Semaine 1 : chapitres 1 à 11 inclus

serendipity a écrit:

je serais curieuse de connaître la date de vos éditions françaises, car si la traduction est récente, je pense que le traducteur a simplement voulu préciser un élément qui n'est pas connu de tout lecteur

La traduction de mon exemplaire, chez Flammarion, date de 1985. Je ne sais pas si beaucoup de traductions différentes ont été effectuées. En tout cas, je trouve celle-ci agréable à lire.

cat a écrit:

Par ailleurs, ajouter "Marguerite" ne nous avance guère : soit on connaît l'opéra en question (que l'on soit un lecteur moderne ou non), soit on ne le connaît pas, non?

C'est ce que je me disais aussi.

J'ai bêtement lu cette première partie d'une traite sans prendre de notes et à présent je trouve difficile d'intervenir. Mais j'espère me rattraper la semaine prochaine.
En attendant je lis vos commentaires avec attention.
J'aime beaucoup ce roman. J'avais lu plusieurs livres de Warton il y a longtemps mais je ne connaissais pas celui ci.

Je trouve son écriture caustique, pleine d'ironie.

Comment Archer va t'il évoluer : conservateur toujours ou fera t'il le choix du non conformisme qui se profile déjà en la personne d'Ellen ?
Je ne sais pas pourquoi, comme qn l'a dit déjà elle ne m'est pas du tout sympathique.

Je lis la suite avec intérêt mais je me rends compte aussi avec une certaine froideur. Je m'intéresse beaucoup aux personnages sans les aimer, sans émotion, à l'exception peut être de cette jeune fiancée qui m'attendrit.

majeanne a écrit:

Je lis la suite avec intérêt mais je me rends compte aussi avec une certaine froideur. Je m'intéresse beaucoup aux personnages sans les aimer, sans émotion, à l'exception peut être de cette jeune fiancée qui m'attendrit.

Je soucris tout à fait

En ce qui me concerne, c'est également dû à la lecture en VO et au style d'Edith Wharton, dont la narration est assez distanciée (côté entomologiste ironique évoqué par certaines).

cat47 a écrit:

Ajouter "Marguerite" ne nous avance guère : soit on connaît l'opéra en question (que l'on soit un lecteur moderne ou non), soit on ne le connaît pas, non? Sauf peut-être pour les lecteurs de Tintin.

Et les fans de "La Grande Vadrouille"

serendipity a écrit:

Et les fans de "La Grande Vadrouille"

ce ne serait pas plutôt "la vache et le prisonnier" ??
Ceci dit (très constructive remarque !! ) je crois effectivement que l'aspect culturel et mondain de la "formation" que Newland donnerait à sa femme n'est pas sans importance, loin de là, mais je vois cela fondé sur une base de sexualité réussie (car bien sûr Newland ne l'imagine pas autrement ! ) il insiste trop sur l'innocence de May pour que ce soit, justement, innocent !
Edit : je reviens à Marguerite, la traductrice a dû hésiter à écrire : Christine Nilssen chantait Faust, dans la mesure où c'est un rôle masculin, elle a donc dû vouloir préciser le personnage , ce qui n'aurait pas été nécessaire dans la Traviata, par exemple, et ce n'est peut-être pas si anodin que cela quand on pense que Marguerite est une femme séduite et déchue, et son cri d'amour ( m'ama !!)fait rougir May et bouleverse fortement Newland, qui guette justement les réactions de sa fiancée.
Pas de sensualité ? Vous êtes sûres ??

Quand je lis ton message, Clinchamps et celui de Cat précédemment, je trouve que Newland est décidément trop imbu de sa personne pour être sympathique. Cela le rend pénible à lire et pontifiant.

Dans ce roman, aucun personnage n'attire la sympathie. Ils dissimulent trop pour que le lecteur puisse s'attacher à l'un d'entre eux.

Par ailleurs, Newland prend des risques en voulant être un pygmalion.
Il prend le risque qu'une fois éduquée, May prenne son envol et veuille être considérée comme une égale et non comme une élève qui a tout à apprendre pleine de respect et d'admiration pour son maître.
Est-ce que c'est ce que présage le roman?

Selon la légende Pygmalion (roi de Chypre, sculpta une statue si belle qu’il en tomba amoureux. Aphrodite, déesse de l’amour, touchée par sa passion, changea la statue en femme et il l’épousa) était misogyne et fut condamné à adorer sa statue, Newland serait-il lui aussi misogyne

C'est vrai que la froideur ironique et distanciée avec laquelle Edith Wharton décrit ses personnages empêchent notre empathie pour eux de se développer. Pour moi, cela ne me gêne pas, au contraire, je n'ai pas vraiment envie de trouver tous ces gens coincés sympathiques, mais cela me plaît de les voir se heurter à la réalité profonde de la nature humaine, que toutes leurs conventions et leurs codes n'empêcheront pas d'exister.

