Une auberge pour les admirateurs de Jane Austen, et bien plus encore... |
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| Au Bonheur des dames, Semaine 1 : Chapitres 1 à 3 | |
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Auteur | Message |
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Selenh Méchante Femme Savante
Nombre de messages : 7065 Age : 65 Localisation : Aquitaine. Date d'inscription : 24/02/2010
| Sujet: Re: Au Bonheur des dames, Semaine 1 : Chapitres 1 à 3 Jeu 4 Oct - 19:05 | |
| - Annwvyn a écrit:
- Et bien pour Zola, je suppose que c'était la même chose. Seulement (enfin je crois) à son époque, il n'y avait qu'une seule chose qui pouvait appeler à cette consommation hystérique, de masse : le nouveau concept du grand magasin. Et il semble véridique que c'étaient les femmes qui étaient les principales victimes. Quoi de plus naturel que ce mépris, ou du moins, cette incompréhension, devant cette hystérie ?
Je ne le trouve ni méprisant (ça c'est Mouret) ni incompréhensif, qu'est-ce qu'il ne comprend pas? Le projet de son roman fait qu'il montre des personnages féminins comme masculins divers sur le plan psychologique, il y a toute une palette d'individuels d'un côté; et de foules comme tu le disais à juste titre plus haut, dans le délire de la consommation. Et même dans cette foule il y a un échantillonnage de toutes sortes de consommatrices, dont l'avisée et l'éternelle promeneuse qui n'achètera jamais rien. Et ce n'est pas leur moralité, leur psychologie qui sont en cause, Zola excelle à montrer des phénomènes sociaux, comment la collectivité aussi modèle des individus. - Citation :
- L'émission expliquait qu'à l'époque, les femmes ne pouvaient jamais se balader seules sauf pour aller à l'église ou faire leurs emplettes.
Eh bien l'émission se trompe, figure-toi. Même Miss Margaret peut se promener seule à Milton quinze ans plus tôt et les petites bourgeoises parisiennes seraient aussi serrées que des infantes espagnole? D'ailleurs rien que de dire qu'on n'est pas libre quand on peut seule faire ses emplettes, c'est assez paradoxal! Que ne peux-tu faire si tu veux quand tu es libre de sortir en ville? À commencer par un cinq à sept, surtout quand le mari en fait autant de son côté! Et les grands magasins ne les ont pas rendues plus libres d'aller seules au café, au théâtre ou à l'Opéra. Ou de faire des études, ou d'accéder à des métiers "d'homme". Et puis on est à Paris en 1864, là! L'émission généralise un «idéal» qui n'est pas si monolithique au XIXe, variantes de lieu, de temps, et surtout de classes sociales (tu vas voir comment se conduisent les femmes du peuple dans les autres chapitres!) Le Bonheur des dames n'est visiblement pas fréquenté par la très haute société dont les mœurs n'ont pas changé, mais par des bourgeoises (ni londoniennes, ni viennoises, françaises, et chargées du budget familial, ce qui montre un certain degré d'autonomie préalable!). Déjà ce sont des femmes mariées, que nous voyons, toutes les jeunes filles sont avec maman. Et ces dames pouvaient tout à fait se balader seules pour faire les magasins avant. Bien sûr, dans les grands magasins ça devient l'orgie, parce qu'on peut très vite y avoir accès à un salon de thé, retrouver les copines au lieu de les visiter en laissant sa carte et en se gelant les pieds. Comme au début des galeries marchandes, tiens. Certains s'y sont mis à y camper, mais pour autant ils n'étaient pas aliénés avant ni moins après. - Citation :
- c'étaient des lieux où elles étaient totalement libres. Zola est passé à côté de ça mais il manquait sans doute de recul
Non, libres de quoi de plus, sous le regard des vendeuses et de toutes leurs alter ego, toutes ces dames éprises de ragot? Impossible d'y passer un rendez-vous sans un luxe de précautions. C'était un grand lieu social, culturel et commercial comme le café pour les hommes, qu'elles n'avaient pas comme ça avant, ça c'est vrai. Elles ont pu "s'éclater" en femmes et cela peut certainement accroître le sentiment de valeur et d'identité de chacune, c'est vrai aussi, mais c'est une libération relative et indirecte alors, dont on parle! Zola fait partie de leur classe, c'est un bourgeois relativement cossu mais pas «de la haute» il sait bien comment vivent ces (ses) femmes. Et pour ce qui est de la liberté des femmes parisiennes, il en connait un rayon. Ok, les grands magasins familiarisent la société avec la notion que le plaisir féminin c'est normal, diffuse encore plus cette idée, mais à cette époque ce n'est pas un mouvement de libération, une véritable avancée féminine auquel on accède par la fréquentation du grand magasin. |
| | | zoju Romancière anglaise
Nombre de messages : 1666 Age : 51 Date d'inscription : 21/11/2011
| Sujet: Re: Au Bonheur des dames, Semaine 1 : Chapitres 1 à 3 Jeu 4 Oct - 19:08 | |
| - Selenh a écrit:
- Il y en a un paquet qui le traitent de «pornographe» autour de lui.
