Eric Marchal et les romans historiques

Bien qu'ayant souvent vu Le soleil de la soie en librairie, je n'ai encore rien lu cet auteur. Pour la raison que j'ai déjà de nombreux romans historiques sur mes étagères, et que je me rends compte que, après tous ceux que j'ai lus, je deviens difficile depuis quelques temps : j'ai peur d'être déçue en me lançant dans un auteur que je ne connais pas car j'ai déjà eu quelques déconvenues. Mais ce que tu en dis m'incite à m'y mettre Ludi, par exemple quand les deux derniers que tu mentionnes sortiront en poche.

Tatiana, je te réponds (un peu en retard  ), mais La soie sous la peau est disponible en poche, avec la même couverture que l'édition grand format, d'où ma confusion quand j'ai créé le sujet.

Je passe un bon moment avec Le soleil sous la soie. Après quelques 300 pages (je ne suis donc pas encore arrivée à la moitié de ce pavé ) j'apprécie la plongée dans le quotidien d'un chirurgien affecté aux armées. C'est très bien documenté sur la médecine de l'époque (qu'est ce qu'on est bien aujourd'hui...), le cadre géographique hongrois fait sortir le lecteurs des sentiers franco-français qu'on a l'habitude d'arpenter dans les romans historiques sous Louis XIV. Pour autant je ne suis pas passionnée, le tout manque parfois de saveur. Le héros Nicolas semble trop parfait pour être vrai, bien qu'on découvre ses différentes facettes au fil des chapitres.

Je découvre avec plaisir l’existence d’un topic sur Eric Marchal!   Merci Ludi pour l'ouverture du topic il y a quelques années et Tatiana pour ton retour!  

J’ai reçu en cadeau Les heures indociles, son dernier roman, disponible en poche.



En voici le pitch proposé en quatrième de couverture :

Citation :

Chacun d’entre eux est un rebelle.
À deux, ils sont dangereux.
À trois, ils sont incontrôlables.

Londres, 1908 : engoncé dans ses principes, le siècle renâcle à commencer. Trois combats se rencontrent alors : la suffragette Olympe Lovell, militante acharnée pour les droits des femmes ; le médecin Thomas Belamy, métis annamite déterminé à marier sciences occidentales et orientales ; et Horace de Vere Cole, poète excentrique, aristocrate et plaisantin de génie… Trois avant-gardistes dont les ambitions, tribulations et passions contrariées s’apprêtent à faire trembler l’Angleterre victorienne…

Ce roman est une fiction historique, centrée au début du vingtième siècle, à des moments charnières pour l’évolution de la société, que ce soit par les thèmes mis en avant dans la quatrième de couverture, mais aussi dans le quotidien (arrivée de l’électricité, du gaz, du téléphone…) et bien d'autres (le contenu est très riche!).
L’auteur semble s’être abondamment documenté, au travers d’une note de l’auteur où il précise la réalité historique de certains faits racontés ou la licence littéraire pour déplacer certains éléments de la vie de personnages ayant réellement existé pour les besoins de son récit, mais aussi une abondante bibliographie restituée en fin d’ouvrage.  

C’est une histoire multi-facettes, entre :
- le récit des actions de la suffragette Olympe Lovell, qui agit au sein du WSPU (Women’s Social and Political Union) d’Emmeline Pankhurst et ses filles (notamment Christabel qui apparaît). Je ne connaissais pas du tout comment cela s’était passé à l’époque et j’étais horrifiée des traitements réservés en prison aux suffragettes pour une demande d’un droit de vote des femmes qui nous semble maintenant si naturel…  
- le récit du travail aux urgences de Thomas Bellamy. Les cas cliniques décrits sont issus du travail de recherche bibliographique d’Eric Marchal. Dans la forme du récit, j’avais l’impression de voir la série Urgences, que j’avais adorée dans ma jeunesse, transposée au début du XXème siècle londonien, avec toute la tension pour accueillir et soigner les patients, les enquêtes presque policières pour déterminer la cause des symptômes et le côté touchant de voir apparaître des actes médicaux qui nous semblent « usuels » maintenant (comme le massage cardiaque).    Touchant de voir que des maladies dont nous sommes vaccinés maintenant n’avaient pas le même impact personnel à l’époque (comme la diphtérie).  
- le récit du mode de vie d’Horace de Vere Cole, artiste dans l’âme, qui vit chaque jour comme un jeu et un plaisir, qui s’engage artistiquement et dans le quotidien avec ses canulars, loin de la pose intellectuelle sans implication dans le réel d’autres écrivains.

