Les éditions Hurlevent

En tant que lectrice introvertie, peu à l’aise en société et préférant le confort de mon lit à une sortie shopping, j’étais toute disposée à m’immerger dans l’histoire de Milly ainsi que de son héroïne, Isadorah Templeton. Et, sans surprise, ce roman fût à la hauteur de mes espérances !  
Après la publication de son premier roman, intitulé Les Espérances des Femmes Templeton, grand succès en librairie mais également critiqué par certains détracteurs pour les incohérences historiques qu’il contient, Milly Davis décide de reprendre ses études en suivant un cursus d’histoire afin d’écrire le second tome de sa saga. Pour cette jeune femme de vingt-quatre ans qui a toujours été qualifiée de « singulière » par son entourage, la rentrée est synonyme d’épreuve. Cependant, Milly peut compter sur le soutien de sa meilleure amie Lyrah, avec laquelle elle entretient une relation épistolaire depuis ses plus jeunes années ; de Maggie, sa grand-mère éblouissante, présidente d’un club vegan ; mais aussi sur celui de sa famille et de ses amis de fac Zach et Larry. Dans le cadre de ses recherches, Milly est contrainte de faire appel à Alphard Burton, son professeur d’archivistiques qui, d’après-midis passés dans une librairie obscure à leur rendez-vous habituels dans leur salon de thé favori, va se révéler beaucoup plus qu’un allié précieux dans la vie de Milly…
Ce roman foisonnant a tout pour plaire : avant tout, une plume de qualité qui m’a transportée aux côtés de Milly, lors de ses rituels quotidiens aussi bien que lors du processus d’écriture de son livre, nous délivrant ses pensées les plus profondes, les sentiments qui l’assaillent, ainsi que les différentes facettes de sa personnalité. Impossible de ne pas s’attacher à cette héroïne « singulière » mais qui brille justement par sa différence et sa beauté intérieure   . Par ailleurs, malgré ses 740 pages, le roman ne présente aucune longueur : si je confesse avoir préféré les passages mettant en scène Milly, les chapitres consacrés à Isadorah restent passionnants, mêlant la réalité à la fiction. Les personnages proposés par S.A Yarmond sont également mis en scène avec finesse et authenticité, de l’exubérante Maggie (avec laquelle je partage de nombreux centres d’intérêt et opinions !   ) au gentil Larry ; de la surprenante Hisaé au mystérieux Alphard Burton, en passant par la drôlissime Daria. Les relations se tissant entre les différents protagonistes m’ont plu, en particulier entre une certaine « Daisy » et son Monsieur Banart !  
Enfin, Le Chœur singulier de Milly Davis tire son épingle du jeu pour son dépaysement le plus total ; dépaysement se manifestant entre les pages du second tome des Espérances des Femmes Templeton, mais aussi lors d’un inoubliable voyage écossais, éveillant nos sens et notre curiosité tout au long de l’histoire !
Pour toutes ces raisons, Le Chœur singulier de Milly Davis a été comme une bulle de bien-être, une invitation à croire en ses rêves et à ne jamais baisser les bas, tout en nous rappelant que c’est notre différence qui nous rend si uniques !  

Avec un tel résumé, autant vous dire que cette histoire me vendait du rêve ! Dès le prologue, nous savons qu’un meurtre vient d’être commis mais nous ne connaissons ni l’identité de la victime, ni celle de l’assassin. Les chapitres suivants nous ferons remonter le temps au début des vacances d’été, lors des retrouvailles entre les cousines Bellamy dans la grande demeure familiale, Hauterives.

Nous y croisons Gabrielle, sensible et réservée ; Hortense, rieuse et passionnée par la couture ; et enfin Adèle et Eléonore, deux sœurs au caractère et aux ambitions opposés, l’une étant un vrai rat de bibliothèque désirant enseigner tandis que l’autre est une meneuse née qui partage la même passion pour la mode que sa cousine Hortense. Outre les trois générations de Bellamy, d’autres personnages vont venir passer l’été derrière les grilles en fer forgé du domaine : Virgile, le meilleur ami des jeunes filles, Naia, une artiste peintre en devenir, et Céleste, nouvellement engagée comme domestique.

L’ambiance du roman est absolument parfaite pour une lecture estivale car cet été 1954 à Lyon est chaud jusqu’à en devenir étouffant lors de son final dans lequel la tension et le suspense grimpent crescendo jusqu’au dénouement. Si j’avais eu un soupçon très rapidement sur l’identité du coupable, j’ai eu quelques doutes durant ma lecture tellement l’autrice joue avec le lecteur en donnant de bons mobiles à chaque personnage important. La fin et la manière dont les choses sont tournées m’ont quand même surprises et j’ai refermé le livre en me disant que je ne m’attendais pas à un final aussi glaçant !

J’ai été envoûtée par la plume élégante, fluide et captivante de Juliette Galliani dès le prologue : elle a un style très immersif, très visuel, qui m’a projeté à Hauterives de façon tellement naturelle, imaginant la grande demeure, sa piscine, ses couloirs, ses espaces verts… J’ai eu l’impression d’y être, de voir Hortense s’activer dans l’atelier de couture, Adèle travailler sur sa thèse dans la salle d’étude, Gabrielle écouter un disque dans sa chambre, et Eléonore bronzer près de la piscine. J’ai suivi avec intérêt leurs joies, leurs plaisirs simples, leur enthousiasme pour leur avenir, mais aussi leurs disputes, les jalousies et les rancoeurs qui ont remplacé les moments heureux qui reliaient les filles à leur insouciance. J’y ai retrouvé une ambiance qui m’a rappelé celles du roman Rebecca de Daphné du Maurier et de Expiation de Ian McEwan (d'ailleurs j'ai lu ce roman dans la foulée).

Plus on avance dans l’histoire et plus on comprend comment le drame a pu arriver, plus les masques tombent et les personnalités se dévoilent, et plus l’intrigue gagne en tension et en malaise. Certains personnages deviennent dérangeants, d’autres détestables, certains font pitié et quelques-uns sont toujours aussi attachants. Nuit d’orage à Hauterives a déroulé le fil de son intrigue tel un film qui prenait vie dans mon esprit et dont je ne voulais couper aucun passage. Il m’a rappelé ces sagas de l’été qui passaient à la télé il y a quelques années. Je trouve à ce sujet que ce roman ferait une superbe adaptation ! D’ailleurs, des acteurs se sont imposés à moi pour certains personnages (pas forcément par rapport à leur physique !), comme Lily James pour Eléonore, Emma Stone pour Gabrielle, Kirsten Dunst pour Hortense, Keira Knightley pour Adèle, et Saoirse Ronan pour Céleste.

Si vous avez envie de lire un livre à l’ambiance estivale aussi solaire qu’étouffante, qui gagne en suspense au fil du récit, et aux personnages minutieusement croqués, je vous conseille chaleureusement Nuit d’orage à Hauterives ! Pour moi c’est un gros coup de coeur !