Une auberge pour les admirateurs de Jane Austen, et bien plus encore... |
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| 1er concours d'écriture (contributions page 6, résultats page 7) | |
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Auteur | Message |
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April Black Leather's Violet
Nombre de messages : 17118 Age : 50 Localisation : Allongée sur des pétales de violettes, en très bonne compagnie Date d'inscription : 20/06/2007
| Sujet: Re: 1er concours d'écriture (contributions page 6, résultats page 7) Lun 3 Jan 2011 - 13:17 | |
| Voici les textes pour le concours. Note aux auteurs : pour poster vos textes ici, j'ai fait des copié-collé. Si vous constatez quelque anomalie que ce soit, faites-le moi savoir par MP et je procéderai aux corrections ad hoc, en mettant également un mot sur ce topic. Pour info : il y aura peut-être un 10ème texte, j'attends de la réponse à mon échange de MP avec une membre. comme j'étais en vacances jusqu'à hier, sans accès au forum, je n'ai pu lui répondre que ce matin. Texte no 1- Spoiler:
Conte de la Bière et du Whisky
Le ciel de poix pèse comme une couverture étouffante à ras des toits de tuiles et des pignons dentés des maisons étroites et hautes. Une brume grise s’effiloche au coin des rues. Quelques rares réverbères y allument un halo jaunâtre, se reflétant sur pavé luisant et gras. L’odeur de goudron et de saumure dénonçait le port tout proche. Est-ce un tas de bois, ou de corde, cet amas sombre ? Mais voilà qu’il bouge, s’écroule, se redresse, et la haute taille d’un homme se devine dans l’ombre. Sa démarche est branlante, et d’ailleurs, qui dormirait par terre, par une nuit pareille, si il n’avait pas un peu trop honoré la pinte mousseuse ou le whisky ambré ? L’homme grommelle, tangue un peu, remonte son col et sort de l’ombre. Dans la rue qu’il emprunte, rien ne vit, mais une vague rumeur semble guider ses pas ; une ruelle presque invisible l’attire, il y pousse une porte obscure, qui s’ouvre sur la chaude lumière d’un grand feu. Il allume des étincelles aux flancs des cuivres, met des roses sur les faïences du dressoir et laisse deviner une perspective de dallage noir et blanc vers l’ombre odorante d’un escalier ciré. Il pose des flammes minuscules vertes ou ambre au cœur des flacons alignés sur l’étagère. Quelques chopes d’étain luisent sur les tables. Quelques marins boivent, rient, chantent, même, car un accordéon enrhumé gémit de temps à autre. Trois hommes sont assis dans le coin le plus sombre de la pièce, voûtés, les mains comme accrochées aux chopes de bière devant eux. À l’entrée de l’inconnu ils lèvent la tête, l’un d’eux lance : « Tiens, Piotr le letton !! -Salut Gunther, et toi Yvard, et toi Kurtz, » répond l’homme, accompagnant chaque nom d’une bourrade amicale. « Un bail qu’on ne t’a pas vu par ici, sur quelle mer as-tu traîné ta carcasse cette fois ? - Une de celles que j’aime, chaude et bleue, pas comme cette eau noirâtre et huileuse qui clapote pas loin ! Là où les filles sont gentilles ! »ajoute-t-il avec un rire qui sonne étrangement faux dans le silence soudain qui s’installe, comme il arrive parfois, quand par un hasard étrange, toutes les personnes d’une compagnie laissent passer un ange. Il y a comme un courant froid, les flammes des lampes vacillent et un accord lointain vibre. Les yeux se tournent vers l’accordéon, mais l’homme s’est endormi. « On a marché sur ma tombe », dit Piotr, avec un sourire un peu grimaçant. « Tu ne m’as pas l’air d’aller bien, toi ! Quand tu es rentré on aurait dit que tu avais vu un fantôme ! N’aurais-tu rien à nous raconter ? -Tu as toujours eu de drôles d’histoires dans ta besace, le Letton !! On dirait que tu les attire ! » Piotr ne répond pas, baisse le front, le silence s’étale autour de la table, les autres ne font plus que chuchoter. Soudain Piotr relève le la tête : « Oui, je pourrais vous en raconter une, d’histoire, une drôle, de celles qu’on se répète dans les tavernes des ports, par une nuit comme celle-ci, quand on ne sait quoi rôde dehors. C’était l’an dernier, j’avais trouvé une embauche sur un caboteur qui faisait le commerce du coprah dans les îles du côté de Sumatra. C’était un rafiot qui ne payait pas de mine, mais il voguait avec courage, ma foi, et on s’y sentait bien. À part moi il y avait quatre autres hommes, mais j’étais surtout copain d’un Russe, Gregor. Avec moi il pouvait parler sa langue, et nous causions de temps en temps, après le travail, autour d’un tafia qui n’était pas mauvais. Causer, c’est beaucoup dire ; c’était un taiseux, mais quand il mettait ses yeux verts dans les vôtres, et qu’il souriait, c’était comme un coup de soleil un jour d’hiver. Un soir d’escale, nous sommes partis à la recherche d’une taverne où il y aurait de la bière buvable. Le port était petit, il n’y avait que deux estaminets éclairés de pauvres quinquets. L’un valant l’autre, nous entrâmes dans le premier. Nous étions assis, les seuls de la petite salle, et personne ne se montrait. Gregor, pour une fois manifesta son impatience. « Holà ! Ho ! Il n’y a personne ici ? » Un rideau de perles bougea et une fille apparut. Elle était belle, la peau cuivrée, les yeux sombres, la chevelure nouée en une masse luisante et noire sur la nuque. D’un air indifférent, elle le tour de la pièce, ramassant les verres sales sur un plateau. Enfin elle se dirigea vers nous. Son regard tomba sur Gregor, ses yeux s’étrécirent légèrement, la pupille fixe. Elle posa son plateau , et d’un geste inconscient joignit les mains. Gregor la fascinait, elle avançait lentement vers lui, comme attirée par une force invincible. Elle tendit légèrement la main vers lui, comme prise du besoin intense de le toucher. Gregor, occupé à farfouiller dans ses poches à la recherche de sa pipe ne remarquait rien. Je tapai dans mes mains, et la fille sursauta, parut revenir à elle. Elle passa les eux mains sur son visage et plaqua un sourire mécanique sur ses lèvres. « Que voulez-vous ? » demanda-t-elle dans le pidgin des îles. « De la Bière ? - J’ai pas - Du tafia ? - J’apporte » Et tournant les talons elle se dirigea vers le comptoir sous lequel elle plongea pour en extraire une bouteille noire à long col, à la noble poussière. Elle attrapa un gobelet de verre épais et le posa devant Gregor. D’un geste ferme, elle versa la liqueur ambrée et dit : « Boire ! » Gregor leva les yeux vers elle, leurs regards se choquèrent, et je pus sentir l’air crépiter entre eux. Sans même penser à réclamer un verre pour moi, je contemplai ce qui était en train de se passer devant moi. Sans baisser les yeux, Gregor saisit le verre et le vida lentement. Puis il tendit la main, avec crainte et douceur et toucha légèrement la joue de la fille. Celle-ci sourit, et à son tour posa ses doigts bruns sur la barbe blonde de l’homme. » Piotr se tAIt. Ses compagnons s’exclament, réclamant la suite !! « Alors ? Il l’a eue ? » questionna Kurtz brutalement. Les autres hommes se sont agglutinés, et tout le groupe est à présent suspendu aux lèvres du Letton. Il soupire, et ajoute : « Il s’est levé, lui a pris la main, et elle l’a emmené derrière le rideau de perles. » Il s’arrête de nouveau, hésitant, puis à la demande de tous, il jette : « Je ne les ai jamais revus » -Jamais ? Pas possible ! mais comment ? » les exclamations fusent. « Je les ai cherchés, j’ai secoué un homme qui dormait sous l’auvent, j’ai demandé : où habite la fille, celle de la taverne ? - Quelle fille ? Y en a plus, depuis que celle du vieux s’est noyée, l’année dernière. Y a pas de fille ici. » Un silence s’abat sur la salle. Sans mot dire les hommes retournent à leurs verres, à leurs chopes, à leurs pipes. Piotr ouvre la porte, se tient un instant sur le seuil. Des flocons de brume l’entourent, il fait un pas et disparaît dans la nuit. Kurtz soupire, et tous semblent s’éveiller, s’étirent, haussent le ton. « Ce Piotr !! Il en a toujours, des histoires comme ça !!! C’est un gars qui a de l’imagination ! - Mais toi, tu crois ... - Je crois, je crois .... ce sont les contes de la bière et du whisky ! » Texte no 2- Spoiler:
C’était un jour d’été. La prairie était baignée de soleil, les branches du pommier pliaient sous le poids des fruits. Un renard s’abreuvait à la rivière, mais des bruits l’interrompirent. Il leva la tête et scruta la direction de leur provenance. Cinq enfants couraient vers lui en lançant des cris de guerriers, tenant des épées en bois, et des bâtons. -YYYyyyyyyyyaaaaaaaaaaaaaaaaaaa ! A l’abordage ! Trois des enfants montèrent dans une vieille barque laissée à l’abandon, près de la rivière. Les deux autres restèrent « à terre ». Ils portaient des déguisements de fortune faits avec des morceaux de tissus. Dans la barque se tenait « le capitaine » qui était aussi le plus grand, Jean, 11 ans, il portait un vieux chapeau melon miteux, et s’était dessiné une fausse barbe. Il était accompagné de Philippe, 10 ans, qui portait une cravate autour de la tête et gardait un œil sur sa petite sœur, Sophie, 8 ans, qui suivait avec difficultés ses compagnons de jeux, gênée dans ses mouvements par une veste de smoking rapiécée. A « terre » les frères jumeaux, Paul et Thomas, 10 ans, Paul, portait un cache-œil de fortune, et Thomas un foulard sur la tête. Jean commença à se battre contre Paul, leurs « épées » se croisèrent. -Traitre, je vais te tuer !! lança le capitaine. D’un coup, Paul baissa les bras, et regarda Jean avec un air soupçonneux : - Pourquoi c’est toujours toi, le capitaine et nous les traitres ? - Parce que je suis le plus grand. - Et pourquoi tu es le plus grand ? - Parce que je suis le plus intelligent ! - C’est même pas vrai, d’abord, c’est Philippe le plus intelligent, il est le premier de la classe ! - Quoi ? Tu veux que je te montre que je suis le plus fort ? Les deux garçons s’étaient rapprochés l’un de l’autre, ils se touchaient presque, se toisant du regard. - Arrêtez ! cria Philippe en s’interposant entre ses amis. On a qu’à changer, pour une fois. Nous, on sera les méchants et toi avec Thomas vous aurez la barque. - Non la barque est à moi !! Jean ne comptait pas laisser son jouet favori aux mains de ses amis. Tandis que les garçons se chamaillaient sur la prise de pouvoir, Sophie les regardait depuis la barque. C’était tout le temps la même chose, les garçons, tous les jours, ils se battaient. Elle ne comprenait pas pourquoi, un jour, une fille et un garçon se mariaient, malgré les explications de sa maman, qui lui avait expliqué que c’était parce qu’ils avaient des papillons dans le ventre. Sophie avait peur des papillons depuis ce jour, et les évitait soigneusement de peur qu’un de ces insectes n’entre dans sa bouche pour aller dans son ventre. Elle avait chaud avec sa veste et voulait la retirer. Elle se leva de la barque, tandis que Jean et Paul commencèrent à se bousculer. - Non, c’est toujours toi le chef et tu veux toujours gagner à la fin. - T’es pas aussi fort que moi. Il n’y a que moi, qui fait le chef. Après tu voudras que ce soit ton nigaud de frère qui le fasse. L’idiot du village ! Il ne sait même pas aligné une phrase. Jean, bouscula Paul qui tomba à terre. Il ne supportait plus l’attitude de l’ainé du groupe, qui passait son temps à diriger tout le monde, et se moquait de Thomas, qui était un peu plus lent à comprendre certaines choses. Paul sentit la colère montait en lui, il se leva d’un bond et se jeta sur Jean qui perdit l’équilibre et tenta de se rattraper à Sophie. Mais sa tentative échoua et Sophie tomba dans la rivière. - SOPHIE !! hurla Philippe. Vite, elle ne sait pas nager !! La tête sous l’eau, Sophie, se débattait. Elle réussit à sortir la tête de l’eau, et vit ses amis courir le long de la rivière en criant son prénom. Elle était emportée par le courant, et la veste alourdie, l’entrainait sous l’eau. Elle suffoquait et pleurait. Se débattait, mais commença vite à perdre ses forces. La rivière prit le dessus, et bientôt ses amis ne virent plus la chevelure blonde de la petite fille. Sophie était sous l’eau, les yeux grands ouverts, des bulles flottaient autour d’elle. Elle vit un mouvement en face d’elle. Un visage se rapprochait. Sa maman lui avait raconté l’histoire d’un ange qui venait chercher les âmes des gens qui montaient au ciel. C’était son ange. Mais son ange, lui enleva la veste. Peut-être qu’elle n’en aurait pas besoin au Paradis ? Sa maman disait qu’au Paradis on n’avait jamais froid. Elle le laissa faire. Puis il lui prit la main et l’entrainait vers le haut. Elle allait retrouver Bobo, son chien, il l’attendait au Paradis depuis quelques mois. Mais au bout du chemin, pas de Bobo. Elle sentit plusieurs mains la tirer sur la berge. Ses amis étaient autour d’elle. Son frère l’a pris dans ses bras. - Sophie ! Sophie ! tu m’entends ?dis quelque chose. - Elle est morte, dit Jean. - Mais non patate, elle est pas morte. Elle a les yeux ouverts ! rétorqua Paul. - Et alors, le vieux André, il avait les yeux ouverts quand il est mort au café de mon père. - Elle est choquée c’est tout. Tous regardèrent le garçon qui venait de sauver Sophie. Jean se rapprocha de lui.
- T’es qui toi ? on t’a jamais vu ici ! - Pierre, je suis le fils du nouvel instituteur, j’arrive de Paris. - T’as quel âge ? - 9 ans bientôt 10 !
