Une auberge pour les admirateurs de Jane Austen, et bien plus encore... |
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| Ian McEwan : Atonement | |
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Auteur | Message |
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Mr Damien Tilney The Knight of Irony
Nombre de messages : 3463 Age : 40 Date d'inscription : 04/10/2006
| Sujet: Re: Ian McEwan : Atonement Sam 25 Aoû 2007 - 2:50 | |
| La première fois que j'ai lu le roman, j'ai pensé la même chose que Cat. Mais en lisant l'argumentation de Mimidd, je ne suis plus si sûr. Il me semble que cette histoire n'est pas clair. On ne pourra jamais savoir ce qu'il s'est réellement passé tout simplement parce que c'est Briony qui écrit l'histoire et qu'elle reste ignorant sur les détails de cette soirée. |
| | | Lise Bennet Shanghai's Amber Dawn
Nombre de messages : 3243 Age : 31 Localisation : Lorraine or in a daydream... Date d'inscription : 02/06/2007
| Sujet: Re: Ian McEwan : Atonement Sam 25 Aoû 2007 - 11:12 | |
| Je pense que Damien Tilney a raison. On ne saura jamais vraiment parce qu'on voit l'histoire du point de vue de Briony surtout et parfois du point de vue d'autres personnages mais jamais on ne la voit du point de vue de Lola. On ne sait pas ce qu'elle pense ou ressent, on sait juste les faits. Peut-être que toutes les interprétations sont un peu vraies, - Spoiler:
le livre nous montre bien que Lola n'est plus tellement innocente mais les griffures semblent montrer qu'au moins à la première approche elle n'était pas consentante. Pour la deuxième fois, surprise par Briony, elle semble faible après mais joue-t-elle pour donner l'impression qu'elle n'était pas consentante ou est-elle vraiment choquée et affaiblie ?
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| | | mimidd Aki no Hoshizora
Nombre de messages : 15717 Localisation : with a Japanese man singing for Rotterdam Date d'inscription : 17/04/2006
| Sujet: Re: Ian McEwan : Atonement Sam 25 Aoû 2007 - 11:25 | |
| C'est vrai que ce n'est pas clair - Spoiler:
Le fait est que lorsque j'ai lu le roman, je n'ai pas perçu Lola comme une Lolita, mais juste comme une jeune fille vulnérable, qui essaie tant bien que mal de gérer l'absence de sa mère, à qui l'on impose des responsabilités d'adulte, et qui se trouve dans une grande solitude affective ... Pour moi, il ne fait aucun doute que la première fois, il y a bien eu tentative de viol, comme l'a montré Camille. Je sais que souvent femme varie, mais quand même ... en une soirée, face à deux agressions identiques venant de la même personne, passer d'une défense acharnée au consentement pur et simple, ca me parait un peu gros ... J'ai un peu relu le passage en diagonale, et pour expliquer pourquoi Lola ne dénonce pas Marshall quand elle en a l'occasion : partant du principe qu'il y a bien eu viol (ce qui n'est pas absolument certain, j'en suis consciente ), je pense que la première réaction de la victime est de vouloir oublier, d'évacuer les sévices subis, non ? Mais Briony est là, elle a "tout vu". Cette phrase revient comme un leitmotiv ... quand Lola répète cette phrase au début, on dirait qu'elle en veut à Briony d'avoir vu, et donc de confirmer la réalité de ce qu'elle a subi. impossible d'oublier l'affaire, puisqu'il y a un témoin. Mais tout change quand Briony prononce le nom du "coupable" ... A partir de là, Briony apparait comme une bouée de sauvetage pour Lola : Briony "sait", elle "a vu", mais en même temps elle ne sait pas, et elle n'a pas vu ... En laissant Briony raconter à sa manière ce qui s'est passé, Lola trouve en quelque sorte une échappatoire à la réalité. C'est son histoire, mais en même temps, ca ne l'est pas ... La version de Briony la place en dehors de sa propre histoire. C'est comme si elle n'avait pas vraiment subi ce viol puisque la version officielle donnée par Briony est fausse. D'une certaine manière, en laissant affirmer que Robbie est le coupable du viol, Lola pense pouvoir effacer la réalité du viol puisqu'elle sait pertinemment ce n'est pas Robbie le coupable : "Robbie est le violeur, or Robbie n'est pas le violeur donc il n'y a pas de violeur, ni de viol". Et il ne faut pas sous estimer la pression psychologique que peut exercer l'agresseur sur la victime. Encore aujourd'hui, on voit des femmes qui ne portent pas plainte contre leur agresseur alors qu'elle connaissent parfaitement leur identité ... alors une jeune fille de 15 ans en 1935 ...
Mais bon, ce n'est que mon opinion après une seule lecture du roman, et selon que l'on interprète le personnage de Lola et les faits qui nous sont présentés, les évènements peuvent prendre une tournure tout à fait différente _________________ ずっと続く道 これからも変わらずに 同じことで笑っていよう 一人じゃないよ アホな仲間と =☆= In a road that keeps going without change, let’s keep laughing about the same things. =☆= =☆=☆=☆= You’re not alone. You’ve got this stupid friend with you (道, 丸∞すばる) =☆=☆=☆= |
| | | Lise Bennet Shanghai's Amber Dawn
Nombre de messages : 3243 Age : 31 Localisation : Lorraine or in a daydream... Date d'inscription : 02/06/2007
| Sujet: Re: Ian McEwan : Atonement Sam 25 Aoû 2007 - 11:51 | |
| Je pense que Lola est présentée comme une femme-enfant, pas méchante mais déjà séductrice d'une certaine manière. Comme tu dis mimidd : - Spoiler:
L'aggresseur exerce sûrement une force psychologique sur elle et elle tente d'oublier qu'elle a été agressée en laissant Briony imaginer un autre coupable. D'ailleurs Briony dit ou pense à un moment dans le livre que Lola a voulu se convaincre que Marshall l'aimait. Il était attiré par Lola et il lui plaisait. On voit à la fin du livre qu'ils n'ont pas été malheureux ensemble. Le vrai problème de cette histoire c'est la culpabilité de Briony et l'injustice faite à Robbie, qui a gâché sa vie, alors que d'une façon un peu ambiguë on dit à un moment dans le livre qu'à part Briony personne n'était vraiment convaincu que c'était un/le violeur. D'ailleurs, j'étais très triste pour lui en l'imaginant revenenir avec les jumeaux au petit matin pour être arrêté, s'il avait été l'agresseur, il aurait agi comme Marshall et serait revenu tout de suite vers la maison, ça me semble logique...
