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Liewen
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Liewen


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MessageSujet: Documentaires   Documentaires Icon_minitimeJeu 31 Déc 2009 - 3:34

Comme j'en ai parlé ailleurs, me voilà donc décidée à ouvrir un fil de discussion sur les documentaires, hors docus natures de la BBC (pour en parler c'est par là Arrow). Comme vous pouvez le constater, pour le titre du topic j'ai été inspirée Suspect


Pour inaugurer ce sujet, je vous propose la présentation d'un documentaire résolument engagé et passé un peu trop inaperçu à mon goût, The Age of Stupid.

Documentaires 19171329


The Age of stupid est un documentaire tourné sous le mode du docu-fiction, dont le narrateur désabusé n'est autre que l'excellent Pete Postlethwaite (qu'on a pu voir dans Le Dernier des Mohicans, Les Virtuoses, Usual Suspects, The constant Gardener, Roméo + Juliette, ..., ainsi que diverses adaptations lambtoniennes). Il incarne un vieil archiviste vivant seul dans le monde de 2055 dévasté par les dérèglements climatiques, et qui regarde de vieilles images télé datant des années 2000 en se demandant : Pourquoi n'avons-nous pas empêché le changement climatique tant que nous le pouvions ?

Documentaires Theageofstupid


La partie fiction (autrement dit, toutes les images du monde de 2055) du documentaire est parfois un peu cheap -on sent un peu qu'il n'y a pas eu les moyens d'un Home, par exemple. La forme surprend également : le documentaire est en fait un patchwork de mini-documentaires autour de personnes aussi diverses que Fernand le vieux chamoniard, Jeh l'entrepreneur indien, Piers l'ingénieur britannique, Alvin qui vit à La Nouvelle Orléans, Layefa au Nigéria ou encore Jamila & Adnan les deux petits réfugiés irakiens.
Mais si les premières minutes surprennent, grâce à Pete Postlethwaite qui assure les transitions, la sauce finit par prendre assez vite.


Dans la rubrique Le Saviez-vous ?
- L'avant-première mondiale à Londres était 100% solaire ! Arrow
- Le film est dans le Guinness book pour le record de la plus grande projection simultanée mondiale, dans plus de 700 cinémas et 55 pays, en septembre dernier. Ont d'ailleurs assisté à cette première mondiale des personnalités aussi variées que Kofi Annan, Moby, ou encore Thom Yorke Documentaires 150390 de Radiohead.
- Il a été nominé au British Independent Film Awards dans la catégorie du meilleur documentaire
- Il a été projeté à La Géode au moment du sommet de Copenhague.


Documentaires Snf18spdc682735381a


La réalisatrice, Franny Armstrong, s'est assuré une indépendance complète par un mode de financement original : en effet, le film a été financé par 223 personnes, qui ont fourni chacune entre 30 et 15 000 livres, pour un total de 500 000 livres. Petit budget pour un documentaire de cette envergure, mais de quoi s'assurer une réelle indépendance de ton pour ce documentaire engagé. Il n'est pas consensuel pour un sou, et se montre plutôt sans pitié envers notre société globalisée dont il dénonce la politique de l'autruche. Certains commentaires des interviewés font parfois froid dans le dos, le pire étant lorsqu'on se rend compte que leur réaction, c'est souvent la nôtre...


The Age of stupid n'est pas aussi spectaculaire que Home, ni aussi médiatisé qu'Une Vérité qui dérange, mais c'est un documentaire punchy et percutant, qui mérite le détour. Pour le moment, il n'est visible qu'en VOD ou en DVD ; des diffusions télé sont déjà prévues dans quelques pays, mais aucune pour le moment en France. No


Plus d'infos sur le site officiel Arrow, et un petit trailer avec sous-titres français :

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Fauvette
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MessageSujet: Re: Documentaires   Documentaires Icon_minitimeJeu 31 Déc 2009 - 7:55

Merci d'avoir ouvert ce sujet, Liewen ! Wink
The Age of stupid m'a l'air très intéressant, je n'en avais jamais entendu parler Embarassed (ce n'est pas faute de m'intéresser au sujet, pourtant ^^)
J'espère qu'il finira par être diffusé un jour en France...

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Liewen
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MessageSujet: Re: Documentaires   Documentaires Icon_minitimeJeu 31 Déc 2009 - 13:10

Moi aussi !
On peut voir les prochains diffs TV programmées ici Arrow, mais aucun pays francophone pour le moment No
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lesezeichen
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MessageSujet: A History of Britain (Simon Schama) et The David Starkey Collection (David Starkey)   Documentaires Icon_minitimeJeu 31 Déc 2009 - 15:11

Merci d'avoir ouvert ce sujet, Liewen, qui me permet de vous parler de deux documentaires excellents concernant l'histoire anglaise. cheers

D'abord A History of Britain conçu et présenté par l'historien Simon Schama. Il s'agit d'un projet énorme couvrant l'époque de 3100 AJC jusqu'à 1965 en 15 épisodes d'une durée d'une heure. Ce documentaire a connu un énorme succès : suite à sa diffusion originale en 2002 les inscriptions aux facultés d'Histoire ont considérablement augmenté en Angleterre. M. Schama a choisi une approche très populaire: Utilisant plein d'images évocatives et des tournures hautes en couleurs, M. Schama a un bizarre charme à la Woody Allen et il sait captiver l'audience. J'ai pris beaucoup de plaisir à suivre les épisodes: ce documentaire est très divertissant et en même temps une introduction idéale pour quelqu'un comme moi dont les connaissances en Histoire Anglaise sont fragmentaires et je vous le conseille vivement. Mais il y a quand même des lacunes regrettables: par exemple M. Schama n'évoque la guerre des roses qu'en quelques mots, ce qui est dommage!

Documentaires Hobd

Je me suis donc procurée le DVD box d'un autre historien, David Starkey, The David Starkey Collection, qui consiste de Monarchy, Henry VIII et Elizabeth. Le ton de Monarchy est très différent: M. Starkey est un peu sec et il manque un peu d'humour. Ceci dit, ce documentaire qui nous présente les Rois et les Reines d'Angleterre, est très bien structuré et il comporte plein d'infos présentées de façon très claire et intéressante. Évidemment, en regardant les épisodes d'affilée, ça peut devenir un peu fatigant, notamment en ce qui concerne les époques qui m'intéressent (encore?) un peu moins, par exemple l'époque des George! lol! Mais ce documentaire est vraiment très bien fait et je le conseille vivement aussi.

Dans le même box on trouve aussi The Six Wives of Henry VIII et Elizabeth. Il s'agit de 4 épisodes de 45 minutes respectives, et là c'est vraiment excellent. Ces documentaires sont des compagnons idéales pour les versions fictives, les Tudor en ce qui concerne Henry VIII et les films avec Cate Blanchette ou Helen Mirren, en ce qui concerne Elizabeth. Les informations sont présentées de façon excellentissime, et il y a plein de choses que j'ai comprises pour la première fois, par exemple que William Cecil et Lord Burghley sont la même personne. Embarassed

Les deux documentaires sont égayés par des petites scènes et il faut dire qu'en ce qui concerne les Six Wives of Henry VIII, les actrices jouant les femmes de Henry, probablement des inconnues, sont si excellentes et correspondent tellement à l'image que je me faisais d'eux, que je les préfère largement à leur contreparties dans les Tudor!

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Liewen
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MessageSujet: Re: Documentaires   Documentaires Icon_minitimeJeu 31 Déc 2009 - 16:41

Merci beaucoup pour ta présentation Lesezeichen !
J'avoue que même si je possède une monographie sur l'histoire de la Grande Bretagne que je consulte régulièrement, je n'ai jamais eu le courage de la lire en entier, ce qui fait que si je connais bien certaines périodes de l'histoire britannique, d'autres me sont particulièrement obscurs et je manque cruellement d'une vision d'ensemble... Quelque chose me dit donc que A History of Britain va rapidement rejoindre ma PAV... cheers

Merci également de ta présentation des autres docus, je les mets également sur ma PAV virtuelle. study
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Dérinoé
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MessageSujet: Re: Documentaires   Documentaires Icon_minitimeDim 8 Sep 2013 - 23:59

Petit message pour dire un mot d'un documentaire coup de poing visionné la semaine passée intitulé Just, Melvin: Just Evil, réalisé par James Ronald Whitney en 2000, aux États-Unis, nominé six fois dans divers festivals prestigieux, titulaires de quatre Prix et sélectionné au Festival du Film du Berlin.