Sophie regarda Pierre. Son ange était le fils de l’instituteur, et il s’agenouilla près d’elle: - Ça va ? Elle hocha la tête pour acquiescer.Les cheveux collaient sur le visage de Sophie, elle regardait son sauveur. Il était aussi grand que Jean, ses cheveux étaient noirs et avait des yeux bleus. Au loin, la cloche de la mairie sonnait la nouvelle heure, Pierre se releva. - Bon, j’y vais, ma mère m’attend pour les corvées et je dois me changer. Vous devriez ramener Sophie chez elle, elle a aussi besoin de se réchauffer sinon elle va tomber malade. A plus tard. Sophie esquissa un sourire suite au conseil de Pierre. Il prenait soin d’elle. - Demain tu viens jouer avec nous ?demanda Paul. - Oui, mais à la condition de ne pas toujours être un traître, répondit Pierre avec un sourire complice. - T’inquiète !! tu es notre nouveau capitaine. Jean lança un regard méchant vers Paul, il avait gardé le silence depuis quelques minutes, sentant qu’il ne faisait pas le poids face à Pierre. Pierre leur fit signe de la main et s’éloigna. - Il est trop fort, remarqua Thomas, impressionné par leur nouvel ami. Sophie se leva et courra après Pierre, elle lui prit la main et leva les yeux vers lui. Timidement elle lui murmura : - Merci. Pierre regarda les grands yeux verts de la petite fille, il lui sourit. C’est à cet instant précis que Sophie comprit ce que sa mère lui avait expliqué. Les papillons dans le ventre. Ce jour-là, elle prit une décision. Un jour, elle épouserait Pierre. Son ange Pierre. Texte no 3- Spoiler:
Chapitre 1 : Elle ou la première rencontre
Je le vis, je rougis, je pâlis à sa vue. Un trouble s’éleva dans mon âme éperdue, Phèdre, Racine
Une petite bouille ronde à la chevelure rousse flamboyante riait joyeusement. La petite main se tendait le plus possible vers le ciel dans l’espoir d’attraper le soleil. Lucie se mit à rire à gorge déployée. Quelle belle journée ! La vie semblait enfin lui sourire pour la première fois depuis bien longtemps. Elle se sentait en plénitude avec le monde, l’espace vert autour d’elle, les enfants riant et gambadant gaiement, le ciel bleu sans nuages au dessus d’elle…
Tout ceci jusqu’à ce qu’elle les vit... Ces deux yeux bleus azur qui lui apparurent au sommet de la tête de l’enfant. Ces deux yeux bleus perçants qui semblaient voir au fond de son âme. Troublée, elle baissa la tête un moment, pour la relever aussitôt. Avec certitude, elle comprit que son monde avait basculé, que sa vie telle qu’elle la connaissait ne serait plus jamais la même… Qui était ce garçon ? Ce jeune homme devrait-elle dire, vu qu’il semblait être âgé de quelques années de plus qu’elle. Et que faisait-il là en ce bel après-midi d’automne, au milieu d’une ribambelle de gamins qui lui tournaient autour et s’accrochaient à ses bras ? Cela faisait bien deux mois qu’elle venait chaque semaine dans ce parc, pour tenter d’échapper le temps d’une heure à ses soucis quotidiens. Elle ne l’avait jamais vu pourtant. Elle l’aurait remarqué.
Bien qu’elle se fût résignée à se passer d’un homme, Lucie ne put s’empêcher de jauger d’un air appréciateur le garçon en face d’elle. Même en étant baissé pour ramasser l’écharpe de l’enfant dont il s’occupait, il ne pouvait masquer sa haute stature. Brun, les cheveux ondulés tombant en boucles légères sur ses épaules, il aurait pu passer inaperçu dans la masse d’étudiants qui traversait le parc, si ce n’était ses deux yeux bleus, bleus comme le ciel au dessus de lui.
Il la vit, lui sourit tout en la saluant d’un signe de la tête avant de se détourner d’elle et de s’éloigner à la poursuite de la petite fille. A cet instant, Lucie eut l’impression que le ciel s’était assombri et la température rafraîchie. Qu’elle était bête ! Ce n’était qu’un garçon après tout, pas plus différent que la dizaine d’autres qui passait devant son banc. Et pourtant… Tout d’un coup, elle prit peur, elle ne le voyait plus, elle voulait le revoir, ne serait-ce qu’une dernière fois. Une toute dernière fois ! Mais il n’était plus là, il était parti et le parc se vidait peu à peu de ses promeneurs. La nuit tombait et le vent se mit à souffler, refroidissant l’atmosphère.
Il ne lui restait plus qu’à partir, rentrer chez elle retrouver son quotidien morose, ses amis qui ne la comprenaient pas, ses parents qui lui manquaient. Il ne lui restait plus qu’à l’oublier, à conserver ce souvenir au fond d’elle pour embaumer un peu ses journées difficiles.
Chapitre 2 : Seule !
When you depart from me, sorrow abides and happiness takes his leave, Much ado about nothing, Shakespeare
Les sanglots longs des violons de l’automne, blessent mon cœur d’une langueur monotone… Ces paroles tournaient en boucle dans la tête de Lucie. Il lui manquait quelque chose ou plutôt non, quelque chose lui manquait ! Quoi ? Elle ne le savait pas ou plutôt elle ne voulait pas s’avouer que c’était des beaux yeux de l’inconnu, de son sourire éclatant qu’elle se languissait…
Elle s’abrutissait dans son travail, passant ses journées à la bibliothèque, la tête plongée dans de vieux manuscrits. Jusqu’à ce que la nuit tombe et que les portes se ferment…Il lui fallait alors rentrer chez elle, rapidement, la musique de son MP3 assourdissant les bruits étouffés du soir.
Son seul plaisir de la journée, le seul qu’elle acceptait de s’accorder, était sa promenade dans le parc chaque après-midi. Elle guettait sans s’en rendre compte la venue de l’inconnu qui viendrait enfin disperser les affres de l’attente. Mais en vain… le parc se vidait, les enfants rentraient prendre leur goûter, et il lui fallait quant à elle reprendre le chemin de la bibliothèque, la mort dans l’âme, une autre journée de perdue…
Chapitre 3 : Lui ou le premier échange
Aimer et être aimé, c’est sentir le soleil des deux côtés, Viscott
Emilie le pressait chaque midi de l’emmener au parc. La pauvre petite ne comprenait pas pourquoi Eric se refusait à y retourner. Ils s’étaient pourtant bien amusé tous les deux la dernière fois !
Cependant Eric résistait. Pourquoi ? A cause de Sonia. Ou plutôt de l’inconnue du parc… De cette jeune fille aux yeux verts qui semblaient dévorer son âme. Il ne comprenait pas comment un simple regard pouvait dire tant de choses sur son propriétaire : sa tristesse, sa solitude, sa fragilité, sa jeunesse. Eric avait lu à cœur ouvert dans ces yeux. Il désirait plus que tout aller à sa rencontre, lui parler, tenter de l’aider si elle en avait besoin. Mais il avait peur. Peur de la réaction de Sonia, de sa jalousie farouche et surtout de ce qu’elle pouvait faire à Emilie. Si elle la lui enlevait ? Rien qu’à cette pensée, Eric frissonna et resserra un peu plus fort la petite fille dans ses bras :
« On ira demain ma chérie, il fait trop froid aujourd’hui »
Rien ni personne ne lui enlèvera sa fille !
Pourtant, il lui faudrait bien y retourner un jour. Sans vraiment en comprendre la raison, Eric sentait bien qu’il lui faudrait revoir la jeune fille, lui parler, l’aider. Une force incompréhensible le poussait vers elle. Altruisme ? Peut-être. Eric ne pouvait le dire…
« Papa ! Je veux y aller ! - Très bien mon cœur, on y va. Couvre-toi bien par contre, je ne voudrais pas que ta maman te récupère malade… »
Alea jacta est. Il lui faudra bien affronter cette épreuve un jour. Et puis qu’est-ce que Sonia pourrait trouver à y redire ? Ce n’était tout de même pas un crime de parler à quelqu’un !
Arrivés au parc, le père et sa petite fille se dirigèrent vers un banc libre. Mais Emilie ne pouvait rester en place et se mit à courir en direction du bac à sable, se faisant d’emblée de nouveaux amis.
Eric la regardait affectueusement. Toute cette histoire s’était avérée être un échec complet, une bêtise monumentale. Cependant, en regardant Emilie, il ne pouvait s’empêcher de se dire que c’était aussi la plus belle chose qui avait pu lui arriver. Si seulement Sonia n’était pas Sonia !
La jeune fille était là. Toujours le même regard émeraude, fixe et empli de tristesse. Pour la seconde fois, Eric lui sourit. Il se leva et se dirigea vers elle, l’enjoignant d’un geste à s’assoir à ses côtés sur un banc, plus près du bac à sable.
« Bonjour », la salua-t-il avec un doux sourire
La jeune fille le regardait, éberluée. La pauvre ! Elle ne devait pas comprendre pourquoi un inconnu qu’elle n’avait jamais vu l’abordait ainsi. Elle devait le prendre pour un fou furieux. D’ailleurs, Eric s’étonna qu’elle accepte de s’assoir à ses côtés.
« Excusez mon audace, mademoiselle. Vous ne me connaissez pas, et moi-même je ne vous connais pas vraiment mais je vous ai vu il y a quelque temps, assise sur un banc de ce parc. Et… je vous avoue que c’est la première fois que ca m’arrive mais j’avais envie de vous parler, de vous connaître. Si je vous fais peur, n’hésitez pas à me renvoyer et je m’en vais sur le champ !
-Non, non je vous en prie, restez ! Vous ne me dérangez pas et je vous avais vu aussi, avec votre jeune sœur…
-Ma fille.
-Votre ? … Excusez-moi, bien sûr votre fille. Elle est très mignonne.
-Ne vous excusez pas, c’est normal que vous ayez confondu. Je l’ai eu très jeune. Une erreur de jeunesse pourrait-on dire…
-Et votre femme ? Elle n’est pas ici avec vous ?
-Ma femme ? Ah oui vous voulez parler de Sonia… je ne suis pas marié. On s’est séparé avant même la naissance d’Emilie, ca ne marchait pas entre nous… mais trêve de parler de moi ! Parlez-moi un peu de vous.
-De moi ? Il n’y a rien à dire…, des larmes commençaient à perler au coin de ses yeux. Pardonnez-moi, je dois y aller, je… je vais être en retard.
- Permettez-moi de vous raccompagner, Mademoiselle… Mademoiselle ?
-Lucie. Vous êtes gentil mais je préfère rentrer seule. Au revoir.
Et sans un regard en arrière, la jeune fille s’enfuit. Eric resta seul sur son banc, la regardant s’éloigner avec regret. Lucie… c’est un joli prénom. Elle lui faisait l’effet d’une biche effarouchée ayant aperçu un prédateur. Il ne lui voulait aucun mal pourtant.
Perdu dans ses pensées, Eric n’entendit pas la jeune fille s’approcher de lui avant qu’elle ne fut assise de nouveau à ses côtés.
« Pardonnez-moi. Je n’aurais pas dû partir ainsi, c’était rude de ma part. Je… je ne sais pas ce qui m’a pris…
-Papa, papa ! Viens voir mon beau château !
-J’arrive ma chérie. Vous permettez ? Et si j’osais ? Voudriez-vous m’accompagner boire un verre ? Ou un chocolat chaud ?, fit-il avec un clin d’œil vers sa fille. Je vous serais très obligé. Lucie acquiesça. Bien, je vais juste voir son chef d’œuvre et on y va !, dit-il avec un grand sourire.
Chapitre 4 : What happens…
Un baiser fait moins de bruit qu’un canon, mais l’écho en dure plus longtemps, Oliver Wendell Holmes
Lucie ne comprenait rien à ce qui venait de se passer. Elle était bien au chaud sur son canapé, tout juste rentrée, comme au sortir d’un rêve.
Elle avait revu le garçon. Eric… Et la petite fille aussi. Sa fille. C’était la partie qui lui semblait la plus dingue. Que lui, à tout juste 25 ans, puisse être père ! Enfin c’était des choses qui arrivent. Et Emilie était si adorable.
Mais là n’était pas le principal. Il était venu vers elle, lui avait parlé avec gentillesse et elle, elle s’était comportée comme une vraie cruche ! Incapable de placer un mot correctement ! Il avait cependant eu la décence de ne pas s’en apercevoir… Ensuite, elle s’était enfuit, angoissée de tomber de plus en plus amoureuse (car oui c’était bien le mot !) de cet inconnu auquel elle avait à peine parlé 20 minutes… Mais arrivée à la grille du parc, elle avait fait demi-tour, attirée vers lui par une force irrésistible indépendante de sa volonté. Soit ! Ce qui devait arriver arriva. Il l’avait invité à boire un verre et ils avaient passé une heure délicieuse à discuter de tout et de rien, pendant qu’Emilie se régalait d’une glace au chocolat. Elle lui avait parlé de Rémi, de leurs parents… elle lui avait tout dit, tout ce qui était enfoui au plus profond d’elle depuis deux ans et dont elle n’avait jamais osé parler à personne. L’accident, l’hôpital, le deuil, sa solitude… Elle avait déversé à ses pieds tout ce qu’elle gardait enfermé dans son cœur depuis ce jour… et lui, il… il avait été parfait ! Adorable, compréhensif, à l’écoute… jamais personne ne l’avait écouté ainsi, sans l’interrompre et ses beaux yeux lui avaient été d’un grand réconfort, semblant tout comprendre sans problème, comme s’ils lisaient au fond de son cœur à livre ouvert.
Et puis après, alors que la nuit était tombée depuis longtemps, tenant la petite Emilie endormie dans ses bras, il l’avait raccompagné jusque chez elle. Alors qu’ils se tenaient sous le porche, elle avait osé l’embrasser et il avait répondu à son appel avec douceur, puis avec fougue. Personne ne l’avait jamais embrassé ainsi, lui donnant l’impression de tout lui offrir, de tout lui sacrifier… Mais Emilie s’était mise à gémir dans son sommeil et Eric avait dû se détacher d’elle. Avec un grand sourire, il lui avait souhaité une bonne nuit et lui avait promis de la rejoindre le lendemain, à la même heure au parc.
Lucie s’endormit, le sourire aux lèvres. Dormant pour la première fois depuis bien longtemps sans cauchemars. Demain… Texte no 4- Spoiler:
Petite ballerine
Assise devant la cheminée, une tasse de thé bien chaude à la main je le regarde. Il se tourne vers moi, me sourit… j’aime son sourire. Je ferme les yeux, les souvenirs remontent à la surface, une larme coule doucement. Je sens une main me caresser la joue et des lèvres se poser délicatement. Mes paupières s’ouvrent, il rit… ses yeux sont magnifiques. Nous avions passé toute la journée dehors dans le parc, il faisait un temps splendide. Malgré le vent, le soleil rayonnait et réchauffait mon visage, une jolie couleur rouge colorait mes joues. En ce mois de Décembre, la ville était recouverte d’un joli manteau blanc, c’était splendide ! Il marchait dans la neige, les cheveux au vent, sa joie de vivre suffisait à mon bonheur. Et pourtant…
4 ans plus tôt…
2012, je m’appelle Elena Denali, 24 ans. J’occupe un petit appartement au sixième étage d’un immeuble en plein centre de Paris. Paris…c’est la ville lumière, la Tour Eiffel, le Moulin Rouge, la Pyramide du Louvre et la ville la plus romantique…j’adore la danse et j’ai aujourd’hui la chance d’en faire mon métier, ballerine à l’Opéra de Paris. Tous ces petits fourmillements au bout des doigts et des pieds juste avant d’entrer sur scène, cette sensation de voler lorsque les pas s’enchainent et les applaudissements qui résonnent dans la tête à la fin du spectacle, étaient pour moi des instants magiques. Pour en arriver là, il a fallut des heures de travail et d’acharnement. La danse demandait beaucoup de rigueur. Assise sur un fauteuil dans la salle, j’observe les ballerines répéter. Elles dansent avec grâce tel des cygnes. Puis arrive l’entrée des petits rats d’opéra, ces petites danseuses en tutu exécutant minutieusement les unes après les autres leurs pas. 22h, les répétitions sont terminées, mes pieds me font mal, il est temps pour moi de rentrer. Je passe dans les loges récupérer mes affaires. Une rose rouge est posée sur mes chaussons. Je suis surprise. La fleur sent extrêmement bon. Qui a bien pu me l’offrir ? Mystère…
Nous sommes maintenant à 1h de l’ouverture du rideau. Nous faisons une dernière répétition. Le grand moment est arrivé, apparemment il y a beaucoup de monde dans la salle. Mes mains tremblent, je sens l’adrénaline monter en moi, je suis toute excitée. Le rideau s’ouvre, le spectacle peut enfin commencer. Je m’élance… sous les projecteurs je ne vois personne autour de moi, je suis seule sur scène… j’effectue les mouvements… je me sens envahir par la musique, j’accompagne les notes pas à pas… puis pointes… et tours sur moi-même, j’ai l’impression de flotter. Petit à petit, les danseurs font leur entrée, nous enchainons la chorégraphie avec des portées. Les costumes sont magnifiques et les décors féeriques. Le spectacle aura durée 2 heures. Nous saluons le public, les applaudissements n’en finissent pas, certains se lèvent même de leur siège pour nous féliciter.
