Virginie Despentes

J’ai regardé la semaine dernière l’adaptation de Vernon Subutex, et je me suis dit que c’était l’occasion d’ouvrir un topic à cette autrice incontournable de la scène littéraire contemporaine.
Virginie Despentes a vécu mille vies, et le moins qu’on puisse dire c’est que les mille étaient rock’n’roll.

France Culture a écrit:

Virginie Despentes, de son vrai nom Virginie Daget, est née en 1969 à Nancy. Après une jeunesse agitée et perturbée - Virginie Despentes endure une période d’internement psychiatrique à l’âge de quinze ans qui la déscolarise – la jeune adulte fréquente le milieu punk et sombre dans l’alcoolisme et la prostitution occasionnelle. En 1992, elle écrit son livre Baise-moi qui ne sera publié que deux ans plus tard par Florent Massot d’abord en catimini, avant de connaître un réel succès. Suivront entre autres Les Jolies choses (Prix de Flore 1998), King Kong Théorie (2006), Apocalypse Bébé (Prix Renaudot 2010) puis la trilogie Vernon Subutex entre 2015 et 2017. Virginie Despentes adapte au cinéma certains de ses romans et réalise des documentaires. Elle est également devenue une figure de la communauté lesbienne et promeut un nouveau féminisme. Membre de l'Académie Goncourt depuis 2016, elle est considérée comme une écrivaine essentielle de son époque, ses livres reflétant de façon dérangeante par ses sujets et son style direct, le monde actuel.

Il me semble qu’elle a longtemps été plutôt underground, et c’est avec la parution de Vernon Subutex qu’on a vu ses livres partout en librairie. C’est avec cette œuvre que je l’ai découverte, des amies m’avaient offert les 2 premiers tomes.

Citation :

Vernon Subutex est un homme parmi tant d’autres, parisien et mordu de musique, dont la vie s’effiloche lentement quand l’industrie du disque s’effondre et lui fait fermer boutique. Lorsque son ami et star du rock meurt d’overdose, Vernon se retrouve à la rue, avec en poche le testament vidéo du chanteur, ultime objet de convoitise. Alors que Vernon tente en vain de garder la tête hors de l’eau, il dérive de canapé en canapé, d’amis d’enfance en connaissances, jusqu’à la chute. Primée et largement saluée par la critique, cette série de Virginie Despentes décrit avec justesse le malaise contemporain d’une humanité à la dérive. Une saga aux accents de polar et sur fond de rock’n roll.

C’est une saga que j’ai beaucoup aimé. Je ne suis pas forcément une fan absolue de l’écriture de Despentes, mais j’aime sa nervosité et son naturel. Elle pose un regard très intéressant sur notre société (dans ce livre, mais aussi dans toutes les interviews d'elle que j’ai pu entendre). Il y a quelques années que je les ai lus, je ne pourrais donc pas beaucoup détailler, mais la révolte et la nostalgie de ces livres, ainsi que l'importance qu'y a l'amitié, font que je garde une grande affection pour ces romans.


J'ai donc regardé récemment l’adaptation en série, créée par Cathy Verney pour Canal + l'an dernier. J’ai un peu tourné autour depuis sa sortie, car j’avais lu que Despentes avait détesté. Finalement, je l’ai trouvée pas mal du tout. Vernon est incarné par Romain Duris, ce qui était déjà un argument suffisant pour que je m’y mette.     Mais la plupart des membres du casting sont très bons et ont su rendre le caractère des personnages, tel que je m’en souvenais : Philippe Rebbot qui incarne Xavier le scénariste un peu réac et embourgeoisé, Florence Thomassin qui a parfaitement trouvé l’hystérie et l’égocentrisme de Sylvie, Céline Sallette qui joue La Hyène (un des personnages les plus marquants, que l’on retrouve apparemment dans d’autres livres de l’autrice), Flora Fishback qui est surtout connue comme chanteuse et que j’ai trouvée excellente en Anaïs, Emilie Gavois-Kahn... entre autres. J’ai été plus mitigée sur l’acteur qui joue le rôle du producteur Dopalet, et l’actrice qui joue Aïcha, parfois très touchante et parfois caricaturale. Duris est (sans surprise) un parfait Vernon, attachant, agaçant, sublime et pathétique en même temps.

La série reprend, si je me souviens bien, l’intrigue du premier tome, et c’est dommage qu’elle s’arrête là. Même si je les trouve un peu plus faibles, les 2 autres tomes ouvrent des perspectives, avec les « convergences » organisées par Vernon, disquaire déchu devenu DJ quasiment gourou. Mais enfin, si j’ai regardé les 2 premiers épisodes avec un peu de méfiance, je me suis vite laissée embarquer et j’ai retrouvé l’émotion des livres. Et bien sûr, la BO est excellente.

Ce visionnage m’a donné envie de continuer ma découverte des livres de Despentes : j’ai Apocalypse bébé sur ma PAL, et je veux aussi absolument lire son essai féministe King Kong Théorie (on l’a beaucoup vu passer sur les réseaux sociaux après #Metoo).

