J’ouvre un topic à un cycle de romans fantasy qui a été une agréable surprise de lecture de cette année qui se termine.
Tout d’abord, je vous présente l’autrice en quelque mots, sa biographie disponible sur internet est restreinte…
Nghi Vo est née en 1981 aux États-Unis. Elle a été journaliste et prête-plume.
Elle a publié deux romans indépendants, mais évoluant dans un même univers (un troisième est en cours) :
-
The Chosen and the Beautiful (adaptation de
Gatsby le Magnifique)
-
Siren QueenEt un cycle,
Les archives des Collines-Chantantes :
-
L'Impératrice du Sel et de la Fortune-
Quand la tigresse descendit de la montagne-
Entre les méandres-
Des mammouths à la porteA ce jour, seuls les trois premiers tomes des
archives des Collines-Chantantes ont été traduits en français, le quatrième devrait sortir en mars 2024 aux éditions L’Atalante, désormais bien connues des amateurs de fantasy.
L'Impératrice du Sel et de la Fortune a reçu une distinction, le prix Hugo du meilleur roman court 2021.
Présentation des archives des Collines-ChantantesLes romans du cycle des
archives des Collines-Chantantes sont indépendants et se déroulent dans un monde de fantasy asiatique (principalement d’inspiration chinoise, certains noms de personnages évoquent l’Asie du Sud-Est, tel le Vietnam).
On suit le personnage de Chih, adelphe de l’abbaye des Collines-Chantantes, ordre monastique qui s’est spécialisé dans la collecte de témoignages, récits et contes afin de garder une trace de l’Histoire et la culture à travers l’Histoire et malgré ses heurts.
Dans le premier tome,
L'Impératrice du Sel et de la Fortune, Chih se rend à un pavillon près d’un lac où a été exilée par le passé l’Impératrice. Venue du Nord (d’origine inuit ?) pour un mariage diplomatique avec l’Empereur, elle avait été éloignée de la cour après avoir donné un héritier mâle à l’empire, avant que l’Histoire ne bascule à nouveau... C’est dans les intrigues de cour passée que Chih vient plonger en recueillant le témoignage d’une ancienne servante de l’Impératrice, afin d’éclairer la situation politique actuelle.
Les chapitres débutent par un inventaire des objets fins trouvés dans la résidence. Ils sont le prétexte à la servante pour relater des épisodes de la vie « retirée » de l’Impératrice et pour Chih de mener son enquête. La plume a la discrétion et la finesse de la littérature asiatique.
J’ai adoré l’ambiance feutrée de ce premier roman !
Dans le deuxième tome,
Quand la tigresse descendit de la montagne, Chih est accompagnée d’une éclaireuse à dos de mammouth pour traverser un col montagnard. Surprises par l’attaque de trois tigresses ayant la capacité de se métamorphoser en femmes, elles trouvent refuge dans une grange où elles ont recueilli un homme sauvé des griffes des tigresses. Les tigresses veillent. Un récit contre du temps, un récit contre une vie sauve… Chih a toute la nuit, sous l’avant-toit et près du feu, pour conter une histoire qui distrait suffisamment les tigresses de leur envie de chasser.
J’ai aimé ce second tome, même si le changement d’ambiance et de style narratif m’a fait regretter de ne pas rester dans celui du premier que j’avais adoré. Néanmoins, j’apprécie la prise de risque de l’autrice de se renouveler et la proposition faite est agréable, tant pour la structure du récit que par sa plume.
Dans le troisième tome,
Entre les méandres, le lecteur se retrouve dans une région totalement différente, dans des plaines arborées, le long des méandres d’un fleuve. L’ambiance est celle d’un film d’arts martiaux, type
wuxia. Chih fait la rencontre de quatre personnes dans une auberge, qui vont l’accompagner dans son périple à pied jusqu’à sa prochaine station. Attaqués par des bandits ou témoins de la violence des grands chemins, Chih va découvrir que ses compagnons improvisés de voyage ne sont pas tous de simples piétons mais des combattants aguerris pour certains. Chih en apprend plus sur les récits locaux des « mafias » locales et redresseurs de torts.
Pour ce tome, on se sent transporté dans un film chinois, type
kung-fu pian ou
wuxia pian, à voyager dans la Chine rurale ancienne, apprendre les légendes antiques et assister à des combats d’arts martiaux. Le récit est moins méditatif, plus tonique et enlevé que les deux premiers tomes. C’est un nouvel exercice de style agréable à lire ! J’ai beaucoup aimé ce tome !!
En résumé, je recommande chaudement ce cycle aux amateurs de récits asiatiques mythiques et de fantasy (avec le bestiaire associé à ce monde). Le style a la même délicatesse que la culture asiatique continentale, sans être « rose bonbon », le monde peut parfois être dur et cruel, ce qui le garde réaliste.
L’indépendance des romans et les changements d’ambiance et d’écriture font que chacun peut trouver un tome à son goût.
Néanmoins, pour les amateurs de sensations fortes et d’action, passez votre chemin ! Vous vous ennuierez.
Je préviens aussi que le personnage de Chih est non-binaire, parfois homme, parfois femme dans les accords. Cela m’a dérouté au début, avant que je me rende compte que si Chih est un adelphe, c’est pour éviter de l’appeler « frère » ou « sœur » de son ordre...