Epuisé mais excité par la représentation, tout ce que je souhaitais c’était retrouver mon lit, m’effondrer sur ma couette et dormir, voila ce que je désirais à ce moment là. Je me change, me démaquille mais je ne remarque pas cette petite boite posée dans le coin. Intriguée, je l’ouvre délicatement… un magnifique bijou y était déposé. Il s’agissait d’un pendentif en cristal, taillé en forme de goutte d’eau. De couleur bleu nuit, il donnait des reflets verts en présence de lumière. Subjugué, je ne peux décrocher mes yeux. Et encore cette question ; qui a bien pu m’offrir ce bijou ? Un admirateur secret ? Une enveloppe accompagnait le coffret. A l’intérieur, cette phrase : «Vivre et aimer sans attendre… »
Minuit passée, dans la nuit noire, je repense à cette soirée et à ce mystérieux cadeau ; Quand au loin j’aperçois une silhouette, un homme se tient debout devant moi sur le trottoir…je ne vois pas son visage… il est grand et musclé… une brise légère me fait parvenir un parfum exaltant et ensorcelant. Je suis troublée, je veux rebrousser chemin mais mes jambes ne m’obéissent pas. Soudain, un murmure au creux de mon oreille… les battements de mon cœur se bousculent… la panique me submerge, je me retourne mais il n’y a personne… regardant à nouveau devant moi, il avait disparu… Impossible de dormir, je repense à cet homme, cette voix si troublante, et cette odeur si envoutante vous donnant l’envie soudaine de vous laisser porter ...
Réveil après une nuit blanche, je n’arrive pas à me concentrer sur scène, toute la journée je repense à ce moment si intense et effrayant à la fois, que faisait cet homme à une heure aussi tardive dans la rue ? Que me voulait-il ? Je suis tellement troublée que j’en oublie totalement l’enchaînement de mes pas. Ce soir j’ai rendez-vous avec des amis, cela me changera peut-être les idées. Tout au long de la soirée je suis absente, le regard perdu au loin, et je vois bien que mes amis se posent des questions. Je rentre chez moi avec qu’une idée en tête : revoir ce mystérieux inconnu… mais cette nuit là, rien.
La semaine passe et aucune nouvelle rencontre. Je me retourne à chaque coin de rue, mon cœur tambourine dans ma poitrine à chaque fois que j’entends des pas derrière moi. Assise sur le canapé, sa douce voix repasse sans cesse dans ma tête tel un disque de musique, ses intonations musicales me berce quand j’y repense.
La clef verrouille la porte, mon casier est fermé, je sors de l’opéra, je souhaite me racheter une tenue pour les entrainements et faire quelques achats de Noel.
Songeuse, je me retrouve devant la voiture… lorsque je sens de nouveau l'étrange caresse… envoûtée par ce souffle, je suspends tout mouvement, de peur de l'interrompre … le souffle haletant, ma poitrine me fait mal et me brûle les poumons. Je n’ose me retourner de peur de perdre ce moment. Il prononce mon nom… mon cœur explose… je me sens défaillir, ma vue se trouble, je ferme les yeux. Je me tourne sans les ouvrir de crainte qu’il n'y ait personne près de moi. Son souffle sur mes lèvres, j’entrouvre mes paupières… nos regards se croisent. Je plonge dans ses yeux d’un bleu intense, une larme coule sur ma joue. Ses doigts viennent effleurer mon visage, il me sourit. Un sourire en coin… quelle charme envoutant, qui pourrait résister ? Je me blottis contre lui, nos cœurs battent à l’unisson.
Nous restons là, sans bouger pendant plusieurs minutes. Il me murmure des mots doux… Il se détache doucement de moi, je le regarde et je ne peux me décrocher de lui. Il recule… prononce mon nom, je m’avance dans sa direction mais il s’éloigne de plus en plus… je cours d’avantage… il me distance… je n’arrive pas à le rattraper… Pourquoi fait-il cela ? Je tends le bras… il est déjà loin à présent… je m’écroule par terre et hurle de douleur…
Des perles de sueur parsèment mon front, mes mains tremblent, je viens de me réveiller dans mon salon… je suis effondrée… alors ce n’était qu’un rêve… je pleure toutes les larmes de mon corps. Je me lève et sort de l’appartement, courant dans les rues à en perdre haleine, je le cherche. Mes pas foulent le pavé, j’ai froid, mes pieds me font souffrir mais je ne veux pas m’arrêter. Soudain mes jambes se stoppent, elles ne me portent plus, je tombe au sol. Je tiens mon visage entre mes mains. Lorsque quelqu’un me soulève, je relève la tête… Un parfum entêtant viens me chatouiller les narines… ma main devant la bouche, j’en ai le souffle coupé… je la pose sur son torse, c’est lui. Il me fixe, je le dévisage… Grand, cheveux noirs, des yeux bleus nuits… captivant !
« - Qui êtes-vous ? - Le bijou vous a plu à ce que je vois, dit-il calmement - Alors c’était vous ce cadeau, je suppose que la rose aussi ? - Oui c’était moi. - Vous auriez pu vous présenter à moi, je ne connais même pas votre nom ? - John… mon nom est John »
Il se penche vers moi et commence à m’embrasser dans le cou. Je n’ai pas le temps de l’éviter et de dire quoi que ce soit, que je suis déjà sous l’emprise délicieuse de ses baisers. Nous rentrons tous les deux à l’appartement. Chaque moment fut un délice. Cette nuit là fut magique. Au petit matin, je me sentais bien, légère, posé. Je le regarde dormir, l’embrasse sur la joue puis sors de la chambre. Une tasse de café à la main je regarde par la fenêtre du salon, les rayons du soleil traverse la vitre et me réchauffe le visage. Je n’échangerais ces moments pour rien au monde, je voulais figer cet instant de bonheur pour le conserver dans un coin de mon cœur pour l’éternité. Il avait bouleversé ma vie, je souhaitais qu’il reste à mes côtés pour toujours. Mais le destin en avait décidé autrement…
Le téléphone sonne, je décroche « - J’ai appris la nouvelle… tu tiens le coup ? - Je… J’ai l’impression de l’entendre constamment, dis-je en pleurant Je ne peux pas continuer Maria, je ne tiendrais pas. »
Quelques semaines après cette nuit-là, alors que je commençais à vivre, tout s’était écroulé.
Tard dans la nuit, le téléphone retentit. C’était la police, ils m’annoncent la mort de John dans un accident de voiture. Le combiné tombe au sol, je n’ose croire ce que je viens d’entendre. Et s’il s’agissait là encore d’un rêve. Mais non…aucun son ne sort de ma bouche, je suis obligé de m’asseoir sur la chaise du salon, restant là quelques minutes, à regarder le sol. Puis prise soudain de colère, je renverse tout ce qu’il y a sur la table, les livres de la bibliothèque sont éparpillés dans la pièce, les rideaux sont arrachés. J’hurle « Pourquoi ? Pourquoi moi ? » Je m’effondre sur le tapis, recroquevillé sur moi-même, je pleurs. Ma vie, mon avenir s’effondre…
« - Lucas, on va rentrer mon chéri, il commence à faire nuit. - J’arrive maman, encore 5 minutes, je finis mon bonhomme de neige » me dit-il en souriant
Il a ses yeux et ses expressions… je retrouve John à travers Lucas. Parfois je repense à ces merveilleux moments passés avec lui…la vie ne tient qu’à un fil…mon petit cœur se serre mais heureusement mon fils me fait tenir bon. J’ai arrêté la danse et vendu l’appartement après la naissance de Lucas. Le pendentif qu’il m’avait offert ne me quitte jamais et régulièrement nous allons déposer une rose rouge sur sa tombe. Nous vivions tous les deux à présent dans une maison loin du centre ville, besoin d’un espace plus grand, de tourner la page et de commencer une nouvelle vie.
Assise devant la cheminée, une tasse de thé bien chaude à la main je le regarde. Il se tourne vers moi, me sourit… j’aime son sourire. Texte no 5- Spoiler:
Rencontre C’était un soir de 13 juillet. Alentour, les sommets enneigés, imposante dentelle d’aiguilles se paraient de soieries multicolores ondoyantes sous les derniers rayons du soleil couchant. Les pentes escarpées encore lumineuses et le fond des vallées déjà noyés d’ombre contrastaient. Niché au centre du vallon d’altitude, au bord du lac noir qui lui donnait son nom, dans d’une prairie d’alpage, voluptueux tapis d’herbes odorantes émaillées de fleurs, le Refuge de l’Izard, affichait complet. Sur la terrasse de planches aux tables et bancs rustiques, une trentaine d’alpinistes dispersés en petits groupes, bavardaient et riaient. La gardienne Nicole et sa fille Fabienne s’affairaient, plaisantaient tout en servant les montagnards. Tous avaient un bon coup de fourchette ! Leur duo était parfaitement rodé. Elles circulaient vives et précises entre les tables et pouvaient à l’occasion compter sur Darius, étudiant durant l’année scolaire, puis cuisinier du refuge durant les trois mois d’été… qui ainsi finançait ses études et passait de belles vacances. Des étudiants, il y en avait ce soir là ! Un petit groupe avait pris ses quartiers dans le plus petit des dortoirs. Attablés ils chahutaient joyeusement en attendant leur tour : - «Naїs, ne fais pas ta mijaurée, tu n’es pas montée jusqu’ici pour caler à mi-chemin ! On avait dit « lever du soleil sur le glacier pour la Fête Nationale pour sabler le champagne et déguster le saucisson !», donc demain, 14 juillet, départ à trois heures du matin, tous ensembles ! Nous sommes une équipe !», rugissait un géant blond à l’air protecteur. - «Naїs, tu as grimpé six heures d’affilées aujourd’hui, sans faiblir… 700 mètres de dénivelé ! Tu peux arriver au bout sans problème ! Et Michel a raison, tu sais bien que tu n’as rien à craindre avec nous, même si c’est une première pour toi » renchérissait un beau brun aux traits fins. - « Le problème n’est pas là, Christian, lui répondit la brunette à la moue dubitative à qui tous ces encouragements s’adressaient. Je ne pourrais jamais, m’entends-tu, me lever à trois heures pour aller courir la montagne… et encore moins affronter la neige et la glace ! Vous étiez prévenus : OK pour le refuge, ensuite… Repartir si tôt cela ne va pas être possible… J’aurais ensuite besoin du reste de la semaine pour m’en remettre… Je ne peux pas avec toutes mes révisions ! Je préfère travailler en vous attendant, j’ai un examen en septembre, moi». - « Tu n’as quand même pas pris tes cours ? », lui lança incrédule, un troisième larron basané à fort accent espagnol nommé Pablo. - « Juste un livre pour travailler demain ! » La petite bande partit dans un grand éclat de rire. - « Pas possible ! » S’exclama Pablo. - « Pas étonnant que tu n’avais plus de place pour porter tes gourdes d’eau ! Ah les filles ! Comptez sur elles pour voyager léger ! La prochaine fois, j’exige l’inspection de ton sac avant le départ.» renchérit Christian. La seconde jeune fille, une blondinette au regard doux, s’adressa gentiment à Naїs : - « Si tu veux, je reste avec toi.» - « Cathy, je sais combien cette montée te tient à cœur, tu es une montagnarde entrainée ! Je compte vraiment travailler. Le cadre est superbe, et j’aurais un toit !». Les quatre amis se consultèrent du regard, autant céder tout de suite. Naїs était une obstinée et elle n’avait effectivement jamais promis d’aller au bout de la course, même s’ils l’avaient espéré. - « OK, tu désertes. Holà belle Aubergiste, à boire, à manger ! Il fait faim, on a marché six heures, Diable ! » Héla Michel d’une voix de stentor. Les autres tables se retournèrent en souriant, Nicole, la gardienne, les bras chargés d’assiettes vides, appela : - « Darius, peux-tu aider, s’il te plait ? » - « J’arrive ! » entendit-t-on répondre de la cuisine. Un joyeux et sympathique jeune homme brun apparut dans l’embrasure de la porte, le regard velouté, malicieux, bronzé à souhait. -« Aaaaaah ! » s’exclamèrent en cœur les garçons. « On a faim ! Quel est le menu ? » - Lasagnes bolognaises et tarte aux myrtilles ? propose Darius - Parfait ! Adjugé ! répondent-ils tous en cœur en frappant des pieds le sol de la terrasse. Naїs le suivit du regard distraitement. Alors qu’il franchissait la porte du chalet, une dame d’un certain âge, assise à une table voisine, l’interpella : - « Dites-moi, jeune homme, votre assiette de crudité était vraiment parfaite, mais je n’arrive pas à reconnaitre ce légume vert râpé avec la carotte… Pourtant je suis sure d’en avoir déjà mangé». - « C’est… de l’avocat sauvage, Madame ! Vous devez effectivement en avoir déjà gouté. C’est très bon ! » et l’altitude le bonifie termina-t-il en riant. - « Assurément… répond la dame d’un ton approbateur. Vous ne les cueillez quand même pas dans ce vallon ? Viennent-ils du dernier village? » Les yeux de Darius brillèrent d’une lueur espiègle : - « Nous les montons à dos d’homme du village lorsqu’ils sont mûrs à point, une fois par semaine, ici nous sommes beaucoup trop en altitude et, - « Oh, merci… C’était vraiment délicieux ! » lui répond la dame satisfaite… Alors que Darius revenu se penchait en déposant le plat de pâtes fumantes au centre de la table, Naїs, taquine lui murmura à l’oreille : - « je veux bien faire la montée du glacier à cloche-pied s’il pousse des avocats sauvages dans la vallée ! Sans rire, qu’est-ce que c’était ? » - « Chut ! répond Darius d’un air de comploteur. Chaque grande maison a ses secrets, je ne peux rien révéler… Bon appétit ! ». Sans demander leur reste, les garçons avaient déjà attaqué le plat. - « Naїs, donne ton assiette ! » Et dans le cliquetis des fourchettes, sous les premières étoiles, les cinq amis goutèrent le bonheur d’une nuit d’été perdus dans un vallon alpin. Le lendemain à son réveil le soleil était haut dans le ciel : neuf heures, ses amis avaient atteint leur objectif depuis deux bonnes heures. Ils l’avaient à peine réveillée à trois heures, lors de leur départ. Elle était une vraie marmotte. Elle descendit dans la salle commune, au rez de chaussé du refuge. - « Bonjour ! Bien dormi ? » Assis sur le seuil, dos contre la porte, profitant du soleil et de l’absence de clients, tous partis à l’assaut des sommets, Darius savourait une grande tasse de café fumant. - « Oui, merci… Je ne suis pas une montagnarde aguerrie, expliqua-t-elle en souriant, j’ai trop besoin de dormir ! » - « Tu as raison, l’essentiel