. Ca reste du " pornographe " bien soft, en comparaison avec ce qu'on trouve aujourd'hui. J''ai trouvé Nana , très vague, alors qu'il parle de la vie et œuvre d'une prostituée, mais c'est un autre débat Annwvyn: j'ai également vu cette émission sur arte, qui étai très intéressante. Moi aussi, j'ai retenu que, selon cette émission, les grands magasins ont permis aux femmes pour la première fois, une nouvelle forme d’émancipation dans la gestion d'un budget notamment. Dans le même temps, ils donnent un peu trop d'importance au rôle des grands magasins, car ils étaient réservés à une élite parisienne. La province n'y avait pas accès. |
| | | Annwvyn Subtle scent of rain
Nombre de messages : 8654 Age : 35 Localisation : Paris Date d'inscription : 24/06/2009
| Sujet: Re: Au Bonheur des dames, Semaine 1 : Chapitres 1 à 3 Jeu 4 Oct - 19:39 | |
| Selenh, je ne voulais pas dire que Zola ne comprenait pas, ou était méprisant. Je voulais juste dire qu'aujourd'hui devant le délire des consommateurs, nous pouvions nous montrer méprisant (comme Mouret le fait) ou du moins n'y rien comprendre. Et c'est en ceci que le discours méprisant envers les femmes de Mouret (je n'ai aucune idée de ce que Zola en pensait personnellement ! ) ne m'étonne et ne me choque absolument pas ! Par ailleurs, j'ai lu ton post avec beaucoup d'attention, et je dois dire que je n'ai pas encore tranché. Les grands magasins offraient une liberté relative, là je suis d'accord (avec toute la foule, je veux bien le croire ), mais je pense encore que les bourgeoises (les classes populaires sont à mettre à part, comme je l'ai dit je parlais ici essentiellement des clientes de la bourgeoisie) avaient peu de sphères de liberté. Et je reste persuadée que se balader sans chaperon dans la rue, ça n'était pas très bien vu. Aussi, l'émission d'Arte m'avait semblé tout à fait pertinente (quoique surprenante, je ne m'attendais pas à une telle analyse). Les grands magasins, nouveau lieu de loisirs unique en son genre, presque exclusivement réservé aux femmes, bouleversait (sous une apparence inoffensive et inattendue), les habitudes de l'époque. Mais Selenh, il faudrait que tu jettes un oeil à l'émission, tu pourrais nous dire précisément ce que tu en penses. Zoju : je pense que l'émancipation d'une classe restreinte (la bourgeoisie parisienne) peut bien conduire à une émancipation généralisée (ou institutionalisée). Auquel cas les grands magasins auraient bien pu marquer le début de cette nouvelle forme d'émancipation des femmes. Et nous reparlerons des classes laborieuses par la suite : il faut dire que nos vendeuses travaillent, gagnent et dépensent leur propre argent... si ça ce n'est pas de l'émancipation ! |
| | | Lily of the valley Sherlock's Blue Scarf
Nombre de messages : 9788 Age : 55 Localisation : Pile entre Honoré (de B) et George (S)... Date d'inscription : 29/06/2012
| Sujet: Re: Au Bonheur des dames, Semaine 1 : Chapitres 1 à 3 Ven 5 Oct - 8:59 | |
| Je ne suis pas raisonnable, ce matin à 5h je lisais le chapitre 7...mais je ne commente que les 3 premiers... Je persiste à dire que depuis le début et même avant le 4e chapitre, Mouret me touche... Il me touche même quand il veut "tout bouffer". On a l'impression qu'il comble ainsi une lacune... C'est un personnage très latin ce qui le différencie des Thornton and co (qui soit dit en passant pouvaient très bien ne pas avoir de passé "féminin"... Je pense que c'est tout à fait possible)... Il a besoin de ce tourbillon qu'est son magasin que sont les femmes autour de lui, pour vivre. Je ne sais pas trop comment l'exprimer... Dès le début il porte un regard différent sur Denise (le passage des "yeux vieil or"...) comme si elle représentait une parenthèse, une pause dans ce tourbillon dont il fait sa vie... Bref, il m'est sympathique mais n'est tout de même pas obligé d'être barbu.... !!! |
| | | serendipity Aurora Borealis Chaser
Nombre de messages : 12420 Date d'inscription : 31/05/2007
| Sujet: Re: Au Bonheur des dames, Semaine 1 : Chapitres 1 à 3 Ven 5 Oct - 9:07 | |
| Peut-être devrions nous d'ores et déjà ouvrir un topic pour la 2è partie de la lecture, cela éviterait que les discussions ici ne "débordent" un peu du cadre (j'ai peur d'être spoilée par certaines impressions ... des extraits du 4è chapitre ayant été postés ainsi que des impressions de lecture postérieures) Sinon, je passais pas ici pour poser une question, je me suis rendue compte ce matin (en lisant le chapitre 4, donc je suis moi aussi HS mais je ne spoilerai personne ) que je confondais allègrement Bourdoncle et Bouthemont. Quelqu'un peut me rafraîchir la mémoire sur le who's who |
| | | Fred Amazing Needle Spirit
Nombre de messages : 3739 Age : 53 Localisation : les pieds sur terre et la tête dans les nuages Date d'inscription : 05/10/2009
| Sujet: Re: Au Bonheur des dames, Semaine 1 : Chapitres 1 à 3 Ven 5 Oct - 9:26 | |
| serendipity, regarde ici: et là: J'ai honte, je n'ai pas encore commencé... Mais comme je suis un peu patraque aujourd'hui, je vais prendre le temps de m'allonger et de lire en espérant pouvoir m'arrêter au chapitre 3 |
| | | marie21 Lost in RA Sunbae
Nombre de messages : 19045 Age : 45 Localisation : In a forest, halfway from the Peak District to Seoul with a stopover in Istanbul Date d'inscription : 25/09/2006
| Sujet: Re: Au Bonheur des dames, Semaine 1 : Chapitres 1 à 3 Ven 5 Oct - 9:37 | |
| d'après ce que j'ai compris, Bourdoncle est le directeur adjoint (et associé, il a suivi Mouret dès le début et a investi dans le magasin ) , le type qui accompagne toujours Mouret lors de ses déplacements dans le magasin, - Spoiler:
celui ci m'a paru très froid, assez méprisant à l'égard des femmes, de Denise et des employés...il ne m'est pas du tout sympathique, surtout qu'à part acquiescer à tout ce que dit Mouret (il tente de le contredire à plusieurs reprises ou bien ne semble jamais convaincu par les idées de Mouret mais finit toujours par se ranger à son avis! ) et le suivre, il ne semble pas très utile dans le magasin! c'est lui qui se charge de renvoyer les employés!
