Goliarda Sapienza (1924-1996).

Goliara Sapienza, autrice sicilienne, était fille de Giuseppe Sapienza (monsieur sagesse) et de Maria Giudice (madame juge), deux figures du socialisme sicilien.

Télérama a écrit:

Enfant de remplacement, elle arriva au monde en 1924 dans une famille sicilienne nombreuse et recomposée, juste après l'assassinat d'un frère, Goliardo, et la mort d'une sœur, Goliarda. Sa vie fut un glissement permanent, jusqu'à sa chute mortelle dans les escaliers, en 1996. [...]  Goliarda... C'est un peu comme si elle s'était appelée « Paillarde ». Dans la Sicile des années 1930, peu de fillettes répondaient à ce prénom, les quolibets fusèrent donc souvent. Néanmoins, cette évocation des goliards du Moyen Age, clercs connus pour leur puissance poétique et subversive, lui va comme un gant. Sapienza... « sagesse », de quoi parfaire l'aura magnanime de la romancière

Elle commença sa carrière d'actrice au théâtre, puis dans de petits rôles au cinéma (elle a notamment joué dans Senso de Luchino Visconti), avant de se lancer dans l'écriture.

Son chef d'oeuvre L'art de la joie a été publié après sa mort en 1998 et il a connu le succès dans de nombreux pays. Une lecture de ce roman était prévue par plusieurs d'entre nous cette année, qui sera forcément impactée par le confinement, mais celles qui ont le livre et la motivation de s'attaquer à ce monument prendront les devants 

Télérama a écrit:

Il fallut le flair enthousiaste d'une éditrice française, Viviane Hamy, pour que son travail sorte de l'ombre, en 2005, presque dix ans après sa mort, avec la parution en France de son monumental Art de la joie, dans une traduction remarquable de Nathalie Castagné. Goliarda Sapienza avait elle-même pris presque dix ans de sa vie, entre 1967 et 1976, pour écrire au Bic noir ce roman de plus de 600 pages où elle mit tant d'elle-même. Son héroïne, Modesta, n'a pas un prénom plus facile à porter que le sien. Née le 1er janvier 1900, elle incarne à elle seule tous les combats de son siècle : féministe, bisexuelle, communiste, antifasciste, Modesta connaît la pauvreté extrême, l'absence de père, le viol, le couvent, la vie de château, la peur de l'eau, la maternité, la psychanalyse, la vieillesse.

 
Pour en savoir plus, deux émissions de La Compagnie des Auteurs lui ont été consacrées sur France Culture. Ces émissions peuvent être podcastées ici ici

Merci pour cette présentation, Serendipity ! Je lirai vos avis sur L'Art de la joie

Et j'ignorais qu'elle avait joué dans Senso Merci pour l'info !

Juliette2a a écrit:

Et j'ignorais qu'elle avait joué dans Senso Merci pour l'info !

Idem pour moi, je l'ai découvert en préparant ce topic. Apparemment c'est un petit rôle de figurante qui ne serait même pas crédité au générique

Merci pour l’ouverture de ce topic   .

J’ai lu, de la même autrice, Moi, Jean Gabin : un court roman à la veine autobiographique qui retrace les années de jeunesses de Sapienza, dans un quartier populaire de la Sicile, au début des années 30.

J’ai adoré suivre cette petite fille effrontée, frondeuse, fougueuse, aux idéaux libertaires déjà bien arrêtés, et qui passe le plus clair de son temps à déambuler dans les ruelles et salles obscures de son quartier que sur les bancs de l’école. Elle fait véritablement l’apprentissage de la vie dans la rue, au gré de ses rencontres, et à travers les films, notamment ceux de Jean Gabin.

Elle n’est pas amoureuse de Jean Gabin, non, elle veut être Jean Gabin : car il est à ses yeux le paradigme même du héros rebelle, libre comme l’air et virile. Tous les passages évoquant Gabin, par le prisme juvénile de cette petite fille, sont merveilleux et touchants.

Je voudrais vous partager ici un petit extrait cocasse où l’héroïne tente d’imiter la démarche et l’allure ténébreuse de Gabin :

Spoiler:

C’est un texte poétique, sensible, engagé, et qui donne un très bel aperçu des années formatrices de cette autrice à la vie si mouvementée     . J'ai d'ailleurs découvert et adoré Le quai des brumes, et in fine Gabin, grâce à ce roman .

Aussi, je suivrais avec beaucoup d’intérêt votre lecture commune de L’Art de la joie ; j’ai grande envie aussi de m’y plonger, très prochainement je l’espère.