c’est de faire ce que l’on doit… surtout ici ! Je t’offre un café ? Il est spécial lui aussi, un peu comme les avocats sauvages…» - Rieuse elle rétorqua : « Ne me raconte pas que tu cours la montagne pour en cueillir les cerises ! Une variété ignorée de l’académie de botanique ! Qu’étaient donc ces mystérieux avocats ? Dis-le-moi, nous sommes seuls. » - « Hum… C’était une courgette râpée. » Il lui fait un clin d’œil entendu « Il n’y avait plus que cela en cuisine, on est un peu à court de légumes avant la prochaine descente au village, demain matin ! ». - « Je n’y aurais jamais songé… J’avais pensé à des racines sauvages, un genre de chicorée ! Mais c’est bien vu ! Et ton café ? Qu’a-t-il de spécial ? » - « Je l’ai préparé pour moi, il est à la turque, parfumé à la cardamome, cela te tente ? En prime, si tu le souhaites je lirais ton avenir dans le marc ! » - « Mon avenir ! Je peux te le donner d’avance, le café ne m’apprendra rien : je vais passer l’été à réviser ! Mais pourquoi pas ! Il retourna dans la cuisine et revint avec une grande tasse dans laquelle il versa le breuvage odorant et sirupeux. Seule, loin de l’agitation de son groupe d’amis, Naїs observa plus attentivement son compagnon, un sourire permanent semblait avoir élu domicile sur ses traits réguliers, des yeux bruns caressants, des boucles noires, une bouche bien dessinée, lui rappelait ces jeunes étrusques sur les fresques antiques qui fêtent un éternel printemps. - « Que révises-tu ? » lui demande-t-il. - « La mécanique quantique…dit-elle d’un ton pitoyable en esquissant une grimace. D’ailleurs, je m’y mets juste après, je repasse l’examen en septembre » - « Tu sais, je démarre une thèse en astrophysique a la rentrée, la Méca Q et moi, nous nous entendons bien. Si tu veux je t’aide. J’ai trois heures avant l’arrivée des prochains randonneurs et Nicole n’a pas besoin de moi en continu le matin ». - « Vraiment ! Excellent ! Voilà, j’ai fini mon café, c’était la première fois que je le buvais ainsi… J’aime beaucoup avec la cardamome. On fait comment, ensuite ? » - « Prends la tasse et renverse-la dans la soucoupe…maintenant, il faut attendre un peu que le dépôt sèche… Fais un vœu ou pense à une question qui te tiens à cœur … et ensuite, c’est à moi d’entrer en scène ! » Naïs renversa délicatement la tasse dans sa soucoupe. - « Prêt ! … Et pour la question… Je réfléchis…» Elle pourrait l’interroger sur la réussite à son examen, mais elle était, en bonne scientifique, trop rationnelle pour abandonner son carnet de notes, à la lecture du marc de café… Que celui-ci soit ou non lu par un futur astrophysicien. Par contre, elle n’était pas contre un peu d’aide des étoiles en ce qui concernait ce garçon… « Il a un charme fou, voire même un certain charisme... Il me plait vraiment. Et moi ? Nous reverrons-nous ? » « C’est bon, j’ai mon souhait, à toi, grand mage ! » Annonça-t-elle taquine. Il retourna sa tasse… -« Hum… Intéressant… » - « Oui ? » - « Laisse-moi mieux me concentrer, les dessins qui sont apparus dans ta tasse sont très surprenants…On n’en voit pas souvent ainsi… Il y a un oiseau dans un arbre, regarde, la ! » Il y avait effectivement un petit tas de marc qui s’était accumulé au bout d’une longue coulure… brune - « L’oiseau, c’est ton but, ce que tu veux atteindre. Mais il est sauvage, et sur une haute branche, prêt à s’envoler. Il va falloir que tu l’apprivoises, tu devras réfléchir pour ne pas l’effrayer… Il te faudra de la patience et du travail… Mais il est là… Il t’attend… Tu peux y arriver. » - « Tu crois ? » Naїs s’amusait, elle se prit au jeu… Il était bon conteur, son histoire la fascinait… Et l’oiseau aussi ! Elle rit à l’idée qu’il ignorait qu’il était celui qu’il voyait si bien au fond de sa tasse… « Et ensuite ? Que se passe-t-il ? » - « Pour finir, il faut que tu fasses une marque avec l’index dans le marc, vas-y ! » Naїs prit la tasse et planta une virgule vigoureuse dans le plus gros tas de café, au fond de la tasse. - « Alors ? »
- « Très bien ! Tu viens de détruire le gros rocher qui t’empêchait d’approcher l’arbre de l’oiseau. Tu devrais pouvoir réussir. Car vous êtes beaucoup plus proches grâce à cela… Allez, au travail maintenant ? Après le marc de café, il est temps d’aligner les équations !». - « Patiente, je vais chercher mon Cohen-Tannoudji… C’est fou ce que ce bouquin était lourd dans mon sac à dos, hier, au fur et a mesure de la montée ! Tu reprendras avec moi l’équation de Schrodinger ? ». Naїs avait les yeux qui brillaient comme des escarboucles et pour être honnête, n’avait jamais envisagé la mécanique quantique avec autant d’intérêt… Car Darius l’avait affirmé, elle avait résolu haut la main les épreuves qui l’empêchaient d’approcher le bel oiseau, il ne lui restait plus qu’a l’apprivoiser… Elle en avait bien l’intention, elle avait d’ailleurs toute la journée pour cela ! Darius dégagea une table sous l’auvent, sortit un bloc de papier et des crayons. Après avoir suivi du regard la jeune fille remontant chercher ses livres et cahiers en bondissant dans l’escalier, il s’interrogeait sur l’étrange idée qu’il avait eu de lui proposer ses services ! Mais lorsqu’elle fut de retour, conquis par son naturel, et sa grâce mutine, il se laissa aller à imaginer… il y avait comme un lien entre eux évidemment : la Mécanique Quantique c’est si passionnant… et ce léger parfum de miel, et sa voix si mélodieuse... et… Installée à ses côtés, livre ouvert, l’histoire pouvait commencer.
Dernière édition par April le Mar 1 Mai 2012 - 13:25, édité 5 fois |
| | | April Black Leather's Violet
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| Sujet: Re: 1er concours d'écriture (contributions page 6, résultats page 7) Lun 3 Jan 2011 - 13:36 | |
| Suite des textes. Texte no 6- Spoiler:
Aventure Foins des ors et de la pourpre vaticane, pensa Flore exténuée, consciente du lamentable spectacle qu’elle offrait, effondrée contre le piédestal d’une statue imposante. - Je retourne à notre appartement. Pierre ne dit mot, cependant que Sophie réagit violemment. - Tu exagères tu nous persuades de partir pour des vacances romaines et aujourd’hui tu promènes ton regard désabusé sur des splendeurs ! Accroche-toi un peu, fais un effort, cultive-toi ! - Je n’ai pas votre endurance. J’ai juste envie de légèreté, de paix. - Paix et tourisme sont contraires. Ne t’es-tu pas assez recueillie et reposée lors de la messe pontificale ? Sophie désigna d’autorité l’imposant baldaquin de bronze du Bernin. C’est absolument magnifique. Le guide précise… - Que ce monument est incontournable, je sais ! J’en ai assez des visites pas à pas avec votre guide Michelin qui ne laisse aucune place à l’imagination. - L’imagination ne supplée jamais l’information ! S’exclama Pierre. Nous n’allons pas manquer une œuvre majeure alors que nous ne connaissons pas Rome. - La visite me plairait d’avantage, si toute cette marée humaine disparaissait. J’ajoute que si vous aviez comme moi préparé le voyage, vous auriez la possibilité d’admirer, d’imaginer, d’éviter d’être scolaire : Quel besoin avez-vous de détailler à un millimètre près les petites palmettes et de vous exclamer à chaque dorure signalées dans votre guide ! J’ai mal aux pieds, ma bouteille d’eau est vide, je pars. - Ne te perds pas. Flore grimaça légèrement en haussant les épaules. - Ce n’est pas si loin et j’ai mon plan, à ce soir. Elle redressa le buste, leur tourna le dos déterminée. - Ouf, délivrée ! pensa-t-elle après avoir passé l’enceinte pontificale. Allègre maintenant, ses pieds effleuraient vivement les pavés jusqu’à la piazza di Spagna, où elle avait un rendez-vous, un incontournable rendez-vous. - Ici, ils pourront m’indiquer... j’ai assez perdu de temps. Elle contempla le second étage d’une modeste demeure et disparut à l’intérieur. La maison transformée en Musée au souvenir et à la gloire de John Keats la bouleversait, mais elle voulait connaitre le jardin ou il reposait. Elle y songeait depuis quelques jours, plus encore après la soirée de la veille. Rebutée par les bars branchés, l’alcool, la vie noctambule moderne, elle s’était brutalement retranchée dans ses rêves, laissant perplexes ses deux amis. - Et qu’y puis-je, après tout, si je nourrie une certaine nostalgie pour les ruines de la Rome antique et l’ombre vertigineuse du poète ? Je ne suis pas née dans le bon siècle. Cette réflexion la fit sourire : - J’exagère ! J’apprécie le monde moderne ! Elle gravit quatre à quatre les escaliers qui menaient au second étage. Dans l’ambiance feutrée très britannique du petit musée, une aimable dame blonde, lui indiqua le chemin - Attention Mademoiselle, ne musardez pas, le cimetière ferme à 16 h 30 ! Il vous faut bien 45 minutes pour y parvenir. - Merci beaucoup, Madame ! Alors qu’elle courait dans une ruelle ombragée parcourue d’effluves suaves, elle se laissa distraire de son chemin. Nez au vent, celles-ci la guidèrent vers une placette où un jasmin exubérant montait à l’assaut du porche d’une très vieille église et laissait cascader ses grappes fleuries. - Quelle splendeur ! Je n’aurais jamais le temps d’acheter des violettes, alors, elle cueillit avec délicatesse une offrande d’étoiles odorantes. - Merci ville éternelle, de me proposer ces fleurs délicates, je les dédie à celui qui les aurait certainement aimées… … Dans son jean crème passablement froissé, le jeune homme mélancolique contemplait les blocs de marbre millénaires plantés là. Comme un naufragé rejeté par la mer, au pied de la pyramide de Caius Cestius, véritable gardienne du Cimetière Acatholique de Rome, il scrutait avidement les lieux. Il avait voulu ce séjour, recherché ce subterfuge pour apporter l’oubli à son cœur blessé, mais nul remède à son mal. Plus encore qu’en Angleterre, la « dolce vita », la jovialité des Romains, le ravissement bon-enfant des touristes décontractés et la beauté du printemps entretenaient sa blessure. - Un ciel gris et bas, une pluie fine, désespérante, anglaise conviendrait mieux à ma mélancolie ! Songea-t-il. Elle aurait dû m’accompagner, si seulement j’avais su le lui exprimer ! Quand l’ai-je perdue ? Ces questions hantaient ses nuits d’insomnie. Elle était brillante et versatile, et lui, affamé d’elle, recherchait son ombre, se voulait son adorant. - Quelles furent mes erreurs ? Pourquoi me sentir si coupable de l’avoir aimée et plus encore de l’avoir perdue ? Et maintenant ? Résister, puisque tout me blesse. A moi désormais d’affronter le monde au quotidien, d’accomplir méthodiquement ma tache journalière. Et la nuit… survivre, survivre avec John Keats avant de sombrer un peu plus dans le petit matin. Mon bonheur, si absurde que soit désormais ce mot, ne sera plus que dans l’accomplissement de petits gestes. Que de pages remplies pendant ses nuits blanches ! Il avait toujours écrit. Un air de tristesse s’inscrit fugitivement sur son visage au souvenir de ses tous premiers balbutiements littéraires. Un cahier d’écolier à petits carreaux, avec une belle couverture bleue contenait ses pensées adolescentes. Puis le cahier rouge avait connu ses émois quand, comme un soleil, elle était entrée dans sa vie. Charmante et cruelle, son image le hantait toujours. Hier encore, jolie sirène, elle dansait sur les flots de la Méditerranée, dans les feux du couchant, sur la plage d’Ostia. Alors, il avait décidé de renoncer à tout, d’en finir avec ses rêves. Il ne voulait plus souffrir, plus lire ce qu’elle avait été pour lui. Dans un grand autodafé, page par page, il avait regardé le papier se tordre et gémir sur le sable avant de tomber en poussière… son âme était en lambeaux. A l’aube, une vague plus forte emportait à la mer, les cendres de son amour défunt. Hagard, il était venu chercher l’apaisement auprès du poète confident. Celui qui aurait pu comprendre le déchirement qui était le sien. Il franchit l’enceinte à la chaude couleur terre de Sienne, évita à sa gauche le bureau d’information des visiteurs sans même s’émerveiller de la délicate harmonie des lianes des glycines mauves, au parfum opulent, palissées contre la solide bâtisse ocre. Au fond de la clairière antique, à l’ombre des pins parasols, deux tombes jumelles, encadrées d’iris et couvertes de pieds de violettes l’attendaient. Sur la première, une palette de peintre et un pinceau : la dernière demeure de l’ami, Severn. Sur la seconde, une lyre aux cordes cassées : John Keats reposait : plus d’insomnie pour lui. D’émotion, il se laissa choir dans l’herbe drue, au pied du parterre de violettes si chères au poète. Ses yeux couleur d’absinthe, noyés de larmes, la poitrine gonflée d’un long sanglot, il laissa libre cours à sa douleur puis peu à peu se maîtrisa, sortit de sa poche un recueil au cuir lisse, brun, fatigué, seuls au monde…. Keats et lui. Un chat curieux, s’approcha, puis s’installa dans le soleil, hiératique sur une dalle de pierre non loin, comme pour l’écouter… … Flore sentit dans son corps le ralentissement des wagons et le chuintement des freins. - Station « pyramide » lut-elle. Et maintenant ? Où aller ? La foule poussa rudement l’indécise vers la surface, au milieu de l’agitation romaine, sur cette place où tant de routes convergeaient. Taxis, bus, voitures, scooters, bicyclettes traçaient la route en klaxonnant à tout va tandis que parfois des piétons pressés s’interpellaient. - Il faut que je me calme, que je réfléchisse, je suis si près du but ! Un peu à l’écart, elle consulta son plan de la ville de Rome, trop succinct pour lui être de la moindre utilité. - Française ? Interrogea un beau raggazzo, œil de velours à l’affut d’un cœur facile. Elle le vrilla d’un regard noir tout en acquiesçant, continua son chemin, plan en main. - Française et de mauvaise humeur lance-t-il goguenard en la voyant s’éloigner à grands pas. - Donc, marmonna-t-elle, le principe, c’est de ne surtout pas repasser la porte et entrer dans la cité