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| | | marie21 Lost in RA Sunbae
Nombre de messages : 19045 Age : 45 Localisation : In a forest, halfway from the Peak District to Seoul with a stopover in Istanbul Date d'inscription : 25/09/2006
| Sujet: Re: Ian McEwan : Atonement Sam 25 Aoû 2007 - 11:55 | |
| - Mr Damien Tilney a écrit:
- La première fois que j'ai lu le roman, j'ai pensé la même chose que Cat. Mais en lisant l'argumentation de Mimidd, je ne suis plus si sûr. Il me semble que cette histoire n'est pas clair. On ne pourra jamais savoir ce qu'il s'est réellement passé tout simplement parce que c'est Briony qui écrit l'histoire et qu'elle reste ignorant sur les détails de cette soirée.
Oui, je suis d'accord, cette histoire n'est pas claire et en plus, elle est racontée par Briony qui a des sentiments ambivalents vis à vis de Lola. Mais je pense aussi que l'interprétation de Mimid n'est pas fausse. - Spoiler:
C'est vrai que les évènements se sont passés en 1935 et peut-être que Lola a épousé son agresseur parce qu'elle était déjà deshonnorée et puis elle peut rester dans la bonne société et garder la tête haute car personne à part Briony et elle ne sait vraiment qui l'a agressé. Du coup, on comprend que Briony lui en veuille d'avoir garder le silence et de l'avoir laisser accuser Robbie du crime. Mais pour moi Lola était quand même attirée par Marshall mais comme elle était jeune, elle ne savait pas trop le risque qu'elle prenait en le séduisant...
En tout cas, cette conversation est intéressante. |
| | | cat47 Master of Thornfield
Nombre de messages : 24251 Age : 67 Localisation : Entre Salève et Léman Date d'inscription : 28/01/2006
| Sujet: Re: Ian McEwan : Atonement Sam 25 Aoû 2007 - 16:14 | |
| - Lise Bennet a écrit:
- Je pense que Lola est présentée comme une femme-enfant, pas méchante mais déjà séductrice d'une certaine manière.
C'est également sur cet aspect séduction que je base mon interprétation. Je ne me rappelle pas suffisamment les détails de la première partie mais il me semble bien que certains éléments peuvent faire penser qu'elle est attirée par Marshall (pour cela il faudrait que je relise la/les? scènes où ils sont impliqués). La scène de l'agression est quant à elle très confuse, on ne peut pas en tirer de conclusion (je suis sûre que c'est voulu par l'auteur). Par contre, ayant relu les derniers chapitres, il m'a semblé que l'aspect séducteur de Lola y était souligné (elle porte des hauts talons malgré son âge) de même que le fait que son mari est dépendant d'elle. Cela ne m'a pas semblé innocent de la part de McEwan. _________________ |
| | | clinchamps Oshaberi Sensei
Nombre de messages : 72665 Age : 81 Localisation : Dans les bois du Fushimi Inari-taïsha Date d'inscription : 09/01/2007
| | | | marie21 Lost in RA Sunbae
Nombre de messages : 19045 Age : 45 Localisation : In a forest, halfway from the Peak District to Seoul with a stopover in Istanbul Date d'inscription : 25/09/2006
| Sujet: Re: Ian McEwan : Atonement Lun 27 Aoû 2007 - 10:08 | |
| - cat47 a écrit:
C'est également sur cet aspect séduction que je base mon interprétation. Je ne me rappelle pas suffisamment les détails de la première partie mais il me semble bien que certains éléments peuvent faire penser qu'elle est attirée par Marshall (pour cela il faudrait que je relise la/les? scènes où ils sont impliqués). Ben, y a la scène où Marshall vient dans la nursery, je crois, où se trouve Lola et ses deux petits frères. c'est dans la première partie...je n'ai pas le livre sous les yeux en ce moment mais je crois me souvenir que Marshall leur offre du chocolat et qu'il semble s'intéresser de très près à Lola, et elle a une attitude de petite séductrice, c'est inconscient et ce n'est pas très explicite mais si je me souviens bien, cela lui plait d'être le centre de regard de Marshall, comme elle est en manque d'attention. Mais là encore, ce n'est que mon interprétation de la scène et je pense qu'on peut voir Lola comme une victime innocente, inconsciente de son pouvoir de séduction sur Marshall. |
| | | Remi Subtil compliment
Nombre de messages : 171 Age : 40 Localisation : Paris Date d'inscription : 30/04/2007
| Sujet: Re: Ian McEwan : Atonement Lun 27 Aoû 2007 - 14:33 | |
| Enfin! Après des mois à entendre les éloges et des mois à éviter la section Atonement pour ne pas être spoiler, je peux ajouter mes épithètes aux votres et surtt à ceux de McEwan. - Spoiler:
Tout d'abord l'impression générale. J'ai bcp aimé la division du roman en quatre parties inégales qui donnent une sorte de rythme que la prose de l'auteur étouffe un peu. Que de qualificatifs, d'adjectifs, de subtilités de vocabulaire. J'ai trouvé le vocabulaire de l'auteur parfois ampoulé. Cela se justifie pleinement dans la première partie car c'est vraiment la vision de Briony, ce sont plus les Tribulations du Lecteur que celles d'Arabella. En revanche, je trouve que le style se purifie dans les dernières parties. La première partie est pour moi la plus belle, l'atmosphère caniculaire est vraiment bien traité tant dans les mots que dans le ressenti qu'en a le lecteur, lourdeur, longueur, une sorte de carcan réalisé par l'auteur qui nous cerne de tous les côtés sans qu'on puisse vraiment laisser notre imagination vagabondée sur la psychologie des personnages. L'impression de parcourir la maison des Tallis, comme si j'y étais, m'y promener, ressentir tous les décalages dans les relations, une sorte de froideur, de lourdeur qui accompagne la météo, et qui donne encore plus d'echo à la tension sexuelle qui agite cette partie. J'avoue que cette partie ne manque pas de piquant. Et puis c'est là que tout se joue, le vrai drame, l'erreur ( plus ou moins volontaire) de Briony, et on sait à ce moment que plus jamais ils ne pourront s'aimer. Les deux autres parties m'ont paru plus difficiles à lire. D'abord la guerre et son quotidien ne font pas partie de mes sujets préférés, sensible je suis , et puis je pressentais une sorte de faux. Comme si les souvenirs rapportés étaient plus issus de l'imaginaire, avec des passages se superposant trop bien aux faits plus anciens ( Cécilia et Robbie dans la cuisine) " Reviens...Robbie, reviens " " Leur amour. Ni Briony ni la guerre ne l'avaient détruit" " Reviens, Briony". Impression confirmée par la signature de Briony à la fin. Dès lors tout ce que les parties deux et trois racontaient ne pouvaient pas être complètement vrai. Confirmation dans la dernière partie.