Bouthemont.est un employé du magasin! il me semble qu'il a du poids dans le magasin, et donc n'est pas un simple vendeur! ( spoiler chapitres suivants 6/7/8, - Spoiler:
c'est lui qui est aussi renvoyé en même temps que Denise pour lui avoir trouvé un petit travail en plus, et qui ensuite monte sa propre affaire, un petit magasin pas loin du BDD)
EDIT: Merci Fred! c'est plus clair ainsi!! |
| | | Lily of the valley Sherlock's Blue Scarf
Nombre de messages : 9788 Age : 55 Localisation : Pile entre Honoré (de B) et George (S)... Date d'inscription : 29/06/2012
| Sujet: Re: Au Bonheur des dames, Semaine 1 : Chapitres 1 à 3 Ven 5 Oct - 9:46 | |
| - marie21 a écrit:
Bouthemont.est un employé du magasin! il me semble qu'il a du poids dans le magasin, et donc n'est pas un simple vendeur! ( spoiler chapitres suivants 6/7/8, - Spoiler:
c'est lui qui est aussi renvoyé en même temps que Denise pour lui avoir trouvé un petit travail en plus, et qui ensuite monte sa propre affaire, un petit magasin pas loin du BDD)
EDIT: Merci Fred! c'est plus clair ainsi!! Non, ça c'est Robineau.... |
| | | serendipity Aurora Borealis Chaser
Nombre de messages : 12420 Date d'inscription : 31/05/2007
| Sujet: Re: Au Bonheur des dames, Semaine 1 : Chapitres 1 à 3 Ven 5 Oct - 9:49 | |
| Merci Fred et Marie, très gentil de votre part (il allait me falloir repartir plusieurs pages en arrière et actuellement, je n'ai pas beaucoup de temps) @ Lily, ah oui il y a Robineau aussi et je mélange aussi (lil faut que je me fasse une fiche ). |
| | | Lily of the valley Sherlock's Blue Scarf
Nombre de messages : 9788 Age : 55 Localisation : Pile entre Honoré (de B) et George (S)... Date d'inscription : 29/06/2012
| Sujet: Re: Au Bonheur des dames, Semaine 1 : Chapitres 1 à 3 Ven 5 Oct - 9:51 | |
| Bouthemont c'est celui qui s'occupe des livraisons je crois, au début on le voit qui réceptionne les ballots de soie... |
| | | marie21 Lost in RA Sunbae
Nombre de messages : 19045 Age : 45 Localisation : In a forest, halfway from the Peak District to Seoul with a stopover in Istanbul Date d'inscription : 25/09/2006
| Sujet: Re: Au Bonheur des dames, Semaine 1 : Chapitres 1 à 3 Ven 5 Oct - 10:25 | |
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| | | Selenh Méchante Femme Savante
Nombre de messages : 7065 Age : 65 Localisation : Aquitaine. Date d'inscription : 24/02/2010
| Sujet: Re: Au Bonheur des dames, Semaine 1 : Chapitres 1 à 3 Ven 5 Oct - 11:20 | |
| - Annwvyn a écrit:
- Selenh, je ne voulais pas dire que Zola ne comprenait pas, ou était méprisant. Je voulais juste dire qu'aujourd'hui devant le délire des consommateurs, nous pouvions nous montrer méprisant (comme Mouret le fait) ou du moins n'y rien comprendre. Et c'est en ceci que le discours méprisant envers les femmes de Mouret (je n'ai aucune idée de ce que Zola en pensait personnellement ! ) ne m'étonne et ne me choque absolument pas !
Ah, d'accord, alors j'avais mal compris. - Citation :
- les clientes de la bourgeoisie) avaient peu de sphères de liberté. Et je reste persuadée que se balader sans chaperon dans la rue, ça n'était pas très bien vu.
Oui, la liberté de la femme «convenable» au XIXe n'est pas égale à celle des hommes, en particulier sur les plans économique, sexuel, professionnel, les études, les loisirs. Par contre on est au moins trois à ne pas voir de chaperons partout dans la rue, ni Zola dans son roman, qui est quand même un contemporain et dont les lecteurs n'ont pas relevé d'incongruité au fait que ces dames circulent toutes seules (arrivées perlées chez Madame Desforges dans le chapitre 3), ni l'émission d'Arte qui signale si je t'ai bien lue qu'on pouvait aller seule à l'église, chez ses amies, faire les courses, (et par extension dans les grands magasins qui permettent effectivement une sociabilité extérieure plus développée que la boutique du Vieil Elbeuf), ni moi dans les romans, essais, mémoires et livres historique que j'ai lus. Malentendu sur le vocabulaire peut-être? Pour moi chaperon veut dire personne «convenable» qui reste en tiers chaque fois qu'une jeune fille pourrait se retrouver seule avec un jeune homme. Ces même jeunes filles courant le BDD avec leurs mamans et n'ayant pas de budget, je ne crois pas que c'est à elles que tu penses? Après, ce n'est pas qu'il est spécialement «mal vu» de se promener dans la rue seule, dès le règne de Louis-Philippe qui marque l'essor de la moyenne bourgeoisie (la grande et la noblesse ont serviteurs et voitures qui permettent de ne pas envisager de déambuler sur les trottoirs) mais on préfère sortir avec sa fille, une amie, une femme de chambre si on est assez cossue. C'est toujours plus agréable parce qu'on est en compagnie (et non "chaperonnée", contrainte) et que les femmes craignent davantage qu'aujourd'hui d'être "insultées" par des messieurs mal embouchés. C'est pour cela d'ailleurs que l'on s'habille conformément à sa classe et qu'on ne va pas traîner dans les rues douteuses. Les grands boulevards d'Haussmann autant que les grands magasins dans ce cas ouvrent un surcroît d'espace «fréquentable» à ces dames, et là je suis d'accord qu'il y a plus de liberté géographique, une plus grande sécurité, une nouvelle sociabilité. Mais de là à en faire une avancée du statut des femmes dont on s'étonne que Zola ne l'ait pas ressentie... - Citation :
- Zola n'en parle absolument pas [...] : les grands magasins ont marqué un tournant dans l'émancipation des femmes [...] Zola est passé à côté de ça mais il manquait sans doute de recul.
je suis surprise quand tu écris ça. - Citation :
- Aussi, l'émission d'Arte m'avait semblé tout à fait pertinente (quoique surprenante, je ne m'attendais pas à une telle analyse). Les grands magasins, nouveau lieu de loisirs unique en son genre, presque exclusivement réservé aux femmes, bouleversait (sous une apparence inoffensive et inattendue), les habitudes de l'époque.