Documentaires Just_m10

Le documentaire est écrit et réalisé par un jeune Américain d'une trentaine d'années, James, lequel a grandi dans une famille ravagée sur quatre générations par l'inceste, l'alcoolisme et des abus en tous genres commis par son propre grand-père, Melvin Just. Marié deux fois à des femmes en perdition déjà mères d'enfants en bas âge et lui-même père de trois filles engendrées au sein de ces familles recomposées, Melvin Just molestera, violera et prostituera chacun de ses neuf enfants et beaux-enfants, lesquels répercuteront sur les générations suivantes les violences subies - alcoolisme, violence physique et, pour les hommes de la famille, pédophilie -, y compris sur le réalisateur même du documentaire.

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Le sympathique Melvin qui, si j'ose dire, arbore le physique de l'emploi.

Absolument tous les enfants et petits-enfants de la famille connaitront des problèmes plus ou moins grave d'alcoolisme, de prostitution, de toxicomanie et de tentatives de suicide répétées, à commencer par la mère de James, belle-fille de Melvin détentrice d'un Q.I. de 158 et probablement l'une des rares de la famille, avec son fils, à s'en être plus ou moins tirée, malgré des années difficiles.

En interrogeant tous les acteurs de ce drame tranquille d'une Amérique profonde, alcoolisée, analphabète et évoluant dans une pauvreté presque inimaginable en Occident - les deux épouses successives du grand homme, les neuf enfants et beaux-enfants dont un adulte lourdement handicapé, l'arrière-petite-fille âgée d'une dizaine d'année mais aussi et surtout Melvin lui-même, monstre impotent terrifiant de déni monolithique - James reconstitue les pièces d'un puzzle familial fascinant et hideux aux couleurs des bidons-villes dans lesquels s'est dispersée une bonne partie de la descendance.

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James, ancien danseur de rock de haut niveau, pianiste talentueux, et sa Maman, belle-fille de Melvin tardivement diagnostiquée comme surdouée.

Entre ses tantes édentées alcoolisées jusqu'aux gencives toutes plus romanesques les unes que les autres, sa grand-mère maternelle, poupée squelettique interrogée sur son lit de mort et plus lucide peut-être que tous les membres sobres interrogés, sa propre mère - seule à pratiquer un anglais intelligible et à connaître les vertus d'une hygiène quotidienne -, James parvient à saisir et, surtout, à donner à voir un improbable mystère auquel est confronté avec lui le spectateur d'un bout à l'autre de l'histoire: comment, les enfants devenant adultes et la famille s'agrandissant toujours, personne, victimes en tête, n'est-il parvenu, d'une manière ou d'une autre, à mettre fin aux exactions d'un homme ayant sévi sur quatre générations?

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L'une des cousines de James qui ne dessoûlera pas de l'interview et dont l'anglais entretient quelques accointances avec des dialectes médiévaux disparus depuis longtemps.

Alors qu'il interroge son oncle Jim devant ce qui semble être un logis plus ou moins décati, James lui demande pourquoi il a généreusement accepté d'héberger et de soutenir l'une de ses sœurs en perdition, gravement alcoolique. Tranquillement, l'homme répond que, n'appréciant pas la solitude, il serait heureux de tendre la main à sa cadette et de partager avec elle son toit... et son lit. Face à la stupéfaction de son neveu, l'homme - un quinquagénaire bonhomme pas agressif pour deux sous - explique que, selon lui, deux adultes consentants ont tous les droits, y compris ceux de coucher ensemble, et qu'il ne voit pas en quoi, ni pourquoi serait prohibée une relation sexuelle entre eux deux, si sa sœur y consentait. Posément, James lui répond: "Peut-être parce que vous avez la même mère?" Après quelques secondes d'étonnement muet, l'oncle Jim fronce ses sourcils impavides et lâche à voix basse, d'un air vaguement perplexe: "Ah! Oui..."

Tout est dit.

La scène finale, qu'aucun écrivain, quelle que soit son imagination, n'aurait su inventer, est d'une beauté immonde et douloureuse, intenable de drôlerie involontaire et d'un tragique proche de l'épouvante. Entre deux, quoi.

Pour le réalisateur, pari réussi. Douloureux et réussi.


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MessageSujet: Re: Documentaires   Documentaires Icon_minitimeJeu 31 Juil 2014 - 19:41

J'aimerais présenter ici un documentaire que j'ai dû regarder une bonne centaine de fois depuis que je l'ai découvert et dont, à une époque, je connaissais certaines parties par coeur. Je l'ai du reste déjà mentionné dans le fil du "Questionnaire des 4 films" ouvert par Cléopatre.

Une nuit, alors que j'étais plongée depuis plusieurs semaines dans la rédaction éprouvante d'un travail au long cours et que la fatigue m'avait ôté jusqu'au sommeil, pour une raison que j'ignore, j'ai décidé de boire un café devant la télévision du logement estudiantin où je vivais. Il devait être 2 ou 3 heures du matin et je me suis arrêtée dans une indifférence totale sur la chaîne suisse TSR 2, vraisemblablement en pleine rediffusion d'un documentaire américain sous-titré français - un deux ceux qui n'attirent pas les foules, même aux heures de pointe. Allongée sur le sofa et, sans regarder l'écran, me suis concentrée sur les monologues en anglais et les voix des différentes personnes interviewées.

Au bout de quelques minutes, intriguée, je me suis redressée afin de pouvoir regarder l'écran, tentant de saisir le fil rouge du récit. Et, de minute en minute, happée par l'histoire et les intervenants, j'ai fini par le visionner en entier. Plus tard, j'ai effectué une petite recherche rétrospective sur le programme de télévision afin de dénicher le nom du documentaire: Capturing the Friedmans (2003) Contre toutes attentes, je l'ai trouvé la Médiathèque de mon quartier où je l'ai emprunté très souvent depuis.

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L'affiche du film, produit par l'excellente chaîne américaine HBO.

Voilà pour la petite histoire.

Au début des années 2000, le réalisateur américain Andrew Jarecki décide de tourner un documentaire sur les clowns qui officient à New York. Il apprend que l'un des plus populaires d'entre eux, très prisés dans les fêtes de la société huppée de Manhattan, se nomme David Friedman. Lors d'une interview où il lui demande d'évoquer sa propre enfance et la naissance de sa vocation, David suggère, entre tristesse et embarras, que son passé ne fut pas des plus simples et qu'il aurait beaucoup à raconter, s'il le voulait. Cette scène sera du reste incluse dans le documentaire Capturing the Friedmans.

Intrigué, Jarecki insiste et demande à David de lui raconter quels ont été les faits marquants auxquels il fait allusion avec une si grande réserve. Le jeune homme lui livre alors une histoire tout à fait étonnante, à mille lieux de son activité artistique de clown.

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David Friedman, aîné des 3 fils et clown professionnel.

Quelques années plus tôt, alors qu'il vit encore chez ses parents dans la banlieue de New-York, David voit son père - Arnold Friedman - et son frère cadet - Jesse Friedman - arrêtés, accusés et finalement condamnés pour des dizaines et des dizaines de viols commis durant plusieurs années sur les élèves du cours d'informatique d'Arnold. Particularité du récit de David: celui-ci dispose de centaines d'heures de film amateur de sa famille avant, pendant et après le drame, les membres de la fratrie - composée de David, Seth et Jesse - ayant eu très tôt pour habitude d'immortaliser sur pellicules réunions familiales, moments de détente, disputes et autres journées de crise. Fasciné, Jarecki visionne les bandes en compagnie de David et décide de modifier son thème de documentaire: d'un film sur l'activité de clown dans les quartiers chics de la ville, il bifurque vers l'histoire de la famille Friedman et le déroulement des évènements survenus après l'arrestation.

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De gauche à droite, Jesse, Arnold, David, Seth et Elaine.