C'est un livre très triste finalement, sa vie durant elle a vécut avec ce poids sur les épaules et elle mourra avec, même si elle est condamnée à tout oublier, et on sent d'ailleurs une sorte de soulagement. Un livre dur, touchant, troublant, très fort aussi. Ma critique a l'air négative mais après qq jours je vous assure que je le recommande vraiment chaudement autour de moi. Et j'ai hâte de voir son adaptation par Joe Wright, qui a l'air très très belle. |
| | | cat47 Master of Thornfield
Nombre de messages : 24251 Age : 67 Localisation : Entre Salève et Léman Date d'inscription : 28/01/2006
| Sujet: Re: Ian McEwan : Atonement Lun 27 Aoû 2007 - 20:20 | |
| Merci pour ces commentaires, Remi, j'ai l'impression que nous avons eu le même ressenti sur de nombreux points (sauf que moi la partie "guerre" ne me dérange pas du tout). - Remi a écrit:
- Ma critique a l'air négative mais après qq jours je vous assure que je le recommande vraiment chaudement autour de moi.
Je ne trouve pas que tu sois négatif, je l'ai certainement été beaucoup plus que toi mais je le répète, certaines parties sont très difficiles à lire en VO, justement pour les questions de style que tu soulignes de manière très précise. Mais tout comme toi je recommande chaleureusement le livre autour de moi. _________________ |
| | | Remi Subtil compliment
Nombre de messages : 171 Age : 40 Localisation : Paris Date d'inscription : 30/04/2007
| | | | cat47 Master of Thornfield
Nombre de messages : 24251 Age : 67 Localisation : Entre Salève et Léman Date d'inscription : 28/01/2006
| Sujet: Re: Ian McEwan : Atonement Mar 28 Aoû 2007 - 0:47 | |
| J'avais compris que tu l'avais lu en en français mais ce que je voulais dire c'est que comme tu parles de vocabulaire ampoulé, j'ai retrouvé la sensation que j'avais eue en le lisant en anglais, je m'étais fait la réflexion du niveau de vocabulaire vraiment très recherché. Cela rend parfois la lecture en vo fastidieuse, surtout les chapitre qui ont très peu de dialogues. J'imagine qu'en traduction cela passe mieux, j'ai d'ailleurs envie de le relire en français pour voir, et aussi parce que je veux le faire découvrir à mon mari donc je vais de toute façon acheter une traduction. _________________ |
| | | LizzyB Ville du Nord...
Nombre de messages : 795 Age : 40 Localisation : Mclaren's pub Date d'inscription : 21/03/2007
| Sujet: Re: Ian McEwan : Atonement Ven 31 Aoû 2007 - 19:02 | |
| bon cette fois c'est sûr je vais me l'acheter, plus je lis vos posts plus l'envie me monte de découvrir ce livre, cette histoire et ses nouveaux personnages de plus la bande annonce du film est tellement allèchante (surtout James McAvoy) qu'il faut que je m'y mette........c'est parti ....... |
| | | Doddy The Lady of Pemberley
Nombre de messages : 7925 Localisation : Paris Date d'inscription : 08/11/2006
| Sujet: Re: Ian McEwan : Atonement Ven 31 Aoû 2007 - 19:10 | |
| Excellente initiative ! Je ne sais même pas comment tu as fait pour résister à notre lobbying intensif pendant tout ce temps. |
| | | Mr Damien Tilney The Knight of Irony
Nombre de messages : 3463 Age : 40 Date d'inscription : 04/10/2006
| Sujet: Re: Ian McEwan : Atonement Ven 31 Aoû 2007 - 19:19 | |
| @ Doddy. A ton avis si tu refais ton sondage sur nos romans préférés, Atonement va t-il remonter dans le classement ? J'ai l'impression que grâce à ce forum beaucoup de gens se sont laissés tenter et beaucoup ne regrettent pas du tout. |
| | | Doddy The Lady of Pemberley
Nombre de messages : 7925 Localisation : Paris Date d'inscription : 08/11/2006
| Sujet: Re: Ian McEwan : Atonement Ven 31 Aoû 2007 - 19:20 | |
| C'est marrant que tu me dises parce que je me suis fait la même réflexion ce matin quand j'allais à mon boulot.
Les grands esprits...
A mon avis il obtiendrait bien plus que les 40 et quelques points qu'il avait eu (ce qui était déjà un très bon score). |
| | | Vethalyn Manteau de Darcy
Nombre de messages : 65 Age : 37 Localisation : Lyon Date d'inscription : 02/04/2007
| Sujet: Re: Ian McEwan : Atonement Dim 2 Sep 2007 - 20:03 | |
| Bonjour à tous, J'ai lu Atonement et voilà ce que j'en ai pensé... Je n'ai rien lu du tout du topic, mais il me semble que vous êtes plutôt très élogieux à propos de ce roman. Pour ma part, je n’ai pas aimé. L’intrigue était intéressante, et j’ai bien aimé la façon dont était amené « le drame ». Mais que c’était long, long… Je n’en pouvais plus de devoir plonger dans la conscience de chacun des personnages, ça ne m’intéressait pas du tout, je voulais qu’il y ait de l’action… D’habitude, les descriptions ne me rebutent pas plus que ça, un style un peu alambiqué m’allèche et l’introspection est quelque chose que j’adore. Les ingrédients étaient réunis, mais ça n’a pas fonctionné. J’ai trouvé ça ennuyeux au possible. La façon qu'a Ian Mc Ewan de décrire dans les moindres détails chaque geste et pensée des personnages m'a un peu irritée. Par ailleurs, les phrases m’ont paru parfois un peu bancales ; je ne sais pas si c’est dû à la traduction, mais ça m’a un peu dérangée. Exemple : « En partie parce qu’elle était jeune et la journée magnifique, en partie parce qu’elle ressentait le besoin naissant d’une cigarette, Cecilia[…] allait au pas de course sur le chemin qui longeait la rivière ». Il y a un truc qui cloche… Est-ce moi qui cherche vraiment n’importe quelle excuse pour critiquer ce livre ou la tournure est est-elle vraiment bizarre ? Bref. Dans la première partie du livre, j’ai quand même eu quelques sursauts d’intérêt grâce au déroulement (lent) de l’intrigue. Mais la seconde partie m’a achevée. J’ai allègrement sauté des dizaines de pages de description de la guerre et j‘ai quand même lu avec un peu d’intérêt les passages décrivant le travail des infirmières en temps de guerre. Et voilà tout. Je suis sûrement passée à côté de cette réflexion autour de la fiction, de la réalité, de l’illusion ; en lisant les dernières pages, je sentais bien qu’il y avait des trucs complexes à voir avec ça, mais ça m’a échappée, et, je dirais, tant pis… L'auteur ne m'a pas assez captivée pour que je fasse l'effort d'y réfléchir un peu... (les facteurs "plage", "mer" et "soleil" ont dû jouer là-dedans aussi ) Voilà, désolée pour les fans, mais maintenant je vais m'empresser de lire attentivement le topic pour voir ce que vous avez tant apprécié dans ce roman |
| | | mimidd Aki no Hoshizora
Nombre de messages : 15717 Localisation : with a Japanese man singing for Rotterdam Date d'inscription : 17/04/2006
| Sujet: Re: Ian McEwan : Atonement Dim 2 Sep 2007 - 20:44 | |
| - Vethalyn a écrit:
- Bonjour à tous,
J'ai lu Atonement et voilà ce que j'en ai pensé...
