Naomi Fontaine, autrice canadienne et innue

J'ouvre un topic à Naomi Fontaine, une autrice canadienne, née en 1987 à Uashat, dans la région de la Côte Nord au Canada.
Elle fait partie de la communauté innue et enseigne le français en parallèle de ses travaux d’écriture.

A ce jour, elle a publié quatre ouvrages (dont je copie la présentation sous balise spoiler) :
- Kuessipan en 2011, qui a été adapté au cinéma par Myriam Verreault en 2019

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- Manikanetish en 2017

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- Tracer un chemin : Meshkanatsheu : Ecrits des Premiers Peuples, dirigé en compagnie d’Olivier Dezutter et Jean-François Létourneau, en 2017

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- Shuni : ce que tu dois savoir, Julie, en 2019

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Ses écrits ont été traduits en anglais, allemand et danois.

Comme, j’ai fait l’acquisition de trois ouvrages de Naomi Fontaine, suite à la présentation de la maison d’éditions Mémoire d’Encrier au festival VO-VF 2021, je lui ouvre un topic où poster mes avis en espérant que cela donnera envie à des lecteurs de découvrir son œuvre ou de s’intéresser à d’autres noms de la littérature innue (comme An Antane Kapesh, Josephine Bacon, Natasha Kanapé Fontaine,…).  

J’ai commencé ma découverte de sa bibliographie par son essai Shuni : ce que tu dois savoir, Julie. Comme vous vous en doutez par l'ouverture de ce topic, il m'a beaucoup plu!  
Il se présente sous la forme d’une lettre adressée à une amie québécoise (Julie, dont le prénom se prononce Shuni en langue innu-aimun) qui va devenir missionnaire auprès d’une communauté innue, pour lui présenter la communauté qu’elle va découvrir. Cette lettre est l’occasion de lui (de nous) parler de son peuple : son histoire, ses valeurs, son mode de vie, ses forces et fêlures, ses aspirations, mais aussi de son rapport de mère à fils (surnommé Petit Ours).

Cette longue lettre n’est pas écrite d’une traite, cela ressemblerait plus à une succession de lettres, ce qui rend la lecture agréable. Le lecteur peut en lire une à la fois ou plusieurs à la suite selon son envie et son temps à disposition.
Elle écrit en français. Même si elle est capable de s’exprimer en innu-aimun, elle est plus à l’aise avec la langue française, la faute à la colonisation et la scolarisation, l’éducation en langue française, comme elle l’explique dans une des lettres.
Dans cet essai, la langue est fluide et belle, elle se lit facilement et agréablement et est porteuse de la lumière qui émane de son autrice.  

Son témoignage sur ce qu’elle souhaite partager de la communauté innue est intéressant, plus axé sur la dimension émotionnelle, morale, qu’historique, ce qui rend son discours universel.    Dans ses mots, j’y ai reconnu des émotions qui m’avaient été partagées par des ressortissants d’autres peuples qui ont été colonisés dans leur histoire.    Cela donne une touche très juste à son message.  
J’ai beaucoup aimé la façon de concevoir et interagir avec le monde des Innus, notamment dans un rapport au temps circulaire (et non linéaire), un poids plus grand au monde sensitif qu’à celui des idées.    Je me suis parfois reconnue dans son rapport à son fils.

Je recommande fortement la lecture de cet essai à tout lecteur intéressé par le témoignage d’une Innue ou même à toute personne qui souhaite s’ouvrir à l’autre, pour mieux se connaitre dans le miroir de l’altérité comme le propose Naomi Fontaine.  
J’ai Kuessipan et Manikanetish dans ma PAL. Je suis curieuse de découvrir comment elle utilise ses mots dans le format du roman.

Quelle jolie présentation, Vavyala !
Je ne suis pas vraiment "essais", mais ce que tu dis de Shuni, ce que tu dois savoir, Julie me plait beaucoup !

Juliette2a a écrit:

Je ne suis pas vraiment "essais", mais ce que tu dis de Shuni, ce que tu dois savoir, Julie me plait beaucoup !

Il est classé comme essai sous Wikipédia, mais dans la pratique, je rapprocherais sa forme de celle d'Une si longue lettre, de Mariama Bâ, que nous avons découvert lors de ce challenge Wentworth 2021.
La seule différence est que le récit de M. Bâ est fictionnel (bien qu'inspiré de la réalité sénégalaise), alors qu'ici, il est clairement autobiographique. L'autrice partage des éléments de son passé dans sa lettre à son amie Julie (et au lecteur).

Je pense qu'il a le potentiel de te plaire.

Merci Vavyala pour la présentation de cette écrivaine francophone.
Je me note son nom si je la croise en bibliothèque ou en librairie 

Petit Faucon, si tu la croises, j'espère que tu aimeras!  

Je poursuis mon exploration des écrits de Naomi Fontaine par son deuxième roman, Manikanetish.

Yammie, jeune enseignante d’origine innue (mais ayant quitté la communauté pendant son enfance) quitte son petit copain et la ville de Québec pour aller enseigner le français à Uashat, dans une communauté innue. Manikanetish, c’est le nom de l’école, "Petite Marguerite" en français, en hommage à une femme sans enfants qui a pris soin et enseigné à des dizaines d’enfants.  
On va suivre les premiers pas de Yammie dans l’enseignement, l’apprivoisement réciproque entre elle et ses élèves, découvrir les drames que certains peuvent vivre dans la réserve… Cela va être aussi pour elle un retour vers ses racines et une culture qu’elle maitrise moins que ceux qui sont restés.
Naomi Fontaine étant enseignante, je me suis demandé jusqu’à quel point le roman était une fiction et où commençait l’autobiographie.