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Jesse et Arnold au moment de l'arrestation:privé de ses lunettes, Arnold ne voit plus rien.

Le documentaire réunit les témoignages de la famille Friedman, d'amis de la famille, de policiers, de juges et d'avocats en charge de l'affaire, de victimes, d'anciens voisins et de journalistes.

Au centre des témoignages, la famille Friedman elle-même et, tout particulièrement, Elaine - ex-épouse d'Arnold et mère des 3 garçons -, Howard - le frère d'Arnold - et David, le fils aîné.

Et au centre du centre des témoignages, Arnold Friedman, homme énigmatique et déroutant, aussi brillant que secret et qui, bien qu'il fut au coeur de toutes les discussions, apparaît très souvent silencieux face à la caméra de ses fils. Issu d'une famille juive très modeste, il se passionne enfant pour le piano et, après de brillantes études universitaires, décide de s'engager dans un orchestre de musique cubaine sous le nom d'Arnito Ray. Après quelques années de vie d'artiste fort heureuses, il se marrie avec Elaine et décide d'adopter une carrière plus conventionnelle afin de faire vivre sa famille: il devient alors enseignant dans une High School et, très apprécié de ses élèves, finit sa carrière primé par la ville et couvert d'honneurs. Adoré de ses 3 fils, on le voit souvent, complice, jouer et parler avec eux sur les films familiaux présentés par le documentaire,

A la retraite, passionné d'informatique avant l'heure, il acquiert un certain nombre d'ordinateurs déjà usés qu'il installe au sous-sol de sa maison et commence à dispenser des cours aux enfants du quartier. Il engage son fils Jesse, alors adolescent, pour l'aider à ranger et à réaménager la classe après chaque cession.

Un jour, la famille de l'un des élèves de la classe dépose plainte contre les deux hommes pour agression sexuelle. A partir de cet instant, comme une boule de neige enfle dans la pente, des dizaines d'enfants ayant suivi ses cours allèguent de viols sordides prétendument commis par Arnold et Jesse durant les classes d'informatique. Plaintes sont déposées. Enquête est menée. Un procès est programmé, dans l'ambiance survolté d'un quartier ravagé par la médisance et l'agressivité. Usant des nombreux films amateurs tournés au moment des évènements par David et ses frères, Jarecki donne la parole à différents acteurs de l'histoire. C'est du moins ainsi que peut se résumer la trame apparente de son documentaire.

Le documentaire de Jarecki est souvent vendu par les compte-rendus journalistiques comme un travail portant sur l'hystérie collective qui peut sévir au sein d'une communauté suite à une allégation aussi grave que celle du viol d'un enfant, le réalisateur lui-même ayant souvent prétendu douter fortement de la culpabilité des deux hommes. Je ne me prononcerai pas sur ce point et laisse à ceux qui le souhaite le soin de se faire une opinion par eux-même quant aux différents actes d'accusation arrêtés par la justice.

Documentaires Unknow25
La trame du film volontiers vendue par les médias.

En revanche, ce que je peux dire sans rien trahir de l'histoire ni du dénouement, c'est que, pour ma part, j'ai été fascinée par la réflexion sur la vérité psychologique qui se dégage du film. Autrement dit, le documentaire me semble poser la question suivante: peut-on capturer - d'où le titre selon moi - la vérité psychique d'un humain à partir de points de vue extérieurs et, si oui, comment? Tous les intervenants de l'histoire, Arnold en tête bien sûr, sont complexes, bardés de paradoxes, de zones d'ombre insondables et de lumières inattendues: le récit choral proposé par le documentaire rend-il vraiment justice à ce qu'ils sont en général et à ce qu'ils furent durant les années du drame?

Je signale encore que ce film, qui a obtenu le Grand Prix du Jury au Festival de Sundance 2003, est porté par une très belle musique originale du compositeur italien Andrea Morricone, fils du célèbre Enio Morricone.

Si certains d'entre vous ont déjà vu le documentaire ou projettent de le visionner, je serais très curieuse de lire vos avis. Wink


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MessageSujet: Re: Documentaires   Documentaires Icon_minitimeLun 11 Aoû 2014 - 0:58

Je viens vous parler ce soir d'un documentaire vu en ce début d'année sur la chaîne Arte et que j'ai trouvé particulièrement fascinant dans la mesure où, narrant une petite tranche de vie volée à une famille américaine moyenne, il nous plonge dans un monde tout à fait dépaysant - du moins pour moi -, pourvu de codes et de mythes mystérieux pour qui ne les pratique pas: Virgine Tales (ou Contes de la virginité).

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Mirjam von Arx, Virgin Tales, 2012: une affiche particulièrement représentative, entre real politic et onirisme en voile blanc.

Il y a quelques trois ou quatre ans, Mirjam von Arx, une réalisatrice suisse-allemande accompagnée d'une petite équipe de tournage exclusivement féminine, s'envole pour le Colorado, aux Etats-Unis, et ce afin de tourner un documentaire sur un sujet qui l'interpelle depuis longtemps: la virginité. Pour ce faire, elle rencontre une famille protestante très observante - les Wilson -, laquelle a acquis une certaine notoriété via l'instauration de rencontres annuelles aujourd'hui connues sous le nom de  "purity balls" ou "bals de pureté".

Documentaires Unknow31
La réalisatrice thurgovienne Mirjam von Arx cherchait depuis longtemps un angle d'attaque pour aborder la question culturelle, morale, religieuse et sociale de la virginité.

Les Wilson sont une famille nombreuse - unie et d'abord très charmant - éminemment représentative du courant méthodiste évangélique, un mouvement traditionaliste du Protestantisme très implanté dans certaines régions américaines. Randy Wilson (54 ans) et son épouse Lisa (53) se sont mariés jeunes et, après avoir consommé leurs premières relations sexuelles ensemble, ont donné naissance à 5 filles et à 2 garçons. Professionnellement, Randy a consacré sa vie à son Eglise puisqu'il est "National Field Director for Church Ministries" au sein du puissant lobby conservateur "Family Research Council". Son épouse a quant à elle dédié son temps au soin et à l'éducation des enfants, tous scolarisés à domicile.

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La famille Wilson au grand complet, accompagnée des conjoints respectifs des trois enfants aînés et du premier des petits-enfants.

Leur 7 enfants, dont les trois aînés sont mariés et vivent hors du nid au moment du tournage, se nomment Lauren (27 ans), Colten (25 ans), Khrystian (24), Jordyn (23 ans), Logan (16 ans) Kameryn (15 ans) et Kaalyn (9 ans).

Bien que le reportage s'intéresse à tous les membres de la famille, il prend pour focus Jordyn qui, au moment du tournage, se trouve dans la position charnière de la plus jeune des enfants adultes encore célibataires. Pour la réalisatrice, elle acceptera de tenir une sorte de Journal filmé de ses états d'âme durant plusieurs mois, relatant son attente du Prince Charmant avec beaucoup d'honnêteté et d'ouverture.

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Jordyn Wilson, dans l'attente du grand amour et dont le Journal filmé constitue plusieurs séquences du film.

Documentaires Images16
Ici, un extrait du Journal filmé que Jordyn, désespérément célibataire, a accepté de tourner durant plusieurs mois dans le cadre du documentaire.

La particularité de la famille Wilson, comme rapidement évoqué plus haut, réside dans le fait que les parents ont instauré une sorte de rite d'initiation annuel de plus en plus populaire au sein des milieux conservateurs américains: les fameux "purity balls" ou "bals de la pureté".

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Randy Wilson, instigateur des "bals de la pureté", ici accompagné de Jordyn et de sa benjamine Kaalyn.

Ces bals sont fondés sur l'idée qu'un croyant véritable ne doit entretenir aucune relation charnelle de quelque ordre que ce soit - y compris un baiser - avant le mariage. Bien que cette conception s'applique aussi bien aux filles qu'aux garçons, et ce exactement sous les mêmes conditions, les "bals de pureté" sont exclusivement destinés aux filles - et, plus particulièrement, aux relations entretenues par pères et filles. Dès le plus jeune âge - 6 ou 7 ans pour certaines -, elles sont invitées, une fois l'an, à revêtir une robe de bal offerte par le père pour l'occasion et à lui promettre, face à une assemblée recueillie, une totale virginité, et ce jusqu'au mariage. L'époux, au moment de la noce, se fera ainsi le relai du père et la jeune fille, déliée de son engagement morale, pourra s'adonner à des relations sexuelles avec les consentements éclairés de sa famille et de son Pasteur.