Je n'ai rien lu du tout du topic, mais il me semble que vous êtes plutôt très élogieux à propos de ce roman. Pour ma part, je n’ai pas aimé. L’intrigue était intéressante, et j’ai bien aimé la façon dont était amené « le drame ». Mais que c’était long, long… Je n’en pouvais plus de devoir plonger dans la conscience de chacun des personnages, ça ne m’intéressait pas du tout, je voulais qu’il y ait de l’action… C'est peut être justement pour ca que tu n'as pas aimé ... Apparemment, tu t'attendais à une tout autre histoire et un tout autre style de narration. Ayant lu avec intérêt ce topic avant de commencer ma lecture, je savais parfaitement à quoi m'attendre, donc je n'ai pas eu de difficultés à entrer dans l'histoire, je n'ai pas été décue par le manque d'action ni par la plongée dans la conscience des personnages Cela dit, tout le monde ne peut pas aimer les mêmes livres, et même en ce qui concerne ce seul livre, tout le monde n'aime pas les mêmes parties ... Pour ma part, j'ai adoré toute la partie tournant autour de la guerre, mais la majorité préfère la première partie ^^ _________________ ずっと続く道 これからも変わらずに 同じことで笑っていよう 一人じゃないよ アホな仲間と =☆= In a road that keeps going without change, let’s keep laughing about the same things. =☆= =☆=☆=☆= You’re not alone. You’ve got this stupid friend with you (道, 丸∞すばる) =☆=☆=☆= |
| | | Lise Bennet Shanghai's Amber Dawn
Nombre de messages : 3243 Age : 31 Localisation : Lorraine or in a daydream... Date d'inscription : 02/06/2007
| Sujet: Re: Ian McEwan : Atonement Lun 3 Sep 2007 - 9:26 | |
| Je comprends Vethalyn, j'ai trouvé le livre assez long dans certains moments, ça ne m'a gênée mais j'ai eu une pensée pour les gens qui n'aimaient pas du tout les répétitions des scènes avec différents points de vues, les réflexions des personnages (sur le mouvement du doigt dans la première partie par exemple) et tout ce qui rallongeait le livre sans être absolument nécessaire à l'histoire (mais je pense que les descriptions de guerre étaient utiles tout de même, enfin ce n'est que mon avis). Comme mimidd l'a dit : tout le monde ne peut pas aimer les mêmes livres. |
| | | Camille Mc Avoy Bits of Ivory
Nombre de messages : 11921 Age : 39 Localisation : in Highbury Date d'inscription : 10/02/2006
| Sujet: Re: Ian McEwan : Atonement Lun 3 Sep 2007 - 10:41 | |
| Moi aussi j'ai trouvé la première partie assez longue en fait, j'étais captivée au début parce que j'attendais la robe verte avec une certaine impatience, mais je trouvais ça long. Il y a eu de l'action avec la lettre et la bibliothèque ( je dirais rien, mais Robbie tout de même:lol!: ). Comme Mimidd, j'ai préféré la deuxième partie, parce que j'ai trouvé qu'il y avait de l'action, ou en tous cas ça arrivait plus vite que dans la première partie. Le livre prend son temps et il faut savoir s'accrocher! Je pense que la perspective du film m'a aidé à tenir bon ( même si j'ai relu le tome 5 d'Harry Potter en milieu de lecture d'atonement^^) La troisième partie sur Brionny et son apprentissage du métier d'infièrmière m'a moins plus, mais encore une fois, après l'arrivée des soldats et donc l'arrivée de l'action, tout allait mieux! La dernière partie, trés dure sur le plan psychologique m'a enthousiasmée. j'imagine la détresse de cette dame agée, et imaginer la sublime Vanessa Redgrave jouer cette partie c'est divin! Elle sera parfaite! Pource qui est du style, la phrase est tout à fait bien construite, c'est juste très très littéraire! |
| | | Popila Free Spirit of Longbourn
Nombre de messages : 2057 Age : 40 Date d'inscription : 27/07/2007
| Sujet: Re: Ian McEwan : Atonement Mar 11 Sep 2007 - 22:55 | |
| J'ai fini Expiation dimanche : incontestablement, Ian McEwan est un grand écrivain, mais je n'ai pas aimé ce livre. Je vais essayer de vous expliquer pourquoi : attention, c'est plutôt réservé à ceux qui l'ont lu et qui aiment les posts très longs : si vous ne possédez pas ces deux qualités, je vous conseille de plutôt passer votre chemin! Ière Partie : Une lente et efficace montée de la tension dramatique. Détail futile pour commencer : j'ai bien aimé que les n° des chapitres soient écrits en toute lettres. Manifestement, Ian McEwan maîtrise l'art de donner vie à ses personnages, et ce grâce à une description minutieuse de leurs sensations et états d'âme. L'enfance est bien incarnée grâce aux jumeaux, l'adolescence grâce à Briony (sale et négligée) et Lola (l'apprentie séductrice), la jeunesse grâce à Robbie et Cécilia (incertitude/avenir). Le désordre qui règne dans toutes les chambres sauf celle de Briony me semble une notation très juste de ce que peut être une maison de vacances, surtout par une chaleur caniculaire. Un double patronage : Jane Austen et Virginia Woolf (+Marcel Proust). Cf l'exergue, tirée de Northanger Abbey. D'emblée, on sait que le thème du livre sera : du danger des romans et de la lecture que l'on fait du monde. La littérature est donc le vrai sujet d' Atonement, et non pas seulement une thématique du roman (cf les préoccupations littéraires de Briony, les lectures de Cecilia, la formation littéraire de Robbie, + bien sûr la bibliothèque). Un thème classique, qui trouve son équivalent dans la littérature française avec Madame Bovary de Flaubert, pour aller vite. Deuxième marraine du livre : Virginia Woolf. Ian McEwan reprend à son compte la technique des flux de conscience, illustrée, entre autres, dans Mrs Dalloway, et reprise ici dans la Ière partie du livre , en particulier avec la scène de la fontaine vue successivement par les yeux de Cecilia, Robbie et Briony. Le patronage de Virginia Woolf est d'ailleurs ironiquement revendiqué dans la IIIème partie, avec la lettre de l'éditeur, qui commente ainsi le manuscrit que lui à envoyé Briony, Deux silhouettes à la fontaine : - Citation :
- Vous avez su à la fois capter le flux de pensée et le représenter par de subtiles différences dans l'intention de caractériser vos personnages. Quelque chose a été saisi. Malgré tout, nous nous sommes demandés si cette technique n'était pas trop redevable de celle de Mrs Woolf.