Vu comme ça je suis tout à fait d'accord, mais ce n'est pas alors lié à des contraintes de chaperonnage dont on se serait délivrées, et l'émancipation est encore loin. - Citation :
- il faut dire que nos vendeuses travaillent, gagnent et dépensent leur propre argent... si ça ce n'est pas de l'émancipation ! [
Tout à fait, et cela me rappelle la démonstration de Thornton à Margaret à propos de ses ouvrières. Elle en est encore au modèle paternaliste et chrétien et s'offusque de ce qu'il ne s'occupe pas de la moralité de ses ouvrières, il riposte que seule leur manière de faire leur travail le concerne, et qu'il ne va pas se mêler de la façon dont elle vont dépenser l'argent du salaire qu'il leur donne. Quand à l'idée d'égalité de traitement égal à travail égal, que crains que ni John, ni Octave, et pas même leurs créateurs n'aient simplement envisagé la question! - Lily of the valley a écrit:
- Je ne suis pas raisonnable, ce matin à 5h je lisais le chapitre 7...mais je ne commente que les 3 premiers...
Et j'allais attaquer le huitième quand j'ai égaré mon baladeur. En fait tout Zola est en audiolivre, je vais tout charger et tout réécouter c'est trop boooonnnn! - Citation :
- Je persiste à dire que depuis le début et même avant le 4e chapitre, Mouret me touche... Il me touche même quand il veut "tout bouffer". On a l'impression qu'il comble ainsi une lacune...
Octave est un personnage chéri de Zola, il l'a avoué lui-même. Même quand il dévoile ses défauts Z. a pour lui une tendresse, que tu as sans doute ressentie. - Citation :
- Thornton and co (qui soit dit en passant pouvaient très bien ne pas avoir de passé "féminin"... Je pense que c'est tout à fait possible)
Complètement d'accord avec toi, particulièrement pour ce personnage, vu la façon (bien austère) dont sa vie s'est déroulée, et son absolu respect de la femme (dévotion à la mère, absolu de l'amour voué à Margaret).... - serendipity a écrit:
- Peut-être devrions nous d'ores et déjà ouvrir un topic pour la 2è partie de la lecture, cela éviterait que les discussions ici ne "débordent" un peu du cadre (j'ai peur d'être spoilée par certaines impressions ... des extraits du 4è chapitre ayant été postés ainsi que des impressions de lecture postérieures)
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| | | Lily of the valley Sherlock's Blue Scarf
Nombre de messages : 9788 Age : 55 Localisation : Pile entre Honoré (de B) et George (S)... Date d'inscription : 29/06/2012
| Sujet: Re: Au Bonheur des dames, Semaine 1 : Chapitres 1 à 3 Ven 5 Oct - 11:44 | |
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| | | Annwvyn Subtle scent of rain
Nombre de messages : 8654 Age : 35 Localisation : Paris Date d'inscription : 24/06/2009
| Sujet: Re: Au Bonheur des dames, Semaine 1 : Chapitres 1 à 3 Ven 5 Oct - 11:50 | |
| Je passe juste en coup de vent pour dire que j'ouvrirai le prochain topic dimanche soir, comme prévu ! Et encore une fois, faisons tous attention à ne pas parler des choses qui se passent après le 3ème chapitre ! (j'avais repéré des extraits du 5ème chapitre surtout). Mais s'il vous plait, soyez prudents ! Pour le classement des vendeurs, c'est en gros ça : - Bourdoncle : il n'est pas un vendeur, c'est l'adjoint de Mouret depuis toujours, et il se charge de l'organisation générale (les ressources humaines, et peut être d'autres trucs). Il est à la direction. - Bouthemont : c'est le premier vendeur de la soie. Mais en qualité de 1er, il se charge seul (comme Mme Aurélie pour les confections) des commandes (voilà pourquoi il était au service des livraisons pour vérifier ses commandes). - Robineau : c'est le second à la soie (derrière Bouthemont donc). Il était vendeur avec Mouret sous les ordres de Mme Hédouin (ils le disent je ne sais plus quand). C'est donc lui aussi un ancien ! - Jouve : ancien militaire, il s'occupe de la surveillance du personnel. Voilà pour la nomenclature ! |
| | | Luluberlu Préceptrice
Nombre de messages : 31 Age : 54 Localisation : Ma cabane au Canada Date d'inscription : 28/09/2012
| Sujet: Re: Au Bonheur des dames, Semaine 1 : Chapitres 1 à 3 Ven 5 Oct - 14:21 | |
| Bouthemont n'est pas plûtôt l'acheteur? Au chapitre 2 il est écrit : "....il était médiocre pour la vente ; mais, pour l'achat, on ne connaissait pas son pareil". En tout les cas, moi je l'avais associé à cet unique rôle car quand Mouret le rencontre, il est à vérifier les livraisons reçues du matin. Je suis certaine que vous pouvez m'aider : je sais que j'ai lu en quelque part, comment citer des commentaires mais je ne me souviens plus dans quelle rubrique que c'était. À chaque fois que j'essaie l'icone de droite, cela ne semble pas du tout à une citation |
| | | Annwvyn Subtle scent of rain
Nombre de messages : 8654 Age : 35 Localisation : Paris Date d'inscription : 24/06/2009
| Sujet: Re: Au Bonheur des dames, Semaine 1 : Chapitres 1 à 3 Ven 5 Oct - 19:42 | |
| Luluberlu, comme je l'ai dit, Bouthemont est bien vendeur à la soie. Mais en sa qualité de premier vendeur, c'est lui qui passe les commandes/qui fait l'approvisionnement. Donc oui, il a aussi un rôle d'acheteur (il achète aux fabricants de soie de Lyon) et visiblement il s'en sort mieux dans l'achat ! Sinon, si tu cliques "citer", c'est comme quand tu cliques sur "répondre" seulement tu as le commentaire de la personne que tu cites qui apparaît. Il te suffit ensuite de conserver les balises [quote] au début et à la fin du message de la personne citée, et de supprimer les parties de son post qui ne t'intéressent pas. J'espère que je suis assez claire ! Et si tu veux citer plusieurs personnes, tu peux cliquer sur "citations multiples" puis "répondre" et tous les posts que tu veux citer apparaissent dans ta réponse. EDIT : pour info, à la demande de la foule, j'ai ouvert le topic de la deuxième semaine ! |
| | | Selenh Méchante Femme Savante
Nombre de messages : 7065 Age : 65 Localisation : Aquitaine. Date d'inscription : 24/02/2010
| Sujet: Re: Au Bonheur des dames, Semaine 1 : Chapitres 1 à 3 Sam 6 Oct - 8:00 | |
| - Annwvyn a écrit:
- Mais Selenh, il faudrait que tu jettes un oeil à l'émission, tu pourrais nous dire précisément ce que tu en penses.