Documentaires Images13
Les couples pères et filles au centre de la soirée, entre contrat moral et "anneaux de virginité".

Le bal se conclut généralement par une chorégraphie interprétée par l'ensemble des participantes sous la houlette de l'une des filles Wilson - en l'occurrence Jordyn, la jeune femme citée plus haut. (Je précise qu'au sein de ce mouvement, un rite de passage, d'inspiration vaguement chevaleresque, existe pour les garçons et que le reportage nous donne à voir la cérémonie consacrée au jeune Logan, âgé de 16 ans.)

Documentaires Unknow30
L'apothéose du bal: la chorégraphie chrétienne interprétée par les fillettes autour de la Croix.

Ceci pour l'aspect le plus spectaculaire de la tradition.

Mais, ce que nous montre Mirjam von Arx au travers de la famille Wilson, c'est toute la mythologie - mélange étonnant, pour un Européen, entre tradition chevaleresque courtoise et dogme religieux inflexible - qui sous-tend ces fameux bals. En effet, la doctrine théologique se double ici d'une sorte de "mythologie de l'amour" que l'on pourrait résumer de la manière suivante. Premier mouvement: Dieu a prévu pour chaque être humain un destin particulier et, pour celles et ceux qu'ils vouent aux mariages, Il pourvoira bien naturellement un conjoint digne de ce nom. En ce sens, nul besoin de chercher un compagnon ou une compagne activement: il suffit de prier et d'attendre l'arrivée de l'élu. Second mouvement: les relations sexuelles - lesquelles incluent également un simple baiser ou une caresse sur la joue - ne sont épanouissantes qu'au sein du mariage et le plaisir, tant psychologique que physique, ne sera présent que si les deux partenaires se sont préservés pour le jour de leur union sacrée. Conclusion: la plupart des jeunes filles, toutes affaires cessantes après la fin de leurs études secondaires, passent leur temps à prier et à travailler leurs qualités de ménagère dans l'attente providentielle de l'élu. Il en va de même pour les garçons dont il est cependant attendu qu'ils nourrissent leurs futures familles et, par conséquent, qu'ils s'emploient à se former en vue d'un bon travail.

Faut-il encore ajouter que tout ce beau monde adhère unanimement aux thèses républicaines les plus conservatrices, que les garçons - à l'instar des époux respectifs des filles aînées - sont vivement encouragés à accomplir leur devoir patriotique au sein de l'Armée américaine et que les enfants sont élevés dans une étonnante autarcie culturelle, la plupart d'entre eux étant scolarisés à la maison et ne développant d'amitié profonde qu'au sein de la fratrie.

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Trois des soeurs Wilson se préparant au "bal de la pureté" se déroulant le soir même.

Virgin Tales est un documentaire tout à fait étonnant dans la mesure où il suggère et dévoile sans jugement aucun l'univers riche et complexe qui se dissimule derrière ce monde de croyances parfois hétéroclites, fait de dogmes religieux intransigeants, de vision manichéenne du monde et d'engagement chevaleresque envers les Dames, joyaux des familles par leurs ventres et leurs vertus.

Il est également très intéressant de constater que la famille Wilson constitue un clan de gens beaux, talentueux - la plupart des enfants chantent, dansent et bricolent admirablement et tous s'expriment dans un anglais soigné - charmants et souriants, joliment vêtus en toutes circonstances et prêts à répondre aux questions les plus franches de la réalisatrice avec un sérieux et une honnêteté qui forcent l'admiration. Leur discours n'est du reste ni prude, ni éthéré et chacun semble s'exprimer franchement, dévoilant ses doutes et ses passages à vide de manière très touchante. Comme l'a expliqué Mirjam von Arx elle-même à l'occasion de diverses interviews, cet univers oscille entre claustration morale (et parfois physique) poussée à l'extrême et magie presque féerique, baignée dans l'idée jalousement défendue par tous les protagonistes que, pour chaque Dame, Dieu prévoit un Chevalier servant. Et inversement.

Par ce qu'il dévoile d'une mentalité et d'une culture encore peu connues hors des Etats-Unis et par l'honnêteté de son montage - ne tombant jamais dans le jugement ou la moquerie faciles - ce documentaire vaut vraiment la peine d'être vu.

Pour en savoir plus, vous pouvez également faire un tour sur le site officiel du film - Virgin Tales. Film, essentiellement rédigé en allemand - en cliquant ici.

Je serais ravie que des personnes ayant vu ou projetant de voir ce documentaire passe donner leur avis. Wink


Dernière édition par Dérinoé le Sam 22 Nov 2014 - 0:59, édité 2 fois
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MessageSujet: Re: Documentaires   Documentaires Icon_minitimeLun 11 Aoû 2014 - 11:02

J'ai vu ce documentaire cet hiver sur ARTE. Je suis tombée dessus en 2ème partie de soirée, je regrette d'ailleurs d'avoir loupé le début.

Effectivement une affiche, excellente en soit qui résume magnifiquement l'univers de cette famille.


Un reportage très bien fait, je suis d'accord avec tout ce que vient de dire Dérinoé. Je rajouterai que durant le reportage je suis passée par plusieurs phases : tour à tour fascinée, horrifiée, excédée, intéressée (à la manière d'un anthropologue qui découvre une culture indigène traditionnelle), effarée, ébahi, désolée, dégoûtée...


Je ne suis ni activiste, ni féministe, pourtant j'ai eu plus d'une fois envie de prendre Jocelyn par les cheveux et de la traîner vers le bûcher pour la convaincre de brûler son soutien gorge ^^ Je crois que c'est elle qui m'a le plus terrifiée. Dans un sens c'était la plus "extrême" de tous, ou peut-être le plus "naïve" allez savoir.


Je vous encourage tous, si vous en avez l'occasion à la regarder.


Edit : je suis prise d'un doute, j'ai l'impression d'avoir déjà parlé de ce documentaire à l'Auberge. J'ai cherché mais je ne trouve pas  scratch ou alors je voulais en parler après sa diffusion, je l'ai pensé tellement fort que j'ai l'impression de l'avoir fait ^^

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MessageSujet: Re: Documentaires   Documentaires Icon_minitimeLun 11 Aoû 2014 - 14:39

Merci Dérinoé pour cette nouvelle épouvante récréative.

Dérinoé a écrit:
Les couples pères et filles au centre de la soirée, entre contrat moral et "anneaux de virginité"

Une chance pour les joailliers! Un mariage mi-incestueux, mi-religieux à la prépuberté, puis la grand-messe une fois le bon cheval (reproducteur) sélectionné. Le rêve.
(Même les Posy rings du XVIIème siècle avaient plus de charme, parce que remarquables d'originalité et de liberté. Good Lord...).  

ekaterin64 a écrit:
j'ai eu plus d'une fois envie de prendre Jocelyn par les cheveux et de la traîner vers le bûcher pour la convaincre de brûler son soutien gorge

Sans avoir vu le documentaire - hormis quelques extraits sur le sujet, à l'instant, sur youtube -, c'est un peu l'envie qui me gagne également. Enfin, Dieu est grand; il saura éteindre tous les brasiers. Et les tabernacles, aussi, en dommage collatéral.  Wink
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MessageSujet: Re: Documentaires   Documentaires Icon_minitimeLun 11 Aoû 2014 - 15:23

A la base, de ma part en tout les cas, il n'y avait aucun jugement sur cette volonté de rester vierge jusqu'au mariage, ou leur choix politique ou le fait de vouloir rester femme au foyer. Après tout, c'est également une forme de liberté de mener une vie selon ses propres principes, même si ceux-ci ne font pas parti d'une "normalité"


Le malaise venait, comme souvent, du côté extrême, et d'avoir devant moi une secte

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MessageSujet: Re: Documentaires   Documentaires Icon_minitimeLun 11 Aoû 2014 - 17:25

@ Ekaterin64:

Citation :
J'ai vu ce documentaire cet hiver sur ARTE. Je suis tombée dessus en 2ème partie de soirée, je regrette d'ailleurs d'avoir loupé le début.