Ce que j'aime moins :Quelque clichés peut-être : aux yeux de Ian McEwan, les jeunes filles de bonne famille des années 1930 passent leur temps à fumer cigarettes sur cigarettes, boire des cocktails indigestes et porter des robes aguichantes. L'aspect kitsch (voulu) du parc et de la maison, qui fait penser à un décor de théâtre. Mais là, je fais un peu la fine bouche.Au fond, on a tous les ingrédients d'un roman d'Agatha Christie : les tensions latentes au sein d'une famille vivant dans une grande maison tarabiscotée, mais le traitement que Ian McEwan fait subir à ces ingrédients est très différent. La traduction française est très bien écrite, ce qui laisse supposer que le texte anglais est bon. On a une montée du suspense extrêmement efficace ; - Spoiler:
je m'attendais à ce qu'on aboutisse à un meurtre : en fait, on aboutit à son envers, le viol.
Demi-méprise, donc, d'autant que la scène de la bibliothèque est interprété par Briony comme une scène de violence. On songe à Hitchcock qui filmait les scènes d'amour comme des scènes de meurtre, et vice-versa. Un regret : j'aurais aimé que le personnage d'Emily Tallis connaisse un développement ultérieur. Question : pourquoi n'a-t-on pratiquement jamais le point de vue de Lola et de Paul Marshall? Faut-il voir là une stratégie d'évitement de la part de l'auteur? Autant j'aime bien la scène du vase avec son érotisme et sa violence latentes, autant je n'aime pas la scène de la bibliothèque. Moi qui à ce stade de ma lecture pensais -à tort- que le roman avait été écrit dans les années 1950, Ian McEwan se montrant le digne héritier de V.Woolf dans cette reconstitution de l'atmosphère des années 1930, je me suis dit : trop contemporain. Dans la manière d'écrire, je veux dire. C'est la scène "hot" du livre : pourquoi pas. Mais je déteste la phrase suivante : "Ils retinrent leur souffle jusqu'à ce que la membrane se rompe". Je sais bien que Robbie étudie la médecine, mais quand même, on peut décrire la perte de la virginité autrement, de manière plus poétique. Et puis, cette Cecila, qu'est-ce qu'elle fait de sa dignité? Après une lettre aussi crue, une bonne gifle aurait été bienvenue... Son comportement en cette circonstance me pose un problème par rapport aux conventions sociales des années 1930. Il y a une attraction physique entre les jeunes gens, certes, mais la chaleur de la journée, l'énervement, l'exacerbation des désirs, l'ennui de ces longs mois passés à la campagne jouent sans doute beaucoup. S'il n'y avait pas eu cette dramatique affaire policière où Robbie est accusé à tort d'un crime qu'il n'a pas commis, je ne suis pas sûre que l'attirance des deux jeunes gens aurait résisté aussi longtemps que dans le roman, en particulier face aux complications liées à la famille et à l'argent. Malgré toutes les réserves émises, la Ière partie du roman est très bien écrite et tient la route. Surprise avec la IIème partie : ellipse de 5 ansBon, alors là, il faut que j'avoue que j'ai fait un truc qui m'arrive rarement : j'ai compris que j'allais avoir droit à la description de la guerre et de toutes ses horreurs, et comme j'étais arrivée à la 1/2 du bouquin, avec cette Ière partie extrêmement prenante mais un peu longue, étonnée de ce découpage bizarre (je savais qu'il y avait 4 parties, et je constatais que la Ière occupait la 1/2 du volume, donc que les parties 2, 3 et 4 allaient être plus courtes), je suis allée directement lire un peu de le IIIème partie (confrontation Briony/Cecilia) et l'intégralité de la IVème partie. Je sais, c'est très mal. D'habitude, je lis tout d'une traite. Mais il faut croire que la Ière partie m'avait pesé, ou alors, il y a un problème avec cette coupure brutale entre partie 1 et partie 2. Et de fait, j'aurais préféré enchaîner avec un compte-rendu du procès de Robbie, avec les sentiments des différents protagonistes. Mais l'auteur est le seul maître à bord après Dieu. Ceci dit, le fait que les parties soient de longueur inégale ne m'a pas choquée : dans un roman classique, on se serait arrangé pour que les parties soient égales, au risque de diluer la matière dans un flot de considérations inutiles ; ici, j'ai trouvé que ce côté asymétrique de la construction avait quelque chose qui rappelait certains tableaux/sculptures cubistes. (je ne sais pas si je suis très claire? ) Et les 4 parties sont d'un niveau égal du point de vue de la qualité de l'écriture. Retour à la IIème Partie, ou : Robbie s'en va-t-en guerre.Je ne m'attendais guère à ce qu'un auteur anglais traite de la guerre de 1940 et de la retraite de Dunkerque : après coup, j'ai trouvé mon a priori stupide. Beaucoup de livres ont déjà évoqué la question, en particulier Robert Merle, dans Week-end à Zuydcote, dont je suis incapable de vous dire quoi que ce soit, puisque je ne l'ai pas lu, mais qui fait référence. Ian McEwan s'en tire bien dans cette narration du chemin de croix de Robbie et de ses deux compagnons (l'expression a été utilisée par quelqu'un d'autre dans ce topic, et elle me semble très juste). Robbie se remémore Cecilia, ses lettres, leur entrevue à sa sortie de prison. Il se remémore également Briony, le béguin qu'elle a eu pour lui à l'âge de 10 ans. Briony y fait allusion dans la Ière partie. Je n'arrive pas à me convaincre que Briony ait + ou - sciemment menti parce qu'elle était jalouse de l'amour de Robbie pour Cecilia. En revanche, il est possible qu'elle ait été jalouse de l'affection de sa soeur au point de souhaiter que Robbie disparaisse de sa/ de leur vie. Mais cette hypothèse n'est pas vraiment relayée par le roman. IIIème Partie, ou : Briony infirmière.La IIème et le IIIème partie sont très différentes de la Ière : la Ière partie développait plusieurs points de vue ; la IIème développe le point de vue de Robbie, la IIIème, celui de Briony. Dans les deux cas, il faut patienter une page ou deux pour avoir confirmation de l'identité du personnage : personnellement, je trouve ce jeu de devinettes entre l'auteur et le lecteur un peu agaçant. Nous avons dans cette partie une description de l'activité d'infirmière de Briony à l'hôpital, description préparée par la lettre de Cecilia dans la IIIème partie apprenant à Robbie l'intention de Briony de revenir sur ses déclarations au procès. Finalement, on n'a pas la description du processus qui a permis à Briony de commencer à douter de ce qu'elle avait cru jusqu'alors, sinon de manière rétrospective dans la Ière partie. On a tout d'abord une description des blessés dont la souffrance est souvent insoutenable, et qui culmine dans la scène très émouvante où l'on voit mourir un jeune Français, fils de boulanger. Ensuite vient le mariage de Lola avec Paul Marshall, épisode qui est un peu expédié ; la lettre de l'éditeur, très éclairée et éclairante, et enfin l'entrevue de Briony et de Cecilia - Spoiler:
+ Robbie : surprise! Je le pensais mort à la fin de la IIème partie. Cette intuition était la bonne mais Ian McEwan s'ingénie à multiplier les fausses pistes (cf déjà avec l'identité du violeur de Lola : Paul Marshall? Danny Hardmann? Notons, au passage, qu'en accusant sans preuve l'un des deux, Cecilia cède d'une certaine manière à un préjugé de classe : comme quoi, tout le monde peut se tromper.) Je n'arrive pas à me forger une opinion de cette entrevue. Je suis restée un peu sur ma faim. Bien sûr, je ne m'attendais pas à ce que Robbie et Cecilia pardonnent à Briony. Mais pourquoi leur rend-elle visite? N'aurait-elle pas dû d'abord mettre son projet à exécution plutôt que d'aller s'humilier chez sa soeur? C'est une fois le jugement cassé que Briony aurait pu espérer renouer contact avec eux. Et la confrontation avec Lola et Paul Marshall est soigneusement évitée, ou du moins rendue inutile : dommage également. IVème Partie : Epilogue, Londres, 1999.- Spoiler:
Super ta remarque, Remi, sur la fin de la IIIème partie. Je n'avais pas fait attention : effectivement, c'est signé B.T. Londres 1999, ce qui aurait dû nous mettre la puce à l'oreille. Et, au passage, je souscris totalement à l'analyse que fait Mimidd, je crois, de la scène du viol. Mais tout ce que j'ai lu sur ce topic m' a beaucoup éclairé, de toute manière.