Je ne demande pas mieux mais je la trouve où (sachant que je n'ai pas la télévision)? Est-ce celle dont j'ai posté un extrait sur le topic Zola et celui du sondage? Sinon il me faudrait les références. - Lily of the valley a écrit:
et... pour les folles furieuses qui ont lu le 8e chapitre au lieu de déjeuner aujourd'hui (bon, ok, trois quatre pois chiches en lisant... mais ce n'est pas un déjeuner ça) ???? Je ne vis pas vraiment de façon aussi passionnée! Je lis le BDD en audiolivre, donc j'y consacre chaque jour l'heure de balade des chiens et les maigres soins ménagers que j'accorde à mon foyer. Ça fait déjà pas mal, sachant que chaque chapitre dure environ une heure. Vive l'audiolivre, je dis! (Je n'ai encore vu que Petit Faucon qui partage cette addiction avec moi, c'est peu, vous ne savez pas ce que vous perdez!) |
| | | Fauvette Bluebird on a White Cliff
Nombre de messages : 5816 Age : 36 Localisation : Paris Date d'inscription : 29/04/2009
| Sujet: Re: Au Bonheur des dames, Semaine 1 : Chapitres 1 à 3 Sam 6 Oct - 8:35 | |
| Ouf, je ne suis pas en retard pour commenter les trois premiers chapitres ! Il y a déjà eu de très belles analyses, et je rejoins tout le monde sur le côté extrêmement sensuel du roman : j'avais oublié à quel point le vocabulaire de Zola pouvait être riche et évocateur (et pourtant j'ai étudié - et adoré - L'Oeuvre, au lycée !), ses descriptions des tissus et marchandises du Bonheur des Dames débordant dans la rue sont fascinantes ! La longue visite du magasin, peu après l'embauche de Denise (je ne sais plus exactement dans quel chapitre ), m'a particulièrement marquée : on suit Mouret et son associé de pièce en pièce, d'étage en étage, de la soie à la confection, en passant par l'ameublement, les accessoires, chaque département du magasin, à tel point que cela donne un peu le tournis ! J'imaginais très bien, en lisant ce passage, son adaptation filmée en un seul grand plan-séquence (tel celui de la plage dans Atonement ) qui montrerait le grand magasin de fond en comble. Côté personnages, j'ai en revanche un tout petit peu plus de mal à accrocher : Denise me plaît bien mais elle n'a pas encore un grand rôle, et on n'en sait pas encore beaucoup plus sur ses frères (même si je sens que l'aîné, tout sympathique qu'il soit, va sûrement lui poser quelques problèmes). J'ai eu de la peine pour son oncle et les autres petits commerçants du quartier, résignés à être tôt ou tard dévorés par le "monstre" qu'est ABDD... mais en même temps, il faut bien dire que leur attitude très bornée et conservatrice ne va pas les aider à regagner leur clientèle ! En ce qui concerne Octave Mouret, pour l'instant je le laisse volontiers à ses admiratrices ! ^^ Son personnage est certes assez charismatique, mais son côté un peu cynique, misogyne et inconsciemment (ou pas) égoïste me refroidit quelque peu. Mais j'ai tout de même hâte d'en savoir plus sur lui (je n'ai pas lu Pot-Bouille) et de voir ce que va donner sa gestion du magasin et sa course effrénée vers toujours plus de clientes, de marchandises et de surface de vente... PS : à propos de la conversation sur les chaperons dans les messages ci-dessus, une allusion aux "femmes en cheveux" qui parcourent le BDD m'a interpellée : apparemment, il s'agit de clientes habitant le quartier, qui sortent non apprêtées (donc sans chapeau ?) pour faire leurs courses au magasin ? _________________ Dessin de Jaimie Withbraid
Dernière édition par Fauvette le Sam 6 Oct - 9:25, édité 1 fois |
| | | Tatiana A view from the past
Nombre de messages : 14362 Age : 39 Localisation : Quelque part dans l'Angleterre du XIXe... Date d'inscription : 26/02/2010
| Sujet: Re: Au Bonheur des dames, Semaine 1 : Chapitres 1 à 3 Sam 6 Oct - 9:19 | |
| Fauvette je me suis posée la même question sur les "femmes en cheveux". J'ai compris pareil, que ce sont des femmes du quartier, d'une condition sociale modeste, qui sortent sans porter de chapeau. A l'opposé de femmes de la haute bourgeoisie qui ne sauraient sortir sur un chapeau souvent très décoré. Ce passage m'a évoqué l'adaptation du roman de Roger Martin du Gard Les Thibault. Dans une scène, une mère dit sévèrement à sa fille Jenny s'apprêtant à sortir les cheveux détachés "qu"on ne sort pas en cheveux". Pourtant ce passage se déroule en 1914, des années après le Second Empire, et la famille en question tout en étant bourgeoise ne roule pas sur l'or. D'où ma surprise : je pensais qu'une femme de cette époque (les années 1860, et même bien après) ne pouvait tout simplement pas envisager de sortir tête nue, quelle que soit sa condition . Et qu'une femme qui ne mettait pas de chapeau était plus ou moins assimilée à une prostituée. _________________ |
| | | Selenh Méchante Femme Savante
Nombre de messages : 7065 Age : 65 Localisation : Aquitaine. Date d'inscription : 24/02/2010
| Sujet: Re: Au Bonheur des dames, Semaine 1 : Chapitres 1 à 3 Sam 6 Oct - 9:37 | |
| Pas forcément une prostituée, mais c'est très "populaire". Même si elle est du quartier, une femme "qui se tient", une épouse de petit fonctionnaire, ne sortira pas "en cheveux". On laisse ça à la ménagère de base et aux marchandes qui ne vont pas non plus travailler en chapeau à l'étal et sont souvent sans chapeau ni coiffe sur leur trottoir, extension de la boutique. En outre, même si vous êtes "en cheveux", on va encore mesurer votre degré de correction à l'état plus ou moins soigné de votre chignon. Ça se voit chez Zola, les échevelées sont nettement perçues comme des négligées, voire des "moins que rien", laxistes sur leur ménage et facilement soupçonnées de l'être dans leur moralité. L'honnête charcutière devant son magasin, même posant pour la photo, est sans problème "en cheveux". Elle mettra quand même gants et chapeau pour sortir du quartier. Ma tante, demoiselle de la poste à la campagne, s'est fait faire deux chapeaux par ans jusqu'à la deuxième guerre mondiale, et disait qu'il était hors de question de faire autrement en ce temps là. Pourtant elle était fille d'institutrice laïque, et d'un milieu pas du tout "coincé". Sa modiste était la grand-mère de mon ex, et elle a exercé ce métier sans baisse de clientèle toute sa vie. - Fauvette a écrit:
- La longue visite du magasin, peu après l'embauche de Denise (je ne sais plus exactement dans quel chapitre ), m'a particulièrement marquée : on suit Mouret et son associé de pièce en pièce, d'étage en étage, de la soie à la confection, en passant par l'ameublement, les accessoires, chaque département du magasin, à tel point que cela donne un peu le tournis ! J'imaginais très bien, en lisant ce passage, son adaptation filmée en un seul grand plan-séquence (tel celui de la plage dans Atonement ) qui montrerait le grand magasin de fond en comble.