Hey! Merci beaucoup pour ton avis: cela me fait très plaisir qu'une autre personne ayant visionné le documentaire prenne le temps de partager son point de vue sur ce topic aujourd'hui plus ou moins déserté. sunny 

Et oui, en effet, ce documentaire a été diffusé plusieurs fois par Arte entre la fin de l'année 2013 et Janvier 2014.


Citation :
Un reportage très bien fait, je suis d'accord avec tout ce que vient de dire Dérinoé. Je rajouterai que durant le reportage je suis passée par plusieurs phases : tour à tour fascinée, horrifiée, excédée, intéressée (à la manière d'un anthropologue qui découvre une culture indigène traditionnelle), effarée, ébahi, désolée, dégoûtée...

Merci.

Je partage aussi ta réaction mais d'une manière un peu différente. Ce qui m'a, je pense, touché, dans ce documentaire, c'est sa capacité à capter et, par conséquent, à générer chez le spectateur plusieurs strates de sentiments différents mais simultanés: une grande curiosité pour un monde si proche - d'un point de vue géographique et temporel - mais si éloigné, culturellement, de ma propre vie à laquelle se superposent une incrédulité face à des croyances qui peuvent confiner au fétichisme et une sorte de fascination presque enfantine pour le conte de fée dont relève aussi leur mode de vie. En ce sens, je trouve le titre du documentaire parfaitement choisi puisque cette importance attribuée à la virginité relève au moins autant de croyances religieuses pures et dures que d'une sorte de narration épique médiévale où Princes et Princesses vivent dans des Royaumes de pureté morale et physique avant que de se connaître. (Au sens biblique du verbe.)


Citation :
Je ne suis ni activiste, ni féministe, pourtant j'ai eu plus d'une fois envie de prendre Jocelyn par les cheveux et de la traîner vers le bûcher pour la convaincre de brûler son soutien gorge ^^ Je crois que c'est elle qui m'a le plus terrifiée. Dans un sens c'était la plus "extrême" de tous, ou peut-être le plus "naïve" allez savoir.

Je comprends et, en même temps, j'ai été assez étonnée par l'honnêteté dont Jordyn fait preuve face à la caméra.

Spoiler:

C'est également en ce sens que j'ai trouvé le documentaire intéressant: dans le discours, engagé et convaincu, tenu par ces jeunes gens se superposent une adhésion aveugle à un dogme que l'on sent rabâché depuis l'enfance et les aspérités des parcours individuels, avec leurs lots de doutes et de problèmes.


Citation :
Je vous encourage tous, si vous en avez l'occasion à la regarder.

Itou.

Citation :
Edit : je suis prise d'un doute, j'ai l'impression d'avoir déjà parlé de ce documentaire à l'Auberge. J'ai cherché mais je ne trouve pas  scratch ou alors je voulais en parler après sa diffusion, je l'ai pensé tellement fort que j'ai l'impression de l'avoir fait

Si tu en as parlé quelque part sur Lambton, j'ai pour ma part manqué le topic ou les messages concernés.

Citation :
A la base, de ma part en tout les cas, il n'y avait aucun jugement sur cette volonté de rester vierge jusqu'au mariage, ou leur choix politique ou le fait de vouloir rester femme au foyer. Après tout, c'est également une forme de liberté de mener une vie selon ses propres principes, même si ceux-ci ne font pas parti d'une "normalité"

Le malaise venait, comme souvent, du côté extrême, et d'avoir devant moi une secte

Je comprends très bien ton point de vue. Personnellement, ce qui m'a le plus interpelée, c'est le fait que certains principes soient imposés, martelés, rabâchés sans qu'ils possèdent de réel contenu philosophique, moral ou théologique.

Par exemple, la thèse - absolument arbitraire - qui veut que les relations sexuelles dans le mariage soient "glourious" par essence (pour reprendre l'expression de Lisa Wilson, la mère) et que la nuit de noce constitue dans tous les cas et dans toutes les situations un moment de joie physique et psychologique presque divin est clairement infirmée par l'expérience de milliards d'humains dans le monde.

Que l'on souhaite, pour des raisons religieuses ou non, réserver sa virginité pour le grand amour ne me paraît ni ridicule, ni extravagant - bien au contraire. Que l'on en déduise en revanche que le Sacrement religieux du mariage et l'approbation des familles fassent du premier rapport sexuel - ainsi que de tous ceux qui suivront - des moments de bonheur purs et sans nuage me paraît complètement erroné. Et, si les membres mariés de ce courant témoignaient honnêtement de leurs expériences personnelles, leurs discours, à l'instar de ceux de tous les humains, seraient probablement très variés, nimbés de bonheurs, de déceptions, de hauts, de bas, de succès et de tragédies exemplaires.

@ TimesNewRoman:


Citation :
Merci Dérinoé pour cette nouvelle épouvante récréative.

Avec joie et plaisir. Wink

Citation :
Une chance pour les joailliers! Un mariage mi-incestueux, mi-religieux à la prépuberté, puis la grand-messe une fois le bon cheval (reproducteur) sélectionné. Le rêve.
(Même les Posy rings du XVIIème siècle avaient plus de charme, parce que remarquables d'originalité et de liberté. Good Lord...).

Oui, en effet, le documentaire, sans prendre parti, produit un de malaise diffus face aux réminiscences incestueuses que peuvent dégager ces "bals de la pureté", avec leur cérémonial de contrats écrits, de déclarations nuptiales et d'anneaux de virginité. Le contrat, en l'occurrence, stipule que la fille promet virginité à son père en échange de son amour, de son affection et d'une protection inconditionnels.

Spoiler:

Un autre point qui m'a frappée, c'est le fait que ces enfants - filles et garçons confondus - sont introduits aux notions de virginité et de chasteté à un âge où, probablement, ils ne comprennent pas le sens de l'expression "relations sexuelles". De manière paradoxale, la sexualité - prohibée dans le célibat mais glorifiée dans le mariage - constitue un sujet de discussion et de réflexion récurrent au sein de ces familles et apparaît dans le champ de pensée de minots de 5 ou 6 ans pour qui ces termes deviennent des mantras vides de sens, martelés du matin au soir. J'ai le sentiment que, même si les enfants possèdent une curiosité naturelle pour les parties génitales ou la sexualité, ils ne développeraient pas d'eux-mêmes une sorte d'obsession pour la question si celle-ci n'était omniprésente, sous leurs propres toits.


Citation :
Sans avoir vu le documentaire - hormis quelques extraits sur le sujet, à l'instant, sur youtube -, c'est un peu l'envie qui me gagne également. Enfin, Dieu est grand; il saura éteindre tous les brasiers. Et les tabernacles, aussi, en dommage collatéral.

Qu'Il puisse t'entendre, dans Son inaltérable éternité. Wink


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MessageSujet: Re: Documentaires   Documentaires Icon_minitimeLun 11 Aoû 2014 - 18:17

Dérinoé a écrit:
Je partage aussi ta réaction mais d'une manière un peu différente. Ce qui m'a, je pense, touché, dans ce documentaire, c'est sa capacité à capter et, par conséquent, à générer chez le spectateur plusieurs strates de sentiments différents mais simultanés
C'est là où on voit la parfaite maîtrise de la réalisatrice et sûrement une volonté de nous les rendre on va dire "sympathiques", "abordables" et "normaux". Pas d'agressivité, pas de jugement, l'équipe a dû devenir suffisamment familière pour qu'ils en oublient la caméra. N'oublions pas qu'ils ont fait parti de leur vie durant de longs mois, nous sommes rentrés dans leur intimité, alors forcément à un moment ou à un autre nous nous sommes attachés à eux. Ce ne sont pas des monstres^^
Après je pense que de leur côté, en tout les cas les parents étaient en pleine propagande, cela n'aurait pas été à leur avantage de ne pas coopérer dans ce sens là.

