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 America, America

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cat47
Master of Thornfield
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MessageSujet: America, America   America, America Icon_minitimeMer 27 Juin 2018 - 18:52

Envie de parler de vos lectures sur les Etats-Unis en "non fiction"? Je vous proposer de nous retrouver sur ce fil de discussion pour partager et discuter de nos découvertes.

Je viens de terminer Pourquoi les pauvres votent à droite, de Thomas Frank, que j'avais acheté en février 2017, dans l'idée de mieux comprendre ce qui avait pu pousser le Midwest à voter en masse pour Donald Trump.

Présentation de l''éditeur a écrit:
A la fin des années 1960, la concurrence internationale et la peur du déclassement transforment un populisme de gauche (rooseveltien, conquérant, égalitaire) en un "populisme" de droite faisant son miel de la crainte de millions d'ouvriers et d'employés d'être rattrapés par plus déshérités qu'eux. C'est alors que la question de l'insécurité resurgit. Elle va embourgeoiser l'identité de la gauche, perçue comme laxiste, efféminée, intellectuelle, et prolétariser celle de la droite, jugée plus déterminée, plus masculine, moins "naïve". Cette métamorphose s'accomplit à mesure que l'inflation resurgit, que les usines ferment et que l'"élite", jadis associée aux grandes familles de l'industrie et de la banque, devient identifiée à une "nouvelle gauche" friande d'innovations sociales, sexuelles et raciales. Les médias conservateurs n'ont plus qu'à se déchaîner contre une oligarchie radical-chic protégée d'une insécurité qu'elle conteste avec l'insouciance de ceux que cette violence épargne. Au reste, n'est-elle pas entretenue dans ses aveuglements par§ une ménagerie de juges laxistes, d'intellectuels jargonnants et autres boucs émissaires rêvés du ressentiment populaire ? "Progressistes en limousine" là-bas ; "gauche caviar" chez nous.

La présentation de l'éditeur (en fait un extrait de la préface de Serge Halimi) est clairement plus structurée et sophistiquée que le livre. lol!

Je m'attendais à une analyse sociologique et donc plus ou moins rigoureuse des petits blancs américains méprisés par les "élites" des côtes est et ouest alors que le livre est un pamphlet, avec tout ce que ce genre peut avoir de faiblesses quand l'auteur manque de génie. Ce qui donne beaucoup de généralisations, un soupçon de mauvaise foi et très peu de modération. Je reste sur l'impression que l'auteur, plus jeune que moi de quelques années pourtant, n'arrive pas à se défaire de l'angle de vue du "vieux mâle blanc". Embarassed Laughing

Je ne me suis pas ennuyée et ni indignée, loin de là, mais j'ai quand même eu l'impression d'être trompée sur la marchandise. Le titre original du livre est What's the Matter With Kansas? How conservatives won the heart of America. Ce qui est bien plus correct que le titre français. L'auteur, qui y est né et y a débuté ses études, parle uniquement du Kansas. Il ne semble voir les choses que par le petit bout de la lorgnette, celui de cet état clairement au coeur des Etats-Unis géographiquement, mais pas nécessairement culturellement.

Citation :
Dans le grand défilé de l'ignorance, mon Etat d'origine occupe fièrement sa place au premier rang. Certes, le Kansas est un cas extrême, et il y existe encore des territoires ouvriers (...) que les conservateurs doivent encore convertir. Mais il est également vrai que les événements qui commencent au Kansas - la guerre de Sécession, la Prohibition, le Populisme et Pizza Hut - ont en général tendance à s'étendre ensuite à tout le pays.

La thèse de l'auteur :  
Citation :
Le monde des affaires - en raison de sa nature même - impose  au pays un style culturel conçu à la fois pour scandaliser les uns et satisfaire la soif de pseudo-subversion des autres (...). Le Kansas est bel est bien scandalisé. Cet état constate, impuissant, que sa culture, telle que la lui renvoie les deux côtes. devient de plus en plus vulgaire et scandaleuse avec les années. Le Kansas cherche à prendre sa revanche. Le Kansas se gausse quand des célébrités disent des bêtises; il se réjouit de voir emprisonner des stars de cinéma. (...) Il réclame la tête de l'élite libérale. Il se rue dans les bureau de vote et... décide de réduire les impôts.