consacrée. Et puis… Qu’est-ce là ? Une pyramide ? Derrière le mausolée se découpaient les silhouettes de pins, cyprès, laurier, palmiers, arbres de Judée, myrtes… - Quelle paix, c’est le paradis romain ! Le cœur battant la chamade, elle découvrit sous les grands arbres quelques stèles de marbre blanc et une grande croix celtique. J’ai trouvé jubila-t-elle en croisant les doigts et esquissant un petit saut sur place. La grille du cimetière franchie, l’ombre bienfaisante des frondaisons des pins l’accueillit. Rome n’était plus qu’un bruissement. Gaillardement elle gravit le chemin abrupt qui serpentait au milieu des monuments de style victorien. Un panneau de bois, patiné par des siècles de soleil ardent, indiquait la direction. L’austère beauté des feuilles d’acanthes répondait dans un jeu de miroirs à leurs copies de marbre sculptées. Plus loin, de délicates roses anciennes aux teintes de dragées évoquent de frêles jeunes filles pleurant leur amour brisé. Thème repris par l’ange du chagrin, dernière sculpture de William Wetmore Story, que celui-ci fit à la mort de sa femme. L’ange, belle jeune femme ailée, prostrée, abandonnée, cachait son visage, Flore malgré elle sentit sa gorge se nouer. Elle descendit vers la clairière à l’abri de la pyramide. Ici, la nature reprenait ses droits et des chats facétieux s’ébattaient en toute liberté dans la prairie, gardiens des temps anciens, des dieux du forum comme des poètes anglais. Sur un banc de marbre ouvragé, un charmant trio de souriantes ladies, septante années « si britanniques » sous leurs chapeaux à voilettes, souriaient aux discours volubiles de leur compagnon, costume de lin trois pièces, cravate soignée assortie à la pochette, qui faisait voltiger sa canne avec brio en direction de la ville tout en soulevant un chapeau colonial en sa direction. Flore, gracieusement rendit les saluts. Quand, le but de sa visite se laissa entrevoir. - Pas de chance, soupira-t-elle, en découvrant le jeune homme prostré sur la tombe de Keats accroché à sa lecture, relevant parfois la tête pour mieux s’adresser à l’épitaphe de marbre. Discrète, elle rebroussa chemin, se sentant indécente à le détailler. Pourtant, elle ne s’éloigna pas complètement, captivée par le beau jeune homme douloureux. - Qu’il semble souffrir ! Avec sa peau laiteuse c’est surement un compatriote de celui que je suis venue saluer. Elle s’assit à l’ombre d’un grand pin, adossée au tronc, enveloppée par sa fragrance résineuse et reprit le fil de sa rêverie... … Il avait entendu crisser les graviers. Sans doute une personne venue se recueillir et qui avait passé son chemin. Heureusement, les visiteurs du poète étaient discrets. Il retourna à sa lecture. Puis fixa le sol. - Seul, je me sens seul, terriblement. Différent et anachronique. Différent des jeunes gens de mon âge. Je n’en ai pas croisé dans ce jardin d’éternité. Uniquement des personnes âgées, certainement tout à fait charmantes, mais, C’est alors qu’il aperçut sur le chemin de la pyramide une silhouette sombre, une robe noire à la jupe évasée. Une toute jeune femme brune d’une élégance marquée. La sobriété de sa tenue la rendait intemporelle. A travers ses cils, il l’observa. Comme une fleur après la pluie elle s’inclina vers la terre et s’assit la jupe en corolle autour d’elle, son regard sombre perdu vers la tombe du poète. Parfois, elle penchait sa tête fine vers le sol, comme une pleureuse des temps anciens ou la redressait lentement vers le ciel comme pour prier. Il se surprit à imaginer qu’il n’était pas le seul à regretter le poète et qu’elle était sa muse, revenue pour lui… … Patiemment Flore attendait, elle serait restée encore des heures à goûter cette l’harmonie. Mais ses amis curieux, n’auraient de cesse, si elle n’était pas à leur pied à terre avant eux, de connaître ce qui l’avait poussée à rentrer si tard. Or, il n’était pas question de leur dévoiler ses secrets, cette après-midi, elle l’avait imaginée tant de fois ! - D’ailleurs qu’entendent-ils à la poésie ? Ils ne jurent que par les cotes des monuments établies dans leur guide touristique. C’est leur bible, non la mienne ! Elle écrasa un peu ses brins de jasmin, ils embaumaient encore, bien que fripés. D’abord je pose mon bouquet, et puis, lui, qui est-il ? Il n’a pas le droit de monopoliser Keats tout de même ! Qu’il est beau avec ses boucles d’or cuivré, pensa-t-elle, mais triste… Comme prisonnier d’un monde que j’ignore. Bien sur, il lit Keats. Elle sourit. J’aimerai qu’il le lise pour moi… Mais comment briser la glace ? … Ombre délicate, la muse reprit sa route. Sa perte imminente lui poinçonna le cœur, de cette douleur fulgurante qu’il connaissait si bien. Sa présence évanescente, étrange adoratrice du poète par delà les siècles, avait répandu en lui un baume, une espérance en l’avenir. Il restait pourtant assis dans l’herbe, au plus prés de la tombe, perdu dans son dialogue intime avec l’âme du poète… … Flore, plus silencieuse et légère qu’un papillon avait remonté les lacets d’un sentier sablé. Par ce chemin de traverse, elle déboucha face à la stèle. Son visiteur lui tournait le dos. Elle lança un bref regard sur la page ouverte du livre : « Bright Star », mon poème préféré ! Flore se détendit, subitement en confiance, elle s’avança. Un délicat poignet orné d’or fit irruption dans le champ de vision du jeune homme triste. Une petite main déposa des brins de jasmin sur la pierre. « …And so live ever – or else swoon to death. »
… La muse de Keats s’adressait directement à lui d’une voix légèrement tendue, marquée d’une pointe d’accent français. « Bright Star ». Il tressaillit, releva lentement la tête, craignant d’être déçu. Mais la jeune femme souriait avenante. Leurs yeux se rencontrèrent.
- Je suis Flore, dit-elle en extirpant de son sac le même exemplaire à la couverture de cuir lustré qu’elle lui tendit. Texte no 7- Spoiler:
L’Amphithéâtre Tout avait commencé un jour de septembre… une rentrée étudiante ensoleillée … l’été indien. Le grand amphithéâtre bruissait de la présence des nouveaux élèves impatients de découvrir le professeur. Il apparût. Il ferma la porte. Le regard froid, hiératique, mince et d’une élégance toute britannique, il attendit le silence. Intimidés, le brouhaha s’éteignit. Soudainement, la porte s’ouvrit sur une jupe provençale. Elle hésita un instant interdite, intimidée par le vaste amphithéâtre bondé. Rougissante, auréolée par la lumière extérieure elle hésitait. Le professeur lui désigna d’autorité le banc du premier rang, juste sous sa chair, tout en laissant divaguer son regard d’acier sur les élèves. Puis se saisissant d’une longue craie, il commença son cours. Nul bruit ne l’interrompit sauf un déplacement de pied sur le plancher qu’il désapprouva instantanément en se retournant d’un bloc vers celui qui en était la cause. Puis, tendant la craie avec autorité, il apostropha sèchement la retardataire. - Mademoiselle, voulez-vous passer au tableau. Rouge d’émoi, elle prit la craie qui lui était offerte et commença la démonstration de physique, balbutiante, puis plus assurée. Le professeur la regardait intensément et même il la détaillait de bas en haut et de haut en bas, fixant parfois un bouton, une chaussure. Quelquefois il approuvait brièvement sa démonstration, ou lorsqu’elle se trompait faisait entendre un petit claquement de la langue contre le palais, jusqu’à ce qu’elle rectifie. - Merci Mademoiselle, puis s’adressant à la salle, « recopiez la démonstration, interrogation la semaine prochaine, au revoir ». Cassie expira nerveusement et sourit de soulagement en regagnant sa place. - Je m’appelle Nasser, et toi ? entendit-elle. - Cassie. - Comme la fleur de mon pays ! Soyons amis, je ne connais personne dans la classe. - Je suis arrivée en retard et maintenant je crois que je suis repérée, mais je n’arrivais pas à garer ma voiture. - Tu n’habites pas dans la cité étudiante, es-tu de la ville ? Elle secoua la tête « voilà après l’interrogation de physique, un curieux ». Elle le dévisagea, «joli garçon, sympathique, le regard grave noir » elle se leva. - Sortons, nous serons plus à l’aise dans le parc. Chez-nous les automnes sont superbes. C’est une chance que d’avoir une Université au milieu d’un grand parc. Elle se laissa gracieusement choir sur l’herbe sous un platane à la frondaison pas tout à fait dégarnie. De quelle région es-tu ?
- Je suis l’exilé triste et loin d’une terre ravagée. Son regard velouté se voilà de tristesse. Je suis de Phénicie. - Pourquoi, appelles-tu ton pays Phénicie, alors que son nom est Liban ? - Parce que c’est le nom de sa grandeur ; il chante, l’autre gronde, il est mélodieux, l’autre explose sous les bombes. Mais vaine est la gloire et passe la grandeur lorsque les hommes se déchaînent. A cet instant précis, il se mit à étouffer : un souffle rauque, pénible. Immédiatement, Cassie reconnu la crise d’asthme qui parfois étreignait son petit frère et sans un mot, avec des gestes précis, elle ouvrit le sac de Nasser, pour la vie…. La vie, vite ! Il lui prit la bombe de ventoline qu’elle tendait, respira un grand coup… - Merci ! Son regard brillait d’un intérêt nouveau. - Je te remercie, je suis rarement secouru avec autant de rapidité. Souffres-tu de cette maladie ? - Non, mon petit frère a des crises terribles ! J’ai l’habitude, il faut réagir promptement. Après un instant de mutisme, il s’anima de nouveau. - Tu as soulagé tous les étudiants ce matin. Avant que tu n’arrives, nous nous demandions qui aller être le sacrifié du jour. As-tu remarqué comme il détaille l’impétrant. Ce professeur est redouté à un point inimaginable. - Pourquoi ? - Disons, qu’il est froid, parfois cinglant, assez hautain… c’est la réputation qu’il traîne depuis longtemps et il note très sévèrement. - C’est terrible le bouche à oreille ! Je n’étais pas à l’aise, mais j’en suis sortie vivante, en général lorsque quelqu’un m’intimide, j’essaie de penser à une jolie chose et ça va. - Donne-moi ta botte secrète. - Puis-je compter sur ta discrétion ? - Ma discrétion t’est acquise, mais que crains-tu ? - Oh ! juste quelques rires ironiques, si je suis interrogée de nouveau… - Je promets, alors…. - Dans le jardin de mon grand-père, un rosier anglais porte de magnifiques roses saumonées d’un parfum exubérant et chaleureux, je faisais ma démonstration devant un parterre de mésange, et un vieux merle attentif. Le rire de Nasser s’éleva joyeux. Il se leva, - j’ai faim, mangeons ensemble. Enfin, si tu acceptes.
Texte no 8- Spoiler:
La fée et le milliardaire
« Tu m’as donné ta boue et j’en ai fait de l’or » Charles Baudelaire
Il est tout aussi inexact d’affirmer que le monde est injuste que de croire le contraire. Les uns qui pensent cela sont qualifiés de pessimistes et de nihilistes, et les autres d’idéalistes, d’optimistes crasses, de doux rêveurs. Ainsi va la vie : un amalgame de couleurs criardes et estompées, un melting-pot de merdes et de bienfaits, un maelstrom de passions et de haines. L’homme, au milieu de tout ça, essaie tant bien que mal de se laisser guider par la raison, ses émotions ou tout simplement les nécessités de son corps. Et il se targue de savoir se débrouiller seul, faute de mieux. Il est également incroyablement naïf d’imaginer que les fées sont des êtres épris d’équité. Ces créatures sont à l’image de la Nature qui les façonne : complexes, versatiles, ombrageuses. Il n’en existe pas deux qui entretiennent les mêmes rêves. Comme si les ailes dont elles sont pourvues les poussaient vers l’une ou l’autre direction, elles apparaissent et disparaissent à leur guise, se riant de la morale, de la justice, de toutes ces notions typiquement humaines qui compriment notre esprit et martèlent notre cœur. Pourtant, d’aussi loin que l’on se souvienne, les hommes ont toujours eu la nécessité de croire en elles. D’aussi loin que l’on se souvienne, des écrivains leur ont composé d’élogieux panégyriques, de rayonnantes odes lyriques ; et d’aussi loin que l’on se souvienne, ils ont nourri cet incroyable, inconcevable, mirobolant espoir que les fées présideraient leur vie, guideraient leur choix, exauceraient leurs souhaits. Bien sûr, elles se moquent de tout cela comme de leur première mue. Ce ne sont pas leurs affaires. Elles ont déjà bien assez à faire avec le renouveau du printemps, l’agencement des étoiles et la réglementation des marées. Les humains peuvent se débrouiller seuls, après tout. Ils n’ont pas besoin de leur aide, n’est-ce pas ? N’est-ce pas ?
Par un beau matin de printemps, l’incertitude jaillit de l’esprit tortueux d’une petite fée qui s’ennuyait sur sa branche de cerisier. C’était un doute insignifiant, à peine éclot, mais plus résolu que la plus farouche des certitudes. Il huma un instant le souffle du vent, heureux d’être enfin libre, puis s’immisça entre les ajoncs et les herbes folles, surprenant dans sa course deux ou trois féétauds qui festoyaient, un lièvre brun, l’oreille dressée, qui en détala de terreur, et Titania, alanguie dans son trône de verdure. Le doute s’éleva dans les airs, bulle argentée aux contours estompés, et il épousa un minuscule cumulus blanc perdu dans l’immensité azuréenne. À cet instant, un garçonnet leva de grands yeux malicieux vers le nuage dont la forme lui rappela celui de sa grosse tante Brita, et il pouffa. Le rire s’échappa de sa gorge, tourbillonna jusqu’à la nuée et requit à son tour l’autorisation de s’y installer. On dit que c’est ainsi que naquit la première fée incarnée, chargée de protéger une âme égarée. Du doute d’une fée, de l’éclat de rire d’un enfant et d’un petit nuage blanc, perdu dans les cieux. On dit également que c’est le cumulus lui-même qui aurait sciemment provoqué le rire du garçon en revêtant la silhouette de l’affreuse tante Brita, et que la fée incriminée serait, encore aujourd’hui, à la recherche du doute qu’elle a perdu. Mais ce ne sont que des légendes, bien sûr.