Briony est devenue une vieille dame (77ans). Elle est un écrivain reconnu. Elle apprend qu'elle va perdre progressivement la mémoire, alors qu'elle vient juste de terminer la dernière moûture du grand roman de sa vie, dont on peut supposer qu'il recoupe exactement les contours de ce que nous venons de lire. Ce roman ne pourra être publié qu'à titre posthume. Après tout ce poids de la culpabilité porté sa vie durant, on mesure le soulagement paradoxal qu'elle éprouve en apprenant qu'elle va tout oublier de sa vie passée : l'oubli, la perte de la mémoire apparaît donc comme une forme de rédemption. Surtout que : - Spoiler:
en fait, Robbie et Cecilia sont morts au cours du Blitz ; tout ce qui suit la scène du mariage de Paul avec Lola a été inventé. D'où sans doute la scène parallèle : Lola et Paul 50 ans plus tard. Retour au domaine familial transformé en restaurant hôtel de luxe. Dîner d'anniversaire au sein de la famille. Représentation par les petits enfants des jumeaux de la pièce qui n'avait jamais été jouée en I, Les tribulations d'Arabella, écrite par Briony à l'âge de 13 ans : la boucle est bouclée, et ce de manière fort habile : Ian McEwan a réussi à nous rouler dans la farine. Le thème du roman, la naissance d'une vocation littéraire, trouve son aboutissement. NB : il me semble que la mention de la chambre de la tante Venus, que Briony occupera à la fin, n'est pas anodine. Personnage enfermé (comme la tante Léonie dans A la Recherche du temps perdu, et comme Proust lui-même), Briony devient semblable à sa mère, Emily, qui se retirait souvent dans sa chambre à cause de ses migraines, et qui savait ce qui se passait dans la maison rien qu'en écoutant les bruits, sans avoir besoin de voir : la vue se trouve ainsi partiellement discréditée. En résumé, j'admire la construction littéraire de l'oeuvre, mais je n'aime pas, contrairement à beaucoup d'entre vous, l'intrigue amoureuse, qui, d'ailleurs, se révèle, à la fin, pour une bonne part fictionnelle.S'il avait fallu développer les motivations des personnages, j'aurais dit que Cecilia, en s'accrochant à Robbie, trouve un prétexte pour s'arracher de son milieu familial, que, dans sa rage de jeune adulte, elle rejette ; et que, Robbie est fasciné par Cecilia dans la mesure où elle est la fille des patrons, bien qu'il affiche dans la Ière partie son absence de complexes vis-à-vis de ses origines. Nota : le personnage de la mère de Robbie aurait pu gagner à être développé dans la suite. On a dans la Ière partie un faisceau de virtualités intéressantes dont aucune n'est réellement exploitée : dommage, mais sans doute que Ian McEwan ne cherche pas à faire un roman psychologique traditionnel. Encore une fois, c'est la littérature le sujet central de l'oeuvre ; l'accès à la littérature, thème proustien par excellence. Proust en vient à l'écriture après la mort de sa mère pour exorciser un sentiment de culpabilité. La Recherche est le récit de la naissance et de l'affirmation de la vocation d'un écrivain. Ian McEwan ne se montre donc pas particulièrement original, si ce n'est qu'il adopte un point de vue féminin, celui de Briony. La Ière partie est de loin la plus personnelle, la IIème et la IIIème partie étant davantage marquées par l'aspect documentaire, d'ailleurs moqué au début de la IVème partie quand Briony vient rendre des documents à la bibliothèque de l'Imperial War Museum. Autres remarques (digressives) qui me viennent à l'esprit concernant l'importance de la littérature dans le roman : le fait que Cecilia lise Clarissa Harlowe de Richardson au début du roman. Ca a probablement un sens. Je crois que c'est un roman par lettres (cf l'importance des lettres dans le roman de Ian McEwan). C'est le récit d'une séduction par un Lovelace. Paul Marshall serait ce Lovelace moderne, mais les choses ont changé depuis le XVIIIème siècle : les jeunes filles ne sont plus si naïves et innocentes. La véritable séductrice, c'est Lola -on devrait effectivement plutôt dire Lolita. Intéressante également, la description de la dégénérescence d'un monde : Cecilia et son frère ne sont pas des élèves brillants ; le lien qui unissait leurs parents s'est peu à peu dissous et on apprend en IV que le père de Briony s'est remarié. La soeur d'Emily Tallis, Hermione, est en train de divorcer. Les domestiques ont des vues sur les filles de leurs maîtres (Robbie/Cecilia, Hardman/Lola). Le fils de bonne famille, Paul Marshall, se commet avec une fille beaucoup plus jeune que lui. Le spectre de la guerre est présent dès le début, avec le père, qui travaille au ministère, et la famile Marshall, qui a trouvé dans l'armée un marché où écouler ses chocolats. Mais le thème, banal en lui-même, n'est qu'esquissé. |
| | | Popila Free Spirit of Longbourn
Nombre de messages : 2057 Age : 40 Date d'inscription : 27/07/2007
| Sujet: Re: Ian McEwan : Atonement Mar 11 Sep 2007 - 23:03 | |
| Suite et fin du message précédent : Le personnnage le plus intéressant et le plus complexe, somme toute, c'est Briony ; Robbie et Cecilia ne sont que des figures.L'auteur est brillant, peut-être trop : si je trouve les jeux formels du livre intéressants, j'accroche moins que lorsqu'il se place à l'intérieur de ses personnages, de ce qu'ils vivent. C'est pourquoi j'ai une prédilection particulière pour le début, même si la IVème partie constitue une pirouette habile et un joli tour de force et si II et III ne déméritent pas par rapport à l'ensemble. Un bon roman, donc, que je relirais sans doute avec plaisir, même si je n'aime pas ce qui en constitue le fond. Dans tous les cas, ce fut une lecture stimulante, et je remercie les membres de cette auberge de me l'avoir fait découvrir. |
| | | Mr Damien Tilney The Knight of Irony
Nombre de messages : 3463 Age : 40 Date d'inscription : 04/10/2006
| Sujet: Re: Ian McEwan : Atonement Mer 12 Sep 2007 - 14:47 | |
| @ Popila. J'ai lu toute ta critique. On voit que quand tu lis un livre tu utilises toute ta culture pour pouvoir en parler ensuite.