Je vous reposte le TPE (ou ce qui semble en être un) que j'avais déjà proposé ailleurs, il fourmille d'images d'époque qu'à ce stade de la lecture on comprend beaucoup mieux.
Dernière édition par Selenh le Sam 6 Oct - 13:19, édité 1 fois |
| | | Nat2a Lady à la rescousse
Nombre de messages : 322 Age : 61 Localisation : Corse Date d'inscription : 19/08/2011
| Sujet: Re: Au Bonheur des dames, Semaine 1 : Chapitres 1 à 3 Sam 6 Oct - 10:53 | |
| Après tous vos posts, difficile de ne pas se répéter. Pour moi le 1er chapitre est comme une photo: en noir et blanc tout ce qui concerne Denise, ses frères et la boutique de l'oncle Baudu, et en couleur tout ce qui touche au bonheur des Dames; le magasin est un personnage à lui tout seul et c'est le plus éclatant de tous. Zola nous fait vivre le Paris de cette époque comme un metteur en scène et pose ses lieux et ses personnages de façon très méthodique. Le personnage de Mouret incarne la joie de vivre, le désir à l'opposé pour l'instant de Denise qui me paraît bien terne tout en faisant preuve d'une certaine audace quand elle arrive à Paris sans même avoir prévenu son oncle ou quand elle décide de se présenter pour travailler au magasin. |
| | | Selenh Méchante Femme Savante
Nombre de messages : 7065 Age : 65 Localisation : Aquitaine. Date d'inscription : 24/02/2010
| Sujet: Re: Au Bonheur des dames, Semaine 1 : Chapitres 1 à 3 Sam 6 Oct - 13:04 | |
| - zoju a écrit:
- Ca reste du "pornographe " bien soft, en comparaison avec ce qu'on trouve aujourd'hui.
Tu verras quelques caricatures d'époque significatives au début d'une vieille émission en noir et blanc, sublime, dans laquelle Henri Guillemin conte fabuleusement la vie d'Émile Zola. - Annwvyn a écrit:
- Mais Selenh, il faudrait que tu jettes un oeil à l'émission, tu pourrais nous dire précisément ce que tu en penses.
Ça y est, je l'ai trouvée, et j'en suis enchantée. Tu avais raison, en fait, c'est avec ta formulation que je n'étais pas d'accord, j'adhère à celle de l'émission. Et tant qu'à te chatouiller j'en reviens à ta critique, à mon avis très injuste, de mon Émile préféré. Ni lui ni personne à ce stade ne peut voir dans cette énorme aliénation de la femme au désir de consommer un des facteurs favorisants d'une émancipation, dont la première crise explicite ne se fera sentir qu'après la guerre de 14/18. Donc je suis d'accord avec toi, si l'on veut, à condition de beaucoup nuancer! Les grands magasins ont un projet aliénant, le ferment d'émancipation n'est pas du tout lisible à ce moment-là. Cela rejoint une de nos discussions avec Glee qui ne voit dans le capitalisme qu'un facteur d'aliénation et qui ne peut comprendre qu'il peut l'être, très indirectement, très involontairement certes, d'émancipation; parce que la course au profit fait éclater les cadres sociaux. Ici le coup porté à la condition féminine de l'époque vient de ce que la bourgeoise n'est plus seulement aliénée au chef de famille mais aussi à Aristide Boucicaut / Octave Mouret au désir de consommation. Son désir permis est stimulé, lui permet effectivement de développer son individualité, mais pour le moment au profit surtout d'Octave, qui empoche l'argent du mari, concurrent malheureux . La consommatrice reste instrumentalisée entre deux hommes, pompe aspirante, outil génial qu'a trouvé l'un pour absorber les finances de l'autre. (Ne sommes-nous pas actuellement dans la même problématique concernant les enfant, tiraillés entre l'autorité parentale et les prescriptions commerciales?) Mais pour en revenir aux femmes, stimuler leur désir, comme dit l'émission, c'était ouvrir involontairement, of course, la boîte de Pandore, et je trouve cette formulation parfaite. Ni Aristide, ni Octave ni Émile ne peuvent, en plus, deviner que la femme désirante va, une fois mise sur l'ouvrage et à la maîtrise de domaines masculins en 14-18, appliquer son désir à encore plus que des chiffons! Merci dans tous les cas de m'avoir guidée vers cette émission, je suis aux anges. Et pour revenir à un autre de nos sujets de "désaccord", si tu regardes bien les scènes et photos d'époque il y a pas mal de femmes qui vont toutes seules dans la rue, très convenablement. Plus que de femmes "en cheveux", d'ailleurs. Normal, les prises de vues sont surtout faites sur les grands boulevards. Justement (je me répète), les grands magasins étant assimilés au départ à "magasins" tout court c'est une sortie convenable. La lutte des entrepreneurs pour prouver à l'église que ce ne sont pas des lieux d'immoralité, ce qui amène à l'embauche de vendeuses, est d'ailleurs tout à fait réjouissante à découvrir. Comme le dit l'émission, le grand magasin c'est vu comme la fête permise, surtout. La grande débauche, mais sage, accessible à la femme convenable. Elle ne viole aucune prescription morale et religieuse effectivement, au BDD! Tant qu'il n'y avait pas de grands magasins ne pouvait exister le commandement: L'argent de ton époux tu ne dépenseras dans les temples de la consommation capitaliste. Mais elle découvre son corps, la force du désir et celle du plaisir, oh là là... C'est effectivement le premier pas. Si Zola ne l'a pas compris, l'Église si... Normal encore, c'est son obsession de dénicher tout ce qui risque d'être agréable à l'individu comme un péché, mon Émile est plus libéral que ça et n'y voit pas malice. - Citation :
- Et nous reparlerons des classes laborieuses par la suite : il faut dire que nos vendeuses travaillent, gagnent et dépensent leur propre argent... si ça ce n'est pas de l'émancipation !