Merci pour l'ouverture du topic Serendipity, j'ai également appris des choses !

J'ai L'Art de la joie sur ma PAL depuis 2-3 ans, ce livre m'avait intriguée par son statut de livre culte. Je me réjouis donc de l'attaquer bientôt.

Ton retour sur Moi, Jean Gabin donne envie de le découvrir également, Sihaya.

J'ai également Moi, Jean Gabin dans le viseur depuis sa sortie merci d'avoir partagé un extrait Sihaya 

Merci serendipity pour l'ouverture du topic et la présentation très intéressante de Goliarda Sapienza que je découvre!

Merci beaucoup Sihaya pour ton retour sur Moi, Jean Gabin, très bien raconté, qui donne très envie de découvrir ce texte un jour!    L'extrait que tu partages est très beau dans son écriture!

J'ai commencé L'Art de la joie. Malgré ses presque 800 pages qui m'effrayaient, c'est tellement bien écrit que je le lis comme un page turner (après 2 jours, j'en suis au quart).
Beaucoup de force dans l'écriture, qui nous entraine inexorablement comme un fleuve emporte ce qui y tombe, beaucoup de poésie, qui illumine d'espoir même les moments les plus sombres de la vie de Modesta et une grande admiration pour le début de parcours de cette femme qui ne s'enferme pas dans un rôle de victime passive de sa vie mais en prend les rênes avec action chaque fois qu'elle en a la possibilité.

J'ai hâte que les Lambtoniennes inscrites à la lecture de groupe viennent échanger pour pouvoir en discuter ensemble!  
D'autant que comme je ne suis pas une littéraire, les commentaires d'autres Lambtoniennes promettent d'être plus intéressants que ce que je pourrai vous en dire!
N'hésite pas à nous rejoindre Sihaya, à la fois parce que tu as déjà découvert son œuvre et parce qu'au vu de ce que tu partages de Moi, Jean Gabin, il y a des chances que L'Art de la joie te plaise aussi (enfin, pour ce que j'en ai lu jusqu'à présent).

esperluette a écrit:

Ton retour sur Moi, Jean Gabin donne envie de le découvrir également, Sihaya.

Vavyala a écrit:

N'hésite pas à nous rejoindre Sihaya, à la fois parce que tu as déjà découvert son œuvre et parce qu'au vu de ce que tu partages de Moi, Jean Gabin, il y a des chances que L'Art de la joie te plaise aussi (enfin, pour ce que j'en ai lu jusqu'à présent).

Merci pour ton retour Vavyala, je n'ai lu jusqu'à présent que des avis dithyrambiques sur ce bouquin ! J'imagine bien que cela ne doit pas être une lecture légère et évidente - au vu des thématiques abordées et la toile de fond politique - mais ce portrait de femme au destin si particulier attise beaucoup ma curiosité.
Est-ce que la lecture commune a déjà commencé? Comme je n'ai pas le livre sous la main, je comptais me le procurer lors de la réouverture de ma médiathèque   ...

Sihaya a écrit:

J'imagine bien que cela ne doit pas être une lecture légère et évidente - au vu des thématiques abordées et la toile de fond politique - mais ce portrait de femme au destin si particulier attise beaucoup ma curiosité.

Sihaya a écrit:

Est-ce que la lecture commune a déjà commencé? Comme je n'ai pas le livre sous la main, je comptais me le procurer lors de la réouverture de ma médiathèque   ...

Je suis contente de lire que tu prévois de nous rejoindre sur cette lecture!  
Comme écrit par serendipity:

serendipity a écrit:

Une lecture de ce roman était prévue par plusieurs d'entre nous cette année, qui sera forcément impactée par le confinement, mais celles qui ont le livre et la motivation de s'attaquer à ce monument prendront les devants  

Donc tu seras synchrone avec la majorité des lectrices du groupe en te le procurant et le lisant au déconfinement.  

C'est juste moi la fainéante (et peut-être l'impatiente   ) qui n'ait pas eu le courage de me lancer dans 800 pages de lecture dans les transports en commun et envisage plutôt des livres plus courts et légers pour commencer ma future prise de contact avec les trajets en RER quotidiens.  

Je te comprends, trimballer une brique pareille dans les transports n'est pas chose aisée .
Bonne avancée dans ta lecture!!

Haha, tu m'as bien fait rire Sihaya avec le vocable "brique".

