George Gissing

Portrait:

George Gissing (1857-1903) a publié, d’après Wikipedia, 23 romans à partir de 1880. Les années 1890 lui ont assuré une grande popularité, grâce à ses romans mais aussi à ses nouvelles. Alors que son talent le destinait à une belle carrière littéraire, il va côtoyer la pauvreté suite à un drame personnel dont il peinera à se défaire.
En France il reste peu connu, peu de ses livres (et encore, seule une édition récente - en 2014 - manifestement), ayant été traduits en Français bien qu’il ait pu être comparé à Zola, qu'il y ait vécu, et qu'il y soit décédé.
Pour de plus amples informations, on peut consulter sa très riche page Wikipedia

Ses romans les plus connus semblent être The Nether World (1889, Les Déshérités), New Grub Street (1891, La Nouvelle Bohême), Born in Exile (1892, Né en exil) et The Odd Women (1893, Femmes en trop). A noter qu’il est aussi l’auteur d’un ouvrage critique sur Dickens (1898).

Je viens de terminer The Odd Women, à la fois brillant et audacieux. Ses héroïnes sont des femmes "non appariées" ou célibataires par défaut (ou par choix). En quelque sorte celles qui n’ont pu trouver un mari en raison de l’excédent féminin par rapport au nombre d’hommes. Gissing peint un monde cruel mais en plein bouleversement et aborde des thèmes modernes pour son époque : le célibat, le problème de la non-dissolution du mariage, l’éducation et l’émancipation des femmes. Il s’attache à des femmes de la classe moyenne, avec quelques moyens décrits avec force détails, obligées de travailler et qui frôlent la pauvreté. Leur travail est effectué dans des conditions souvent pénibles, à l’image des vendeuses qui ont interdiction de s’asseoir pendant des journées de treize à seize heures.
Le romancier se prononce en faveur de l’émancipation féminine mais son discours s’avère ambivalent, avec de temps à autre des propos tout à fait conventionnels voire misogynes. Cette complexité représente un des intérêts du roman, aux côtés de personnages intéressants (même si une des principales intrigues, celle autour de Monica, se révèle finalement moins palpitante que prévu) et d’un style remarquable. Sa simplicité rappelle Anthony Trollope (l’humour en moins) avec un art d’aller à l’essentiel qui m’a conquise.

Une excellente découverte   , qu’il me tarde de poursuivre avec un autre de ses romans.
Est-ce qu'il t'a plu aussi Serendipity ?

Merci d'avoir présenté George Gissing et ses "Odd Women" Tatiana

J'ai également apprécié ce roman. J'ai lu les 3/4 très vite, avec grand plaisir, et j'ai ensuite dû le mettre de côté avant de le terminer récemment, donc la fin a été plus inégale pour moi. Ce découpage tombait mal car je me suis interrompue après

Spoiler:

Ce roman est riche d'une galerie de personnages intéressants et à la psychologie très fouillée (même si parfois pas très attachants). On y voit surtout des femmes fortes mais au final peu humaines (à mon sens).

Spoiler:

Les personnages masculins sont également très intéressants au premier rang Everard Barfoot (qui exprime certaines vues de l'auteur), mais aussi les personnage secondaires (heureusement qu'il y a le professeur de mathématiques pour nous donner encore un peu d'espoir sur la vie de couple )

Après avoir lu l'introduction, je ne suis pas certaine d'avoir envie de lire d'autres romans de George Gissing (alors que telle était mon intention initiale), son regard s'étant considérablement durci envers les classes laborieuses. Je pensais rencontrer un auteur plus humaniste en réalité... mais je suis très contente d'avoir lu ce roman et je pense en lire d'autre sur ce thème des femmes superflues.

Je pense tenter un jour les nouvelles de Gissing, elles me semblent plus en phase avec mes attentes du moment

Je conclus avec la vision de la vie exprimée par la belle-soeur de M. Widdowson "Life's as you take it: all gloom or moderately shiny"

Oui j'ai trouvé aussi qu'il se lit facilement. Après ma progression plutôt laborieuse dans Miss Marjoribanks cette lecture a été la bienvenue .

