Angela Huth, Les filles de Hallows Farm et autres oeuvres

Et voilà, je continue mon exploration de cette auteure Angela Huth, avec Quand rentrent les marins / Wives of the fishermen.


A nouveau une lecture très agréable. Voici la présentation de l'éditeur :

Myrtle est aussi réservée, sage et modeste qu'Annie est pétulante, séductrice et vaniteuse. Élevées dans un petit port perdu au fin fond de l'Écosse, elles ont appris ensemble à devenir des femmes. Des femmes de marins pêcheurs, dont le lot quotidien est lié à chaque caprice de l'océan, au retour de leur homme, aux rumeurs qui enflamment tout le village dès qu'un étranger en frôle le pavé... Patiemment, Myrtle s'emploie à calmer les tocades passagères de son amie et à pallier sa négligence à l'égard de Janice, l'unique fille d'Annie. Jusqu'au jour où survient le pire, et où le drame emporte avec lui tous les remparts contre les déchaînements des passions. Contre ces non-dits qui éclatent avec d'autant plus de force qu'ils ont été si savamment et si longtemps protégés.

C'est l'histoire de la vie et de la mort d'une amitié entre deux femmes, depuis leur petite enfance, jusqu'à la quarantaine. Nous sommes dans un village sur la côté Est de l'Ecosse, au-dessus de Dundee, et la vie est rude pour les habitants, dont la vie est rythmée par les sorties en mer des marins-pêcheurs.
C'est aussi pour Myrtle la lente éclosion à elle-même, la découverte de soi, qu'on met souvent toute une vie à réaliser.
Angela Huth procède par association de souvenirs pour nous raconter ce qui fait le lien entre Myrtle et Annie, leurs parties de cartes, leurs tasses de thé, leurs fous rires, leurs histoires avec les garçons, surtout celles d'Annie, car Myrtle se sent tellement gauche dans son corps si grand et si ample. Il y a dans ce livre de magnifique descriptions des sentiments ambivalents de l'amitié, de l'absence des hommes en mer, de l'angoisse de l'absence, du deuil, et aussi de la nature, des landes sous le vent, des sentiers pierreux chauds sous les sandales, du ciel qui se noie dans la mer.

Dans la vidéo ci-dessous (en français avec un accent délicieux !!), l'auteur explique qu'elle a fait les beaux-arts, et que quand elle écrit elle "voit" des images qu'elle transcrit, et je trouve que ça se sent dans son écriture qui est très visuelle, et que j'ai beaucoup appréciée.

Spoiler:

Qu'Angela Huth ait fait les beaux-arts est une information intéressante. Il y a des remarques très fines sur la peinture dans Invitation à la vie conjugale (un de ses meilleurs livres, avec Tendres silences et les Filles de Hallows Farm).

Quant à son dernier livre, au titre si mal traduit, j'attends son passage en poche pour l'acheter et le lire, un peu d'attente faisant grandir le désir.

Adèle, j'ai pris à la bibliothèque Invitation à la vie conjugale, et j'espère le commencer dans une semaine ou deux ; j'en ai lu beaucoup de bonnes critiques, et je pense que je ne serai pas déçue.
Et tu l'as classé toi aussi parmi ses meilleurs livres :

Et maintenant, mon compte-rendu de Invitation à la vie conjugale / Invitation to the married life de Angela Huth - publié en 1991.

C'est un livre assez introspectif, qui explore les méandres du couple, les concessions que l'on fait ou que l'on ne veut plus faire, les raisons pour lesquelles l'un cherche ailleurs ou s'accroche à son conjoint malgré une absence de points communs, etc ... Ça se passe à Londres, à Oxford et dans le Norfolk

Le livre est construit en 2 parties :
La première, qui prend les 2/3 du livre environ, nous présente les personnages :

= un couple de trentenaires : Ursula et Martin Knox, parents de jeunes enfants, mariés depuis 16 ans, habitants Oxford où Martin est professeur et Ursula paysagiste.
Martin aime Oxford, Ursula rêve de la campagne et d'une vieille maison à retaper au grand air.
Ils sont très amoureux l'un de l'autre, et bien que Martin pense que "90% des pensées de l'autre vous sont inconnues", il est à l'écoute de sa femme, et ils sont proches.

= un couple de quarantenaires : Frances et Toby Farthingoe ; ceux-là vivent juxtaposés, dans un ancien couvent aux fenêtres gothiques, noyé dans un grand parcs planté d'ifs.
Toby est informaticien, il a créé des programmes qui lui ont assuré une fortune, et continue à programmer dans son grenier toute la journée ; la nuit, il prend sa tente et son duvet et va observer les blaireaux. Toby sait qu'il n'a rien en commun avec Frances, mais il n'imagine pas qu'une femme puisse s'intéresser à ses passions.
Frances est une femme intuitive, qui ne s'intéresse pas à son mari ni à sa fille, elle a un cuisinier et des serviteurs, et pour meubler son ennui insondable elle organise des fêtes dont elle gère l'organisation de A à Z : c'est là qu'elle se réalise vraiment.
L'organisation d'une fête en septembre est donc l'objet du livre, tous les personnages y sont invités.