J'ai terminé ma lecture hier soir. J'ai passé un bon moment, les 800 pages ont défilé plus vite et avec moins d'appréhension que je n'en avais au moment de m'y attaquer. Le livre est découpé en 4 parties de tailles homogènes (environ 200 pages). Les 200 premières pages "s'avalent" sans peine. Dans la suite, même si j'ai pris du plaisir à lire et de la curiosité à savoir ce qui allait se passer, j'ai trouvé quelques longueurs quand même.

J'ai beaucoup aimé cette lecture, merci aux Lambtoniennes qui l'ont proposé.   

J'ai eu l'impression de lire deux livres en un:
- la première partie plus centrée sur le personnage principal de Modesta, à suivre son combat pour s'en sortir et accéder à une position où elle puisse être plus libre de son destin
- les parties suivantes où le contexte historique (débuts du socialisme et communisme en Italie, montée du fascisme, seconde guerre mondiale, après-guerre) prend plus de place au premier plan, avec une galerie de personnages secondaires qui prend de plus en plus position et de corps autour de Modesta

C'est un livre très dense dans les thématiques abordées, mais aussi très contemporain dans son message.
Chacun peut en retirer un aspect qui le marquera plus que d'autres (et cet aspect peut évoluer aux différentes périodes de sa vie, de ses relectures).
Pour ma première lecture, je vois ce livre comme une ode en filigrane à la pleine conscience pour profiter de la vie, dans la joie, en laissant les aléas du passé "comme des faits qui ne nous intéressent pas".  

Voilà, je n'en dis pas plus, j'attends que mes co-lectrices viennent en parler sur le topic pour échanger plus en détail sur certains aspects de ce roman.

Pour conclure sur un clin d’œil à Moi, Jean Gabin, présenté plus haut dans ce topic, un extrait qui m'a bien surprise et amusée quand j'y suis arrivée :

Citation :

BAMBU: Mais oui, ma tante, ne t'en occupe pas! Avec moi aussi il fait tout le temps comme ça, il aime faire le méchant.
'NTONI: Tu veux dire le dur, Bambolina. C'est la faute du cinéma. Il est tombé amoureux de Jean Gabin.
BAMBU: Oh, c'est vrai! S'il n'avait pas ces traits parfaits, il ressemblerai à Jean Gabin.
'NTONI: C'est sûr! Je l'ai vu, à la sortie du cinéma, il imitait sa démarche.
PRANDO: Crétin! Je n'imite personne, moi!

Merci pour ton avis Vavyala ! J'appréhende un peu cette lecture (le fait que c'est un pavé, et surtout son aura), mais ton retour est plutôt rassurant.

J'ai hâte de pouvoir échanger dessus.

esperluette a écrit:

Merci pour ton avis Vavyala ! J'appréhendes un peu cette lecture (le fait que c'est un pavé, et surtout son aura), mais ton retour est plutôt rassurant.

Tout à fait d'accord avec esperluette. Pour autant, je ne me fixerai qu'une obligation de moyen et pas de résultat et je me dis que je peux aussi ne lire que le début

Disons que j'ai tellement aimé que je serais capable de le relire une deuxième fois en même temps que vous si vous vous synchronisez pour la lecture.  
J'étais tellement curieuse de lire comment allait évoluer la vie de Modesta que je l'ai lu d'une traite. Mais j'ai repéré quelques citations qui auraient valu que je me les note dans mon carnet (mais n'ayant pas accepté de perdre le fil de ma lecture, je ne l'ai pas fait). Mais maintenant, va les retrouver dans les 800 pages! Mais j'ai retenu l'élan dont j'avais besoin, comme fil conducteur pour m'inspirer, c'est déjà ça!

Un exemple d'un passage qui m'a parlé et que j'ai facilement retrouvé car en début de troisième partie:

Citation :

Quiconque a connu l'aventure de doubler le cap des trente ans, sait combien il a été fatigant, âpre et excitant d'escalader la montagne qui des pentes de l'enfance monte jusqu'à la cime de la jeunesse, et combien a été rapide, comme une chute d'eau, un vol géométrique d'ailes dans la lumière, quelques instants et... hier j'avais les joues fraiches des vingt ans, aujourd'hui - en une nuit? - les trois doigts du temps m'ont effleurée, préavis du petit espace qui reste et de la perspective finale qui attend inexorablement... Première, mensongère terreur des trente ans.
Qu'avais-je fait? Avais-je gaspillé mes jours? Insuffisamment joui du soleil et de la mer? Ce n'est que par la suite, à l'âge d'or des cinquante ans, temps plein de force calomnié par les poètes et l'état-civil, ce n'est que par la suite que l'on sait combien de richesse il y a dans les oasis sereines où l'on se retrouve avec soi-même, seul. Mais cela vient plus tard.