Le tout est écrit d’une plume légère et lumineuse qui me donnerait envie de rejoindre sa salle de classe.  
L’évocation des paysages de la région, forêts et lacs, et des chalets réconfortants où elle fait halte donne des envies de voyage dans cette région du Canada !    
Il n’y a pas vraiment de fin, comme un chapitre de vie qui se termine, mais la vie elle se poursuivant. C’est une tranche de vie que le lecteur suit.

J’ai passé un moment très agréable de lecture, doux et léger malgré les quelques moments tristes racontés, car ce qu’il en reste, c’est la volonté d’avancer coûte que coûte et profiter de la vie ! Un court roman (136 pages) que je recommande !  

Oh, tu sais donner envie !! Comme je souhaite poursuivre ma découverte des peuples arctiques, je chercherai celui-ci à la bibliothèque !

J'espère qu'il te plaira si tu le trouves!

Merci !!

Depuis quelques années maintenant, les littératures inuit et scandinave font partie de mes lectures de prédilection. La découverte d’une culture inédite, la liberté d’un peuple pourtant soumis à l’invasion coloniale (que ce soit au Groënland, en Amérique du Nord, ou au nord de la Russie), la beauté de la nature et la simplicité de la vie me touchent particulièrement.  
Naomi Fontaine est une auteure francophone, d’origine innue, dont le court roman Manikanetish retrace la vie d’une jeune institutrice le temps d’une année scolaire. Yammie, expatriée au Québec depuis de nombreuses années, revient dans sa région natale, au sein de la population innue dont elle a perdu les coutumes au fil des années. Outre son inexpérience, la séparation, la solitude, la cruauté de la vie l’assaillent dès ses débuts scolaires. Néanmoins, le poste qu’elle occupe va lui offrir de nouvelles opportunités : découverte d’adolescents perdus mais pleins de potentiel, mise en scène d’une pièce de théâtre (« Le Cid »), partage d’une communauté unie, surprises de la vie…
Ce récit en partie autobiographique m’a profondément émue : si le roman n’est pas long (moins de 150 pages), il n’en demeure pas moins marquant, ne serait-ce que pour l’authenticité et l’humanité de son héroïne, sa vision de la vie, les défis qu’elle relève avec brio. Le style de Naomi Fontaine est épuré, les phrases sont courtes, mais le tout m’a emballée.  
Manikanetish est ainsi une œuvre de qualité que j’ai pris plaisir à lire et qui confirme mon envie de poursuivre mon exploration des charmes et du dépaysement de la littérature nordique !  

Je suis très contente que ce roman t'ait plu Juliette!

Je te plussoie totalement sur le retour de ce roman, délicat et puissant à la fois, avec des écueils et des espoirs...  
Et je partage l'intérêt sur la littérature des (et sur les) peuples dits premiers.

Merci Juliette pour ton retour, et Vavyala pour la présentation de cette auteure, je me note son nom et le livre 

Petit Faucon, j'espère que le style de Naomi Fontaine te plaira si tu la rencontres un jour.

Il me reste Kuessipan à lire, vers juin si je tiens mon programme de lecture. Mais comme Ludi a été déçue, j'ai un peu peur...

Avec plaisir, les filles !

Et merci à toi, Vavyala, pour la belle découverte de l'univers de Naomi Fontaine

Je me suis rendue compte récemment que je n'étais pas passée donner mon avis sur Kuessipan, lu en juillet dernier.

Auparavant, je copie ici l'avis de Ludi qui l'a lu bien avant moi (posté en janvier sur le topic des projets de lectures en duo/trio):

ludi33 a écrit:

[...]J'ai aussi lu Kuessipan dont la forme m'avait un peu perturbée, mais je suis quand même allée voir le film.

Je rejoins son avis sur la forme, on n'a pas affaire à un texte linéaire avec une histoire qui se suit.
On a plutôt une compilation de courts textes, d'une page ou deux. Ils parlent du quotidien des Innus. La juxtaposition des textes donne un certain effet de littérature qu'on assimilerait à de la littérature contemporaine, dans le sens de déconstruction des schémas habituels occidentaux de construction d'un ouvrage, mais qui sont peut-être naturels dans le récit innu.

Ce livre m'a beaucoup plu, mais je suis d'accord avec Ludi sur la perturbation de la forme choisie quand on n'y est pas préparé.

Comme pour les précédents ouvrages de Naomi Fontaine que j'ai lus, j'aime beaucoup ses mots!  

J'aimerais beaucoup voir le film un jour!  

Sinon, Naomi Fontaine est l'autrice de la préface d'un essai de la première autrice innue, An Antane Kapesh (Je suis une maudite sauvagesse) que j'ai lu cette semaine. Elle raconte comment ce texte avait été fondateur pour elle et comment elle avait œuvré à sa réédition quand elle s'est rendue compte qu'il n'était plus réédité et facilement accessible. Une idée lumineuse!  

Merci pour ton retour suite à ta lecture de Kuessipan ! Je note que la forme du texte est inhabituelle et peut perturber !

Effectivement, quelle idée altruiste d'avoir contribué à la réédition de ce texte innu