Dans le monde de Frank, le Kansas est représentatif des problèmes que les States ont à affronter. Le capitalisme est responsable de la déliquescence culturelle et morale de l'Amérique. Les Républicains modérés ne pensent qu'à l'argent et les "élites libérales", donc les Démocrates, sont bien naïfs de faire appel à la conscience des gens éduqués alors qu'ils profitent eux aussi d'un capitalisme décomplexé qui leur permet de se reproduire entre eux et de snober les "vrais Américains".

Pas loin d'une théorie du complot, ce qui est assez étonnant pour un historien de formation. Par contre le reste du monde (par exemple la chute de l'URSS) n'est pas évoquée, et le racisme (les gens de Kansas ne sont pas racistes du tout selon l'auteur puisque leurs ancêtres ont pris possession de l'endroit pour faire barrage aux esclavagistes) ainsi que l'environnement sont évacués en quelques lignes. scratch Et surtout, rien sur la tendance mondiale à l'urbanisation et à l'affaiblissement des régions non côtières.

Le style de Frank est très imagé, libre, nerveux, touffu, souvent trop! On apprend pas mal de choses sur le Kansas et les événements qui ont pu influencer les électeurs. On rencontre également des énergumènes personnages hauts en couleur dont un pape alternatif. ^^

Mais j'ai vu surtout dans ces pages une nostalgie teintée d'aigreur, pas mal d'intolérance (les idées différentes des celles de l'auteur sont à plusieurs reprises qualifiées de délirantes, et pas seulement celles du pape alternatif ^^) et surtout une sorte d'aveuglement face aux défis incontournables d'un monde en constant changement.

J'ai largement préféré un autre ouvrage sur le même thème, plus récent et écrit par un Français, La Fin du rêve américain ?, de Lauric Henneton.
Présentation de l'éditeur a écrit:
Le rêve américain est-il mort ? L’Amérique est-elle en déclin ? C’est sur ce thème que s’est fait élire Donald Trump en 2016, prétendant raviver la flamme, le « rêve », et restaurer la grandeur de l’Amérique.
Pour Lauric Henneton, un tel discours renoue avec l’imaginaire et l’histoire des États-Unis. Car l’angoisse du déclin autant que l’espoir d’une vie meilleure, le pessimisme autant que l’optimisme sont au cœur même du rêve américain et ce dès la création des colonies britanniques en Amérique du Nord.
Explorant cette histoire émotionnelle dans laquelle le puritanisme occupe une large place, l’auteur examine les différentes composantes du présupposé déclin – hispanisation, fin de l’Amérique blanche… – qu’il confronte à la réalité. Ses analyses éclairent d’un jour nouveau le mandat de Barack Obama, perçu dans certains milieux comme le fossoyeur du rêve américain. Un rêve qui, en dépit de tout, garde un immense pouvoir d’attractivité sur des millions de gens de par le monde.

Précis, bien argumenté, et surtout, surtout, très bien documenté. Dans un style accessible, malgré une rigueur tout universitaire.

Bilan intéressant de l'état du rêve américain dressé, une année après l'élection de Trump, par un auteur qui reste trop souvent superficiel, malgré l'abondance de références et de statistiques. J'ai apprécié les chapitres historiques, sur la formation du rêve américain, sur les réactions de crainte provoquées par les diverses dynamiques de changement, ainsi que sur l'évolution des banlieues en tant que lieu privilégié de concrétisation du rêve. Intéressantes considérations sur les "jérémiades", ces sermons peignant le diable sur la muraille, spécialité des religieux/puritains reprises par bien des politiciens modernes.

Les diverses analyses sociologiques m'ont moins convaincues, énumérations de chiffres fastidieuses qu'il aurait été judicieux de présenter dans des tableaux, pour consacrer plus de place à développer une réflexion originale. L'auteur recrache chiffres et études sans structurer son approche et ses conclusions, malheureusement. Le style de ces chapitres est particulièrement indigeste.

Un état des lieux un peu court mais une bonne base pour approfondir grâce à une bibliographie et des sources bien fournies.

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Dernière édition par cat47 le Mer 27 Juin 2018 - 19:27, édité 1 fois
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Selenh
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MessageSujet: Re: America, America   America, America Icon_minitimeMer 27 Juin 2018 - 19:16

Très intéressant, merci Cat.
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