D’un battement d’ailes, Jane s’éleva dans les lumières de la Grosse Pomme. L’air était doux. Les multiples manifestations sonores de la rue s’évaporaient peu à peu dans la brume nocturne tandis que la fée montait, toujours un peu plus haut, par-delà les nuages et la pollution. Ses longues ailes diaphanes se balançaient en cadence par-dessus ses épaules, dispersant une lueur d’or dans son sillage. Elle devait chercher, encore et encore… Au-dessus des toits de New York, elle se laissa transpercer par les émotions qui s’entrechoquaient dans la nuit. Des millions d’âmes, des milliards de sensations qui fusaient en elle, autour d’elle, électrisant la moindre de ses phalanges. Tourbillonnante comme un pétale dans les nuées, sa silhouette fine se suspendit un instant sous les étoiles, nimbée du halo pâle de l’astre sélénite, les deux pointes de ses ailes brandies au-dessus d’elle comme un point d’interrogation. Ce fut cet instant précis que choisit Colin Welton, milliardaire de son état, pour sortir prendre l’air sur le balcon de son loft, un verre de champagne à la main, tandis que derrière lui une nymphe aux jambes sublimes, prénommée Helena, susurrait son nom d’une voix suave. « J’arrive, mon ange », s’entendit-il répondre d’un ton neutre alors que son regard parcourait distraitement les émanations nocturnes de la ville. Ses yeux clairs s’arrêtèrent sur la lune, ronde, brillante, à peine assombrie par une ombre qui voletait devant elle. Le jeune homme cligna des paupières. Regarda de nouveau. L’image avait disparu quelque part dans les méandres de Brooklyn ; pourtant, il lui avait réellement semblé… Il secoua la tête, but une dernière gorgée et s’engouffra à l’intérieur de l’appartement où l’attendait la créature la plus élégante de l’univers. Allons, Colin, tu sais bien que les anges n’existent pas…
*
Jane retira la bouilloire du feu et versa l’eau dans la tasse avec une précision de chirurgien. Ses sens exacerbés par sa condition féerique lui facilitaient grandement la cécité, et le plus difficile pour elle était encore de se donner pour plus impotente qu’elle ne l’était aux yeux des humains. Jusqu’à présent, depuis qu’elle était arrivée dans l’univers des mortels, elle s’en était assez bien tirée, faisant croire qu’elle était simplement malvoyante. Gisèle, sa voisine antillaise, lui avait dégotté un petit boulot au siège social d’un grand groupe new-yorkais, la Welton Corp, dirigée par un jeune héritier aux mœurs, disait-on, légères. Le travail n’avait rien de reluisant, puisque les deux filles se contentaient de nettoyer les bureaux des hommes d’affaires et de « récurer la crotte qu’ils laissent tous dans les toilettes », comme aurait ironisé Gigi avec sa gouaille habituelle. Mais Jane ne se plaignait pas. Ne se plaignait jamais. Le monde réel était suffisamment cruel. Chacune de ses sorties la rendait plus faible, vacillante sous la détresse des passants. Son empathie de fée lui renvoyait comme une bombe le mal-être de la société, la peur, la mort, le désespoir, la pauvreté, et elle, impuissante, qui ne pouvait qu’absorber tous ces maux dans un cœur aussi perméable qu’une éponge ; et ce vide à l’intérieur d’elle-même, ce vide dans la poitrine qu’une seule âme aurait pu un jour combler… celle à qui elle devait accorder sa protection. Si seulement elle l’avait trouvée… Hélas le destin en avait décidé autrement. Jane était aveugle. En place de ses yeux, deux pupilles entièrement noires, d’un noir d’encre, profond comme l’océan, lui confiaient un regard étrange, dérangeant, à la limite du supportable. Au premier coup d’œil, elle aurait dû connaître son Protégé. Au premier coup d’œil… Jane laissa échapper un soupir. Le bruit de la sonnette arracha à la fée un sursaut incontrôlé. Elle reposa la théière, s’essuya méticuleusement les mains sur un torchon, repositionna ses lunettes à triple foyer et alla ouvrir. La figure large et radieuse de Gisèle s’encadra dans l’embrasure de la porte. – Hello ! Tu te prépares ? Le boulot nous attend ! Jane esquissa un sourire et se détourna vers l’unique salle qui lui servait d’appartement. Il n’était pas grand – vingt mètres carrés humides et confinés sous les combles, une minuscule cuisine et une salle de bain encore plus réduite –, mais elle ne l’avait choisi que pour ses hautes fenêtres qui donnaient directement sur le toit de l’immeuble voisin. Un lieu où, légère et aérienne, elle avait pris l’habitude de se rendre pour exercer ses ailes de fée. – J’arrive, Gigi… Juste le temps d’avaler mon thé ! Gisèle faufila son imposante stature à travers la porte et s’affala sans autre mesure sur le canapé-lit posé au centre de la pièce. Jane l’y rejoignit discrètement, la tasse entre ses mains. Les premières lueurs du jour transparaissaient derrière les gratte-ciel, baignant le salon d’une douce luminosité, et accentuaient un peu plus le contraste entre le mètre quatre-vingt bien en chair de Gisèle et la silhouette menue de Jane. Cela ne dura pas. Comme chaque matin avant l’arrivée des grosses légumes du business, le siège social de la Welton Corp attendait leur venue. La fée avala rapidement le contenu de sa tasse et se leva, prête à assumer son labeur. – Ça y est, nous sommes parties ? demanda Gisèle en se soulevant à son tour. – Nous sommes parties, acquiesça Jane, ses courtes boucles blondes volant avec souplesse alors qu’elle enfilait son manteau.
* Où es-tu ? L’espace d’un instant, Jane posa les deux mains sur les rebords de la fenêtre qu’elle était en train de nettoyer, face au ciel de Manhattan. Où te caches-tu, mon âme perdue ? – Ben alors, Jane ? Tu rêves ? Dans le couloir presque désert, la blonde tourna la tête vers l’imposante silhouette de Gisèle, qui passait la brosse rotative dans un angle. – Non, non, je t’écoute… tu parlais de qui ? – Colin Welton ! Encore et toujours lui ! De qui d’autre voudrais-tu que je cause ? Ce type est une vraie bombe sexuelle ! Il paraît qu’il s’envoie en l’air avec un mannequin en ce moment. La garce ! Jane retint un sourire devant les traits révoltés de l’Antillaise. – Voyons, Gigi ! Tu n’as pas honte d’être aussi grossière ? Ce n’est pas parce que cet homme est un coureur que tu dois systématiquement rabaisser ses petites amies ! Je suis sûre qu’elles sont bien plus élégantes que toi ou moi. – Parle pour toi, gringalette ! Moi, au moins, j’ai les formes appropriées ! rétorqua Gisèle, alors qu’elle passait l’engin de nettoyage avec une vigueur renouvelée. Jane se contenta de hocher la tête. Lors de ces discussions, le sang chaud de Gisèle se butait souvent au calme froid et patient de l’aveugle. Pourtant, elle ne pouvait s’empêcher d’éprouver de la reconnaissance pour sa voisine de palier. C’était grâce à elle que malgré son handicap le D.R.H. du service d’entretien avait accepté sa candidature. Sans son tempérament de feu, elle aurait dû abandonner ce monde, et avec lui tous ses espoirs. Songeuse, elle s’accroupit pour ramasser les quelques produits corrosifs qui traînaient à terre et se releva distraitement pour demander à sa collègue de lui amener le chariot.
– Alors, cette soirée avec Helena ? demanda Eric, l’un des associés de Colin, avec l’air le plus innocent du monde. – Ntt, ntt, émit Colin en secouant la tête, pas la peine d’essayer de me tirer les vers du nez, vous ne saurez rien ! – J’en sais déjà assez… Cette éblouissante nymphe a passé la nuit avec vous, j’en jetterais ma chemise au feu ! continua l’indiscret sur un ton évocateur. Pour toute réponse, les lèvres du milliardaire dessinèrent un sourire énigmatique. Les deux hommes se dirigeaient à grands pas vers les bureaux, bien matinaux pour une fois. Ils devaient s’entretenir d’une fusion hasardeuse avant l’ouverture de la Bourse. Les couloirs du siège social étaient quasiment vides, peuplés uniquement des différentes équipes de nettoyage qui dès l’aube s’étaient dispersées aux quatre coins de la tour afin d’en assurer la propreté. Aucun des deux associés n’aurait eu l’idée de leur accorder un regard. Pas un regard, non, jusqu’à ce que… Blam ! Colin, tout occupé à parler, ne vit pas la jeune fille qui s’était relevée à ce moment-là. La blonde bascula en arrière et les bouteilles s’éparpillèrent sur le sol. Alertée par le bruit, sa collègue noire leva le menton, intriguée. Une exclamation s’échappa de sa bouche lorsqu’elle reconnut le P.D.G. de la Welton Corp. Jane n’eut même pas le temps de se demander ce qu’il s’était passé. Celui qui lui était rentré dedans se confondait à présent en excuse, tandis que son compagnon se baissait pour ramasser les produits. Elle hocha la tête, un peu choquée, et entreprit de chercher les lunettes qui s’étaient décrochées de son nez. Non loin d’elle, Gisèle avait poussé un gémissement, dont elle ne pouvait s’expliquer la cause. À l’instant où ses doigts rencontraient enfin la paire de lunettes, la fée sentit une main se poser sur la sienne, une main masculine, nerveuse et musclée. Elle leva ses yeux aveugles sur son propriétaire, une expression de confusion extrême sur son visage. Était-ce possible ? Une impulsion électrique se déversa en une fraction de seconde dans leurs deux corps. L’homme retira son poignet avec hâte, surpris par cette déflagration aussi subite qu’inattendue. Le trouble de Jane s’accentua lorsqu’elle perçut le regard de l’inconnu plonger dans ses pupilles mortes. Inconnu ? Non, justement, cet homme ne lui était pas inconnu, il était… lui. Son Protégé. D’un seul contact elle l’avait reconnue, l’âme égarée qu’elle avait cherchée depuis si longtemps, celle qu’on lui avait assignée lors de son enfétement… Et en cet instant, bien qu’elle ne connaisse même pas sa physionomie, elle sut tout de lui, de ses craintes, de ses espoirs, de son passé, de son cœur et de son esprit. Elle reçut tout cela en elle, et bien plus encore… Cela ne dura qu’une seconde. Se sentant mis à nu, Colin détourna les yeux de ces deux gouffres noirs qui le scrutaient sans le voir. Eric avait déjà rangé tous les produits, secondé par la collègue qui bredouillait des excuses incohérentes. « Elle ne me voit pas », pensa-t-il alors que la blonde rechaussait ses lunettes, et, bizarrement, cette idée le rendit mal à l’aise. Il n’avait pas supporté ce regard vide et s’en voulait à présent d’avoir éprouvé un tel sentiment de peur et de répugnance face à cette jeune fille. Après tout, ce n’était pas de sa faute ! Il l’aida à se relever en gardant un silence gêné. Elle-même maintenait sa tête inclinée, comme si elle avait conscience de la confusion qu’avait causée dans l’esprit de Colin son visage marqué. – Colin, vous venez ? questionna son ami avant d’adresser un léger clin d’œil à la plantureuse noire. Excusez-nous, hein ! – Ce n’est rien, vraiment, répondit cette dernière avec un large sourire. Le milliardaire hocha le menton en bredouillant et le suivit dans le couloir. Il jeta un coup d’œil derrière lui, juste à temps pour contempler une dernière fois ce petit bout de femme qui, encore toute tremblante, empoignait le produit qu’elle cherchait. – Plutôt jolie, murmura-t-il à voix haute, sans s’apercevoir qu’Eric l’écoutait. – Qui ? L’Antillaise ? Un sacré morceau, hein ? Par contre, je ne savais pas qu’ils engageaient des malvoyants, au service d’entretien. Un accident comme ça, c’était à prévoir ! ajouta-t-il d’un air navré. Il se tourna vers son P.D.G. et haussa un sourcil. – Colin, que se passe-t-il ? Vous êtes malade ? Vous êtes blanc comme un linge ! Colin secoua la tête. Pour l’instant, il n’avait pas besoin de sollicitude. Il lui fallait juste… se changer les idées. Mais il faisait confiance à Eric pour s’en charger avec les dernières nouvelles du Wall Street Journal. Quand ils seraient dans son bureau, il aurait déjà oublié cette aventure. Mais ces yeux, pourrait-il les oublier ? Texte no 9- Spoiler:
Métro, boulot, et soudain, du nouveau
7h06. Elle se lève, étouffant un bâillement. Ça fait un moment que la radio s’est lancée pour la réveiller, avec un succès mitigé. Elle va dans la salle de bains, se met sous la douche. Elle aime sentir l’eau qui coule sur son corps, ça, ça lui permet de se réveiller.
7h14. Elle s’habille. Ce sont des vêtements pour le travail, elle ne les aime pas. Un tailleur gris sans âme, avec un chemisier blanc sans originalité et de petits escarpins ni beaux ni confortables. Elle n’a pas le choix. Pour l’accueil des clients, on n’a pas droit aux excentricités. Sa coiffure est aussi morose que ses habits. Elle se dit qu’elle profitera du week-end pour porter des couleurs vives et mettre un peu plus de gaieté et de fantaisie dans son apparence.
7h22. Elle se prépare un café, coupe un morceau de pain, met du beurre (pas trop, elle essaie de faire attention à sa ligne), un peu de confiture (sans sucre mais bio, elle préfère le naturel). Elle se demande si elle ne devrait pas changer de régime le matin mais elle n’a pas envie de laisser tomber le pain beurré – c’est tellement bon !
7h30. Elle prend son petit-déjeuner en écoutant le flash-info. Rien d’exaltant ce matin, comme tant de matins : il a plu quelque part en province, elle n’a pas bien entendu où, et des maisons ont été inondées. Reportage de trois minutes avec témoignages pathétiques des sinistrés. Un attentat, quelque part au Moyen-Orient (Iran ? Liban ? Pakistan ? Afghanistan ? Un pays en –an, en tout cas). Un homme politique a lancé un nouveau mouvement, mais elle ne sait plus de quel bord il était avant. Elle se dit qu’il n’y a pas assez de femmes dans ce monde-là et en même temps, ça ne l’étonne pas, c’est un milieu détestable. Elle préfère les annonces qui suivent : une comédie romantique avec l’acteur fétiche du moment interviewé pendant 45 secondes. Elle ira voir ça avec sa meilleure amie, pour rêver un peu. La météo annonce de la grisaille pour la matinée mais promet du beau temps ensuite. Elle espère que pour une fois, les prévisions seront exactes.
7h47. Elle part de chez elle en coup de vent. Elle habite un deux-pièces au troisième étage d’un immeuble des années cinquante. Ce n’est pas l’appartement de ses rêves mais pour le prix qu’elle paye, 500 euros charges comprises chaque mois, c’est correct. Elle descend l’escalier quatre à quatre. Elle ne veut pas rater le RER de 7h58, elle risquerait d’être en retard. Elle marche dans les rues mornes, sans rien regarder autour d’elle jusqu’à la gare. Elle connaît le trajet par cœur, de toute façon. Il bruine, le ciel est bas. Et il n’y a jamais rien à voir, par ici.
8h03. Elle est dans le RER, assise. Elle a sorti un livre, le dernier best-seller dont elle a entendu parler à la télé. Elle l’a commandé sur internet, elle n’a pas le temps de flâner dans les librairies. C’est une histoire d’amour avec un peu de fantastique qui se passe à New-York. C’est léger, ça se lit sans peine, ça met de bonne humeur et ça ne prend pas la tête.
8h16. Elle lève le nez, mécontente : un jeune crétin a mis la musique très fort sur son téléphone dernier cri. Toute la rame en profite mais personne ne dit rien. Ça pourrait mal tourner, mieux vaut rester tranquille, dans ces cas-là. Déconcentrée, elle ferme son roman. Elle était à la fin du chapitre, de toute façon. Elle regarde défiler le paysage triste et gris. Elle aimerait bien penser qu’elle va trouver son prince charmant, elle aussi, mais elle n’y croit pas trop.
8h23. Un message sur son portable : une copine qui lui propose un plan shopping. Elle répond oui. Elle se demande si la fille en question a enfin largué son mec, un vrai boulet. Elle espère que c’est le cas. Elle s’intéresse à ses voisins : une vieille qui somnole, un ouvrier immigré à l’air fatigué, une lycéenne trop maquillée et pas assez habillée. Ça la fait rire, elle se rappelle les diktats de la mode quand elle avait cet âge-là.
8h34. Elle descend du RER. L’escalator, un couloir, un escalier, un autre couloir, un tournant dans un sens, un tournant dans l’autre sens, on monte trois marches, on en redescend quatre, on tourne encore, et voilà le quai du métro. Bondé, comme toujours.