Je partage ton ressenti vis-à-vis des personnages, de leur portrait sous la plume de Gissing, pénétrant dans ses analyses psychologiques, des femmes comme des hommes. Je m'attendais à des femmes plus attachantes, non pas tant les soeurs Madden

Spoiler:

Chez les hommes, Everard Barfoot semble être le plus proche de l'auteur d'après l'introduction fort intéressante (avons-nous lu la même édition ? Oxford World Classics en ce qui me concerne). Contre toute attente j'ai beaucoup aimé ce personnage. Le détestable Edmund Widdowson rappelle fortement le Louis Trevelyan de Trollope, bien qu'un peu plus humain.

J'ai trouvé en outre intéressant que, bien qu'inégalement traitées (je ne m'attendais pas à ce que l'intrigue autour de Monica devienne tellement centrale), une belle galerie de positions sociales et matrimoniales prennent place dans le récit : un célibataire endurci qui finit par tomber dans son propre piège, deux femmes d'âge mur pleinement satisfaites de leur situation et fières de l'école qu'elles dirigent, un couple longtemps séparé pour cause d'insuffisance de moyens et dont l'union se révèle heureuse, une jeune fille rêvant à un mariage lui assurant un confort matériel...

Pour ma part je suis décidée à poursuivre ma découverte, d'abord avec The Nether World qui s'attache à une population miséreuse. J'attends de voir comment y sont présentés les personnages chez ce romancier qui se méfiait du peuple. Ce roman se rapproche sûrement plus de Dickens de par son environnement.

Merci pour cette présentation et ces avis intéressants et intrigants, les filles !

J'ai bien la même édition que toi Tatiana

Je n'ai pas trouvé M. Widdowson aussi détestable que toi J'ai eu pitié de ce personnage qui est son premier ennemi (il m'a donné envie de lire un jour "He Knew he was Right" de Trollope

Je confirme que sa belle-soeur est assez savoureuse en effet un personnage austenien

Très intéressée par ton avis sur "The Nether World" le moment venu

Attirée par vos avis positif, j'ai téléchargé The odd women et The nether world sur ma liseuse et ai entamé le premier. Pour le moment j'aime bien, par contre de ce que j'en ai lu, Edmund Widowson a l'air très gentil, je me demande comment il va tourner !
Je reviendrai plus tard quand j'aurai plus avancé

@serendipity : je te conseille vivement de lire He knew he was right, mon roman préféré de Trollope

Bonne suite de lecture Ju . Hâte d'avoir tes impressions.
Depuis ma première lecture je n'ai pas poursuivi ma découverte mais ai acheté New Grub Street, autre roman facile à se procurer.

J'aimerais beaucoup découvrir ce romancier un jour, ses histoires ont l'air intéressantes !

L'anglais est de quel niveau à peu près ?

Comme Dulcie, cet auteur m'intéresse beaucoup

Dulcie a écrit:

J'aimerais beaucoup découvrir ce romancier un jour, ses histoires ont l'air intéressantes !

L'anglais est de quel niveau à peu près ?

Je n'ai lu que 5 ou 6 chapitres mais je n'ai pas rencontré de difficultés particulières. Après j'ai l'habitude de lire en anglais donc j'ai du mal à évaluer

Effectivement il se lit facilement, un peu comme du Trollope je dirais, s'il fallait essayer de comparer.

Merci pour vos réponses, bon eh bien je verrais si je lis ses romans

J'ai terminé (merci aux longues heures de voyage en train) et si j'ai bien accroché tout le long, je reste un peu sur ma faim et ai envie de dire "tout ça pour ça ?"
En fait je suis déçue du dénouement des deux principales intrigues :

Spoiler:

En fait je trouve ça dommage : les propos de l'auteur se veulent résolument modernes (même si misogynes par moments en effet) et finalement la fin est assez convenue...

Bref vous l'aurez compris, je suis un peu déçue par cette fin, mais j'ai quand même bien aimé ce livre qui s'est avéré fort intéressant sur la société de l'époque et les tentatives d'émancipation des personnages

Merci pour ton retour Ju. Je comprends tes réserves sur les deux dénouements que tu cites en particulier celui concernant Rhoda. Gissing surprend son lecteur après avoir développé la proximité entre Rhoda et Everard.

Spoiler:

J'espère ne pas me tromper car bien que ma lecture remonte à un peu plus d'un an seulement mes souvenirs sont déjà flous .