Ayant dépassé le cap des trente ans, je me retrouve dans les interrogations ci-dessus de Modesta! (Je ne sais si les trentenaires ou les post-trentenaires du forum le vivent ou se souviennent l'avoir vécu comme ça...) Mais moi, ça résonne directement! Et la mention sur la cinquantaine rassure la "vieille jeunette" que je suis sur le futur  

Oui, aucune obligation de résultat serendipity! (même si je souhaite de tout cœur qu'il te plaise!   )
Mais si vous veniez à décrocher dans la première partie, je vous encourage éventuellement à sauter à la deuxième partie pour vous faire une idée plus exhaustive (avant de choisir de continuer ou d'abandonner). J'ai vraiment l'impression de lire un second roman à partir de là (dans le ton, le contexte...).

Merci pour ton retour enthousiaste, Vavyala !

Je vais bientôt commencer L'art de la joie, la semaine prochaine je pense

Je suis donc venue prendre l'air du topic avant de commencer !

Bonne lecture Petit Faucon! J'espère qu'il te plaira autant (ou plus!) qu'il ne m'a plu!!
Hâte de lire vos retours à chacune sur votre lecture!

Si je n'étais pas lancée en ce moment dans les pavés de Dumas et prochainement dans une lecture de groupe avec O. Wilde, je me serais bien jointe à vous pour une relecture commune!

Vavyala a écrit:

Ayant dépassé le cap des trente ans, je me retrouve dans les interrogations ci-dessus de Modesta! (Je ne sais si les trentenaires ou les post-trentenaires du forum le vivent ou se souviennent l'avoir vécu comme ça...) Mais moi, ça résonne directement! Et la mention sur la cinquantaine rassure la "vieille jeunette" que je suis sur le futur  

Vavyala, je te confirme absolument ça :

« Ce n'est que par la suite, à l'âge d'or des cinquante ans, temps plein de force calomnié par les poètes et l'état-civil, ce n'est que par la suite que l'on sait combien de richesse il y a dans les oasis sereines où l'on se retrouve avec soi-même, seul. »

Et ça ne s'est pas démenti depuis les 10 ans passés depuis. Tu peux avoir de l'espoir !

Merci Selenh! Ton retour est encourageant pour le (mon) futur!

Ce que je trouve encore fort à la relecture de cet extrait, c'est qu'elle ait gardé un souvenir assez vivace et assez réaliste sur les sensations qu'on peut ressentir à chaque âge de la vie...

Petit Faucon a écrit:

Je suis donc venue prendre l'air du topic avant de commencer !

J'adore.

J'avoue que la lecture du synopsis ne m'encourage pas à faire cette lecture... Je suivrai donc avec intérêt vos échanges

C'est mal parti ! Je n'arrive pas à trouver ce pavé en version numérique, et j'ai de plus en plus de mal à tenir des choses pesantes un peu longuement...

Il existe aussi en audiolivre, peut-être as-tu la possibilité de le trouver en médiathèque ?

J'ai vraiment adoré L'art de la joie, qui est un vrai coup de coeur

C'est l'histoire de la vie de Modesta, née le 1er janvier 1900, qui se mêle à celle de la Sicile et de l'Italie, jusqu'à la fin des années 50.
C'est à la fois une histoire profondément individuelle, avec toute sorte de personnages attachants, et en même temps la vie de Modesta est influencée par la pauvreté et le catholicisme outré de son enfance, puis par la guerre de 14, puis la montée du fascisme qui attire tous les jeunes gens/filles, puis la guerre de 40, et enfin l'après-guerre avec ses politiciens.

En moins de 650 pages, on a un concentré de toute la première moitié du XXe siècle, les courants de pensée qui l'ont traversé, les contradictions, les errements du communisme et du fascisme, les rapports homme-femme, le rapport à la famille.
J'ai été portée par ce personnage solaire, intelligent, et plein d'énergie qu'est Modesta, et le livre est écrit de façon très vivante ; comme Vavyala j'ai eu du mal à le lâcher, et il reste encore très présent à mon esprit.
J'ai beaucoup aimé les rapports entre les enfants et les "grands" de la génération d'avant, ce côté famille élargie qui vit dans la même maison.

Je ne peux que vous recommander sa lecture, qui est tout sauf déprimante, et dont je suis ressortie ressourcée.


@ Vavyala : je me suis fait vers la fin un petit arbre généalogique, avec tous ces enfants des un(e)s et des autres