Une telle perfection de vie, un tel calme, une telle osmose fait peur. Je ne trouve pas ça naturel, ils me faisaient penser à certains films d'anticipations où des entités extraterrestres prenaient une apparence humaine, avec un code de conduite "hors norme" pour mieux tromper l'ennemi et nous envahir. C'est l'image idyllique que les pubs des années 60 essayaient de vendre.


Dérinoé a écrit:
j'ai été assez étonnée par l'honnêteté dont Jordyn fait preuve face à la caméra
Elle est quand même, j'ai trouvé en tout les cas, le fer de lance de son père sa meilleure propagande, parce que la plus sincère effectivement. Elle a baigné dedans depuis sa naissance. C'est sa vie, le seul univers qu'elle connaisse.
Une femme n'ayant pas d'autre place dans leur société qu'en tant qu'épouse et mère, on comprend qu'elle ait peur de ne pas trouver "son élu", parce que sans lui elle n'existe pas vraiment.
Plus qu'honnête je dirais un côté très naïf et manquant un peu de caractère


Dérinoé a écrit:
Personnellement, ce qui m'a le plus interpelée, c'est le fait que certains principes soient imposés, martelés, rabâchés sans qu'ils possèdent de réel contenu philosophique, moral ou théologique.
Oui, on peut aussi appeler ça une secte ou un conditionnement forcé lol! 
Ils vivent en vase clos, ne connaissent que ça. Le danger vient surtout que les jeunes générations sont complètement déscolarisés, ne sortent qu'entre eux et jamais seuls. Pas de grandes chances après ça de se faire une autre opinion, si ce n'est que de reproduire à l'identique la vie de leurs aînés

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MessageSujet: Re: Documentaires   Documentaires Icon_minitimeLun 11 Aoû 2014 - 19:23

ekaterin64 a écrit:
A la base, de ma part en tout les cas, il n'y avait aucun jugement sur cette volonté de rester vierge jusqu'au mariage, ou leur choix politique ou le fait de vouloir rester femme au foyer. Après tout, c'est également une forme de liberté de mener une vie selon ses propres principes, même si ceux-ci ne font pas parti d'une "normalité". Le malaise venait, comme souvent, du côté extrême, et d'avoir devant moi une secte

Clairement, oui.
Françoise Sagan avait jugé tyrannique la pression actuelle (disons plus contemporaine) de coucher vite et jeune, aussi tyrannique et stupide que l'interdit (inverse) propre à son époque.
L'art d'être soi, avait titré Bertrand Poirot-Delpech, dans sa nécrologie consacrée à l'écrivain, en septembre 2004...  Wink

Dérinoé a écrit:
Un autre point qui m'a frappée, c'est le fait que ces enfants - filles et garçons confondus - sont introduits aux notions de virginité et de chasteté à un âge où, probablement, ils ne comprennent pas le sens de l'expression "relations sexuelles". De manière paradoxale, la sexualité - prohibée dans le célibat mais glorifiée dans le mariage - constitue un sujet de discussion et de réflexion récurrent au sein de ces familles et apparaît dans le champ de pensée de minots de 5 ou 6 ans pour qui ces termes deviennent des mantras vides de sens, martelés du matin au soir

En effet, et le malaise est tout aussi présent de mon côté.
Ce télescopage permanent (entre ingénuité et prédications à connotation charnelle) redouble l'horreur, d'une certaine façon. Bref, du bel endoctrinement phallocrate...
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MessageSujet: Re: Documentaires   Documentaires Icon_minitimeLun 11 Aoû 2014 - 23:22

@ Ekaterin64:

Citation :
C'est là où on voit la parfaite maîtrise de la réalisatrice et sûrement une volonté de nous les rendre on va dire "sympathiques", "abordables" et "normaux". Pas d'agressivité, pas de jugement, l'équipe a dû devenir suffisamment familière pour qu'ils en oublient la caméra. N'oublions pas qu'ils ont fait parti de leur vie durant de longs mois, nous sommes rentrés dans leur intimité, alors forcément à un moment ou à un autre nous nous sommes attachés à eux. Ce ne sont pas des monstres^^
Après je pense que de leur côté, en tout les cas les parents étaient en pleine propagande, cela n'aurait pas été à leur avantage de ne pas coopérer dans ce sens là.

Là, je ne suis pas sûre d'être d'accord. Tu pars du principe que la réalisatrice, par une maîtrise du montage et de la thématique, a su rendre attachants des personnages, au fond, antipathiques ou effrayants de par leur mode de vie et leurs croyances. C'est là une sorte de préjugé infondé. Qui nous dit que, pour l'essentiel à tout le moins, les Wilson ne sont pas tels qu'ils apparaissent à l'écran, dans leurs bons comme dans leurs mauvais côtés?

Je crois que si la réalisatrice a cherché à les comprendre sincèrement sans jamais les ridiculiser, en revanche, je ne suis pas certaine qu'elle ait manipulé sa matière pour la rendre agréable au spectateur. Je dirais même que, d'un point de vue publicitaire, si manipulation il avait dû y avoir, Mirjam von Arx et son équipe auraient eu tout intérêt à caricaturer et à moquer un mode de vie encore mal perçu ou incompris en Europe.

Je n'ai aucune de raison de croire que les Wilson sont, fondamentalement, différents de la manière dont il apparaissent face à la caméra.


Citation :
Une telle perfection de vie, un tel calme, une telle osmose fait peur. Je ne trouve pas ça naturel, ils me faisaient penser à certains films d'anticipations où des entités extraterrestres prenaient une apparence humaine, avec un code de conduite "hors norme" pour mieux tromper l'ennemi et nous envahir. C'est l'image idyllique que les pubs des années 60 essayaient de vendre.

En un sens, oui.

Spoiler:

D'une manière générale, je les ai trouvés très humains et, par conséquent, tributaires de ces traits de caractère et de ces aspérités qui, précisément, font l'intérêt du film.


Citation :
Elle est quand même, j'ai trouvé en tout les cas, le fer de lance de son père sa meilleure propagande, parce que la plus sincère effectivement. Elle a baigné dedans depuis sa naissance. C'est sa vie, le seul univers qu'elle connaisse.
Une femme n'ayant pas d'autre place dans leur société qu'en tant qu'épouse et mère, on comprend qu'elle ait peur de ne pas trouver "son élu", parce que sans lui elle n'existe pas vraiment.
Plus qu'honnête je dirais un côté très naïf et manquant un peu de caractère

Je comprends très bien ton point de vue mais j'ai perçu le personnage de manière assez différente.

Cela étant, elle témoigne de l'un des paradoxes les plus marquants de ce mouvement religieux: les jeunes femmes, lorsqu'elles sont encore célibataires, sont vivement incitées à n'entretenir aucune relation charnelle ou, même, amicale, avec le sexe opposé et, dans un même temps, leur vie quotidienne est à ce point réduite aux activités familiales et paroissiales que l'attente de l'élu revêt un caractère quasiment obsessionnel.

Au sein d'une société libérale comme l'est la nôtre, il est fort probable que la vie d'une jeune célibataire de de 20 ou 25 ans soit remplie par son travail ou sa formation en cours, ses amis, ses sorties diverses et variées - qu'elles soient récréatives, sportives ou culturelles -, une famille probablement disparate réunissant des gens différents ainsi que par toutes les activités, pénibles ou plaisantes, qu'implique la vie d'adulte. Ainsi, même si l'amour, la sexualité ou le mariage sont attendus avec impatience, il y a fort à parier que cet espoir soit distendu dans une existence riche d'évènements, entre obligations diverses et occupations variées. Or, dans le cas de Jordyn, on ressent fortement que la place laissée vacante par l'absence de toutes ces préoccupations est totalement investie par une attente parfois désespérée du futur époux.

Spoiler:


Citation :
Oui, on peut aussi appeler ça une secte ou un conditionnement forcé lol!
Ils vivent en vase clos, ne connaissent que ça. Le danger vient surtout que les jeunes générations sont complètement déscolarisés, ne sortent qu'entre eux et jamais seuls. Pas de grandes chances après ça de se faire une autre opinion, si ce n'est que de reproduire à l'identique la vie de leurs aînés.