Là encore je vais me montrer en accord avec l'émission (plus nuancée) qu'avec toi: ces filles sont (presque) autonomes financièrement, et la nouveauté du salaire féminin est un premier pas très important, mais ce n'est pas encore l'émancipation pour cette génération. Bien moins "coulant" en cela qu'un Thornton, Boucicaut veille férocement à la "moralité" de ses vendeuses, elles sont sous clef, le salaire, s'il leur en reste quelque chose elle ne pourront guère le consacrer, comme Denise à ses débuts, qu'à des achats raisonnables et indispensables (les fameuses bottines) et seulement après avoir soutenu la famille... Mais je te rejoins, au final: avec le capitalisme triomphant (exode rural, déstructuration des communautés familiales et villageoises, salaire féminin), bien des grains de sable se sont glissés dans les rouages de la société traditionnelle, et n'en déplaise à ma copine Glee ils seront à terme bénéficiaire à la mobilité sociale et à l'émancipation féminine. Un bémol sur l'émission: les dialogues de la docu/fiction auraient pu être plus soignés, éviter des formulations anachroniques comme «Nous avons des tas de choses à nous dire» ou «formidable» utilisé au sens de «magnifique», alors que ce n'est pas encore son usage à l'époque. Ne me dites pas que je suis trop puriste, il suffisait, tant qu'à utiliser des scènes piquées au BDD, de piocher dans les dialogues de Zola, il y a tout ce qu'il faut. |
| | | Annwvyn Subtle scent of rain
Nombre de messages : 8654 Age : 35 Localisation : Paris Date d'inscription : 24/06/2009
| Sujet: Re: Au Bonheur des dames, Semaine 1 : Chapitres 1 à 3 Dim 7 Oct - 7:23 | |
| Et bien Selenh, on peut dire que tu m'as atomisée ! Plus sérieusement, je ne trouve pas que nous ayons tant de points de désaccord que ça. La plupart résultent de la perception que nous avons de l'expression respective de nos idées. Tout ce que tu écris est très intéressant, et je plussoie sur la majorité des choses (notamment sur les dialogues fictifs de l'émission qui effectivement n'étaient pas fameux). Je m'incline également pour ce qui est des femmes seules qui se baladent dans la rue, et je comprends les nuances que tu apportes quant à "l'émancipation par le magasin" (qui est moins évidente que ce que j'avais pu laisser entendre... mais que veux tu, j'ai vu l'émission il y a un certain temps déjà, et à terme, j'ai fini par faire quelques petits raccourcis ). En revanche, je voudrais juste me défendre sur un point. Je n'ai pas critiqué Zola ! J'ai effectivement souligné que dans le reportage, tous les développements et analyses de ABDD étaient repris, mais qu'une idée était nouvelle par rapport au roman : la fameuse émancipation. Et j'ai effectivement dit que Zola n'en avait pas parlé, et qu'il manquait sans doute de recul pour pouvoir percevoir ce début d'émancipation. Mais je ne le critique pas, et suis très loin de contester le fait que personne à l'époque n'aurait pu le percevoir. Comme tu le dis "Ni lui ni personne à ce stade ne peut voir dans cette énorme aliénation de la femme au désir de consommer un des facteurs favorisants d'une émancipation" et en parlant de "manquer de recul" c'est précisément ce que je voulais dire. Et une dernière chose à propos de l'émancipation des vendeuses. Attention, je mets un spoiler pour les chapitres suivants Certes, la moralité des vendeuses est très surveillée (plus que les hommes notamment) néanmoins - Spoiler:
on a quand même des femmes célibataires, qui s'en sortent seules, par leur travail. Elles gèrent seules leur petite fortune, elles peuvent s'en sortir seules et assez honorablement. D'accord, ça devait bien exister dans d'autres professions à l'époque (dans l' Assommoir par exemple, Gervaise gagne seule son pain pour toute la famille avec sa petite entreprise de blanchisserie) mais il semble que le métier de vendeuse offrait des perspectives assez uniques pour les femmes. Et je voudrais parler du personnage de Madame Aurélie qui est hyper moderne : Madame gagne (argent gagné, et non argent de famille) plus que son mari, et chacun vit seul, et très librement. De même, si les vendeuses sont surveillées, l'argent gagné leur donne plus de liberté : chacune peut aller au théâtre et à la campagne dépenser comme elle le souhaite l'argent gagné. Elles sont en ceci à égalité avec les vendeurs du magasin. J'ignore si c'est encore un effet de mon imagination, mais j'ai toujours cru que de telles situations se faisaient plutôt rares à l'époque (attention je ne dis pas que les femmes gagnaient forcément moins que leur mari, ou qu'elles restaient forcément à la maison avec les enfants , mais je dis que le poste de vendeuse était un peu plus comme une profession intermédiaire qui offrait de grandes perspectives pour l'époque.)