Excuse-moi, j'espère ne pas te vexer, mais je ne comprends pas du tout ce que tu n'as pas aimé dans ce livre. Toute ton analyse montre à quel point le romancier est cultivé et doué (ce que je crois également) mais au final tu le trouves trop doué ? Le problème est donc du côté émotionnel alors ?
La manière dont tu nous explique ta lecture est intéressante. J'ai l'impression que tu t'es construit un livre qui n'existe pas parce que le roman tel qu'il est ne te convient pas.
Toutes les hypothèses que tu proposes sur les mobiles des personnages ne prouvent pas que l'auteur n’est pas doué en analyse psychologique. L'auteur a choisi clairement l'ambiguïté. Ils laissent aux lecteurs le soin d'émettre des hypothèses. Au final nous ne savons pas si Lola est une séductrice ou une victime. Nous ne savons pas si Robbie et Cecilia s'aiment véritablement. Nous ne savons pas si Briony était jalouse de sa sœur ou jalouse de Robbie. L'art du romancier est celui de l'ambiguïté. Pourquoi ? Peut-être parce que le roman est celui de Briony et qu'elle a appris qu'on ne peut pas comprendre ce qui anime notre entourage et qu'on reste toujours coincé dans notre subjectivité. Le choix de mimésis psychologique (le fait mimer la psychologie d’être réel) est clairement celle de l'ambiguïté. Comme tu le dis Ian McEwan refuse tout simplement de faire un roman psychologique traditionnel où tous les mobiles et les gestes des personnages sont clairement expliqués. Le romancier écrit après Virginia Woolf qui elle-même refusait de représenter la psychologie de ses personnages de façon monolithique. Je ne comprends donc pas ce que tu attendais de ce livre puisque toi-même reconnais l’héritage littéraire de l’auteur. Tu n’aimes peut être pas les romans de Virginia Woolf (ce qui n’est en rien condamnable).
Tu trouves agaçants que l’auteur te mène en bateau. Je peux le comprendre. Nous sommes tous des lecteurs libres. Nous ne sommes pas obligés de jouer le jeu. Justement dans ce livre le jeu consiste à rendre flou la limite en fiction et réalité. C’est dommage (à mon avis) de lire le dernier chapitre avant d’avoir lu le reste du livre. Je ne comprends donc pas cette phrase « contrairement à beaucoup d'entre vous, l'intrigue amoureuse, qui, d'ailleurs, se révèle, à la fin, pour une bonne part fictionnelle. ». Reproches-tu à l’histoire d’amour d’être une fiction ? Mais tout le livre en est une. Tout le livre joue sur la fiction et la création de cette fiction.
J’ai hâte de pouvoir échanger avec toi sur ce livre. Je suis étonné de voir à quel point tu sais décortiquer avec précision la construction du livre pour au final de pas l’aimer ! Tout ce que tu as analysé fait la richesse du livre à mes yeux ! |
| | | Popila Free Spirit of Longbourn
Nombre de messages : 2057 Age : 40 Date d'inscription : 27/07/2007
| Sujet: Re: Ian McEwan : Atonement Mer 12 Sep 2007 - 16:39 | |
| @damien : j'espère que le compliment sur ma culture ne cache pas un vilain soupçon suivant lequel je friserais le pédantisme... car là, j'en serais très vexée! Si je parle de Proust, c'est parce que j'avais sans cesse cette référence à l'esprit en lisant le livre, et que j'ai davantage pratiqué cet auteur que Virginia Woolf ; or, par bien des aspects, ils sont très proches. Sinon, pour répondre à une de tes interrogations, j'aime bien les romans de Virginia Woolf, même si je je n'ai lu que Mrs Dalloway. Donc, non : ce n'est pas à cause d'une haine viscérale pour cet auteur que j'ai un avis mitigé au sujet d' Atonement! Le fait que tu n'aies pas compris ce que je n'ai pas aimé dans ce livre ne me vexe pas du tout : c'est peut-être ce que j'ai le moins bien expliqué dans mon post, malgré sa longueur. Et pourtant, c'est vrai : malgré le talent de l'auteur, je n'aime pas ce livre. Peut-être parce que le plaisir que j'ai pu éprouver à le lire était surtout d'un ordre purement intellectuel, et pas vraiment émotionnel. Tu as raison de dire que je me suis construit un livre qui n'existe pas : effectivement, par certains aspects, le roman tel qu'il est ne me convainct pas complètement. En revanche, je ne crois pas avoir dit que le romancier n'était pas doué en analyse psychologique : je pense tout le contraire, et j'ai souligné à quel point dans la Ière partie les personnages, qu'ils soient enfants, adolescents ou adultes, me paraissaient sonner juste. Ce que j'aurais tendance à reprocher à l'auteur, c'est d'avoir laissé ensuite de côté certains personnages qui étaient intéressants, et ce, à mon avis (mais je suis peut-être injuste de le penser) dans une stratégie d'évitement. J'ai l'impression (erronée?), à la fin de la Ière partie, que le roman ne prend pas la direction qu'il aurait dû prendre, au vu des pistes suggérées en I. Si l'auteur choisit de nous faire vivre les choses depuis la conscience de chacun des personnages, pourquoi certains se trouvent-ils exclus de cette démarche? Que les choses soient ambiguës concernant les personnages ne me gêne pas : j'aurais même tendance à dire que l'auteur ne les rend pas toujours suffisamment ambigus (voir dans le post précédent la question du béguin que Briony aurait éprouvé à l'âge de 10 ans pour Robbie). Au reste, représenter des personnages de façon non monolithique -avec leurs altermoiements et leurs contradictions- n'est jamais qu'une façon de faire encore et toujours de la psychologie, mais de façon plus fine. Sur le fait que Ian McEwan nous mène en bateau : cela ne m'agace pas (j'ai donné l'impression du contraire? Damien, tu me vois donc comme une personne bien vindicative... Je prends note!). C'est bien sûr très très malin, mais ce n'est pas la 1ère fois que ça m'arrive (voir les romans d'Agatha Christie). - Citation :
- C’est dommage (à mon avis) de lire le dernier chapitre avant d’avoir lu le reste du livre.