C'est exact, oui.

@ TimesNewRoman:


Citation :
Clairement, oui.
Françoise Sagan avait jugé tyrannique la pression actuelle (disons plus contemporaine) de coucher vite et jeune, aussi tyrannique et stupide que l'interdit (inverse) propre à son époque.
L'art d'être soi, avait titré Bertrand Poirot-Delpech, dans sa nécrologie consacrée à l'écrivain, en septembre 2004...

Entièrement d'accord - et très joli titre, particulièrement pour une nécrologie. Sagan, j'en suis sûre, aurait goûté l'ironie d'un article lui reconnaissant l'art d''être elle-même au moment où elle n'était plus. Wink

Citation :
En effet, et le malaise est tout aussi présent de mon côté.
Ce télescopage permanent (entre ingénuité et prédications à connotation charnelle) redouble l'horreur, d'une certaine façon. Bref, du bel endoctrinement phallocrate...

Phallocrate? Dans quel sens l'entends-tu?


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MessageSujet: Re: Documentaires   Documentaires Icon_minitimeMar 12 Aoû 2014 - 9:25

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MessageSujet: Re: Documentaires   Documentaires Icon_minitimeMar 12 Aoû 2014 - 12:19

@ TimesNewRoman:

Je te remercie beaucoup pour ta réponse détaillée. sunny 

Je commence par répondre à ta dernière question.


Citation :
D'où d'ailleurs mon interrogation depuis hier: comment les futurs couples se rencontrent-ils, se forment-ils — en définitive? Le documentaire l'explique-t-il?

Oui, tout à fait. Je citerai les exemples mentionnés par le documentaire, à savoir ceux des 3 enfants aînés de la fratrie Wilson.

Spoiler:


Citation :
Au sens où les parents Wilson veillent, par leurs prêches et endoctrinement, à reproduire une structure sociale (la leur) où l'individu femme ne connaît aucun libre arbitre hors la gynécée qui lui est dévolue, si conjungo.

C'est vrai. Deux remarques cependant.

D'abord, il faut saisir que, si l'on excepte la charge professionnelle qui leur incombe, les garçons sont soumis au même traitement que les filles en matière de virginité, de scolarisation, de libre arbitre, de mariage, de paternité et de mode de vie.

Ensuite, bien que cela ne remplace en rien le droit à choisir pour soi-même ou l'indépendance financière, il faut bien comprendre que les femmes, dans cette société, sont, avant et après leur mariage, respectées et révérées comme des joyaux. On le sent d'ailleurs tout à fait dans les regards que portent les hommes sur leurs épouses dans les moments où les couplent répondent ensemble aux questions de la réalisatrice. (Et inversement, du reste.)

Pour ce qui est du couple parental Wilson, on saisit également que, bien que l'idée du "bal de pureté" émane de Randy, c'est Elisa qui, par ses suggestions nombreuses, lui a donné sa forme actuelle en lui insufflant le glamour et l'esprit chevaleresque qui séduisent bien souvent les jeunes participantes. De la même manière, il transparaît que la mère est matrone en sa demeure et que nul n'est mieux habilité qu'elle a parler des enfants ou de la famille en général. Lorsque le clan au grand complet se réunit autour de la table pour skyper avec l'une des filles aînées, c'est la mère qui, géographiquement, occupe le centre du cercle formé par les autres membres. De la même manière, lorsque l'un des enfants remercie chacun des membres de sa famille individuellement lors d'une solennelle occasions, c'est la mère qui, systématiquement, est citée en dernier, comme on garde le mot le plus important de la phrase pour la séquence finale.

Sans partager aucune des valeurs religieuses ou morales de cette famille, je comprends très bien (comme tu le concèdes toi-même plus loin) l'attrait que peut exercer la promesse d'un tel statut pour des jeunes femmes ayant grandi au sein d'un foyer apparemment très uni.


Citation :
D'abord mariée à son père lors d'un bal public, qui lui assure protection (et enfermement, aliénation) non jusqu'à sa majorité légale et un plein exercice de droits (majorité qui caractérise, en règle générale, l'émancipation du sujet, au moins sur le papier), mais jusqu'à un second mariage. Le mari prend alors le relais du père, si j'ai compris juste, l'individu femelle ayant semble-t-il constamment besoin de tuteurs, comme en jardinerie.

Oui, sur ce point, je ne peux que te rejoindre - et c'est sans doute là l'un des aspects les plus exotiques de la chose pour une mentalité - croyante ou athée - européenne.

Citation :
(Pousser droit est une obsession de tous les tordus, c'est une observation personnelle).

Mille fois d'accord. Ta constatation me rappelle du reste cette phrase du Roi des Aulnes de Michel Tournier (1970): "La pureté est l'inversion maligne de l'innocence."

Citation :
Je n'ai pas souvenance qu'un bal public soit organisé pour les petits garçons auxquels il serait demandé de contracter mariage avec leurs mères, en gage de pureté absolue, mères qui les délivreraient de leur tutelle en les soumettant, selon un continuum aliénant, à celle de leurs futures épouses.

C'est tout à fait exact. En revanche, le rituel masculin - qui met en valeur des notions de virilité, de courage, de protection et d'honneur - soumet le garçon aux mêmes conditions de vie que ses soeurs, pratiquement parlant.

Citation :
J'ai cru comprendre, enfin, que (seuls) les hommes accédaient à un emploi et à des responsabilités dans la Cité (tout en gardant un oeil sur la maisonnée, que les femmes ne régentent donc pas exclusivement).

Cette question reste en suspens.

Comme écrit plus haut sous spoiler, la belle-fille des Wilson, Anna, est en passe d'obtenir le même diplôme universitaire que son époux. D'une manière générale, je ne sais pas si toutes les familles membres du mouvement barrent l'accès de leurs fille aux formations scolaires ou professionnelles secondaires ou si le parcours des ainées Wilson relève de choix personnels. Je me rappelle que Randy Wilson, faisant l'éloge de chacun de ses beaux-enfants, souligne l'intelligence de sa bru et se réjouit qu'elle ait étudié, elle aussi, la théologie.

Dans une autre scène du documentaire - par ailleurs présente dans le trailer officiel -, Jordyn dit expressément qu'elle ne voit aucun intérêt à dépenser des milliers de dollars pour une éducation universitaire dont elle ne fera pas usage, son unique préoccupation étant de se consacrer à un époux et à des enfants qu'elle appelle continuellement de ses voeux.


Citation :
Cette structure sociale-là est phallocrate. C'est un simple constat, je peux imaginer que cette dichotomie et servilité (hors l'époux, point de salut) plaisent.

Oui, d'une certaine manière, mais j'ai eu le sentiment que, même si les femmes n'occupent que peu de places à responsabilité au sein de cet univers-là, elles constituent de véritables piliers dans l'interface moins visible du grand public. Le matriarcat n'est pas sans importance, dans un tel mode de vie.

Citation :
Question: les jeunes hommes qui, par inadvertance, n'auraient pas trouvé leur moitié, restent-ils auprès de leurs parents ou s'émancipent-ils malgré tout par le travail?

Excellente question! Le documentaire n'en dit rien.

De même, je me suis demandée si tout cet esprit d'amour et de confraternité persisterait si l'un des enfants consommait des relations sexuelles avant le mariage, déclarait son homosexualité publiquement ou, plus simplement, décidait d'adopter un mode de vie libéral en général. Serait-il soumis à une intolérable pression du groupe? Serait-il banni de la famille comme peuvent l'être, parfois, ces grands criminels dont on relègue les portraits dans le cagibi familial? Je suis presque certaine que le cas de figure doit se présenter plus ou moins régulièrement au sein de l'Eglise et je me demande comment les membres, prônant du matin au soir des valeurs bibliques et morales d'une haute tenue, réagiraient sur ce terrain de la "trahison".


Dernière édition par Dérinoé le Sam 22 Nov 2014 - 1:10, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Documentaires   Documentaires Icon_minitimeSam 16 Aoû 2014 - 0:49

Pour les éventuels intéressés, je vous relaie ici deux interviews de la réalisatrice de Virgin Tales (2012), la Thurgovienne Mirjam von Arx, réalisé à l'occasion de la promotion du documentaire en Europe et aux Etats-Unis: la première se déroule en allemand, la seconde en anglais.

