Hier soir, je suis allée voir
Lawrence d'Arabie projeté au cinéma UGC Normandie sur les Champs Elysées, qui a prévu un mois de programmation spéciale avant sa fermeture définitive la semaine prochaine.
J'ai donc vu la grande salle mythique (et magnifique, avec un son exceptionnel) de ce cinéma, pour la première et la dernière fois. Ce cinéma a ouvert en 1937 et il ferme ses portes la semaine prochaine, compte tenu de la baisse de fréquentation et de la hausse du prix des loyers. Avant la séance hier, l'histoire de ce cinéma nous a été présentée (de l'époque où il y avait une trentaine de cinéma sur les Champs, à aujourd'hui où on en compte trois, en comptant deux cinémas art et essai dans les rues transverses). Le film nous a aussi été présenté. Dans la salle trois ou quatre personnes avaient vu
Lawrence d'Arabie au cinéma lors de sa sortie en 1962
. A la fin de la présentation, l'animateur avait les larmes aux yeux en parlant de la fermeture du cinéma.
Ensuite, le film !
J'avais essayé de le voir il y a quelques années, sans succès, en français et à la télévision, je m'étais arrêtée à moins de la moitié, j'en avais gardé un souvenir pénible, et c'était plutôt devenu une plaisanterie avec mon frère, on avait souffert ensemble et on avait abandonné ensemble.
Eh bien, hier, j'ai trouvé ça génial !
Le film est en deux parties (avec un entracte), et j'ai préféré la première, où le jeune Lawrence est encore maladroit, un peu rêveur, ne sait pas trop où il va, où l'on savoure le déploiement des grands espaces désertiques, avec la musique incroyable de Maurice Jarre ; à la seconde partie, plus complexe à comprendre, plus hachée dans le rythme (on enchaine les périodes de mégalomanie héroïque du personnage, avec des scènes d'abattement ou des scènes de politique un peu cyniques), et dont la fin est assez abrupte.
Il reste que je suis ressortie emballée, un peu sonnée, et impressionnée par l'ampleur de ce film
, dont toutes les images sont filmées en prises de vue réelles (pas d'images de synthèses, mais des centaines de figurants, des centaines de chevaux, les ciels et le désert filmés tels qu'ils sont...). Le film est aussi captivant comme portrait du personnage principal, fascinant, avec la figure angélique et les grands yeux bleus de Peter O'Toole.
Le présentateur nous a dit que ce film avait été une influence énorme pour plein de cinéastes (Spielberg par exemple), mais aussi une influence certaine pour l'auteur de
Dune, Frank Herbert, et bien-sûr sur Denis Villeneuve, pour les deux derniers films sortis. Je n'aurais pas eu besoin qu'on me le dise pour y penser.
Les images bien-sûr et le désert avec la musique comme présence de chaque seconde, mais aussi le personnage principal, qui de jeune homme un peu "différent" et tendre, se prend au jeu du prophète et finit par s'enfermer lui-même (ou à demande des autres) dans un rôle de messie et d'unificateur des peuples du désert. Ca rappelle des choses...
J'ai retrouvé des thèmes du film
Dune... mais dans le monde réel.
J'ai donc plongé pendant près de quatre heures dans cette page de l'Histoire (qu'on pourrait presque dire de la première guerre mondiale) et dans l'histoire de ce personnage atypique qu'a été T.E Lawrence (même si le film se concentre exclusivement sur la période courte des révoltes arabes). Les acteurs sont excellents, Omar Sharif est très charismatique, Alec Guiness méconnaissable en prince arabe, et Anthony Quinn est parfois drôle (et là encore, je me demande si Javier Bardem dans le dernier
Dune n'est pas tout simplement un clin d'oeil à Anthony Quinn...).
Bon, seul regret, il n'y a absolument aucune femme dans ce film. Ou disons qu'il y a un unique plan où on voit le visage de femmes.
C'est l'Histoire et on n'y peut rien, mais ça fait quand même beaucoup trop d'hommes tout ça !
Voilà, quel plaisir c'était de voir ce monument du cinéma dans ces conditions ! Je ne regrette pas du tout d'avoir choisir d'aller voir ce film !
Je ne suis pas sûre d'avoir bien saisi la complexité de la fin, entre les destins et les désirs croisés des uns et des autres, cela mériterait de lire une ou deux analyses du film, mais enfin, je suis vraiment contente !