Comme plusieurs ici, je n'éprouve pas particulièrement de sympathie pour les personnages, mais je m'intéresse quand même à leur sort, même si dans l'ensemble, ils me laissent indifférente.

J'ai aussi remarqué que le livre étant constitué de chapitres tous assez courts, l'élan de la narration paraît "coupé". Ce qui fait, jusqu'à un certain point, que j'ai du mal à bien m'imprégner de chaque situation (un peu comme si ça se finissait trop rapidement à chaque fois).

C'est vrai que les chapitres ne servent pas un schéma narratif précis.
Il n'y a pas de raison légitime à les rendre aussi concis. Surtout que tout est en continuité.

A y est, je suis en mesure de vous rejoindre.

Mon approche sera certainement biaisée car j'aime beaucoup Edith Wharton (et j'ai vu l'adaptation de Scorsese) et, pour le moment, je retrouve bien mes marques dans le début de ce roman.
Bien que je me sois un peu perdue dans le dédale des Welland, Archer, Mingott, Van der Luyden, leurs alliances et leurs subtiles différences de classe que-si-tu-n'as-pas-été-élevé-dedans-tu-n'as-aucune-chance-de-saisir, j'ai bien aimé la description assez subtilement méchante du microcosme des gens-qui-comptent new-yorkais. Le vide de leur existence est assez effrayant, et seul l'échafaudage de règles parfaitement dénuées de sens qu'ils suivent jour après jour semble les maintenir en vie. Pas étonnant qu'Archer étouffe là-dedans, même s'il ne s'en rend pas compte au début.
May est un mystère. Qui est-elle derrière la robe blanche, les joues roses et les manières parfaitement policées qu'elle présente au monde ? C'est peut-être la question qu'Archer ne devrait pas se poser et pourtant, le contraste avec la Comtesse Olenska, l'ovni qui atterrit brutalement dans ce petit monde bien huilé, commence à brouiller l'image de cette fiancée bien trop unie.
Tout cela sent fort son chien dans le jeu de quille... d'autant que son comportement avec les hommes est sans doute assez hardi.

Quelques scènes bien savoureuses: l'opéra que personne ne semble écouter sauf à repérer le moment où il convient de rendre ses visites, de partir fumer son cirage, ou de faire son entrée pour être fashionably late.
Le sauvetage du repas des Mingott et de leur prestige par Mrs Archer et les Van der Luyden.

Allez, je vais vous lire maintenant.

A mon tour de donner mon avis sur la 1ère partie du roman.
Je dois d'abord préciser que j'ai fini le roman et que cela risque un peu de fausser mon point de vue sur

Spoiler:

; mais je n'ai pas pu résister à l'appel du style d'Edith Wharton .
Je suis vite rentrée dans le livre, transportée par la manière dont l'auteur décrit le microcosme des hautes sphère new-yorkaise. Le bon ton, les apparences, la vacuité de l'existence tout cela transparaît à merveille. Parfois, les différents liens de parentés, les "niveaux hiérarchiques" de la haute société ne sont pas facile à suivre. Les descriptions des Van der Luyden et de la grand mère Mingott sont délectables et criantes de vérité
Il est vrai que Newland Archer peu paraître vaniteux, imbu de sa personne, voire misogyne (lui qui veut jouer le rôle de Pygmalion avec May). Mais je m'y suis vite attachée, car on perçoit déjà la faille. On sent les prémices du dilemme, on voit le changement progressif de son regard sur la société. Il lui devient difficile de se conformer aux convenances sur certains points : le refus du divorce par la Haute société.
Ellen Olenska est très intrigante : qui est-elle vraiment ? que s'est-il passé lorsqu'elle s'est séparé de son mari ? Elle fait l'effet d'une véritable bouffée d'air frais dans cette société nombriliste et hypocrite. J'aime son originalité, son amour des arts et des artistes, le trouble qu'elle provoque chez les hommes, sa grande sensualité.
May, quant à elle, m'a paru dans un premier temps un peu fade à côté de la piquante Ellen. Peut-être un peu trop lisse à mon goût


J'ai trouvé que la sensualité était bien présente dans le roman. Peut-être cela est-il dû au fait que l'histoire nous soit raconté du point de vue de Newland Archer. La description de May et de ses rougeurs, de sa beauté, le trouble qui gagne Newland quand Ellen effleure sa cuisse ou son genoux (je ne sais plus) de son évantail.

J'ai vraiment beaucoup aimé ce roman . Mais le meilleur est à venir selon moi

Je viens de lire les trois pages et c'est vraiment très intéressant (comme toujours!). Quelques citations relevées de-ci, de-là.