Puis ces différentes facettes se rejoignent et comme trois fleuves, créent un nouveau courant, où ces combats individuels se dissolvent dans des problématiques socio-politiques plus larges (conditions de vie dans l’East End et Chinatown, manœuvres politiques entre libéraux et conservateurs, armement de la marine face à l’Allemagne,…).
Alors que je trouvais l’histoire passionnante quand on suivait les engagements respectifs de chaque personnage, mon attention s’est relâchée quand

Spoiler:

Elle s’est heureusement rallumée au final qui est à la hauteur des débuts du roman.  

On y croise la famille Pankhurst comme dit plus haut, les ministres en exercice à cette époque (dont Churchill), Virginia Stephen (future Woolf) et le groupe de Bloomsbury, Conan Doyle,…  

Eric Marchal a su créer en plus de 800 pages un récit riche, où souffle le vent de la modernité qui a soufflé à cette époque de l’histoire, avec des personnages libres et attachants.  
On y vibre aux combats historiques, aux histoires plus personnelles

Spoiler:

Sa plume est sobre mais suffisamment détaillée et habilement agencée pour recréer les cadres de l’époque de sorte de s’y sentir transporté.    A noter pour les âmes sensibles que les descriptions des interventions médicales sont aussi détaillées (techniques sans être glauques, mais assez impressionnantes quand on fait de l’œil à la moindre goutte de sang   ). Je rejoins la remarque de Ludi pour un autre de ses romans, sur ce point.

Vous aurez compris que j'ai beaucoup aimé ma découverte de cet auteur!  

Pour conclure cette présentation, on croise dans l’histoire un personnage français qui vient d’un autre de ses romans Là où rêvent les étoiles qui m’intrigue assez pour que ce soit la prochaine exploration de l’œuvre d’Eric Marchal que je souhaiterait faire!    (Je sais que je mords à l’hameçon de l’auto-promotion, mais quand une histoire est bien racontée, je ferme les yeux dessus.   )

Merci pour ta présentation et ton retour sur ce roman Vavyala. Le cadre historique est évidemment très tentant pour un lectorat amateur d'histoire et de littérature anglaises .
(J'avoue ne garder aucun souvenir du Soleil sous la soie, en-dehors de son volume Mon carnet de lectures m'indique que ce fut ma dernière lecture de 2016, et que je suis bien arrivée au bout).

Merci pour cette très jolie présentation, Vavyala !! Je rajoute immédiatement ce livre dans ma wish-list (les thèmes abordés me plaisent beaucoup)

Merci pour ce retour détaillé, Vavyala ! L'époque et les thématiques sont intéressantes. L'aspect médical détaillé aurait tendance à me rebuter en revanche.

De rien, j'ai pris le temps de détailler mon retour à la fois parce que j'ai beaucoup aimé, mais aussi qu'il a le profil d'un roman lambtonien.

Tatiana, j'ai vu depuis que le personnage que je croyais fictif d'Horace de Vere Cole avait vraiment existé et qu'un canular qu'il a fait avec Virginia Woolf relaté dans le roman avait vraiment eu lieu! (Eric Marchal l'a en partie adapté, notamment pour intégrer un personnage fictif.)
Il y a une douzaine de pages de bibliographie, de textes datant du début du XXème, donc je me dis qu'il a été aussi sérieux que possible pour le cadre historique.

Juliette, je pense qu'il te plairait (notamment pour certaines raisons sous spoiler que je ne peux pas te dire, sinon ça te gâcherait la bonne surprise).

esperluette, d'un côté, je te rassure, l'aspect médical ne prend pas toute la place de l'intrigue, donc reste contenu dans de justes proportions.
D'un autre côté, il y a 1 ou 2 scènes d'opérations un peu plus poussées qui ont failli me faire tourner de l’œil (comme cela a été le cas des personnages témoins ) et un des mauvais traitements infligés aux suffragettes en prison, donc je préfère prévenir les mauvaises surprises des potentielles futures lectrices. A la limite, si tu le lis un jour, tu peux sauter les passages en question. Ils sont intéressants pour les passionnés de l'histoire de la médecine et éventuellement pour évaluer la solidité psychologique de certaines personnages, mais ne contiennent pas d'éléments cruciaux pour l'intrigue.