Alain Damasio (La Horde du Contrevent, La Zone du Dehors et autres nouvelles)

Il y a deux ans, mon frère m'avait offert un livre d'Alain Damasio, dont j'ai laissé un peu traîné ma lecture. Aujourd'hui, ce livre fait sans doute parti de mes livres préférés. Ayant récemment fini un deuxième roman, et me préparant à lire un recueil de nouvelles, je me propose de vous le faire découvrir en espérant qu'il vous intriguera et que vous prendrez du plaisir à lire ses romans, si vous n'êtes pas trop rebuté par son style.

Alain Damasio est un auteur français, écrivant plutôt de la Science-Fiction. Il a, à ce jour, publié deux romans et un recueil de nouvelles. Un troisième roman (Les Furtifs) paraîtra prochainement. De manière générale, je trouve que les romans d'Alain Damasio sont assez difficiles d'accès : nous rentrons de plein fouet dans son univers et dans un monde créé de toute pièce, qu'il prend rarement le temps de nous présenter. Son style d'écriture est assez particulier, et il manie les différents registres de la langue française en fonction des différents personnages de l'histoire. Pourtant, une fois rentrée dans l'histoire, j'ai toujours eu beaucoup de mal à abandonner un de ces livres et j'ai toujours eu du mal à savoir où j'en étais après les avoir fini.
Il est également directeur narratif de la société Dontnod Entertainment et a participé, avec Stéphane Beauverger ( ), à l'écriture du scénario d'un jeu vidéo appelé Remember Me.

Son premier roman, La Zone du Dehors, a été réécrit en 2007 « pour en affiler la lame » (ce premier roman avait été écrit par Alain Damasio, en 1992, alors qu'il n'avait que 22 ans, puis publié en 1999).


Il s'agit d'un roman d'anticipation mettant en avant les moyens utilisés par les politiques pour « contrôler » la population. Alain Damasio fait clairement référence à Orwell et 1984, comme le montre le quatrième de couverture

La Zone du Dehors a écrit:

2084, Orwell est loin désormais. Le totalitarisme a pris les traits bonhommes de la social-démocratie. Souriez, vous êtes gérés ! Le citoyen ne s'opprime plus : il se fabrique

Les personnes vivant dans cette société n'ont pas de véritables noms. Leurs prénoms sont une suite de lettre faisant référence à leur place dans la société : lorsque ces personnes évoluent dans la hiérarchie, leur nom change et celui reprenant leur place reprend également leurs noms. La paix est assurée, les gens sont en général heureux de vivre, en sécurité, loin de la guerre qui sévit sur Terre. Pourtant, un groupe de voltés n'admet pas le « contrôle » qu'a le gouvernement sur la population et veut réveiller les esprits.

J'ai beaucoup aimé ce roman, car si les protagonistes se battent pour une belle idée, Alain Damasio prend le parti de niveler son avis et de montrer que les solutions proposées ne sont pas forcément bonnes. Il pose des questions morales et met en relief les moyens d'actions, tant des voltés que ceux des partis politiques. Je ne veux pas trop en dire, mais j'ai trouvé que ce roman poussait à réfléchir et à prendre du recul.

Contrairement à son second roman, j'ai trouvé La Zone du Dehors plus « démonstratif », dans le sens où on peut sentir que les dialogues ont été mis en place pour créer un débat philosophique et exposer très clairement différentes idées. Cela n'est pas une critique et le livre est très intéressant, mais je n'ai pas eu toutes les notions philosophiques nécessaires pour m'immerger dès le départ (j'ai eu un peu plus de mal que pour la Horde du Contrevent à « rentrer dedans », ce qui n'est pas peu dire en parlant d'Alain Damasio ).

Son autre roman, La Horde du Contrevent, est celui par lequel j'ai connu cet auteur. Il a reçu le grand prix de l'imaginaire en 2006.

Site de La Volte (éditeur) a écrit:

« Imaginez une Terre poncée, avec en son centre une bande de cinq mille kilomètres de large et sur ses franges un miroir de glace à peine rayable, inhabité. Imaginez qu’un vent féroce en rince la surface. Que les villages qui s’y sont accrochés, avec leurs maisons en goutte d’eau, les chars à voile qui la strient, les airpailleurs debout en plein flot, tous résistent. Imaginez qu’en Extrême-Aval ait été formé un bloc d’élite d’une vingtaine d’enfants aptes à remonter au cran, rafale en gueule, leur vie durant, le vent jusqu’à sa source, à ce jour jamais atteinte : l’Extrême-Amont. Mon nom est Sov Strochnis, scribe. Mon nom est Caracole le troubadour et Oroshi Melicerte, aéromaître. Je m’appelle aussi Golgoth, traceur de la Horde, Arval l’éclaireur et parfois même Larco lorsque je braconne l’azur à la cage volante. Ensemble, nous formons la Horde du Contrevent. Il en a existé trente-trois en huit siècles, toutes infructueuses. Je vous parle au nom de la trente-quatrième : sans doute l’ultime. »

J'ai beaucoup peiné avant d'être happée par ce roman, les premiers chapitres sont un peu laborieux. Mais une fois dépassés, j'ai vraiment eu du mal à décrocher. Tous les personnages sont différents, le style est original et je voulais absolument connaître la fin, même si je sentais plus ou moins qu'aucune ne me satisferait pleinement et qu'il ne pouvais pas y avoir une autre fin que celle la. Certains de mes amis ont trouvé le style d'Alain Damasio assez pompeux, il est vrai qu'il offre de beaux exercices de style, mais j'ai particulièrement apprécié la façon dont il pouvait passer d'un registre à l'autre, sans que ce ne soit artificiel. Le livre est vraiment original, tant dans le système narratif que dans la trame.

Un recueil de nouvelles Aucun Souvenir Assez Solide a été publié récemment, mais je n'ai lu pour le moment qu'une seule nouvelle (qui était disponible dans un autre receuil des éditions La Volte, dédiés aux dangers liés aux nouvelles technologies ), je ne vais donc pas m'apensantir dessus pour le moment.

Malgré ce que ce sujet peu laisser sous entendre, je suis vraiment dingue d'Alain Damasio. J'ai un peu peur des premières pages avant d'ouvrir un livre, mais je suis toujours récompensée à la fin de ma lecture ! Pour autant, je comprendrais aisément que vous n'aimiez pas, alors si je vous ai intrigué, il ne faudra pas venir me maltraiter si votre lecture n'a vraiment pas été votre tasse de thé.