= un couple de cinquantenaires : Rachel et Thomas ; ils se sont mariés par amour pendant leurs études, et maintenant que leurs enfants ont quitté la maison de Londres, ils réalisent qu'ils n'ont plus rien à se dire.
Thomas court les aventures avec des jeunes femmes, poussé par le démon de midi, mais il est toujours content de rentrer chez lui. Il aime la peinture, et son grand regret est de ne pas avoir de talent pictural.
Rachel s'ennuie, ne fait pas d'effort pour ranimer son couple, et se réfugie dans son lit, qu'elle a pourvu de draps en lin et de nombreux oreillers, et elle y dort dès qu'elle se sent malheureuse.

= un couple de soixantenaires : Mary et Bill Lutchings, qui habitent la maison d'enfance de Mary dans le Norfolk ; Bill aime les arbres, Balzac et sa femme, profondément. Il dit :
- Balzac a posé une très bonne question : Un homme peut-il éternellement désirer sa femme ?
- Et qu'a t-il répondu ?
- Oui. Définitivement oui." Bill embrassa Mary sur le nez. "Je ne l'oublierai jamais. Cela m'a formidablement encouragé quand j'ai pensé à t'épouser. Il était très éloquent , le vieux Balzac, là-dessus. Il a dit qu'il était aussi absurde de dénier qu'un homme puisse aimer toujours la même femme que de croire qu'un musicien célèbre a besoin de plusieurs violons pour jouer un morceau de musique. Je n'ai pas eu besoin d'un autre violon, pourrais-tu dire".
Mary adore son mari, mais se ronge de savoir ce qu'il deviendra quand elle sera morte.
Ils sont les parents d'Ursula Knox.

= Et il y a Rosie, Ralph et Serena Cotterman :
Rosie, la soixantaine, est artiste peintre, elle est voisine de Bill et Mary, et elle a un vrai talent d'aquarelliste. Elle est aussi bohême et extravertie.
Ralph, son fils aîné, est fou d'amour pour Ursula Knox, qu'il aime depuis 16 ou 17 ans ; il ne s'est jamais marié, car il n'arrive pas à se résigner que son amour n'est pas payé de retour. Frances lui court après, mais il s'en moque. Pour lui l'amour est une chose très sérieuse.
Serena est la fille de Rosie, elle tient une galerie d'art à Nottingham.

Tous ces personnages vont se rencontrer lors de la soirée de Frances, qui sera le lieu de changements définitifs, ou à venir.

J'ai beaucoup aimé ce livre, tout en nuances de sentiments, et où chaque lecteur peut se reconnaître.
Cette auteure est décidément à suivre

C'est un compte-rendu très intéressant, Petit-Faucon, parce que cette présentation par couples et par âges déconstruit le roman et donne une analyse des personnages sans rien dévoiler de l'intrigue : beau travail !

Je n'ai pas encore acheté son dernier ouvrage, si je suis trop impatiente pour attendre le passage en poche ce sera une lecture pour cet été.

Merci Adèle, de ton commentaire ! je me sens moins seule 

L'analyse par couple m'est venue quand j'ai voulu écrire ce compte-rendu, car A Huth présente un panorama de toutes les saisons de la vie, sauf de jeunes mariés (car on suppose qu'ils sont encore en osmose) ; ce que j'ai aimé aussi, c'est que ce ne sont pas les plus âgés qui sont le moins en phase.

En résumé, je trouve que son livre illustre l'idée que le couple se construit et s'entretient tous les jours, que c'est une activité quotidienne.

Invitation à la vie conjugale a l'air très intéressant, le genre de chose qui pourrait me plaire. Ton avis donne envie Petit Faucon ! Je note, je ne connaissais pas du tout cette auteure.

Je te conseille cette auteure, Miss Raisa, je l'ai découverte il y a peu avec son dernier livre : Mentir n'est pas trahir qui est paru récemment en français, puis j'ai lu Quand rentrent les marins, et enfin Invitation à la vie conjugale.
Sur la page précédente, on parle aussi des Filles de Hallows Farm, si le coeur t'en dit 

Je viens de lire Quand rentrent les marins

 Merci Petit Faucon pour la vidéo d'Angela Huth
C'est passionnant de l'entendre raconter comment elle a eu l'idée d'écrire un roman qui se passe en Ecosse, et comment elle s'est (ou plutôt ne s'est pas) documentée  

C'est un vrai plaisir de l'entendre, elle s'exprime vraiment très bien et son accent est tout à fait charmant.

Dans le roman j'ai aimé la narration éclatée dans la première partie, passant du présent au passé dans la foulée,  le beau personnage de Myrtle et la description de la rude vie des marins pêcheurs. Pour quelqu'un qui n'aime pas se documenter, l'auteur a su rendre toute cette atmosphère, par petites touches, comme un peintre.

L'amitié entre les deux femmes est surprenante, on se demande comment Myrtle peut supporter Annie, ses caprices, sa futilité, voire sa méchanceté. Je l'ai détestée du début à la fin
Son personnage est très important, car c'est elle qui provoque tous les évènements, les autres ne font que réagir.

En terminant le livre, j'ai pensé que clinchamps aurait lu la dernière phrase à sa bonne habitude    et ç'aurait été dommage  

Merci pour ton avis, Roz !

Ah, je suis contente de voir que tu as aimé ce livre Rosalind .

Moi aussi j'en ai un très bon souvenir, et il m'a touché par la vie rude de ces personnages.
Et, Rosalind, à un moment, j'ai craqué et je suis allée lire les dernières pages parce que j'étais triste pour Myrtle . Mais ça ne m'a pas empêchée de bien profiter de ma lecture.