8h39. Elle essaye d’entrer dans la rame. La foule la presse, elle vacille, son pied glisse entre le quai et le wagon. Heureusement, elle se rattrape en agrippant un autre voyageur et parvient à retrouver son équilibre. Elle a eu peur. Pendant ce temps, le métro est reparti, ses passagers écrasés les uns contre les autres. Elle reprend son souffle, jette un coup d’œil sur le quai d’en face, et c’est là que tout bascule.
Lui, il ne sait pas l’heure qu’il est. Il s’en fiche. Personne ne l’attend. Il n’a rien à faire aujourd’hui. Ça tombe bien. Après la nuit qu’il a passée, il ne se sent pas vraiment en mesure de travailler.
Demain, il cherchera un petit boulot. Il est sympa et débrouillard, il trouve toujours quelque chose. Il aime bien varier les activités. Parfois il est à la caisse d’une grande librairie, parfois, il sert des frites à des étudiants fauchés, parfois, il joue les figurants sur un tournage. D’autres fois, il rend des services à domicile (bricolage, électricité, plomberie… il sait un peu tout faire), sans trop passer par les voies légales. Un jour, il faudra bien qu’il essaie de trouver un truc stable, mais il a toujours repoussé le moment.
Il préfère sa liberté. Avec un métier classique, il n’aurait jamais pu se permettre de rentrer de soirée à l’heure où tous les autres se précipitent au travail. L’œil vague, il les regarde, ces gens pressés qui courent pour monter dans les voitures, se bousculent et parfois s’insultent les uns les autres, comme si rater ce métro-là était la pire calamité envisageable. Non, vraiment, il n’a pas envie de leur ressembler
Voilà déjà trois fois qu’il renonce à se glisser dans un wagon. Il n’a pas fait attention et regrette un peu de se trouver là à l’heure de pointe. Mais bon, c’est amusant, ce spectacle permanent que lui offrent les Parisiens stressés (quel pléonasme !). Il a déjà vu tant de petites scènes qu’il se dit qu’il pourrait en tirer une série de sketches hilarants. Ce qui l’étonne, c’est que tous ces gens ne se rendent absolument pas compte du point auquel eux sont ridicules et leurs vies vides de sens. Ils courent trop vite pour s’en apercevoir, sûrement.
Lui, jamais il ne se soumettra au système, ça, c’est sûr ! Ses parents ne comprennent pas cette attitude. Ils ont peur, ils s’inquiètent de son avenir. Lui préfère envisager les choses avec confiance et optimisme. D’ailleurs, il a bien vu ce que ça donnait de chercher à se protéger dans tous les sens : les protections finissent presque toujours par se fissurer et s’effondrer. Le monde est en crise, le capitalisme est pris dans une course folle au profit qui le mène de bulle en bulle et de krach en krach. Personne ne peut être certain de ce qui arrivera demain. Alors, à quoi bon gâcher son temps à préparer consciencieusement un avenir qui sera complètement différent de tout ce qu’on peut imaginer aujourd’hui ?
Il sifflote un air qu’il aime bien et sourit aux passants. Il n’obtient en retour que des regards étonnés ou méfiants. Un matin de semaine dans le métro parisien, un sourire n’a pas sa place. Il le sait plus ou moins, bien sûr, mais aujourd’hui, ça le frappe davantage qu’à l’ordinaire. Quel monde sinistre !
Soudain, un type assis pas très loin lui adresse la parole :
« T’es pas un habitué, toi, hein ?
– Un habitué ? demande-t-il, intrigué.
– Le métro, faire la manche, tout ça… C’est ta première fois ?
– Oh ! fait-il, comprenant enfin où l’autre veut en venir. Non, je rentre de soirée, je ne suis pas là pour gagner ma vie !
– Ah. En tout cas, si un jour tu veux essayer, laisse-moi t’dire qu’à c’t’heure-là, c’est pas la peine. Ou alors, sur les lignes pas trop pleines. Ici, faut encore attendre une bonne demi-heure.
– OK. »
Il n’a pas tellement envie de continuer cette conversation. En fait, il est un peu vexé. D’accord, il doit avoir une mine affreuse et ses vêtements sont destinés à rejoindre le panier à linge au plus tôt ; pourtant, il ne pensait pas avoir l’air si pitoyable ! Son interlocuteur bâille. Lui attrape un journal abandonné par un des passagers de la rame précédente. Ce n’est pas que les nouvelles du jour le passionnent, mais bon, s’il en a encore pour une demi-heure avant de pouvoir voyager sans être compressé et à moitié étouffé, il a sûrement le temps de dénicher au moins une info à peu près intéressante.
Au bout d’un moment, il finit par renoncer. Il n’y a vraiment rien dans ce journal ! Son voisin est parti. Il jette un coup d’œil sur le quai d’en face, et c’est là que tout bascule.
Leurs yeux se sont trouvés, un peu par hasard. Et c’est comme si chacun d’eux venait de découvrir ce qu’il cherchait sans savoir depuis longtemps. Pendant plusieurs secondes, leurs regards ne se lâchent pas. Ni l’un ni l’autre n’ont jamais vraiment cru au coup de foudre (elle en a rêvé, il s’en est moqué), mais cette fois, ils sont vraiment frappés par quelque chose d’extraordinaire.
Un métro arrive et s’arrête. Ils sont séparés.
Désorientés, ils se demandent ce qu’il faut faire. Ont-ils rêvé ? Ce genre de choses, ça n’existe pas en vrai, n’est-ce pas ?
Elle n’a pas bougé. Elle laisse partir un deuxième métro sans elle. Elle va être en retard, ça ne fait plus de doute. Mais quitter cet endroit ? Elle voudrait savourer un peu de son rêve avant de revenir à la réalité. Elle ferme les yeux et sourit. Quand elle les rouvre, elle soupire, déçue sans être surprise : maintenant qu’elle voit à nouveau le quai d’en face, elle se rend compte qu’il n’y a personne. Évidemment. Ça lui apprendra à lire trop d’histoires d’amour, elle commence à fantasmer dans le métro !
Dans deux minutes, elle quittera ce quai et elle sent que désormais, tous les matins, elle aura un petit pincement en cœur en passant par là.
Lui, dès que le contact a été rompu, il s’est levé et s’est précipité vers l’escalier. Il faut qu’il la rejoigne. Que risque-t-il, après tout ? Au pire, il se prendra un vent monumental, et il s’en remettra. Mais un drôle d’espoir invraisemblable l’habite et il ne peut pas l’ignorer, le laisser perdre sans réagir.
Il court aussi vite que possible, bousculant sans ménagement ceux qui se trouvent sur son chemin. C’est l’heure de pointe ! Un métro toutes les quatre-vingt-dix secondes ! Il n’a pas plus de temps qu’il n’en faut !
Essoufflé, il dévale les dernières marches qui le séparent de son quai à elle. Il est vide. Un métro est en train de repartir.
La déception qu’il ressent est beaucoup plus forte que ce à quoi il s’attendait. Il sait que ça n’est pas justifié, mais quand même.
Et soudain, dans la rame qui est en train de passer devant lui, il la voit, tout écrasée contre la porte. Elle l’aperçoit aussi. Elle fait un mouvement surpris, comme si elle voulait le rejoindre.
Et tout aussitôt, la voilà disparue dans les entrailles de Paris. Mais ils ont le cœur léger : demain, ils reviendront ici à la même heure, certains de s’y retrouver. Texte no 10 - Spoiler:
L’IMMEUBLE
La porte de l’ascenseur s’ouvrit avec un bruit feutré et Berthe s’avança dans le hall. Monsieur Fernand, le concierge, sortit aussitôt de sa loge et s’inclinant obséquieusement, le béret à la main, commença à ouvrir la porte d’entrée. Une galopade venant de la cage d’escalier attira l’attention des deux personnes et Monsieur Fernand laissa retomber le lourd ventail pour se précipiter vers les degrés de marbre qui menaient aux étages nobles. Au moment où il les atteignait, un gamin déboula en sautant les marches deux par deux. Apercevant le gardien qui se tenait les bras écartés pour lui barrer la route, il se baissa pour tenter de forcer le passage. Mais la poigne du cerbère s’abattit sur sa nuque avec force. Saisissant le col de la veste, le concierge, tout en le secouant vigoureusement, s’écria d’une voix forte : « Te v’là encore dans l’escalier, garnement !!! J’te l’ai dit combien d’fois qu’il est pas pour toi et ton engeance, cet escalier !! Y a l’escalier de service, pour vous, tu n’as rien à faire ici !! » Et saisissant brutalement le gamin par l’oreille, il le traîna vers la porte. « Aîe ! aïe ! » s’écria le perturbateur de l’ordre social de l’immeuble. « C’est que ça va plus vite par là ! L’autre sortie est de l’autre côté de l’immeuble, ça rallonge...» « Qu’est-ce que tu veux qu’ça m’fasse !! la prochaine fois c’est à coup de pied que j’te sors ! » Et, passant à la hauteur de Berthe, qui assistait, médusée à l’algarade, il s’arrêta pour déclarer en s’inclinant à plusieurs reprises : « Fait’escuse, M’ame Champvallon, ça n’devrait pas arriver, que vous croisiez c’te engeance-là. » Berthe baissa les yeux sur la graine de potence qui se tortillait sous la pince dure du concierge. Elle croisa le regard de deux yeux verts, clairs et pétillants, qui ne trahissaient apparemment aucun remords de l’infraction commise. Elle crut même y déceler comme une connivence, et presque un clin d’œil, comme si l’enfant avait pressenti qu’il y avait là une alliée, ou à tout le moins qu’elle n’était pas une ennemie. Le concierge reprit sa route, et ouvrant d’une main la porte, il jeta le gamin dehors. Celui-ci trébucha, se rattrapa et se tournant, fit un pied de nez au gardien avant de s’esquiver en courant. Monsieur Fernand reprit alors sa litanie d’excuses, mais Berthe l’interrompit rapidement : « Voyons, cela n’est rien, monsieur Fernand ! C’est un enfant !! « « Ah ! mais vous les connaissez, M’ame Champvallon, si vous leur donnez le doigt, y prennent le bras !! faut rien leur céder, que j’vous dis ! mais que j’vous ouvre la porte, M’ame Champvallon ! Vous faut-y un fiacre ? » « Non, merci, monsieur Fernand, au revoir ! » et Berthe se dépêcha de sortir pour couper court à cet entretien qui commençait à l’ennuyer. Certainement, le concierge était efficace, s’occupait parfaitement de l’entretien de l’immeuble, montait le courrier, enfin faisait son travail, mais la façon dont il avait traité l’enfant avait éveillé chez Berthe un agacement dont elle s’étonna elle-même. Après tout, si il y avait un escalier de service, il fallait bien qu’il eût une utilité, et bien sûr il n’aurait pas été convenable ou agréable de croiser tous les jours les domestiques qui logeaient dans les chambres sous les toits, ou les gens qui occupaient le dernier étage. C’était certainement des personnes tout à fait honnêtes et travailleuses, mais on avait beau être au début du XXème siècle, on ne pouvait nier qu’il y avait son monde, à elle, Berthe Champvallon, épouse choyée d’Aristide Champvallon, attaché de cabinet au Ministère, qui occupait l’étage noble de son bel immeuble hausmannien, et les gens de petites conditions, employés ou commis de magasin, qui vivaient au dernier étage. Mais alors, pourquoi avait-elle été choquée de la brutalité de l’homme ? L’image de l’enfant lui revint, petite silhouette menue, aux vêtements modestes, mais dont il avait suffi d’un coup d’œil pour évaluer la parfaite propreté. Les chevaux étaient coupés, et coiffés, les joues un peu pâles, mais propres. Mais ce que Berthe ne parvenait pas à effacer de sa mémoire, c’est le regard de l’enfant, ce regard clair, direct, qui avait en une fraction de seconde établi un dialogue muet entre elle et lui . « C’est un vieil idiot », disait ces yeux, « quelle importance, cet escalier ou l’autre ? Ce sont des blagues, ces histoires d’étage noble, n’est-ce pas ? » semblaient-ils dire, et elle, aussi instantanément, elle l’avait compris, et il avait senti un acquiescement de sa part avant même qu’elle en eût conscience elle-même. Devant ce regard, tout l’édifice de ses principes bourgeois vacillaient, car ce regard était allé droit à son cœur, là où la raison, les principes, ce qui se fait ou ne se fait pas, n’avaient pas de place, là où sa nature profonde dormait sous les édredons étouffants de l’éducation. « Qui est-il ? » se demandait-elle. « Que fait sa famille ? Quel est son nom ? Son âge ? neuf, dix ans, pas plus !! » Ses pas l’avaient conduite vers la demeure proche d’une amie où elle était conviée pour le thé. Chassant l’enfant de son esprit, elle sonna et se prépara à passer un excellent moment de bavardages et de gourmandises car Madeleine avait toujours des petits fours délicieux à ses thés du mardi !! *
Le soir, après le dîner, quand la servante eut débarrassé la table et qu’Aristide et elle se retrouvèrent lui à fumer un cigare en lisant son journal – elle le lui permettait, elle était moderne !! – et elle à déguster son infusion de verveine, l’enfant lui était tout à fait sorti de l’esprit. Ce fut son mari, d’une façon involontaire, qui le lui rappela. « Qu’avez-vous fait, aujourd’hui, ma chérie ? - Peu de choses ! Je suis allée chez Madeleine, vous savez, c’est mardi, aujourd’hui. ... Ah ! Mon ami » reprit-elle après un court silence, « J’ai assisté à une scène amusante, justement en m’y rendant ! J’ai vu Monsieur Fernand secouer d’importance un gamin qui avait pris notre escalier au lieu d’utiliser l’escalier de service. Ce brave concierge en a fait toute une histoire ! - Mais, ma chère, il n’a pas tort !! ce n’est pas pour rien qu’il y a deux entrées et deux escaliers ! - Cependant mon ami, cet enfant avait l’air tout à fait convenable, il s’exprimait correctement. - Certainement, ma chère, mais si nous autorisions l’enfant, il faudrait autoriser les parents et leurs voisins, et où irions-nous ? Il faut de l’ordre, ma chère, de l’ordre !! » À ces fermes paroles Berthe ne répondit point, mais le regard vert et frondeur de l’enfant repassa dans sa mémoire et une petite voix s’éleva alors en elle « Cela vaut-il de brutaliser un enfant ? Est-il si dangereux ou pénible d’avoir le même escalier ? J’aimerais bien rencontrer ces personnes, pour m’en assurer !! ». « Connaissez-vous sa famille, mon ami ? » interrogea-t-elle. Aristide leva les yeux de son journal et arquant un sourcil surpris déclara : « La famille de qui ma chère ? - De cet enfant, celui dont je vous parlais tout à l’heure. - Certainement non, Berthe ! Comment voulez-vous ? Ils logent dans les étages supérieurs, j’ignore totalement de qui il s’agit ! » Berthe laissa le silence s’installer, mais demeura rêveuse, et sans cesse le petit clin d’œil frondeur s’imposait à sa mémoire.
