... mais le savent-ils ? Un jour, un vaisseau spatial se pose sur leur planète. Son unique passager, un homme étrange, se dit capable de réaliser tous leurs rêves, même les plus fous. Aimeraient-ils voler dans l'azur, légers comme des papillons ? Fixer le soleil dans le ciel ? Glaumur, le marchand de rêves, a la solution. Il ne leur en coûtera qu'une goutte de jeunesse... Mais la fête, peu à peu, tourne au cauchemar...

Effectivement, le sujet de ce roman jeunesse fait peur ! Mais tu as piqué ma curiosité...
(en tout cas, je suis ravie que ce topic ait quitté la liste des topics sans aucune réponse ! )

C'est parce que tu m'en as parlé ! je n'avais pas vu qu'il existait