Resmiranda a écrit:

J'ai eu un peu de mal à entrer dans le roman, j'avoue m'y perdre encore un peu dans la galerie des personnages de ce livre (un peu comme un nouveau riche devait se sentir perdu en essayant d'entrer dans ce cercle de "bonnes familles" et leurs codes).

Il me semble que tu as bien mis le doigt sur l'effet voulu par l'auteur. Une espèce de sentiment d'exclusion, de "je n'y arriverai jamais" et de "mais comment font-ils pour s'y retrouver" que doit ressentir une personne confrontée pour la première fois à ce concentré de bonne société.

Dulcie a écrit:

Pour l'instant, je ne me suis pas vraiment rendu compte qu'il existait un "aspect féministe" dans le roman. Ellen Olenska ne m'apparaît pas particulièrement 'féministe', ni comme un moyen pour l'auteur de faire valoir ses vues sur le sujet (je ne sais pas quelle était l'opinion de Wharton là-dessus, même si on peut se douter qu'elle ne devait pas être totalement conservatrice).

Pour moi l'aspect féministe (assez atténué, je l'accorde, dans la mesure où le roman a été publié dans les années 1920, et la situation des femmes n'avait plus grand chose à voir avec celle des années 1870), est dans le questionnement du rôle de la femme, de son éducation, de sa place dans le couple, de son autonomie physique ou intellectuelle, qui est clairement posé au travers des doutes d'Archer. L'opposition entre les deux portraits de femmes (May et la Comtesse Olenska) vient illustrer ces doutes et la difficulté de la progression des idées (même chez un homme cultivé et intelligent): il voit Ellen et il se doit "oui c'est comme ça que ça doit être, elle a le droit de faire ou de penser comme elle le fait" puis il regarde May et se dit "Ah non, pas chez moi, pas ma femme".

Mais comme certains points sont certainement dépassés dans les années 20, je me demande si cet aspect n'a pas plutôt un côté documentaire historique plutôt qu'un côté un peu militant. Il faudrait pouvoir retrouver des critiques de l'époque...

cat47 a écrit:

C'est peut-être d'ailleurs ce que Darcy a voulu souligner lorsqu'elle parlait de la volonté de Newland de se retrouver seul avec May. Seul dans le cadre d'une nuit de noce, pas seul pour discuter comme il peut le faire déjà pendant les fiançailles. Je ne peux m'empêcher de penser à cela aussi lorsque je le vois insister pour hâter le mariage.

Et bien moi je vois dans cette hâte comme une volonté de conjurer le trouble que fait naître en lui la Comtesse Olenska, une façon de se protéger d'un danger mal défini mais qu'il semble pressentir.

Une petite citation qui m'a fait sourire:

Citation :

Naturellement, elle chantait "M'ama", et non "il m'aime", puisqu'une loi immuable et incontestée du monde musical voulait que le texte allemand d'un opéra français, chanté par des artistes suédois, fût traduit en italien, afin d'être plus facilement compris d'un public de langue anglaise. Ceci semblait aussi naturel à Newland Archer que toutes les autres conventions sur lesquelles sa vie était fondée...

Si Newland Archer accepte ce genre de convention sans discuter*, on peut avoir l'intuition que le jour où il va commencer à se poser des questions (merci E. Olenska), ça risque de très mal tourner... Que pourra-t-il conserver de la société à laquelle il appartient ?

* ceci dit, j'avoue que, sans le livret, je ne comprend strictement rien à l'opéra... on pourrait me faire passer de l'italien pour du suédois et vice-versa...

MissAcacia a écrit:

Resmiranda a écrit:

J'ai eu un peu de mal à entrer dans le roman, j'avoue m'y perdre encore un peu dans la galerie des personnages de ce livre (un peu comme un nouveau riche devait se sentir perdu en essayant d'entrer dans ce cercle de "bonnes familles" et leurs codes).

Il me semble que tu as bien mis le doigt sur l'effet voulu par l'auteur. Une espèce de sentiment d'exclusion, de "je n'y arriverai jamais" et de "mais comment font-ils pour s'y retrouver" que doit ressentir une personne confrontée pour la première fois à ce concentré de bonne société.

En pointant le doigt sur cet effet, cela donne une autre envergure au roman. Cela force le trait sur l'idée que cette société est composée de personnes importantes de New York et qu'elle exclut le lecteur qui n'est pas sensé l'être.
Peut-être que l'auteur veut que nous ressentions ce que Olenska vit, à moindre mesure, puisqu'elle en est originaire.

MissAcacia a écrit:

cat47 a écrit:

C'est peut-être d'ailleurs ce que Darcy a voulu souligner lorsqu'elle parlait de la volonté de Newland de se retrouver seul avec May. Seul dans le cadre d'une nuit de noce, pas seul pour discuter comme il peut le faire déjà pendant les fiançailles. Je ne peux m'empêcher de penser à cela aussi lorsque je le vois insister pour hâter le mariage.