Quelques jours passèrent, le souvenir s’estompait, Berthe vaquait à ses occupations coutumières : le thé chez ses amies, les courses chez le bottier, ou la modiste, mais quand elle traversait le grand hall majestueux en faisant claquer ses bottines sur le dallage de marbre elle se surprenait à guetter un bruit de galopade dans l’escalier. Puis un après-midi, comme elle se rendait à nouveau chez son amie Madeleine, passant devant le concierge elle s’arrêta, et sans presque l’avoir prévu elle se surprit à demander : « Monsieur Fernand, cet enfant, comment s’appelle-t-il ? -Un enfant ? » interrogea l’home assez surpris. « Quel enfant m’ame Champvallon ? - Vous savez bien, celui qui a pris le grand escalier l’autre jour, il y a une semaine. - Ah ! Celui-là !! c’est un petit garnement, si vous m’en croyez, M’ame Champvallon !! Son nom, je n’sais point trop, c’est Pierre, je crois. Il vit avec sa grand-mère, une veuve d’un officier, si je ne m’trompe point. Ils restent au sixième, mais le nom de famille ... Mais bougez pas !! J’vas consulter ma liste ! Dame, c’est qu’il n’y a pas souvent de courrier pour eux. » Le bonhomme courut dans sa loge. Berthe sentait son cœur battre fort dans sa poitrine, une sorte d’impatience , une attente. « Allons ! » se morigéna-t-elle, « Que m’arrive-t-il ? Je veux savoir son nom, et ensuite ? Quelle importance ? Quand je le saurai, je serai contente et je n’y penserai plus !! » Mais son cœur continuait à palpiter follement. Le concierge revint, l’air triomphant !! « J’savais bien que j’l’avais quelque part ! C’est Mme veuve Mortier, la grand-mère, et le petit c’est Pierre, mais il n’a p’têt’ pas le même nom ! C’est pourquoi, M’ame Champvallon, si j’puis m’permettre ? - Pour rien, Monsieur Fernand, un caprice !! merci de votre obligeance !! » Et laissant le bonhomme se gratter la nuque d’un air perplexe, elle saisit ses jupes et sortit rapidement de l’immeuble. « Pierre, cela lui va bien, comme le pierrot parisien, c’est un vrai moineau ce petit, vif et preste !! » se disait-elle, « Ah ! ma pauvre Berthe, faut-il que tu t’ennuies pour t’arrêter à ce genre de petite chose insignifiante !! » Et elle trottait, les mains dans son manchon, un vague sourire aux lèvres, plongée dans ses pensées. Le thé chez Madeleine fut comme toujours excellent, les petits fours toujours égaux à eux mêmes, mais Berthe fut la première étonnée de ressentir un léger ennui et d’écourter sa visite sous un prétexte qu’elle inventa aussitôt. Une idée encore vague prenait forme dans on esprit, le désir d’en savoir plus sur Pierre, d’abord une pensée floue à l’arrière de sa conscience, mais qui se précisait au fur et à mesure qu’elle se rapprochait de son immeuble. Et quand elle en franchit le seuil sa décision était prise, bien qu’elle fût alors tout à fait incapable d’en formuler les raisons. Mais elle en ressentait l’obligation, quelque chose la poussait et toujours les yeux verts et rieurs lui faisaient signe. Elle prit l’ascenseur jusqu’au dernier étage où il pouvait la mener, puis elle emprunta l’escalier de service. Plus de marbre, là. Des marches de bois usées, raides, une cage d’escalier étroite pauvrement éclairée. Elle atteignit le dernier étage, avant les combles où l’on accédait par une simple échelle de meunier. Là haut était les chambres des domestiques. Berthe longea un couloir pavé de tomettes rouges. Un robinet gouttait dans son évier sur le palier. Une porte s’ouvrit et une femme en sortit, portant un broc qu’elle vint remplir. Elle était maigre, le cheveu tiré en chignon, une jupe et un caraco de serge noire éclairés d’un col blanc. Elle jeta un coup d’œil surpris à Berthe, qui soudain se sentit aussi peu à sa place que le petit garçon l’avait été dans le grand escalier. Elle s’attendit presque à voir surgir une édition plus misérable de Monsieur Fernand qui l’aurait renvoyée vertement dans son monde. Elle s’approcha cependant et demanda où demeurait Mme Veuve Mortier. Sans un mot la femme lui désigna une porte et comme elle s’y dirigeait, celle-ci s’ouvrit soudain et Pierre en sortit. Il se détournait pour parler à quelqu’un dans la piéce, et Berthe entendit : « Ne prends pas le grand escalier, mon Pierrot, tu vas encore te faire gronder ! - Mais non, Mamie, ne t’inquiète pas !! Mais aussi, c’est si bête ... »Se détournant, il aperçut Berthe. L’étonnement arrondit sa bouche, mais bien vite un grand sourire éclaira son visage. Sans plus réfléchir, Berthe lui tendit la main : « Veux-tu que nous descendions ensemble ? » et à la vieille dame qui venait d’apparaître sur le pas de la porte : « Ne vous inquiétez pas, je vais descendre avec lui, et je reviendrai vous voir. Je suis Madame Champvallon, du premier étage ! » eut-elle le temps d’ajouter, car le garçon avait pris sa main et se dirigeait vers l’escalier, semblant trouver la situation toute naturelle. « Cela te plairait-il de prendre l’ascenseur ? » Pierre leva ses yeux verts brillants du plaisir anticipé : « Oh oui !! merci !! » Le cœur de Berthe s’emplit de la joie qu’elle lisait sur le visage de l’enfant, et sans trop savoir pourquoi ils éclatèrent de rire. Monsieur Fernand faillit en avoir une attaque, mais que pouvait-il dire ? C’était Madame Champvallon, du premier !!!
Dernière édition par April le Lun 3 Jan 2011 - 15:19, édité 2 fois |
| | | April Black Leather's Violet
Nombre de messages : 17118 Age : 50 Localisation : Allongée sur des pétales de violettes, en très bonne compagnie Date d'inscription : 20/06/2007
| Sujet: Re: 1er concours d'écriture (contributions page 6, résultats page 7) Lun 3 Jan 2011 - 14:24 | |
| En ce qui concerne les votes, merci de m'envoyer un MP jusqu'au 16 janvier minuit, en mentionnant dans l'ordre de vos préférences vos 3 textes favoris, avec leur numéros (étant donné que certains n'ont pas de titres). |
| | | Miss Marian Romancière anglaise
Nombre de messages : 1740 Age : 36 Localisation : Lyon Date d'inscription : 14/06/2010
| Sujet: Re: 1er concours d'écriture (contributions page 6, résultats page 7) Lun 3 Jan 2011 - 14:34 | |
| Et bien il y a pas mal de monde qui a participé On va avoir de la lecture, super |
| | | lady Clare Lily-white Doe
Nombre de messages : 9970 Localisation : Between Thornfield Hall and Pemberley Date d'inscription : 01/10/2008
| Sujet: Re: 1er concours d'écriture (contributions page 6, résultats page 7) Lun 3 Jan 2011 - 15:09 | |
| merciiiiiiiiiiiii! c'est super!!! |
| | | April Black Leather's Violet
Nombre de messages : 17118 Age : 50 Localisation : Allongée sur des pétales de violettes, en très bonne compagnie Date d'inscription : 20/06/2007
| Sujet: Re: 1er concours d'écriture (contributions page 6, résultats page 7) Lun 3 Jan 2011 - 15:21 | |
| Pour information, je viens de rajouter un 10ème texte (mais ce n'est pas celui dont je parlais plus haut). C'était un oubli de ma part, le e-mail était "noyé" parmi la tonne de mails reçus pendant mon absence. |
| | | Keina Demande enflammée
Nombre de messages : 361 Age : 45 Localisation : Le Havre Date d'inscription : 28/12/2009
| Sujet: Re: 1er concours d'écriture (contributions page 6, résultats page 7) Lun 3 Jan 2011 - 15:37 | |
| A y est, j'ai tout lu ! (Ben oui, j'avais mon après-midi de libre... ) J'ai déjà mes trois préférés, mais je vais attendre de voir s'il y a des retardataires avant de voter. |
| | | April Black Leather's Violet
Nombre de messages : 17118 Age : 50 Localisation : Allongée sur des pétales de violettes, en très bonne compagnie Date d'inscription : 20/06/2007
| Sujet: Re: 1er concours d'écriture (contributions page 6, résultats page 7) Lun 3 Jan 2011 - 15:41 | |
| Vous avez de toute façon le temps pour tout lire, j'ai laissé un délai de 2 semaines pour voter. |
| | | Miss Marian Romancière anglaise
Nombre de messages : 1740 Age : 36 Localisation : Lyon Date d'inscription : 14/06/2010
| Sujet: Re: 1er concours d'écriture (contributions page 6, résultats page 7) Lun 3 Jan 2011 - 17:41 | |
| Et bien c'est du rapide Keina |
| | | Keina Demande enflammée
Nombre de messages : 361 Age : 45 Localisation : Le Havre Date d'inscription : 28/12/2009
| Sujet: Re: 1er concours d'écriture (contributions page 6, résultats page 7) Lun 3 Jan 2011 - 18:56 | |
| Voui, je suis plus rapide à lire qu'à écrire... Et même si ça m'a occasionné beaucoup d'arrachage de cheveux pendant l'écriture, maintenant je suis bien contente que la limite soit de quatre pages, ça a donné des textes courts mais efficaces ! J'ai vraiment passé un très bon moment avec tous ces inconnus qui se croisaient pour la première fois ! (J'essayais de m'imaginer RA, ou, si ça collait pas, un autre mec canon, pour les personnages masculins. Je sens que je vais faire de beaux rêves cette nuit ! ) |
| | | Ju Gone With The Books
Nombre de messages : 12568 Age : 33 Localisation : In the Tardis, with Ten Date d'inscription : 15/05/2010
| Sujet: Re: 1er concours d'écriture (contributions page 6, résultats page 7) Lun 3 Jan 2011 - 19:08 | |
| Merci April tu as été très rapide Je crois que je sais quoi faire ce soir |
| | | clinchamps Oshaberi Sensei
Nombre de messages : 72656 Age : 81 Localisation : Dans les bois du Fushimi Inari-taïsha Date d'inscription : 09/01/2007
| Sujet: Re: 1er concours d'écriture (contributions page 6, résultats page 7) Lun 3 Jan 2011 - 19:50 | |
| A y est !! Tout lu et mon choix est quasiment fait !! |
| | | Miss Marian Romancière anglaise
Nombre de messages : 1740 Age : 36 Localisation : Lyon Date d'inscription : 14/06/2010
| Sujet: Re: 1er concours d'écriture (contributions page 6, résultats page 7) Lun 3 Jan 2011 - 21:08 | |
| Idem pour moi mais pour mon troisième choix, j'hésite encore |
| | | Ju Gone With The Books
Nombre de messages : 12568 Age : 33 Localisation : In the Tardis, with Ten Date d'inscription : 15/05/2010
| Sujet: Re: 1er concours d'écriture (contributions page 6, résultats page 7) Lun 3 Jan 2011 - 22:25 | |
| Ai tout lu aussi!! Et mon choix est fait! Bravo à toutes en tout cas!! |
| | | nathy's Feedle-Dee-Dee!
Nombre de messages : 8478 Age : 34 Date d'inscription : 28/09/2007
| Sujet: Re: 1er concours d'écriture (contributions page 6, résultats page 7) Lun 3 Jan 2011 - 22:32 | |
| Je n'ai pas lu encore, je me réserve ça pour demain mais déjà j'ai noté en ouvrant les textes un prénom de garçon que j'adore et un prénom de fille que je déteste (enfin c'est surtout la fille que je connais qui porte ce prénom que je déteste ) mais promis je ne me laisserai pas influencer |
| | | Marian Sherwoodian Dreamy Quill
Nombre de messages : 3076 Age : 34 Localisation : Bordeaux, un café à la main, un livre dans l'autre... Date d'inscription : 06/07/2010
| Sujet: Re: 1er concours d'écriture (contributions page 6, résultats page 7) Lun 3 Jan 2011 - 22:55 | |
| 10 textes !! C'est très bien !! C'est même très très bien !! Bravo les Lambtoniennes !! J'ai tout copié-collé dans un traitement de texte et je vous promets de tout lire dès que possible pour vous donner mon avis. |
| | | Fée clochette Soul dancing on the breeze
Nombre de messages : 26781 Age : 79 Localisation : sur le chapeau de Mrs Bennet, ayez pitié de mes pauvres nerfs ! Date d'inscription : 03/03/2008
| | | | L_Alex Delicate Romantic Spirit
Nombre de messages : 6034 Age : 48 Localisation : sur le quai de la gare avec Mr Thornton ! Date d'inscription : 21/10/2008
| Sujet: Re: 1er concours d'écriture (contributions page 6, résultats page 7) Mar 4 Jan 2011 - 10:31 | |
| peux pas voter je vois pas les textes ... mais ça vient de mon ordi !! mais je reviendrais !!! |
| | | clinchamps Oshaberi Sensei
Nombre de messages : 72656 Age : 81 Localisation : Dans les bois du Fushimi Inari-taïsha Date d'inscription : 09/01/2007
| Sujet: Re: 1er concours d'écriture (contributions page 6, résultats page 7) Mar 4 Jan 2011 - 10:35 | |
| A voté !! |
| | | Fred Amazing Needle Spirit
Nombre de messages : 3739 Age : 53 Localisation : les pieds sur terre et la tête dans les nuages Date d'inscription : 05/10/2009
| Sujet: Re: 1er concours d'écriture (contributions page 6, résultats page 7) Mar 4 Jan 2011 - 11:10 | |
| |
| | | Keina Demande enflammée
Nombre de messages : 361 Age : 45 Localisation : Le Havre Date d'inscription : 28/12/2009
| Sujet: Re: 1er concours d'écriture (contributions page 6, résultats page 7) Mar 4 Jan 2011 - 11:14 | |
| A voté aussi ! |
| | | Miss Marian Romancière anglaise
Nombre de messages : 1740 Age : 36 Localisation : Lyon Date d'inscription : 14/06/2010
| Sujet: Re: 1er concours d'écriture (contributions page 6, résultats page 7) Mar 4 Jan 2011 - 12:02 | |
| J'ai voté aussi |
| | | April Black Leather's Violet
Nombre de messages : 17118 Age : 50 Localisation : Allongée sur des pétales de violettes, en très bonne compagnie Date d'inscription : 20/06/2007
| Sujet: Re: 1er concours d'écriture (contributions page 6, résultats page 7) Mar 4 Jan 2011 - 12:08 | |
| Alex, si tu as toujours ce soucis, contacte-moi et on trouvera une solution. |
| | | Mani911 Lallybroch's Time Traveler
Nombre de messages : 2144 Age : 37 Localisation : Castle Leoch Date d'inscription : 22/11/2008
| Sujet: Re: 1er concours d'écriture (contributions page 6, résultats page 7) Jeu 6 Jan 2011 - 17:00 | |
| Voté! Bravo à toutes les participantes, les textes sont magnifiques! |
| | | April Black Leather's Violet
Nombre de messages : 17118 Age : 50 Localisation : Allongée sur des pétales de violettes, en très bonne compagnie Date d'inscription : 20/06/2007
| Sujet: Re: 1er concours d'écriture (contributions page 6, résultats page 7) Jeu 6 Jan 2011 - 17:06 | |
| Pour le moment, il y a 2 textes qui se battent en duel et qui sont à égalité. |
| | | Contenu sponsorisé
| Sujet: Re: 1er concours d'écriture (contributions page 6, résultats page 7) | |
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| | | | 1er concours d'écriture (contributions page 6, résultats page 7) | |
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