Youri Rytkhèou (L'étrangère aux yeux bleus et autres romans)

Petit Faucon, je n'ai pas été dérangée par les ruptures de ton dans ce livre, mais cela m'avait fortement perturbée chez Toni Morrison, bizarre

Bonne lecture, Petit Faucon !
Effectivement, le changement de rythme peut être perturbant, mais j'espère que tu t'y habitueras

J'ai donc lu L'étrangère aux yeux bleus, et après un début un peu laborieux, j'ai été sensible aux personnages et aux décors arctiques, et à la dimension tragique de cette histoire et du peuple tchouktche.

Le livre traite finalement du chemin que fait ce personnage d'Anna, jeune ethnologue tout feu tout flammes, prête à tout (y compris à épouser le premier Tchouktche nomade venu) pour vivre au plus près la vie des nomades Tchouktches, et connaître la célébrité en exposant à Léningrad à l'Institut des peuples du Nord son mémoire sur les coutumes et les croyances de ce peuple, objet de ses études ethnographiques.
Elle a donc au début un regard très clinique sur son conjoint et son nouveau cadre de vie, mais peu à peu la vraie vie la rattrape, elle met un enfant au monde, est poursuivie avec son clan par les avions de la Sûreté qui veulent sédentariser les nomades et collectiviser les troupeaux de rennes, et rencontre la spiritualité du peuple tchouktche. 
C'est là que le livre devient vraiment intéressant, car ce périple qu'elle fait à travers la péninsule tchouktche est aussi un voyage intérieur, une errance (comme l'indique le titre original), de son Leningrad natal vers la cosmogonie de sa nouvelle famille.
J'ai reconnu dans le personnage de Rinto des comportements analogues à ceux racontés par Jean Malaurie chez les Inuit du Groenland : la confiance et l'ouverture vers un "étranger" qui amène un regard neuf et sert d'intermédiaire entre le monde connu et un monde en devenir.
Cette attitude, qui relève des comportements de survie, est bien plus mature que celle des soviétiques (y compris Atata) qui ne voient comme d'habitude pas plus loin que le bout de leur nez et de leur petit ego.
J'ai été ravie également par l'épilogue, qui laisse entendre qu'Anna s'est dégagée des griffes d'Atata, et qu'elle conserve et (peut-être) fait fructifier les connaissances transmises par Rinto et sa famille tchouktche.

A noter que le titre original est : Skitania Anna Odintsova, c'est à dire Le voyage (ou l'errance) d'Anna Odintsova 
Et autre bémol (de taille) : la carte à la fin du livre n'est d'aucune utilité, étant bien trop vaste ; aucun des noms de lieu cités dans le livre s'y trouve, à part Ouelen et Anadyr, ce qui est assez frustrant.

Merci pour ton avis Petit Faucon
Je trouve le titre original très adapté au livre

Merci pour ce très beau commentaire que je partage tout à fait, Petit Faucon !

Merci pour ton très beau texte de retour sur ce roman Petit Faucon!

Je suis totalement en accord avec ton avis sur le contenu du roman et la frustration de la carte n'ayant pas les indications géographiques citées dans le roman!
Merci pour le partage du titre original complet, qui est très beau et illustre parfaitement le cheminement d'Anna.

Merci à vous deux