Jean-Pierre Ohl

Mes parties préférées sont les parties dans la librairie. Je pense que tout grand lecteur adore lire des livres sur d'autres livres. Enfin moi c'est mon cas.
-Et la tête d'Erik quand dans sa vie il y a deux personnes qui disent s'appeler Martin Eden. J'ai bien aimé ca; (peut-être parce que j'ai beaucoup aimé Martin Eden).
-Le fait d'attendre 50 ans avant de prendre des livres dans sa librairie pour être sûr qu'ils valent quelque chose.

J'ai bien aimé aussi les parties dans le château avec le secrétaire (j'en veux un comme ça moi aussi) mais j'ai trouvé que la fin était peut-être poussé un peu loin. Mais toute la recherche était très intéressante et pour se rendre compte à la fin qu'il n'y a plus rien.
Ce qui était logique en fait. Les diamants avaient été dépensés depuis longtemps.

Et j'ai bien aimé la nonchalance de tous les maîtres de Glenmarkie, cette insolence de se croire au dessus de tout intellectuellement moralement et financièrement. Cela donne toujours des dialogues savoureux.

Et la petite maison blanche sur le bord de l'eau, cela m'a donné envie.

le secrétaire, la mort de Sir Thomas, le fantôme et les passages secrets, le lien entre Robin, Lewis, Eric Blair et Scot Fleming autour d'Ebenezer Krook

et puis je l'ai trouvé vraiment très mufle avec cette pauvre Mary Guthrie, qui nous fait un surprenant mariage BTW - honteux replâtrage suivant les critères de Lady Catherine ?

c'est une compilation des écrits de Denis Vrain-Lucas, de tous les faux qu'il a écrits.

une compilation de ces faux, (minables, j'en ai entendu lecture de quelques-uns dans une émission de radio) ne colle pas pour moi avec la définition que donne Krook du dixième livre, c'est pourquoi je m'étais orientée vers une interprétation plus discutable mais de plus d'ampleur avec le développement qui va de la fin de la page 267: «... il n'y a qu'un seul écrivain» à la page 268.

"Laisse moi te présenter Mr Dick..." De qui parle t-il ? Et pourquoi est-ce que Mangematin est tué ?

Pour moi FD parle à la fois du buste de bronze et de lui-même, qui va l'abattre sur le crâne de MM.

Il présente monsieur Dick comme lui-même, totalement inconsistant en soi mais capable d'incarner l'Assassin (celui d'ED et la figure de l'Assassin en général). Le monsieur Dick du prétendu Borel est un Dickens impersonator (page 25), ce qui se conjugue avec le constat de Daumal: «Jamais je ne deviendrai le héros de ma propre vie.» (page 13, et sa révélation pages 55/56 )

Je me réfère aussi à "la part d'ombre" ou de folie du mot "dick" que développe leur professeur dans le cours du début (pages 103-104).

Dans le roman on ne sait qui est "le méchant", pas plus que dans MED. Il y a entre Michel et François une gémellité à la Edgar Poe. MM lui reproche d'avoir tué leur monde dickensien par sa supercherie, et Daumal ne supporte pas ce qu'il le lui montre, au moment même où il se rend compte qu'il ne jouit pas de sa vengeance. Il voit ainsi que c'est lui le "dick", le fou qui a tout détruit, alors qu'il a toujours cru que c'était MM le méchant (276 à 278).

Le paragraphe de la page 281 me donne aussi cette solution. MM écrit, sans le savoir, du FD; qui écrit par volonté d'imposture du EB; mais aucun n'existera jamais dans la mesure ou pour eux exister veut dire être un véritable écrivain. Or, seul l'est Dickens, et Dickens-Dieu est mort.
(Voilà pourquoi on veut écrire la fin du MED, pour être CD, et comme on ne l'est pas, ne le sera jamais, alors cette fin ne sera jamais écrite et FD a beau inventer la solution du mystère à défaut de l'avoir trouvée, ce n'est toujours qu'une illusion).

Il y a ce passage d'EB qui convient bien au meurtre de MM par FD (si je ne me trompe pas):

«Nulle force en moi; juste cette poignante, cette maudite nostalgie. La nostalgie du microbe qui se souvient d'avoir été Dieu- ou l'inverse? Dickens se mourait en bas; en haut j'étais presque mort: ils ne sont tous que des personnages de Dickens ou Dickensiens...

Il y a de plus une scène (la fuite de Dick) dont la référence m'échappe et limite ma vision explicative , qui est au début (premier chapitre en particulier page 13, en particulier la dernière phrase), et "rejouée" à la fin par Sam Weller. Je crois que les clés sont dans Pickwick...
Mais peut-être simplement signifie-t-elle que contrairement aux personnages d'Ohl qui se dissipent dans l'inexistence, les personnages de Dickens continueront, eux, à sortir de toutes les situations désespérées, à vivre à jamais.

Ohl douterait-il de pouvoir écrire autrement que All around Dickens?