Et bien moi je vois dans cette hâte comme une volonté de conjurer le trouble que fait naître en lui la Comtesse Olenska, une façon de se protéger d'un danger mal défini mais qu'il semble pressentir.

Je reprendrai ce point dans notre discussion sur la partie suivante (les protagonistes en parlent eux-même, cela devient un point crucial, c'est donc un peu spoiler). Car justement, je trouve que Newland n'est pas très fort au niveau des pressentiments. Ou plus exactement que Wharton nous laisse libres de l'imaginer aveugle.

Il ne me reste plus qu'à attendre avec impatience , d'autant que j'ai totalement rattrapé mon retard et fait mes devoirs pour demain .

Je viens enfin de rattraper mon retard (j'ai eu beaucoup de travail cette semaine...) et c'est vraiment passionnant de lire ces discussions ! Merci pour vos commentaires et les citations.

Pour compléter mon post d'ouverture, j'ai eu vraiment du mal à me plonger dans ce livre (peut être était-ce aussi dû à la lecture hâchée que j'ai faite), je me perdais littéralement entre les personnages, et je n'arrivais pas à prendre de la hauteur... Après avoir fermé mon livre au chapitre 11 où l'intrigue commençait à démarrer, et où le cadre ayant été posé, on faisait un zoom sur les personnages centraux, j'avais déjà plus envie de continuer ! En prenant un peu de recul, j'ai vraiment adoré la manière dont Edith Wharton décrit la haute société new-yorkaise. Dans cette première partie, j'avais l'impression que c'était elle, l'héroïne, le personnage central du roman (à côté bien sûr de Newland, May et Ellen).
Grâce à vos commentaires, j'ai pu mieux apprécier, et voir différemment certains éléments, ou en remarquer d'autres...

Citation :

Car justement, je trouve que Newland n'est pas très fort au niveau des pressentiments. Ou plus exactement que Wharton nous laisse libres de l'imaginer aveugle.

Impatiente de reprendre la discussion sur ce point avec vous dans l'autre topic !!!

Cette phrase est vraiment excellente, je la trouve très représentative de l'art de Wharton qui cerne ses caractères avec précision et en finesse.

J'ai eu le même problème que toi au début pour les acteurs. Mais les personnages du livre sont finalement très différents, surtout les deux femmes. Wharton donne une certaine importance à leur aspect physique et Scorsese a choisi ses actrices sans en tenir compte. Cela m'a aisée finalement à me les sortir de la tête en cours de lecture.

Pour ce qui est de Daniel Day-Lewis, comme je n'ai pas vu le film depuis sa sortie, je crois que je projette dans ma tête une image de l'acteur plus mûre et comme je vois le personnage plus jeune, cela m'a aussi aidée à donner un autre "corps" au personnage, je pense.

Bon, alors je vous rejoins enfin.
J'ai lu les 3 pages de la discussion et je vais avoir de la difficulté à ajouter quelques choses de pertinents après tous vos commentaires.

Tout d'abord, je dois dire que j'ai eu de la difficulté à progresser dans ma lecture, les chapitres courts on eu au moins l'utilité de m'aider à en lire un peu plus à chaque fois.
Contrairement à vous, je n'ai pas accroché au style de l'auteure. Mais peut-être est-ce du à la traduction. En plus, avec tous ces noms de personnages mondains qui se succèdent rapidement au début, ça ne m'a pas aidé à entrer dans l'histoire.

Pour ce qui est des personnages principaux, ils me laissent plutôt de marbre. Surtout Newland et Olenska. Ils ne m'apparaîssent pas vraiment comme sympathiques. Je redoute un peu ce qui pourrait arriver à cette pauvre May, le personnage qui m'intéresse le plus pour l'instant.

Je suis tout de même curieuse de connaître cette auteure et finalement, la vie à New York à cette époque est plutôt intéressante. C'est ce qui m'incite à poursuivre.

Contente de lire ton avis, même tardif, Maribel. Bonne continuation dans ta lecture

Maribel a écrit:

Je redoute un peu ce qui pourrait arriver à cette pauvre May, le personnage qui m'intéresse le plus pour l'instant.

Il faut surtout pas t'inquiéter pour elle .
Bonne continuation.

Merci! Je vais me dépêcher de lire la deuxième partie pour pouvoir vous rejoindre dans l'autre post.

Nous t'y attendons avec impatience. Je pense que la découverte de ce petit monde va continuer à te motiver. La plupart de celles d'entre nous qui ont eu un peu de peine avec le début du livre l'ont trouvé plus agréable par la suite.

Et surtout, ne crains pas de ne pas être pertinente lorsque tu postes tes commentaires, c'est toujours un plaisir d'avoir un nouvel avis.

Merci cat