C'est comme ça, je n'ai pas pu m'en empêcher : c'est un peu comme quand on a un gâteau fait de biscuit et de chocolat, et qu'on mange d'abord le chocolat avant d'entamer le biscuit : j'invoquerais pour ma défense que contrairement à certains sales gosses, j'ai mangé les deux. - Citation :
- Je ne comprends donc pas cette phrase « contrairement à beaucoup d'entre vous, l'intrigue amoureuse, qui, d'ailleurs, se révèle, à la fin, pour une bonne part fictionnelle. »
J'ai voulu dire qu'à mes yeux l'intrigue amoureuse n'était pas suffisament crédible : pour qu'elle le soit, je trouve qu'il aurait fallu que Ian McEwan nous la rende plus complexe et moins monolithique. Pour ma part, je n'arrive pas à y adhérer (ce n'est pas le cas de tout le monde, j'en suis consciente), mais en aucun cas je ne reproche à l'histoire d'être une fiction. Bien au contraire : le fait que R et C n'aient pas survécu à la guerre, même si c'est moche, me semble plus satisfaisant du point de vue de la seule logique. J'ai eu l'impression, en lisant le livre, que chaque partie constituait une pirouette par rapport à la précédente, sinon un désaveu : la Ière partie, façon V.Woolf, est ensuite dénoncée comme telle en III ; la IIè et la IIIè, plus documentaires, sont dénoncée en IV, comme si l'auteur n'assumait pas pleinement le choix de telle ou telle écriture, hormis peut-être dans la dernière partie. - Citation :
- Je suis étonné de voir à quel point tu sais décortiquer avec précision la construction du livre pour au final de pas l’aimer ! Tout ce que tu as analysé fait la richesse du livre à mes yeux !
C'est parce que le livre est extrêment riche et intéressant, mais comme je l'ai expliqué plus haut, mon plaisir à la lecture était intellectuel, pas émotionnel. Plus exactement, j'éprouvais de l'empathie pour les personnages au début, mais l'histoire d'amour entre R et C m'a laissée complètement froide. Bien sûr, la description de la guerre et des souffrances à l'hopital m'ont touchée (je ne suis pas un monstre, quand même!) et l'épilogue aussi. En fait, mes réserves concernent surtout cette soi-disant histoire d'amour, à laquelle j'ai vraiment du mal à croire (serais-je insensible?) et ce qui suit la Ière partie : j'ai été un peu déçue par rapport à ce que j'attendais, d'où cette reconstruction de ma part -un peu vaine, peut-être- du roman qui aurait pu être écrit à la place. Je sais que tout le monde ne sera pas d'accord avec moi, mais j'espère avoir été un peu plus claire... |
| | | cat47 Master of Thornfield
Nombre de messages : 24251 Age : 67 Localisation : Entre Salève et Léman Date d'inscription : 28/01/2006
| Sujet: Re: Ian McEwan : Atonement Mer 12 Sep 2007 - 17:16 | |
| J'ai lu ta brillante analyse avec beaucoup d'intérêt, Popila, et je me suis laissée quelques heures pour y réfléchir avant d'y répondre. Comme Damien, j'ai été un peu étonnée que ta conclusion soit que tu n'aimais pas le livre car il me semble avoir été plus sévère que toi dans mes critiques et pourtant je l'ai aimé. Lorsque tu parles de faisceau de virtualités intéressantes dont aucune n'est réellement exploitée, j'ai un peu de mal à te suivre. Je trouve au contraire que MacEwan exploite avec maîtrise l'impact des évènements sur Briony bien sûr, mais également sur Robbie et indirectement sur Cecilia. Les autres personnages étant secondaires à mes yeux, je ne m'attendais pas à ce qu'ils soient plus développés. Ce que j'aime, c'est le changement de rythme et d'approche, l'auteur met ses personnages dans une situation historique exceptionnelle et met ainsi en perspective les drames individuels avec un monde qui lui aussi subit les conséquences d'un cataclysme. Je n'ai pas ressenti cela comme une pirouette, j'ai apprécié l'approche. Tu dis également que mettre la création littéraire au centre et parler de la vocation d'un écrivain n'est pas très original. Sans doute, mais quel sujet l'est vraiment? Si chaque nouveau roman écrit ne devait traiter que de thèmes jamais évoqués auparavant, nos PAL seraient sans doute bien moins hautes. Sur la question de l'histoire d'amour à laquelle tu n'accroches pas, c'est évidemment très personnel et cela ne se commande pas. Je dirai simplement que l'histoire d'amour est ici un prétexte, une sorte de péripétie annexe (pardonnez-moi!) et c'est peut-être pour cette raison qu'elle peut en décevoir certains. Conséquence positive de ton post, j'ai relu certains passages de la troisième partie, en particulier la lettre de l'éditeur et la scène du mariage. Ce qui m'a permis de voir, et ceci n'est pas une réponse à tes commentaires mais plutôt une continuation de la discussion menée plus haut, - Spoiler:
que le mot violeur est clairement mentionné dans ce passage mais que malgré tout, l'ambiguité n'est pas totalement levée, même si l'auteur donne des raisons très valables au fait que la jeune fille épouse son agresseur: elle se sauve de l'humiliation (comme Mimidd l'avait très justement souligné) en tombant amoureuse de son agresseur ou tout au moins en le faignant, et par ailleurs, il fait bien sûr une excellente affaire du point de vue financier , ce qui correspond assez bien à son caractère. Je dis que l'ambiguité n'est pas levée car tout cela est encore présenté come étant le point de vue de Briony, c'est son explication à ce fait tout de même surprenant. Ceci ne nous indique toujours pas pourquoi au moment des faits Lola a accepté qu'un innocent soit accusé: elle ne pouvait tout de même pas déjà penser à un futur mariage possible qui la tirerait de ce mauvais pas, à moins qu'elle n'ait été attirée par Marshall et dans ce cas, le viol n'en est que partiellement un. Je crois toujours que Marshall a tout de suite représenté pour Lola une image d'homme attirante, ne serait-ce qu'à cause de sa situation sociale. Le soir des faits, Marshall en a profité pour lui forcer la main, sa résistance, expliquant les traces de violence, étant certainement plus provoquée par son souhait d'avoir un comportement conforme aux convenances que parce qu'elle détestait l'homme qui profitait de sa vulnérabilité.
_________________
Dernière édition par le Mer 12 Sep 2007 - 17:30, édité 1 fois |
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