A présent, j'en profite pour placer mes commentaires sur le troisième chapitre. ¤ Chapitre 3Au troisième chapitre, on en apprend un peu plus sur Mouret, et sur son peu de scrupules. Encore une fois, j'adore l'ambiance de ce chapitre. Je m'installerai bien dans ce salon parisien qui a l'air tout à fait confortable. (et qui en plus donne sur les tuileries). J'aime énormément la façon dont Zola nous décrit la lumière déclinante de la fin d'après-midi. On se sent bien dans ce salon ! Mouret donc voulait parler de ses projets d'agrandissement au Baron Hartmann (il rappelle un peu Haussmann, vous ne trouvez pas ? ) qui est l'ancien amant d'Henriette. Et plutôt que d'aller gentiment le voir dans son bureau, il décide de faire d'Henriette sa maîtresse. Belles méthodes ! Ca a l'air de plutôt bien marcher d'ailleurs, puisque le baron finit par trouver son projet intéressant. C'est là qu'on voit l'énorme froideur de Mouret (et son égoïsme, Fauvette, je suis bien d'accord avec toi), son immense mépris pour les femmes, mais aussi son charme incoyable (et sans jamais y engager son coeur, évidemment !). Lorsqu'elles sont toutes autour de lui, folles de lui et de son magasin... il y a de quoi faire pleurer les féministes ! Il n'empêche, quand il parle à son ami Vallagnosc (qui vient de Plassans comme lui, Plassans étant l'équivalent pour Zola d'Aix-en-Provence), avec passion, aisance, et franchise, il est sinon séduisant du moins fascinant ! Il me semble que dans son enthousiasme, sa vivacité, Mouret fait très français comme héros. Il est très loin de la passion intériorisée d'un Darcy, loin du flegme britannique, et j'ignore si une adaptation anglaise pourra un jour saisir ce personnage. Bref, moi je suis conquise ! Et comme je l'ai dit plus haut, c'est parce que j'ai une tendance à être fascinée par les personnages charismatiques, aussi peu recommandables qu'ils soient. La dernière chose très intéressante dans ce chapitre, c'est le détail de la stratégie d'Octave Mouret. Il explique pourquoi son projet tient la route (les femmes sont prêtes à acheter, et c'est si facile de leur vendre tout ce qu'on veut en mettant des bas prix, en faisant des beaux écroulements de marchandises, en affichant les prix sur des étiquettes -les prix sur les étiquettes, quelle idée ! ). Son discours apparaît très très actuel, et j'adore voir comment on a pu passer du vieux commerce à ce qu'on connaît aujourd'hui (je ne dis par que j'adore ce qu'on connaît aujourd'hui). Mouret paraît bien être un capitaliste convaincu, sans pour autant que le mot de capitaliste ne soit prononcé. |
| | | Selenh Méchante Femme Savante
Nombre de messages : 7065 Age : 65 Localisation : Aquitaine. Date d'inscription : 24/02/2010
| Sujet: Re: Au Bonheur des dames, Semaine 1 : Chapitres 1 à 3 Dim 7 Oct - 9:34 | |
| - Annwvyn a écrit:
- Plus sérieusement, je ne trouve pas que nous ayons tant de points de désaccord que ça. La plupart résultent de la perception que nous avons de l'expression respective de nos idées.
Oui, tout à fait! - Citation :
- En revanche, je voudrais juste me défendre sur un point. Je n'ai pas critiqué Zola !
Me voilà soulagée! J'aime encore plus cet homme depuis que j'ai vu les deux émissions que lui avait consacrées Henri Guillemin, faciles à trouver dans le domaine public sur YT, j'aimerais bien que tu voies ça et que tu donnes ton avis (sur le topic Zola, plutôt, bien sûr). J'ai aussi visionné hier le film de Cayatte. Très intéressant comme exercice d'adaptation, loin d'être un chef-d'œuvre, mais à la vitesse à laquelle ça se déroule on ne risque pas de s'ennuyer. Je conseille à celles qui n'ont jamais lu le bouquin de le regarder seulement après. Mouret n'a pas de barbe, avis à celles qui sont pour un Mouret glabre, mais Albert Préjean, bof bof, j'aurais aimé retrouver Gérard Philippe, tant qu'à faire. Je recherche l'intégrale du Duvivier muet des années 30, surtout après avoir visionné quelques extraits, ça a l'air pas mal du tout. Avis à la population... (c'est dans le domaine public aussi, on peut se le signaler le plus légalement du monde.) |
| | | Tatiana A view from the past
Nombre de messages : 14362 Age : 39 Localisation : Quelque part dans l'Angleterre du XIXe... Date d'inscription : 26/02/2010
| Sujet: Re: Au Bonheur des dames, Semaine 1 : Chapitres 1 à 3 Dim 7 Oct - 11:54 | |
| - Annwvyn a écrit:
- Mouret donc voulait parler de ses projets d'agrandissement au Baron Hartmann (il rappelle un peu Haussmann, vous ne trouvez pas ? ) qui est l'ancien amant d'Henriette. Et plutôt que d'aller gentiment le voir dans son bureau, il décide de faire d'Henriette sa maîtresse. Belles méthodes !
Effectivement, je n'avais pas pensé à faire le rapprochement avec Haussmann, c'est intéressant. J'ai un peu tiqué en lisant la manière dont Zola le décrit avec sa " grosse tête alsacienne" parce qu'étant moi-même Alsacienne je me suis quelque peu offusquée de voir les Alsaciens ainsi catégorisés, mais après tout je comprends ce qu'il veut dire. Les Alsaciens ont un physique germanique, et cet homme est corpulant. La méthode choisie par Mouret pour rencontrer Hartmann n'est pas la plus directe, mais elle est très habile. Car il sait qu'en faisant la conquête d'Henriette - ce qu'il a visiblement réussi puisqu'on comprend qu'elle est amoureuse - il s'attache non seulement une femme de relations sur qui il va pouvoir compter, mais aussi une cliente, et non des moindres, capable d'attirer d'autres femmes dans le magasin et de fidéliser une clientèle féminine hautement désirable pour Mouret. Cela rappelle aussi le rôle des femmes à côté des hommes de pouvoir, capables de les épauler. De toute façon, à cette époque, un homme de la condition de Mouret, en pleine ascension, se "doit" d'avoir une maîtresse, cela fait un peu partie de panoplie obligatoire pour lui. Henriette me rappelle un peu Mme Grandet dans Lucien Leuwen de Stendhal ou la Mme de Blayac du film Ridicule de Patrice Leconte. Passionnée, je pense qu'elle n'est pas du genre à pardonner à l'homme qui la laisse pour une autre. - Citation :
- Et comme je l'ai dit plus haut, c'est parce que j'ai une tendance à être fascinée par les personnages charismatiques, aussi peu recommandables qu'ils soient.
Tout pareil que moi, son charisme a l'effet d'un aimant . Il dégage une telle assurance et une telle puissance qu'il n'a fallu que peu de temps pour que je tombe sous son charme. _________________ |
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