Je ne sais pas trop si c'est vraiment pour des raisons morales qu'elle renonce. Ce n'est pas très bien explicité et c'est très abrupt, je ne m'y attendais vraiment pas

Je ne connaissais pas du tout cet auteur, je note dans ma liste pas-hyper-prioritaire-mais-un-jour-quand-même

Merci pour ton retour Ju, contente que ce roman t'ait plu même si le dénouement t'a paru convenu

Tatiana a écrit:

bien que ma lecture remonte à un peu plus d'un an seulement mes souvenirs sont déjà flous .

C'est également mon cas et je ne me souviens plus très bien des motivations de ce personnage

J'ai lu New Grub Street, roman de 1891 qui place le métier d'écrivain et sa position sociale au cœur de l'intrigue. On en suit plusieurs : Edwin Reardon, romancier qui a connu de petits succès mais peine de plus en plus à vivre de sa plume, marié à une jeune femme issue d'une meilleure classe sociale que lui ; son ami Horace Biffen, en galère autant que lui, et touché par la précarité ; Alfred Yule, auteur d'ouvrages académiques, au caractère difficile, et aidé par sa fille Marian (un personnage très sympathique au lecteur, et que Gissing affectionne à l'évidence aussi); enfin, et non des moindres car c'est celui qui m'a le plus marquée, Jasper Milvain, jeune journaliste littéraire pour qui la littérature représente un moyen d'ascension sociale.

Les femmes qui écrivent ne sont pas en reste dans ce livre, et cela fait partie des éléments intéressants, car on sent un réel soutien de la part de l'auteur envers leur émancipation. En plus de Marian, qui va jusqu'à rédiger occasionnellement des artistes signés par son père, les deux sœurs de Jasper sont encouragées à écrire afin d'augmenter leur revenu.

Si les débuts (et même plus   ) de ma lecture ont été difficiles, ma persévérance a payé car je l'ai finalement beaucoup appréciée. A la fois l'ambivalence de certains personnages et l'immersion dans ce monde littéraire où il était si ardu de se faire une place et de vivre de sa plume, le spectre de la précarité, voire de l'hospice des pauvres (la fameuse workhouse si souvent mentionnée à l'époque) étant omniprésent. Il est donc question de classes sociales mais aussi d'argent, et d'héritage. Gissing a puisé dans sa propre expérience et dans les pratiques littéraires de son époque. Par exemple, la "dictacture" des romans en trois volumes, auxquels les romanciers sont contraints de se plier pour suivre le goût du public friand d'intrigues à rebondissements parues en feuilletons. Gissing met en scène l'opposition entre l'art de l'écrivain solitaire et pauvre, et les requis du commerce littéraire.

J'ai été par ailleurs intriguée par un détail de la vie quotidienne : la chevelure courte de Marian Yule, caractéristique plusieurs fois soulignée. J'avais déjà croisé un personnage aux cheveux courts (Lady Harriet dans Femmes et Filles de Gaskell, du moins dans l'adaptation), mais on est là dans les années 1830, 50 ans avant le cadre du livre de Gissing, à une époque où les cheveux longs était une marque essentielle de féminité.

Merci pour ton commentaire passionnant, Tatiana Tous les éléments sont réunis pour passer un bon moment de lecture, malgré une entrée difficile !

Merci Tatiana pour ce retour sur ta lecture qui semble passionnante. J'aime bien cet auteur qui défend et encourage les femmes écrivaines. Nous sommes loin de certains, à la même époque ou presque, qui faisaient tout pour les dénigrer, voire croire qu'elles n'ont rien à faire dans un monde qui leur était "exclusivement" réservé. Le contexte que tu décris me plait bien. Je me note cet écrivain et le roman dans mes projets

Je t'encourage à découvrir cet auteur injustement méconnu, Ysabelle. Non seulement il écrit bien, mais en plus ses intrigues sont pleinement ancrées dans la société en pleine transformation des dernières années de l'ère victorienne.
Il est regrettable que ses romans soient si difficiles, pour ne pas dire impossibles, à se procurer en français. J'espère vraiment qu'une maison d'édition finira par s'y intéresser.

Merci pour ton retour Tatiana, ce roman a l'air très intéressant en effet
J'ai toujours dans ma PAL une nouvelle intitulée The House of Cobwebs