1) Voici l'interview en allemand dénichée sur YouTube, sur le compte de la société Bures Media Werbe & Imagefilm:




2) Et voici l'interview en anglais, réalisée aux Etats-Unis, et trouvée dans la section "Archive" du site américain Denver Open Media:

https://archive.org/details/dom-548666-virgintales

Les informations délivrées par la réalisatrice sur la genèse et le déroulement de son projet ainsi que le regard qu'elle porte sur les protagoniste du documentaire sont particulièrement intéressants.

Bonne pioche! sunny
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MessageSujet: Re: Documentaires   Documentaires Icon_minitimeMer 20 Aoû 2014 - 12:46

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MessageSujet: Re: Documentaires   Documentaires Icon_minitimeDim 9 Aoû 2015 - 18:30

J'ai longuement hésité à poster ce message dans la section réservée aux documentaires car il aurait tout à fait sa place sur le fil dédié à la photographie. En effet, j'aimerais vous dire un mot d'un film passionnant consacré à la mystérieuse photographe new-yorkaise Vivian Maier (1926-2009) que TimesNewRoman* avait déjà évoquée à deux reprises sur Lambton: d'abord ici, à l'occasion du décès de la talentueuse Mary Ellen Mark et, de manière plus conséquente, ici, bande-annonce à l'appui. Finalement, j'ai opté pour le présent fil, et ce pour deux raisons: d'abord, parce que mon compte-rendu portera plus sur le documentaire en lui-même que sur l'oeuvre photographique de Vivian Maier, ensuite parce que, dépassant la simple exposition d'un travail artistique, ledit documentaire est susceptible d'intéresser bon nombre d'entre vous, y compris ceux qui n'entretiennent que de très lointains rapports avec l'art photographique.

Le documentaire en question s'intitule Finding Vivian Maier (ou À la Recherche de Vivian Maier) et a été coréalisé en 2013 par deux jeunes Américains, John Maloof et Charlie Siskel.

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John Maloof et Charlie Siskel, Finding Vivian Maier, 2013.

Ce film, nominé aux Oscars du Meilleur documentaire en 2015, est l'une des plus passionnantes enquêtes sur la psychologie humaine qu'il m'ait été donné de connaître, à égalité avec L'Adversaire d'Emmanuel Carrère (2000) et Capturing the Friedmans d'Andrew Jareki (2004).

À la fin de l'année 2007, John Maloof, jeune agent immobilier habitué aux marchés aux puces, prépare un ouvrage sur l'un des quartiers mythiques de Chicago, Portage Park**. Réunissant le matériel photographique nécessaire à son projet, il écume les ventes aux enchères dans l'espoir de cravater à bon prix des lots d'images utiles à son album. C'est ainsi qu'il acquière pour moins de 400 Dollars un carton remplis à ras bord de négatifs, de pellicules et de tirages photographiques ayant appartenu à un illustre inconnu dont le nom n'est mentionné nulle part. À sa grande déception, le lot ne comprend aucune image de Portage Park et le jeune homme, occupé par son propre projet, range l'encombrante boîte au fond d'un placard.

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Charlie Siskel (à gauche) et John Maloof (à droite), coréalisateurs de Finding Vivian Maier, 2013.

Une année plus tard, John Maloof ressort certains négatifs, les numérise et les met en vente sur la plateforme EBay, espérant obtenir un peu d'argent grâce à ce matériel sans intérêt pour lui. C'est par le biais d'une transaction qu'il entre en contact avec un Professeur d'Histoire de l'Art, lequel, ébloui par les négatifs, lui fait prendre conscience de leur grande valeur artistique. Fasciné, le jeune homme se met à examiner le contenu du carton avec grande attention, cherchant un indice quant à l'identité du mystérieux photographe. De fil en aiguille et à partir de maigres indications, il finit par tomber sur un patronyme, inscrit sur une vieille enveloppe, dégotée dans l'un des cartons ayant autrefois appartenu au propriétaire des photographies: Vivian Maier.

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Vivian Maier, sans titre, autoportrait vraisemblablement pris à Champsaur, en France, village d'origine de sa mère.

En poursuivant ces recherches et suivant le filet ténu d'une notice mortuaire trouvé dans le Chigaco Tribune, John Maloof apprend que Vivian Maier est décédée, qu'elle fut d'origine new-yorkaise, exerça sa vie durant les professions de nanni et de gouvernante avant de mourir à l'hôpital, à l'âge de 83 ans, sans famille ni descendance connues.

Bardé de ces milliers de négatifs et de son maigre pécule d'informations, John Maloof décide de consacrer à cette étonnante Vivian Maier un livre et un documentaire qui permettront à un large public de découvrir des photographies extraordinaires, jamais révélées au grand jour.

Le livre s'intitule Vivian Maier, Street Photohrapher et a été publié en 2011, chez PowerHouse Books:

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John Maloof, Vivian Maier, Street Photohrapher, 2011.

Le documentaire, c'est celui dont je vous parle présentement: il repose entièrement sur l'enquête passionnante menée par le jeune homme qui, de New-York à Champsaur en passant par Chicago, tente de restituer à la fois le parcours et la personnalité de cette femme hors-du-commun, nanni itinérante de profession mais photographe obsessionnelle ayant accumulé de son vivant quelques 120'000 pellicules et négatifs dont l'immense majorité ne fut jamais tirée sous forme de photographies, confinés à l'état de bobines et entassés dans des cartons disséminés après sa mort. Interrogeant employeurs, anciens enfants placés sous sa garde, voisins, connaissances, galeristes et photographes renommés, John Maloof reconstruit le portrait réfracté d'une femme secrète jusqu'au confinement, toutes faites de paradoxes et d'étrangetés suspendus par une grâce à la fois lumineuse et malsaine à la lanière de son appareil photo.


Bande-annonce de Finding Vivian Maier, coréalisé par John Maloof et Charlie Siskel, 2013.

Je ne veux pas gâcher le plaisir de ceux qui seraient éventuellement intéressés par le documentaire et ne dévoilerai donc aucun des éléments importants révélés par le film. En revanche, je peux vous dire que la personnalité et la vie de l'énigmatique Vivian Maier constituent l'un des puzzles les plus passionnants que j'ai pu rencontrés à ce jour: à la fois indépendante et confinée, itinérante sans repos mais collectionneuse jusqu'à l'excès, l'oeil irisé d'humanité mais le coeur traversé de violences incoercibles, toute en obsessions pour son art mais indifférente à cette concrétisation ultime que constitue le tirage, cette silhouette un peu raide au cheveux de garçon ne vous laissera pas indifférents. Outre l'intérêt artistique que constitue la présentation de son oeuvre, l'enquête, haletante, nous offre le modèle exemplaire d'une (impossible) analyse psychologique, de celles dont chaque élément semble annulé par tous les autres - et réciproquement. Je n'ai pour ma part que peu d'accointances avec l'art photographique et j'ai pourtant goûté chaque minute de ce documentaire, tant, à l'instar de John Maloof, j'avais envie de comprendre quelle muse, du génie ou de la folie sans retour, animait cette femme demeurée dans l'ombre de ses cartons une vie durant.

Si vous souhaitez en apprendre plus sur Vivian Maier ou John Maloof, aujourd'hui indissociablement mêlés dans l'esprit du grand public, vous pouvez consulter le site Vivianmaier.com en cliquant ici. Mais, pour ma part, je vous recommande vivement de visionner le documentaire sans rien gâcher du suspens qui le traverse de part en part, jusqu'au grand point d'interrogation final qui nous pend à tous au bout du nez.

Si certains d'entre vous l'ont déjà visionné ou connaissent le travail de Vivian Maier, je serais ravie de lire d'autres avis sur le personnage. Wink


***


*Petit Faucon en parle ici et Edwyn en a publié un compte-rendu détaillé ici.
**Ce livre a également vu le jour. Il s'intitule Images of America. Portage Park et a été publié en 2008 par Daniel Porgozelski et John Maloof, chez Arcadia Publishing.
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