Merci pour l'ouverture de ce topic, Esperluette ! Vernon Subutex me fait de l'oeil depuis un certain temps, mais je dois avouer que je ne suis pas motivée à découvrir cette oeuvre
Je plussoie pour le casting de la série

Je suis ravie que tu aies ouvert ce topic, Esperluette, ça m'évite de le faire et j'aime beaucoup ce que tu dis de la trilogie "Vernon Subutex". C'est pour cette œuvre que je passe par ici ! J'avoue que je n'aurais pas de mon plein gré été jeter un œil dans l'univers de Despentes, ce que j'en avais entendu dire (sur elle-même, ses prises de positions, et un titre comme "baise-moi") m'en avait dissuadé. Mais parfois c'est à l'insu de son plein gré qu'on avance, et là c'est le fait que ma fille m'a donné la trilogie (je la prenais ou elle la laissait sur le lieu de ses vacances !) qui m'a incitée à en faire en quelque sorte le sauvetage. C'est dire à quel point je n'y allais que d'une fesse !    

Eh bien j'ai beaucoup aimé les deux premiers tomes, mais j'ai abandonné le 3ème au milieu pour ne pas avoir à lire le détail de ce qui est arrivé à Céleste(j'en avais eu un aperçu en feuilletant au hasard !) Si j'ai apprécié les deux premiers (surtout le 1) c'est que justement malgré la lourdeur du sujet le style vif, fort et surtout ni complaisant ni voyeur(ce que je redoutais) m'a beaucoup accrochée. Et dans le 3ème j'ai trouvé que ça s'alourdissait sérieusement, et puis on allait vers du grand n'importe quoi avec cette espèce de religion/secte paraphrasant une parodie du christianisme. Non que ça me choque, mais ça me barbait ! Et ce que j'ai aimé aussi c'est d'avoir l'impression de retraverser les années disparues, car, même si je n'ai pas du tout vécu ce que vivent les personnages du roman, l'ambiance, l'atmosphère, le climat s'y retrouvent très bien !
Mon reproche principal c'est que Despentes nous décrit un microcosme comme si c'était la seule possibilité d'existence. Il y a quand même quelques personnes sur Terre qui ne se droguent pas, ne se prostituent pas, ou sont simplement banalement heureux !   Bon le souci c'est que justement ces gens-là n'ont pas d'histoire !   Enfin, le talent c'est de savoir parler d'eux quand même, et Despentes en a du talent, ça ne fait aucun doute !

Je n'ai pas vu (et ne verrai pas) l'adaptation télé mais aucun doute que Duris a dû incarner magnifiquement Subutex, car, en voyant la photo, je me suis dit " Wouah !!! C'est exactement comme ça que je l'imaginais ! "  

J'ai aimé cette découverte, mais je n'en lirai pas d'autre, son univers m'est quand même par trop étranger !  

Merci beaucoup clinchamps pour ce retour sur Vernon Subutex.
Je n'ai encore jamais lu V Despentes, bien que j'ai entendu dire qu'elle a un style percutant, qui rend ses livres addictifs.

Ce que tu en dis de son contenu :

Citation :

Mon reproche principal c'est que Despentes nous décrit un microcosme comme si c'était la seule possibilité d'existence. Il y a quand même quelques personnes sur Terre qui ne se droguent pas, ne se prostituent pas, ou sont simplement banalement heureux !

me fait penser à Irvine Welsh (Trainspotting et Porno) ou Dona Tartt (le Chardonneret) ; des auteurs avec des histoires fortes mais des personnages qui ne voient la vie qu'à travers l'héroïne ou la cocaïne, et comment s'en procurer avec le minimum d'emmerdements

Petit Faucon a écrit:

Merci beaucoup clinchamps pour ce retour sur Vernon Subutex.
Je n'ai encore jamais lu V Despentes, bien que j'ai entendu dire qu'elle a un style percutant, qui rend ses livres addictifs.

Ce que tu en dis de son contenu :

Citation :

Mon reproche principal c'est que Despentes nous décrit un microcosme comme si c'était la seule possibilité d'existence. Il y a quand même quelques personnes sur Terre qui ne se droguent pas, ne se prostituent pas, ou sont simplement banalement heureux !

me fait penser à Irvine Welsh (Trainspotting et Porno) ou Dona Tartt (le Chardonneret) ; des auteurs avec des histoires fortes mais des personnages qui ne voient la vie qu'à travers l'héroïne ou la cocaïne, et comment s'en procurer avec le minimum d'emmerdements

C'est tout à fait ça ! C'est très restrictif et fatigant au bout du 2ème livre bien que le mouvement para-religieux initié par les fans de Vernon apporte une autre ouverture, mais pour tous les personnages le rail de coke ou le shoot sont aussi banals que le café de fin de repas ou son carré de chocolat !